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Sans vouloir forcer le trait, on peut dire que le fait que GE n'avait avant l'affaire qu'un lobbyiste temporaire à Bruxelles, et que ce soit son propre PDG qui ait fini par venir négocier pied à pied, est exemplaire de la différence de mesure et de moyens qui existe entre les Etats-Unis et l'Union Européenne, et en particulier sur la nature politique et personnelle des pressions qui ne peuvent avoir cours en Europe.
La tradition du « revolving door system » a entaché la neutralité et le professionnalisme des lobbyistes envoyés par GE à Bruxelles. Ainsi on sait que figurent parmi leurs donneurs d'ordres d'anciens membres du Congrès et des Secrétariats, des deux tendances politiques. Entre autres, Nicholas Calio, un lobbyiste officiellement enregistré comme au service de GE qui est aujourd'hui en charge des Affaires Législatives à la Maison Blanche ; idem, une ancienne sénatrice de Géorgie pendant 24 ans, Sam Nunn, est aujourd'hui membre du Conseil d'administration de GE et partenaire d'une firme d'avocats (King & Spalding) qui a servi les intérêts de GE pendant l'affaire.
Le Legal Times analyse ce recours aux lobbyistes politiques, sans précédent dans son volume comme dans son intensité à Bruxelles, comme étant l'élément le plus important de l'échec de la stratégie de GE : « In Brussels, aggressive lobbying of senior policy makers can backfire. That's what GE did, and the company's strategy is widely considered its biggest mistake». De même, le memo précité de Wilmer Cutler et Pickering invite à se méfier du «magic bullet» (l'intervention de personnes économiquement, politiquement ou administrativement haut-placées) qui est si prisé aux Etats-Unis : «applying political pressure will likely cause the Commission to conclude that the parties are seeking to undermine its authority - and thereby may poison the essential final stage of the procedure».
GE n'a ainsi pas lésiné sur la mobilisation des ressources relationnelles et des parties prenantes. Mais il apparaît ici qu'à l'inverse de la logique naturelle qui voudrait que le nombre, la diversité d'origine et l'unité d'intérêt soient un avantage pour la cause que les parties prenantes promeuvent, non seulement le volume et la force, mais aussi la nature du lobbying opéré par GE ont fondé la méfiance et le ressentiment de la Commission.