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Dans le premier chapitre, nous avons remarqué qu'en 1976, il existe déjà à La Paz, des disparités
sociales flagrantes liées aux conditions environnementales. Les populations pauvres s'installent le
plus souvent à El Alto et sur les versants de la Cuenca où les conditions topographiques,
géologiques et climatiques ne sont guère favorables et où le prix du foncier demeure bas. A
l'inverse les habitants aisés s'implantent de préférence dans la Zona Sur où les conditions
environnementales paraissent meilleures (d'après les promoteurs immobiliers...) et où la valeur des
terrains est élevée.
Nous avons vu aussi que l'agglomération de El Alto s'est fortement étendue en direction de l'Ouest,
du Nord et du Sud, et celle de La Paz en direction du Sud et du Sud-Est. Parallèlement, les quartiers
déjà urbanisés se sont notablement densifiés au cours des vingt dernières années. L'étude des
valeurs cadastrales a, en outre, permis de constater qu'il existe des différences spectaculaires en ce
qui concerne le prix du foncier résultant, pour une grande part, de la spéculation immobilière. On
note 2 USD par mètre carré dans la périphérie occidentale alténienne, contre 280 USD pour la
Urbanización Valle de Aranjuez à l'extrême Sud de La Paz (valeurs de 1996). On peut en déduire
que, dans un premier temps, les secteurs d'implantation de la classe aisée et de la classe défavorisée
s'éloignent de plus en plus les uns des autres, et de plus en plus du centre-ville, et que, dans un
deuxième temps, le schéma antérieur, « les riches en bas, les pauvres en haut », se confirme. De
surcroît, l'accès au logement s'avère de plus en plus difficile et problématique pour les nouveaux
arrivants, la plupart originaires du milieu rural pauvre. Bien souvent, ces derniers ont tendance à
s'implanter illégalement.
Par ailleurs, il y a 20 ans, on constatait déjà un certain favoritisme dans le domaine des dépenses
municipales pour la Zona Sur aux dépens de El Alto. Cette dernière fournissait 8% des recettes
fiscales de l'agglomération et ne bénéficiait en retour que de 5% des dépenses alors que les
quartiers résidentiels aisés de El Bajo ne fournissaient que 10% des recettes fiscales mais recevaient
22% des investissements (Baby, 1995). Aujourd'hui, les municipalités de El Alto et de La Paz sont
indépendantes. Mais cette dernière continue à orienter de façon préférentielle ses dépenses vers la
Zona Sur. De même, les opérations municipales (connexion aux services de base du type eau,
électricité...) en faveur de l'intégration et de la revalorisation de certaines banlieues, entraînent
inévitablement une augmentation de la valeur de leurs sols et du prix des locations et anticréticos
(sorte de crédit bail immobilier). Bien souvent, les habitants d'un quartier récemment équipé se
voient dans l'obligation de migrer vers un autre secteur généralement excentré, leurs revenus ne
leur permettant plus de faire face à ces augmentations. Ces constats permettent de souligner le rôle
inattendu et ambigu que peut jouer une mairie dans l'augmentation de la ségrégation à l'intérieur de
sa juridiction.
56Le type d'habitat, au même titre que le lieu d'implantation, est également un élément révélateur vis-
à-vis des inégalités sociales. L'agglomération pacénienne possède des quartiers très distincts les uns
des autres dans lesquels la superficie des propriétés est très variable. Les populations à hauts
revenus sont dans l'ensemble de grandes consommatrices d'espace, alors qu'à l'inverse les
populations défavorisées se voient dans l'obligation de s'entasser. De bas en haut de la ville, on
passe progressivement, des villas somptueuses dans les vallées Sud (Figures 28, 29), aux
immeubles du centre-ville (Figure 21), puis aux maisons en adobe (mélange de glaise et de paille)
et en ladrillos (briques rouges) avec toit de tôle, sur les versants de la Cuenca et à El Alto (Figures
30, 31). Sur les pentes, plus on gagne en altitude et plus les maisons sont rudimentaires et ne
possèdent qu'un rez-de-chaussée, parfois composé d'une seule pièce.
Bien sûr, l'équipement des différents quartiers en services élémentaires (eau, électricité...) n'en
demeure pas moins très inégal.
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Figure 28 - Calacoto, un quartier résidentiel bourgeois au Sud de La Paz
Figure 29 - Rue pavée, arbres d'ornement et voitures onéreuses, aspect d'une rue de Calacoto
Figure 30 (ci-dessus) - Le versant Ouest de la Cuenca :
au premier plan, des blocs d'adobe, au second plan des constructions dont la
base est en adobe et l'étage en brique rouge, signe d'ascension sociale
Figure 31 (à gauche) - Une ruelle sur le versant Ouest, un secteur défavorisé