Langage & Politique en Catalogne : La définition d'une politique scolaire sur un marché linguistique compétitifpar Jean-Philippe SOL Université Paris Dauphine - DEA 126 2001 |
V - GENEALOGIE DE LA POLITIQUE SCOLAIREDE LA CATALOGNE AUTONOMEA - LES CONDITIONS POLITIQUES ET SOCIALES DU RENOUVEAU INTELLECTUEL CATALAN1 - Le renouveau culturel catalan sous le franquismeAppliquant de façon rétroactive la notion de Normalisation Linguistique, Fransesc Vallverdù dénonce les effets négatifs dûs à l'impact de la répression franquiste : "Les effets dévastateurs de la politique franquiste se firent sentir sur les deux fronts de la normalisation linguistique : la normativisation, qui comprend la dilectisation du catalan..., et l'extension sociale de la langue, avec un recul total dans le domaine publique et partielle en ce qui concerne son usage privé"107(*). Sous la férule de Franco, et ce pendant les 15 premières années du régime, le catalan fut proscrit de la vie publique -surtout au niveau de l'éducation108(*) - et son utilisation pourchassé de toute manifestation culturelle. Le but du Caudillo était d'interdire toute manifestation du nationalisme catalan, symbole à ses yeux de la décadence de l'unité espagnole. La défense de l'identité va désormais passer par la défense de la langue : "Face au castillan comme langue unique de l'Etat, le catalan se parlait en famille, dans la rue, dans les boutiques, dans les associations, et, en général, dans tous les lieux où la bureaucratie la logique de sa contrainte"109(*). La nature du régime, autoritaire et non dictatorial, ainsi que la résistance des catalans va engendrer un renouveau culturel consistant. Afin de périodiser cette progressive réappropriation de la langue, Fransesc Vallverdù110(*) distingue 3 phases particulières en se basant sur la production annuelle de titres édités en catalan. Une période de "prohibition totale" de 1939 à 1945 ; une période de "tolérance" qu'il situe entre 1946 et 1961 et enfin, un phénomène de "libéralisation" expliquant le passage d'une production annuelle de titres passant de 122 à 590 ouvrages par an. Cependant, nous sommes d'accord avec Patricia Petherbridge-Hernandez et Rosalind Latiner Raby pour discerner de façon plus large une phase de "suppression culturelle"111(*) allant jusqu'à la fin des années 1950 à laquelle succédera une phase de "libération culturelle" démarrant dans les années 1960 et caractérisée notamment par l'émergence d'institutions dédiées à l'enseignement du catalan. Mais la diffusion d'oeuvres à vocation scientifique consacrées au catalan, à sa langue et à son histoire, se remarque également112(*). Les années 1970 verront la reconnaissance des institutions éducatives catalanes et la préparation des structures éducatives de la communauté autonome de Catalogne. * 107 - VALLVERDU, F., El conflicto linguistico en Catalua : historia y presente, Peninsula, Barcelona, 1981, p.91. * 108 - PETHERBRIDGE-HERNANDEZ, P. & LATINER RABY, R., "Twentieth-Century Transformations in Catalonia and the Ukraine : Ethnic implications in Education", Comparative Education Review, 1993, Vol.37, n°1, p.37. * 109 - MERCADE, F., "El nacionalismo catalan", in HERNANDEZ, F. & MERCADE, F., Estructuras sociales y cuestion nacional en Espaa, Ariel, Barcelona, 1986. * 110 - VALLVERDU, F., Ibid, p.92 et suivantes. * 111 - PETHERBRIDGE-HERNANDEZ, P. & LATINER RABY, R., Ibid. * 112 - ARENAS i SAMPERA, J., Absencia i recuperacio de la llengua catalana a l'ensenyament a Catalunya (1970-1983), La llar del libre, Barcelona, 1983, p.15 et suivantes. |
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