UN RENOUVEAU DE LA PARTICIPATION ASSOCIATIVE ? L'engagement et le militantisme au sein du comité Attac Isèrepar Eric Farges Université Pierre Mendès France - IEP Grenoble - 2002 |
2.2.1.2.2 Des modes de formation peu attractifsLa seconde limite à l'éducation populaire et à la formation des militants réside dans la forme des actions qui sont proposées par le comité. Les réunions ne conviennent pas à certains enquêtés qui pensaient y trouver une réflexion plus dense. Le groupe « campus » semble mieux se prêter à ces débats. En effet, comme l'explique Cécile, le fonctionnement plus souple (il n'y a pas d'ordre du jour contrairement aux réunions publiques) et la taille plus réduite (une dizaine de militants par réunion) du groupe « campus » facilitent les débats d'idées. De plus, lors des réunions publiques, la participation est souvent monopolisée par les militants les plus investis. Isabelle explique que la participation à un groupe de réflexion est indispensable pour prendre part aux discussions, sous peine d' « être mis à l'écart ».
Les publications du Conseil scientifique constituent le principal moyen d'information469(*). Toutefois, elles ne semblent pas convenir à une approche pédagogique. Julie, qui participe au groupe « information», reconnaît d'ailleurs que le contenu de ces brochures reste difficilement accessible. Elle précise qu'un travail de simplification serait nécessaire à opérer. Isabelle regrette, qu'à l'occasion de la première réunion du comité à laquelle elle a assistée, une « grosse pile de documents » lui ait été remise sans aucunes explications. Elle avoue d'ailleurs ne les avoir jamais lus. La forme des documents d'information ne semble donc pas adaptée. Il existerait un décalage entre les attentes des militants et les opportunités qui leur sont proposées. Cécile considère qu'il existe une distance trop importante entre les militants et leurs outils de travail. Le fait que les militants ne participent pas à l'élaboration des documents serait, selon elle, à l'origine de ce problème. Elle suggère, par ailleurs, que les militants « retravaillent » les documents afin de se les réapproprier. Cette idée, qui a déjà été évoquée plusieurs fois, a pour l'instant été appliquée très rarement470(*). Les militants ne contribuent donc pas à l'élaboration de l'information qui provient du Conseil scientifique. Comment rendre compte de cette division du travail ? Isabelle : En fait, ce qui me déçoit un peu avec Attac, c'est que je m'attendais à ce qu'on ait des débats de fond et surtout qu'on soit informé sur ce qu'on connaît moins. Alors que là, c'est ou tu connais ton thème et tu peux un peu t'insérer dedans, apporter des idées ou si tu ne connais pas tu te sens vite un peu mis à l'écart. Julie : Il y a un autre versant c'est de faire au niveau local des choses qui permettent d'interpeller les gens et qui permettent de pousser à la réflexion, de faire une forme d'information sur ce qui ce passe, qui soit suffisamment...et c'est là le problème...qui soit suffisamment simple et tonique pour que ça accroche les gens et là on a beaucoup de progrès à faire parce qu'on ne sait pas encore bien faire. Je pense qu'il faut trouver des formes d'interpellation des gens que ce soit dans la rue ou que ce soit dans les manifestations, qui poussent à la réflexion. Et quand on prend par exemple nos petits documents, pour l'instant il faut se prendre la tête pour comprendre. Il y a un travail à faire de simplification... Enfin une simplification qui dit quand même quelque chose, qui soit abordable et qui accroche Isabelle : Après ils nous ont filé de la documentation, la première fois une dame nous a donné un petit paquet de documents... Fort intéressant ! [Rires] [...] Il y a un énorme problème de communication et de vulgarisation de l'information. Ils m'ont filé une grosse pile de documents, tu les regardes et tu les mets dans un coin ! Je ne les ai pas lus. Je les ai pris et j'en ai lu un ou deux. Mais c'est illisible, il faut se dire « je m'y plonge et j'y passe trois heures ». C'est dur à digérer mais courage ! Il faut vraiment se motiver, il faut faire un sacré effort ! Après, sans vouloir faire vraiment un effort, il n'y a rien qui est fait de façon attractive. Dans le journal d'Attac campus, il y en a qui sont un peu plus accessibles mais même au niveau d'Attac campus j'ai l'impression qu'il y a encore un problème. Ils sont déjà plus clairs mais je ne pense pas que ce soit accessible à tout le monde. Des gens qui n'ont pas fait l'économie, je suis désolé, il y a certaines choses qu'ils ne comprennent pas. C'est un peu compliqué. Mais je pense que les gens ne se rendent pas forcément compte, car dans Attac campus il y en a pas mal qui sont en sciences politiques et ils ont des cours d'économie. Mais ceux qui n'en ont jamais fait, ce n'est pas évident. Même moi qui ait fait deux ans d'éco, tu lis les articles, il y a certain trucs tu es là : oui d'accord... mais encore... Il y a des choses qui ne sont pas évidentes à comprendre. Cécile : Travailler un tract, en fait tu t'appropries un tract en le retravaillant. Si tu veux distribuer un tract qui vient du groupe info, cela te donne des gens qui travaillent tous les documents cela donne des gens qui vont distribuer des tracts et qui ne les lisent pas. Il y a un certain nombre de militants d'Attac Isère qui ont très peu participer à des débats politiques, car il y a peu de débat politique Attac Isère [...] C'est vrai, que les adhérents d'Attac Isère gagneraient à se faire position personnelle [...] Julie : Le niveau technique je crois que ce n'est pas trop de notre... Bon il y a des gens qui se sont penchés dessus, alors au niveau du conseil scientifique d'Attac et au niveau national, mais notre groupe ne s'est pas penché sur le technique, on a répondu à un moment donné à un questionnaire de travail sur la taxe Tobin : à quoi ça servait ? Qui pourrait gérer cela ? On a fait un travail dessus mais je crois qu'au niveau de notre groupe, les questions techniques ne sont pas la priorité. Parce que notre priorité est davantage à pousser les députés. * 469 Mis à part les ouvrages qui semblent assez peu lu par les adhérents, le Conseil scientifique publie des « 4 pages » consacrés à certains thèmes de réflexion (AGCS, dette, taxe Tobin, etc.). Elles sont largement diffusées au sein du comité. * 470 Les documents distribués par les militants lors de diffusions de tracts sont le plus souvent ceux qui proviennent de la direction nationale d'Attac. |
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