UN RENOUVEAU DE LA PARTICIPATION ASSOCIATIVE ? L'engagement et le militantisme au sein du comité Attac Isèrepar Eric Farges Université Pierre Mendès France - IEP Grenoble - 2002 |
1.2.2.2 Le comité iséroisLa création du comité Attac Isère s'est effectuée en novembre 1998, quelques mois après la création d'Attac national. C'était sur l'initiative de l'association Raison d'Agir (qui fait partie des membres fondateurs d'Attac) que le comité local a été créé. Une centaine de personnes ont été contactées. Il s'agissait essentiellement d'adhérents d'associations et de syndicats. Toutefois la plupart ne se connaissaient pas. La première réunion a eue lieu à la bourse du travail, dans le local de la FSU, qui fait partie des membres fondateurs. Lors de sa création, les fondateurs choisirent de donner au comité Isère une forme associative de loi 1901. Des volontaires se présentèrent pour être membre du C.A. Parmi ceux-ci, une seule personne avait adhéré à titre individuel et ne représentait pas une association. Il s'agissait d'un lecteur du Monde Diplomatique qui avait adhéré dès la création de l'association et qui avait été contacté pour le lancement du comité. Parmi les membres actuels du C.A d'Attac Isère, seul Thomas a participé à la création du comité local dont il résume la création. Le comité comptait peu de temps après sa création 200 adhérents134(*) ; ce chiffre a ensuite progressé de façon régulière : 380 adhérents en janvier 2000135(*), 590 adhérents en juin 2000 et 820 en janvier 2001136(*). Thomas : Et puis j'avais été informé de la réunion du week-end contre la précarité organisée par Raison d'Agir, je me disais que c'est intéressant parce que je me trouvais toujours dans un milieu de militants syndicaux et de travailleurs salariés et pas d'intellectuels [...] Je pensais pouvoir servir de lien. J'avais participé à deux conférences, j'avais trouvé ça bien mais un peu intellectuel, il y avait beaucoup d'étudiants et pas beaucoup de prolétaires, c'était sur le campus. Et six mois après, en février, Raison d'Agir avait contacté tous les gens qui avaient laissé leurs coordonnées, Raison d'Agir étant membre fondateur d'Attac, pour créer un comité local d'Attac. Il y avait 110 personnes qui étaient réunies. C'était début novembre 1998. Il y avait Bernard Floris et Philippe Decamp qui était correspondants Attac pendant trois quatre mois. Au cours de cette soirée on avait décidé la création de ce comité, on a eu une réunion une semaine après à la bourse du travail. Il y avait déjà des adhérents Attac à titre individuel, moi j'étais adhérent Attac déjà depuis octobre 1998 j'avais déjà été à la Ciotat pour la première réunion nationale [...] On s'est réuni ici [à la FSU], on avait décidé de nommer des responsables provisoires pour mettre en place les statuts et convoquer l'assemblée générale. Il a fallu qu'il y ait des gens qui veuillent bien être membres du conseil d'administration. Bon. Il y a des choses qui ont commencé à se dessiner, des gens qui ont fait un tract, un communiqué de presse. Le Conseil d'administration auto désigné et autoproclamé... Il était provisoire, c'était uniquement pour convoquer l'Assemblée générale, c'était quelque chose de très informel parce qu'il y aurait très bien pu ce jour-là avoir des fachos parmi nous et qu'ils prennent le pouvoir. On ne se connaissait pas du tout, je connaissais deux ou trois personnes dans l'assemblée mais dans le Conseil d'administration, il y avait des gens de Sud, mais la plupart on ne se connaissait pas. La plupart des gens du Conseil d'administration venaient de syndicats ou d'associations. Il n'y avait que Thomas je crois qui n'avait jamais mis les pieds du tout et qui était lecteur du Monde Diplomatique et qui était très au courant de plein de choses. On a décidé du bureau et du président, secrétaire, trésorier... Toujours provisoires. Moi, j'ai bien voulu assurer la présidence pour les 3 ou 4 mois à venir jusqu'à l'Assemblée du mois de mars 1999. Pour l'Assemblée générale on a fait les statuts et on a réélu le bureau, je me suis représenté, ils m'ont réélu et c'est parti... Il y a toujours eu une forte participation, le plus faible c'était pendant les vacances où il y avait 25 à 30 personnes sinon il y a en moyenne entre 50 et 60 personnes à chaque réunion. Le comité local Attac Isère est constitué en association loi 1901. Toutefois, il a adopté des statuts distincts de ceux des « statuts types » proposés par le national137(*). Le fonctionnement n'en est pas beaucoup affecté. Les prises de décision ont lieu lors du Conseil d'administration qui se réunit tous les quinze jours, il est ouvert à chaque adhérent. Le C.A se compose de 19 membres élus chaque année lors de l'assemblée générale. C'est également à l'occasion du C.A, que le président est élu. Le comité isérois a connu pour l'instant deux présidents : Thomas a été nommé président lors de la création du groupe en novembre 1998. Il a été reconduit dans sa fonction lors de l'assemblée générale de mars 1999. Il a décidé lors de la dernière assemblée, en février 2001, de ne pas se représenter afin de ne pas cumuler les mandats et de laisser la place à un autre. Luc a accepté d'occuper le poste vacant après de nombreuses hésitations. On peut noter que des quorums ont été fixés pour que les réunions du C.A et de l'Assemblée générale soient valides138(*). Il s'agit d'une spécificité du comité Attac Isère. Une répartition des tâches très précise a été établie dans le comité. Un groupe a été constitué pour chaque activité : l'interpellation des élus, l'information et la constitution des tracts, la diffusion des documents nationaux d'Attac, la gestion du site Internet local, l'enregistrement de la boîte vocale du comité et enfin, la gestion des permanences qui sont effectuées tous les mercredis soirs au café « Notre-Dame » à Grenoble afin que les personnes intéressées puissent prendre contact avec l'association. De plus, des groupes de réflexion thématique ont été mis en place auxquels peuvent prendre part les adhérents. Ces groupes sont organisés selon les thèmes lancés par le national : la dette des pays du tiers-monde, les banques et les paradis fiscaux, l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et les Institutions Financières Internationales (IFI), l'énergie, la question de l'environnement et des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM), les médias, la condition des femmes, et enfin l'Accord Général sur le Commerce et les Services (AGCS) et la défense du service public. Les réunions de ces groupes se déroulent, le plus souvent, de façon mensuelle. Elles ont lieu à 18 heures, soit à la Bourse travail, soit à la maison des associations de Grenoble. Chacune d'entre elles regroupe entre 10 et 15 personnes. Une réunion publique a également lieu chaque mois. La réunion publique, ouverte aux non adhérents, rassemble entre 60 et 70 personnes à chaque fois. Les thèmes abordés sont inscrits à l'ordre du jour qui est préparé préalablement au cours du Conseil d'administration. Des réflexions et des débats ont lieu sur les thèmes dont est porteur Attac (tels que la taxe Tobin). D'autres débats ont cours sur l'organisation des actions (congrès du PS, manifestation du 1er mai, contre-sommet à Nice ou à Gênes) et sur la diffusion des informations. Aucun vote n'a lieu durant ces réunions ; le déroulement de la réunion et des prises de parole est assuré par un(e) président(e) qui est renouvelé(e) à chaque réunion. Enfin, on peut noter que des sous-groupes locaux, au sein de l'Isère, se sont mis en place, permettant ainsi une meilleure répartition géographique. Un groupe intitulé « Grésivaudan » s'est constitué pour rassembler toutes les communes de la vallée du Grésivaudan; les réunions y sont bimensuelles. Un groupe dans la commune de Voiron a également vu le jour, une permanence étant assurée de façon hebdomadaire. Un groupe « Campus » a été créé en 2001 afin de pouvoir rassembler les adhérents qui sont étudiants. Pour chacun de ces groupes, un responsable a été désigné, afin de servir de référent. On peut noter qu'il existait auparavant un groupe à Vienne ; celui s'est constitué récemment en association. Les comités locaux constituent l'implantation de l'association au niveau local, ils ont permis son développement rapide et continu dans chaque partie de l'hexagone. Ses fondateurs reconnaissent d'ailleurs fréquemment que l'un des principaux atouts du mouvement réside dans ce maillage territorial dense qui permet une représentation plus homogène des intérêts, et évite ainsi la monopolisation du mouvement par quelques cercles restreints de militants et d'intellectuels parisiens. La direction d'Attac a par conséquent toujours affiché son souci de décentralisation. Toutefois, ces déclarations présentent une contradiction avec les statuts de l'association dans lesquels les comités locaux ne sont pas reconnus juridiquement. Cette absence va donner lieu à des conflits internes en vue de la reconnaissance des comités. * 134 Bazri (Nadia), « A Grenoble Attac s'organise... », art.cit. * 135 Cf., Attac Isère, Rapport moral, 01/2000. * 136 Attac Isère, Lettre aux adhérents, 05/2001. * 137 Cf., « Statuts de l'association », annexe n°14, p. 31. * 138« La participation de la moitié au moins des membres du Conseil d'administration est nécessaire pour la validité des délibérations ». Annexe n°14, article n°9. « L'Assemblée générale se compose de tous les membres à jour de leur cotisation. Elle se réunit chaque année. Pour être valide elle doit réunir un tiers au moins de ses membres. » Ibid., article 10. |
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