La règlementation des contenus illicites circulant sur le reseau internet en droit comparépar Caroline Vallet Université Laval de Québec - 2005 |
2) La Loi québécoise concernant le cadre juridique des technologies de l'information: un isolement législatifLe Québec, contrairement aux autres provinces, a donc suivi un modèle différent de celui proposé par la LUCE. Cette différence se manifeste par l'adoption de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information (LCJTI)252(*). Cette loi tient compte des « principes de l'équivalence fonctionnelle et de la neutralité technologique, médiatique et juridique [qui] sont au coeur du cadre juridique mis en place »253(*). Elle s'inspire à la fois de la loi de l'État de New York et de certaines lois provinciales254(*) mais surtout, elle présente de nombreux points analogues avec la Directive sur le commerce électronique255(*). En effet, la LCJTI instaure un régime de responsabilité pour les intermédiaires techniques sur Internet256(*). Il s'agit d'un régime conditionnel d'exonération de responsabilité en faveur de certains intermédiaires. Par conséquent, ces derniers sont, moyennant le respect de certaines conditions, exonérés de responsabilité pour les documents détenus, indexés et transmis. La LCJTI pose donc les mêmes principes que la Directive européenne à savoir que les fournisseurs techniques sont soumis au principe d'irresponsabilité sous condition. À la différence de la Directive, les prestataires offrant des services de référence sont traités et sont soumis au même principe concernant leur responsabilité257(*). La LCJTI a ainsi choisi de s'inspirer de la Directive sur le commerce électronique en ce qui concerne notamment la responsabilité des PSI. Elle prévoit également que le prestataire « n'est pas tenu d'en surveiller l'information, ni de rechercher des circonstances indiquant que les documents permettent la réalisation d'activités à caractère illicite »258(*). Cette disposition rejoint les objectifs de l'article 15 de la Directive. Il est évident que le Québec s'est isolé du reste du Canada en s'écartant de la philosophie de la Loi type de la CNUDCI sur le commerce électronique259(*) et inévitablement de la LUCE260(*). Les autres provinces ont toutes choisi de s'harmoniser pour faciliter les échanges. Le Québec semble, pour sa part, montrer un intérêt différent. En effet, en suivant les dispositions européennes, le Québec s'harmonise avec l'Europe ce qui favorisera, peut être, les échanges avec cette dernière. Le régime de responsabilité instauré par la LCJTI doit se lire comme venant compléter les principes généraux de la responsabilité civile. Le droit commun n'a donc pas totalement disparu. * 252 Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, L.R.Q. 2001, c.32. (ci-après citée « LCJTI »). Elle a été sanctionnée le 21 juin 2001 et elle est entrée en vigueur le 1er novembre 2001. * 253 Propos de Me Jeanne PROULX, tiré de l'article de Indragandhi BALASSOUPRAMANIANE, « Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information : une approche différente » (2001) 33 J.duB. n°21. * 254 Voir les débats parlementaires de la LCJTI. * 255 Directive sur le commerce électronique, précitée, note 176 ; Pierre TRUDEL, La responsabilité sur Internet, Séminaire Droit et Toile, Bamako, 27 mai 2002, p.8. * 256 LCJTI, précitée, note 252, art. 22, 26, 27, 36 et 37. * 257 Id., art. 22, al 3. * 258 Id., art. 27. * 259 Loi type de la CNUDCI, précitée, note 244. * 260 CONFÉRENCE POUR L'HARMONISATION DES LOIS AU CANADA, précitée, note 243. |
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