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Les archives de famille entre cinéma et histoire


par Jean-René Garandet
Université de Lille - Master 1ère année en à‰tudes Cinématographiques et Archives 2022
  

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CONCLUSION.

Tout du long de cette recherche il a été question de nous interroger dans une première intention de la considération des images d'archives de famille, notamment à travers l'étude de la pratique média-photographique. Nous pouvons relever à cet effet, que nous sommes en présence d'un objet de recherche protéiforme, en ce sens, où celui-ci a connu une évolution marginale au sein d'un mouvement historiographique complexe.

En effet, nous avons observé que la pratique média-photographique de famille se trouve à la jonction d'une idéologie janusienne. D'une part, nous avons observé une idéalisation de l'image familiale comme se devant de démontrer de la grandeur d'une nation. Puis, d'autre part, que celle-ci était également porteuse d'une parole davantage souterraine, et à l'encontre d'un discours dominant. Il est vrai que ces images se doivent d'être interrogées par et pour la société actuelle afin de révéler, une composante historique éludée par les détenteurs du pouvoir. Cela concerne celles et ceux qui nous permettent de dévoiler d'une histoire invisible mais présente, calfeutrée, derrière chacun des événements qui ont constitués notre passé. Il est dès lors d'un enjeu d'étudier ces images d'archives comme étant des indices comme autant de sentiers, que nous devons empruntés dans le dessein d'obtenir une vision la plus détaillée, mais surtout la plus complète possible de notre mémoire collective.

Qui plus est, nous avons constaté dans une seconde intention que les pratiques artisanales tels les albums de famille, mais aussi du racontage était au fait d'une résurgence parmi la société contemporaine. Ces pratiques avaient été mises au banc de l'élaboration de notre patrimoine, de part une attitude d'évitement envers des événements traumatiques à l'échelle mondiale. Nous avons établi à travers cette recherche que l'individu, par suite des deux conflits mondiaux, s'en était remis à l'aspiration d'un monde sous le contrôle de la technique. La reproduction en série, ainsi que l'industrialisation de masse aussi bien des images que de la propriété, avaient supplantés, en lieu et place, d'une transmission d'une expérience. C'est dans le dessein de pallier la perte de notre faculté à transmettre un récit, que l'humanité s'était engagée dans une approche sisyphéenne de l'histoire. Désormais, à mesure que nous avancions vers notre avenir, nous ne regardions plus le passé comme étant de l'ordre d'un éducateur se devant de nous prémunir des catastrophes pouvant se reproduire. Nous avons constaté à travers

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notre recherche de l'aliénation de l'homme de famille, qui tenta de pallier son incapacité à transmettre son récit d'expérience, au point de se perdre parmi ses propres images de famille. Cela ayant eu pour effet coercitif d'institutionaliser une distance envers les autres membres de sa communauté familial. Qui plus est, par suite de la destruction des villages et des individus les peuplant, nous avons été confrontés à une perte inégale de l'expérience humaine ainsi que de la tradition du raconteur.

De plus, cela a eu pour conséquence d'établir une constatation contemporaine, concernant le fait suivant. Nous étions confrontés à la résurgence d'images d'archives de familles dénuées de discours les accompagnants. Cela nous a révélé du conditionnement opérant auprès des générations dont nous faisons partie, de ne pas se préoccuper du passé par le regard d'un individu mais davantage du collectif. Notre recherche nous a révélé de la nécessité par la pratique média-photographique de nous réapproprier ces images d'archives de famille dans une volonté d'établir une histoire commune et juste. Les documents pouvant les accompagner comme étant jugés de second d'ordre par une application méthodiste de l'histoire, peuvent nous permettre d'établir des correspondances entre les individus, dans le dessein de tenter d'abolir une frontière entre le puissant et l'oublié. Bien que nous ayons porté à l'attention de nos lecteurs, que ces images étaient avant tout de l'ordre de l'intime dans une première mesure. Elles peuvent si elles sont accompagnées d'une parole, de construire un univers à part entière entre les communautés humaines.

En effet, comme nous l'avons également observé, les nouvelles générations de cinéastes tentent de reconstituer une histoire universelle à partir des images de familles. Elles sont majoritairement des filles et petites filles de famille désireuses de perpétuer la tradition d'une transmission de l'expérience. Ces anecdotes d'un vécu somme toute personnel, qui pourtant nous enseignent sur le devenir de la perception humaine liée à un événement commun. La pratique du racontage si elle n'est plus l'apanage des hommes de famille, est devenue celle des femmes de famille. Dès lors que la transmission fut abolie par la décision humaine de s'en remettre au progrès, dans l'acception d'une perpétuelle ascension des sociétés. Le principe de tradition a été considéré comme étant antinomique des valeurs promues par l'ère de l'homme moderne. En effet, celle-ci nous permet de

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convoquer dans un même temps la mort et la maladie. La tradition tient sa naissance et sa pérennité auprès des lieux éloignés de l'autorité. Elles nous enseignent non plus le renoncement ; pas plus qu'une condition native de demeurait des sempiternelles vaincus. Bien au contraire, elle nous éduque à constater, voire devancer d'une perte de l'expérience. Il est vrai, que nous avons établi que l'individu s'était réfugié dans un monde de verre, le préservant ainsi lui semblait-il, de toute remémoration du passé, autrement que par une méthode chronologique et systématisée. Toutefois, nous avons constaté que cette structure est tacitement nécessaire. Bien que celle-ci nous contraigne a sans cesse porter notre regard vers l'avenir et non le passé et ses ruines. Il est vrai que les sociétés humaines étaient dans ce besoin de retrouver une structure, au lendemain d'une destruction sans pareille des corps et des esprits.

Cependant, c'est par cette contradiction que nous avons élaborer notre réflexion autour de l'avènement de la raconteuse au coeur de notre société. Il est venu le temps de ces femmes de familles de prendre la caméra, de s'approprier la technique des images en mouvement dans le dessein de nous amener parmi un univers dans lequel co-existe la parole et les images d'archives de famille. Ce sont parmi des fragments de vies, d'images et de mots, qu'une histoire alternative prend corps et voix. Elles sont ces raconteuses qui interrogent celles et ceux qui nous ont précédés. Nous avons remarqué au cours de notre recherche, qu'elles prêtent leur voix afin de redonner vie, le temps d'un film, à ses mères, ses grands-mères, dont le témoignage nous permet de nous inquiéter de notre avenir.

Qui plus est, il est apparu que cela peut nous permettre d'envisager la pratique d'une autre histoire, de connivence avec notre actualité. Nous sommes au fait d'une immédiateté de l'information, pourtant, c'est la construction progressive d'un récit autour des images d'archives de famille que permet une expérience pérenne pour les générations à venir. Nous pouvons admettre la parole comme se pouvant être un document archivistique singulier, dès lors que celle-ci est établie dans un rapport avec les images d'archives de famille.

La perdition d'un récit de la jeunesse d'après-guerre a engendré une nostalgie d'un temps, non du moins perdu que davantage absent. De ce fait nous pourrions, dans le

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prolongement de notre recherche, accentuer notre démarche concernant une approche dialectique entre les images d'archives de famille et la perte de l'expérience dès l'enfance pour un individu. Autrement énoncé, il serait question de nous questionner sur comment l'enfance peut devenir à son tour un témoignage de l'expérience humaine. À cet effet, l'imaginaire du conte, entre la parole énoncée et celle chantée, à travers les chants partisans ne peuvent-elles être mises en corrélation de la volonté souterraine de nous renseigner sur notre devenir comme énonciateur d'expérience ? Cette nouvelle mise en forme de l'histoire entre la parole de la raconteuse de famille et les images d'archives par l'outil média-photographique. Ne nous interrogerait-elle pas concernant notre perception d'une nouvelle réalité historique par l'utilisation de la pratique du racontage de famille ?

De plus, l'approche archéologique liée aux images d'archives de famille peut possiblement approfondir davantage le rapport entre la technique, et la restitution d'une historie souterraine. Il est vrai, que nous pouvons nous questionner également sur la propension d'un discours dominant à catégoriser les membres d'une famille comme véhiculant, malgré eux, une prédétermination d'une expérience conditionnée depuis l'enfance. Il serait question également d'aborder plus en détail la portée de ces nouvelles traditions de transmission du récit, au sein de la pratique média-photographique contemporaine. Cela notamment en rapport à un statut en devenir de l'outil cinématographique, comme devant être étudié en tant que générateur d'expérience singulier. Qui plus est, c'est à travers l'analyse de séquences filmiques, que nous pouvons avancer le fait suivant. Cette nouvelle approche, qui concerne les images d'archives de famille associées à une pratique de la raconteuse de famille se développe pour l'essentiel dans le cinéma italien. Les films qui abordent cette méthode sont principalement des productions italiennes. De ce fait, cela ne peut être considéré comme tenant d'une donnée aléatoire, lorsque nous sommes au fait que la famille et le cinéma italien évoluent en coexistence de la relecture d'une histoire souterraine. Soit une pensée toute particulière liée aux archives de famille ainsi qu'à la transmission de l'expérience. Celle-ci se doit dans le prolongement de notre recherche à venir d'être un objet d'attention indéniable.

En effet, c'est à l'issue de notre recherche, que les films des cinéastes Alina Marazzi et Giulia Casagrande se sont avérés complémentaires. Toutefois, il nous paraissait

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primordial d'étudier un ensemble de propositions cinématographiques afin de nous assurer du bien-fondé d'une étude davantage centrée sur le travail de ces deux cinéastes.

De ce fait, dans la continuité de notre propos, nous allons nous orienter sur la thématique de l'enfance pendant la période de l'après-guerre et du fascisme. En l'occurrence, comment la figure de l'enfance d'après-guerre est-elle révélatrice d'un enjeu concernant l'étude d'un hors-champ de l'Histoire ? Mais également dans quelle mesure, nous pouvons étudier le motif de la représentation du corps de la femme à travers la pratique média-photographique de famille ? La parole comme médiatrice entre les images d'archives de famille et une histoire collective, peut-elle devenir révélatrice d'une lutte souterraine envers un discours propagandiste véhiculé par l'imagerie moderne ?

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon