1.3. PHYSIOPATHOLOGIE
Il est classique de distinguer deux types de
péritonites en fonction du mode de contamination du péritoine
:
a) PERITONITES DITES«
PRIMITIVES»
Rares, elles correspondent aux infections de la cavité
péritonéale qui surviennent en l'absence de foyer infectieux
primaire intra abdominal ou de solution de continuité du tube digestif.
La contamination péritonéale se fait par voie
hématogène au cours d'une bactériémie ; cependant
ce mécanisme n'est probablement pas le seul au cours des
péritonites tuberculeuses (aujourd'hui exceptionnelles), ni dans les
infections d'ascite du cirrhotique (qui présentent l'étiologie la
plus fréquente dans ce groupe) : la stase splanchnique pourrait alors
favoriser le passage transmural des bactéries depuis la lumière
digestive.
Ce sont des infections á un seul germe (Streptocoque,
Pneumocoque chez l'enfant, Entérobactéries surtout chez
l'adulte), cette flore monomorphe étant caractéristique des
péritonites primitives.
Dans tous les cas, la contamination péritonéale
«spontanée» est favorisée par la présence d'une
ascite et /ou d'un déficit immunitaire de l'hôte : diabète,
syndrome néphrotique, cirrhose.
b) PERITONITES DITES« SECONDAIRES
»
En règle, les péritonites sont secondaires
à une lésion du tube digestif ou d'un viscère
intra-abdominal. La lésion initiale peut être une suppuration
(appendicite, cholécystite) ou une nécrose viscérale
(strangulation intestinale), et / ou le plus souvent une perforation du tube
digestif (ulcère, tumeur).
L'inoculation péritonéale est donc faite par la
flore intestinale polymicrobienne, où le rôle pathogène des
entérobactéries (Escherichia Coli) et des anaérobies
(Bacteroidesfragilis) est prédominant, et dont la virulence est accrue
par une synergie aéro-anaérobie.
La flore bactérienne normale est comme suit:
- estomac = 103/mL
- grêle = 106/mL
- côlon = 1011/mL
Ainsi donc plus on descend dans le tube digestif, plus la
concentration de germes est importante. D'où, lors d'une perforation
gastrique, les signes septiques ne seront pas évidents, contrairement au
cas d'une perforation colique qui donne un choc septique très
important.
L'évolution de l'infection après l'inoculation
péritonéale dépend d'une part de l'infection de celle-ci
et de facteurs locaux favorisants (comme le sang ou la nécrose
tissulaire), et d'autre part des moyens de défense de l'organisme dont
la mise en jeu est immédiate et complexe : ces moyens sont locaux
(épiploon, drainage lymphatique) et systémique (phagocytose,
fibrinoformation). Il y a systématiquement trois (3) possibilités
évolutives :
· la guérison par résorption du foyer
infectieux (par exemple : ulcère perforé bouché) ;
· la limitation de l'infection par les moyens de
défense, avec constitution d'un abcès (par exemple : abcès
péri colique sur perforation sigmoïdienne);
· la constitution d'une péritonite, en cas de
faillite ou de débordement de ces moyens de défense.
Les conséquences locales et générales
sont d'autant plus graves que l'inoculation bactérienne est virulente,
abondante et surtout prolongée.Localement, l'inflammation étendue
à toute la séreuse entraine un déplacement de grandes
quantités d'eau, d'électrolytes et des protéines dans un
milieu où ils sont momentanément perdu pour l'organisme, que l'on
appelle « 3ème secteur » et qui
comprend:
- La cavité péritonéale elle-même dans
laquelle s'amasse du liquide exsudée, en plus du liquide en provenance
du viscère perforé.
- L'espace conjonctif sous-péritonéal qui est le
siège d'un oedème plus ou moins important.
- La lumière intestinale distendu qui bientôt va se
remplir de liquide que la muqueuse n'est plus capable de réabsorber
[3].
Ces pertes associées à l'absence d'ingestion et
parfois aux vomissements peuvent atteindre 4 à 6 litres par jour.
L'absorption séreuse augmentée provoque une
diffusion des toxines et des bactéries dans la circulation
générale, qui peut retentir sur toutes les fonctions de
l'organisme : défaillances cardio-circulatoire, respiratoire,
rénale, digestive, hépatique, neurologique. Ainsi se trouve le
concept de «péritonite grave, justiciable, en principe, du
traitement chirurgical». [3]
1.3.1.
RETENTISSEMENT VISCERAL
· L'insuffisance rénale : est
tout d'abord fonctionnelle (oligurie en rapport avec le seul
hypodébit artériel), puis lésionnelle
(ischémie prolongée, toxines bactériennes) avec
débit urinaire chez un adulte, égal ou inférieur à
20 ml/ heure, soit moins de 500ml/ 24 heures. L'hyperkaliémie qu'elle
entraîne est un facteur déterminant dans le mécanisme du
décès.
· La défaillance respiratoire :
ou les facteurs mécaniques (diminution du jeu des coupoles,
déficit de la respiration abdominale) y tiennent une place aussi
importante que les lésions pleuro-pulmonaires [3] qui entrent dans le
cadre plus large du Syndrome de Détresse Respiratoire Aiguë de
l'adulte (S D R A) ; elle résulte de l'activation des
polynucléaires neutrophiles et de leur adhésion entre eux et aux
parois des endothéliums vasculaires pulmonaires. L'hypoxie qui en
résulte ne peut être corrigée par la simple administration
d'oxygène, mais exige une ventilation assistée avec pressions
positives expiratoires. La rétention de CO2 majore l'acidose de la
glycolyse en anaérobie. L'installation de tel syndrome, qui complique 40
à 60% des chocs septiques, aggrave considérablement le pronostic
[14]
· L'impact hématologique : est
également d'origine toxique. La première perturbation est une
Coagulation Intra-vasculaire Disséminée (CIVD) avec consommation
des facteurs de l'hémostase et tendance hémorragique ; une
hypoplaquettose autour de 30.000/mm3 en est le témoin ultime. La
toxicité hématologique se signale également par une hyper
leucocytose (supérieur à 30.000/mm3) ou une hypoleucocytose
(inférieur à 2500) ; le taux d'hémoglobine tend
également à s'abaisser ; c'est un facteur pronostique important
lorsqu'il se situe au-dessous de 8g/100ml.
· La défaillance hépatique
: (par ischémie prolongée, effets toxiques de la
pullulation microbienne intraluminale) se traduit par un ictère et une
chute des facteurs de coagulation, ce dernier aspect majorant la tendance
hémorragique.
· La défaillance cardio-circulatoire
: est poly factorielle et terminale (tachycardie prolongée avec
métabolisme en hypoxie, acidose métabolique, hyperkaliémie
par insuffisance rénale, effets inotropes négatifs des toxines
bactériennes, hypertension artérielle pulmonaire par SDRA...).Son
expression clinique est une hypotension artérielle à pression
veineuse centrale élevée, la bradycardie est un signe
terminal.
· La traduction cérébrale :
enfin, résulte du cumul de l'ensemble de ces facteurs pathogènes
; on l'évalue à l'aide du Score de Glasgow; un chiffre
égal ou inférieur à 6 témoigne d'une situation
terminale, pratiquement irréversible.
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