CONCLUSION
Le devoir de loyauté entre contractants et la
protection de contractants vulnérables sont des mots d'ordre en droit
des contrats et c'est au nom de ceux-ci que le législateur s'immisce
dans la sphère contractuelle en imposant des obligations à la
charge de la partie dominante au contrat. En effet, les contractants ne sont
plus égaux comme le pensait Portalis d'où la recherche d'un
équilibre contractuel, voilà pourquoi des obligations à la
charge du créancier ont été intégrées dans
le contrat de cautionnement étant donné que ledit contrat
crée un déséquilibre entre les parties du fait qu'il n'y
ait que la caution qui s'engage envers le créancier.
Toutefois, les obligations légales mises à la
charge du créancier ne suivent pas le même régime que les
obligations issues de la convention des parties, d'où la faible sanction
qui les caractérise. En effet, seule la déchéance de
droits punit le manquement à une obligation légale.
En droit de l'OHADA, le législateur communautaire s'est
inspiré du droit français des sûretés et a
imposé à son tour l'obligation d'informer la caution.
Cependant, si l'Acte uniforme portant organisation des
sûretés (AUS) a été adopté le 17 avril 1997,
puis modifié le 15 décembre 2010, l'on constate que 13 ans
après son adoption, le législateur communautaire africain n'a pas
pris la peine d'améliorer la situation des cautions en matière
d'information obligatoire. En effet, ni l'article 24 ni l'article 25 de l'AUS
de 2010 ne garantissent que le destinataire reçoive la lettre
d'information, alors que le législateur OHADA s'est assuré de
l'effectivité de l'information obligatoire de plusieurs acteurs du monde
des affaires (commissaire aux comptes, créancier saisissant,
administrateurs, actionnaires, etc.), et ce, depuis 1997.
D'ailleurs, depuis 1997 et 1998, les Actes uniformes relatifs
au droit commercial général, au droit des sociétés
commerciales, aux procédures collectives et aux procédures
simplifiées de recouvrement contiennent tous des obligations
d'information devant impérativement être effectuées au
moyen de procédés permettant de vérifier que le
destinataire a réellement reçu l'information (lettre
recommandée avec avis de réception, lettre au porteur contre
récépissé, etc.).
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Aussi, en zone OHADA comme en France, bien que rien ne
garantisse qu'il la reçoive, le débiteur ou la caution doit
assumer le coût de l'information puisque la facturation de celle-ci reste
à la discrétion du créancier vu que le droit positif
considère l'information périodique et ponctuelle de la caution
comme étant un service bancaire...
Nous constatons alors un conformisme regrettable entre le
droit de l'OHADA et le droit français en dépit du fait que ce
dernier ne soit pas exempt d'imperfections en matière d'information de
la caution. En effet, le législateur communautaire s'est contenté
de recopier la législation française sans prendre la peine de
résoudre les problèmes d'application de la loi importée
(problèmes qui n'ont été traités que partiellement
par les juridictions françaises) à savoir l'effectivité de
l'information, la durée et le coût de celle-ci et l'information
des contre-garanties personnelles.
Pourtant, le législateur africain n'a pas suivi
aveuglement le droit positif français, voilà pourquoi l'on ne
sait toujours pas avec exactitude, dans la zone OHADA, quel incident de
paiement du débiteur principal devrait faire l'objet de l'information
ponctuelle de la caution. En revanche, le droit de l'OHADA a le mérite
de reconnaître la notion de cautionnement réel ainsi que
l'information de la personne qui a consenti une sûreté
réelle en vue de garantir le paiement de la dette d'autrui : la caution
réelle. En sus, le législateur africain a le mérite non
seulement d'avoir circonscrit le nombre de bénéficiaires de
l'information périodique, mais aussi il a le mérite d'avoir
évité l'écueil de la pluralité de dispositions
imposant l'information obligatoire de telle sorte à ce que le principe
selon lequel l'homme responsable de la société libérale
s'informe tout seul ne soit pas désuet. On peut donc affirmer qu'il
n'existe pas de surprotection de la caution en droit de l'OHADA.
Au vu de ce qui précède, on ne saurait
qu'encourager une refonte des articles 24 et 25 de l'AUS de 2010 afin que les
difficultés liées à l'information des cautions soient
prises en compte. En effet, nous pensons que le législateur OHADA, de
par la multitude de pays pour lesquels il légifère, ne devrait
pas se contenter de rédiger des textes imprécis et incomplets,
puis laisser le soin à la CCJA et aux juges nationaux de faire preuve de
créativité.
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