Même s'il n'existe pas de réel consensus
à ce sujet, l'ensemble des travaux s'accorde à dire que le
marché informel des médicaments représente une alternative
de choix pour les plus pauvres puisque, nous l'avons vu
précédemment ; les médicaments y sont
économiquement plus accessibles. Mais ne nous trompons pas de
débat : aucun résultat d'enquête à notre
connaissance ne signale que le marché illicite soit
réservé aux pauvres.
Plusieurs enquêtes rapportent qu'il existe un processus
hiérarchique entre les différentes alternatives d'accès
aux soins. Au cours de l'épisode morbide, les malades auraient
généralement recours en premier lieu au secteur informel avant de
s'adresser aux structures formelles (Hamel, 2006 ; Sossou, 2012). La
capacité des gens à se rendre ultérieurement dans une
structure formelle dépend des facilités que ces derniers auront
à mobiliser des sommes plus importantes. Les ménages
bénéficiant d'un revenu suffisant ou alors de fonds
communautaires de solidarité pourront plus facilement mobiliser cet
argent. Cette approche conceptuelle du recours au marché
parallèle et de la pauvreté revient à décrire un
lien de dépendance entre ces deux entités.
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Tout le monde sollicite le marché illicite mais les
plus pauvres représentent la catégorie sociale la plus «
dépendante ». En termes de justice dans l'accessibilité aux
soins et aux médicaments, deux pistes de réflexion s'offrent
à nous : l'accessibilité financière du marché
parallèle permet l'accès aux médicaments (dans la mesure
où les plus pauvres peuvent accéder plus facilement aux
médicaments), ou au contraire, l'acceptation d'un système de
santé à deux vitesses qui réduit les chances pour les plus
pauvres d'accéder à des soins de qualité et aux
médicaments. (Théories développées par les travaux
de Sen, cité par Hamel, 2006).
En somme mettre en évidence la parfaite
adéquation offre-demande sur le secteur de la distribution informelle
des médicaments a été faite à travers la mise en
place par les distributeurs d'une offre alléchante pour les
ménages, suivi d'une excellente intégration sociale de cette
forme de distribution. Dans la suite, nous essaierons de comprendre comment le
consommateur perçoit ces avantages qu'offre le secteur informel de la
distribution des médicaments.
SECTIONII : LE CONSOMMATEUR FACE AUX «
AVANTAGES » OFFERTS PAR LE SYSTEME DE DISTRIBUTION INFORMEL DES
MEDICAMENTS
Cette deuxième partie sera consacrée au
processus d'intégration de la distribution informelle. Ainsi dans cette
partie, nous allons présenter les facteurs induits par le marché
informel des médicaments susceptibles d'influencer le comportement des
consommateurs envers ce dernier et le model conceptuel verra également
le jour.
1-DISTRIBUTION INFORMEL DES MEDICAMENTS : UNE
INTEGRATION
SOCIALE PARTICULIERE
La vente informelle des médicaments a lieu dans la
rue, au marché, au bureau, et dans les véhicules de transport.
Ces lieux constituent des environnements familiers pour les consommateurs
africains. De plus ces lieux sont parfaitement intégrés dans leur
mode de vie quotidien. L'achat de ces produits est donc facilité par
l'environnement les méthodes de distributions et le lieu de
distribution. La vente des médicaments illicites parait donc bien
adaptée au contexte social des consommateurs africains et sans doute
bien plus que la vente en officines (Jaffre, 1999 ; Ouattara, 2009 ; Mbaho,
2015).