26
A-Notion d'attitude
Les fonctions remplies par les attitudes nous permettent de
comprendre les raisons de leur formation dans l'esprit du consommateur
(D'astous et al. 2006).
Katz (1960) a mis au point une approche fonctionnelle
permettant de justifier 1'utilité des attitudes. Selon cette approche,
il existe quatre fonctions principales des attitudes :
Ø La fonction utilitaire : Les attitudes aident les
gens à fonctionner dans leur environnement.
Ø La fonction d'expression des valeurs : L'attitude
permet à l'individu d'exprimer, aux autres ainsi qu'à
lui-même, les valeurs et les principes qu'il juge primordiaux.
Ø La fonction de protection de l'ego : Les attitudes
peuvent être adoptées afin de protéger l'image que la
personne souhaite projeter. Ainsi, certaines personnes forment des attitudes
positives envers des objets, des personnes ou même envers des
comportements cohérents avec son ego.
Ø La fonction d'organisation des connaissances : Une
attitude correspond à une façon de percevoir le monde, c'est une
sorte de schéma de synthèse de la perception de l'individu sur
différents sujets. C'est une sorte de filtre à travers lequel
l'individu organise sa pensée. Les attitudes permettent ainsi de filtrer
et organiser toutes l'information stockée dans la mémoire de
l'individu et ceci dans le but de la simplifier. Ce qui sera à l'origine
de son comportement.
B-Comportement du consommateur
Plusieurs chercheurs ont travaillé sur la notion de
comportement et les différentes attitudes observés chez les
consommateurs. Suivant Dussart « le comportement du consommateur
représente l'expression des efforts des individus pour satisfaire leurs
besoins et leurs désir centrées sur la consommation ». Des
études ont également été réalisées
sur le comportement du consommateur face à l'achat et l'utilisation de
différents types de biens (Engel, Kollat et Blackwell, 1978 ; Kammoun et
Turki, 2010 ; Basti, 2010).
Dans ce contexte, on trouve selon Basti (2010) trois
modèles explicatifs à la base du comportement du consommateur
face à un bien ou un objet.
Le premier qui traite principalement de la formation
d'attitude chez l'individu. Selon cette vision tridimensionnelle, pour
connaitre l'attitude d'une personne envers un objet, il faut examiner en
même temps les croyances ou connaissances de cette personne à
l'égard de l'objet
27
(la dimension cognitive), ses sentiments envers celui-ci (la
dimension affective) ainsi que les intentions ou comportement s'y rattachant
(la dimension conative). Un second qui traite l'ensemble des actes des
individus directement reliés à l'achat et à l'utilisation
des biens. Ce modèle s'appuie sur les différentes étapes
de l'achat d'un bien. La phase préachat (recherche, collecte et analyse
d'informations) ; l'achat proprement dit (décision et acte d'achat) ; la
phase post-achat (évaluation du bien acheté et de la satisfaction
qu'il procure). Le dernier qui fait une analyse complète du comportement
de l'acheteur. Celui-ci non seulement passe au peigne fin les
différentes étapes d'un achat, il ressort également cinq
différents rôles principaux que peuvent jouer les individus au
cours d'un achat (initiateur, prescripteur, décideur, acheteur, et
consommateur).
Il est à noter que le sentiment, ne se forme jamais,
sans la disposition d'informations en avance, c'est à dire des croyances
concernant l'objet en question et même parfois d'une intention d'achat.
De ce fait, une exploration de l'achat et l'adoption du circuit informel semble
plus important dans notre conteste de travail.
C-Comportement du consommateur et adoption de la
distribution informelle des médicaments
Le comportement du consommateur comme « le processus par
lequel l'individu élabore une réponse à un besoin. Ce
processus combinera des phases surtout cognitives et des phases d'action qui
sont l'achat et la consommation proprement dite » (Kotler, 2006). Le
comportement du consommateur se trouve au coeur de l'étude de la
demande, notamment dès lors que sont considérés les
produits de grande consommation ou de premier nécessité.
De nombreuses études consacrées au comportement
du consommateur cherchent à répertorier les principales variables
qui expliquent les différences observées entre les comportements
individuels. Cette recherche des principales variables qui déterminent
les comportements des consommateurs s'est traduite par l'élaboration
progressive de modèles de comportements de consommateurs.
D'après Chikhi et Benhabib (2007), de nombreuses
variables ont été identifiées comme responsable de
l'adoption des produits ou des objets, certains sont propres au consommateur et
d'autres non. Ceux qui relèvent du consommateur sont de nature socio
démographique comme l'âge, le genre, le niveau d'éducation
et de revenu (Nia et al. 1995) ou de nature psycho-graphique, comme l'estime de
soi (Bloch et al. 1993), le matérialisme (Wee et al., 1995), l'aversion
à l'égard du risque (Wee et al. 1995). D'autres
déterminants
28
concernent directement les attributs du produit, qu'ils soient
intrinsèques comme la qualité perçue (Nia et Zaichkowsky,
2000 ; Wee et al. 1995) ou extrinsèques comme le prix ou la marque (Nia
et Zaichkowsky, 2000). « Les chercheurs se sont
également intéressés au milieu de l'achat et à son
impact sur la propension à acheter des produits au travers de variables
telles que l'implication à l'égard de la catégorie de
produit (Bloch et al. 1993 ; D'Astous et Gargouri, 2001), de la satisfaction
retirée d'achats antérieurs de contrefaçons (Tom et al.,
1998), du lieu d'achat - magasin vs marché - (Bloch et al. 1993 ;
Cordell et al. 1996 ; Tom et al. 1998) et du risque perçu associé
à la catégorie de produit (Cordell et al. 1996) » (Chikhi et
Benhabib,2007).
En effet, comme nous l'avons vu plus haut, le comportement de
consommation peut être différent ou spécifique sur le
circuit informel, ainsi l'attitude du consommateur envers les biens et services
vendus sur les marchés informels pourrait changer ou pas.
2-LES MEDICAMENTS ISSUS DU CIRCUIT INFORMEL : UNE
OFFRE
ECONOMIQUEMENT ALLECHANTE POUR LES MENAGES
Pour certains usagers, il est clair que les
médicaments de la rue sont moins chers et les avantages
économiques associés sont considérables. Mais le
médicament est-il vraiment moins cher dans la rue ?
A- L'automédication : pratique dominante de la
distribution informelle des médicaments
Des études ont mis en évidence qu'en cas de
paludisme, les personnes recourent au secteur privé et informel de
distribution du médicament, ce dernier étant bien souvent
assimilé au privé, situé à proximité de
leurs déplacements quotidiens (Nyato, 2010 ; Djralah et al. 2015).
Cette situation est bien observable dans la plupart des pays
en voie de développement et surtout dans les pays francophones au sud du
Sahara. L'automédication est largement pratiquée dans ces pays et
se produit dans des proportions tout à fait significatives comme le
montre la figure ci-dessous.
29
Tableau 3: modalités d'achat des
médicaments dans les lieux « classiques » de la distribution
pharmaceutique au Bénin
Modes d'achat
|
Pharmacie urbaine
|
Pharmacie rurale
|
Vendeur informel
|
Demande spontanée
|
73%
|
65%
|
70%
|
Ordonnance
|
20%
|
30%
|
10%
|
Demande de conseils
|
7%
|
5%
|
20%
|
|
Source : Baxerres et al. (2016) :
l'automédication en question : un bricolage socialement et
territorialement situé. Colloque internationales et pluridisciplinaire
de Nantes.
On observe que l'automédication est largement
pratiquée quelques soit le lieu de l'achat. Environ 73% des achats en
pharmacie de ville renvoient à l'automédication ; 65% des achats
dans les pharmacies en milieu rural sont également des pratiques
d'automédication ; et enfin 70% des achats du secteur informel ne
passent pas par une prescription médicale (Baxerres, 2016). Nous pouvons
conclure sans risque de nous tromper que l'automédication est une
pratique largement observée en consommation des médicaments ; que
cet achat soit réalisé en milieu formel ou informel. A
présent la question la plus pertinente semble être la raison
principale de cette ruée vers une pratique apparemment irrationnelle.
Pour répondre à cette interrogation, nous
étudierons les dépenses liées à chaque stade du
traitement d'une maladie. De la consultation à l'achat des
médicaments. Cette analyse nous permettra d'apprécier les
coûts liés à chaque étape du processus.
Illustration : Supposons un malade
atteint de fièvre qui se rend dans un centre de santé ou un
hôpital de district. Ce dernier dans la plupart de cas, son processus de
recherche de santé comprend 5 étapes chacune ayant un coût
: à savoir le déplacement, la consultation, l'examen,
hospitalisation et achat des médicaments.
Il faut également noter que les itinéraires
thérapeutiques possibles sont nombreux : le patient peut consulter (un
tradipraticien3, un médecin) ou avoir recours à
l'automédication, le patient peut acheter son médicament dans une
structure autorisée (hôpital, dispensaire, ...) ou non. Une
étude réalisée au Cameroun en 2002 permet d'apporter des
chiffres comparatifs qui sont présentés dans le tableau
suivant.
3 Pratiquant de la médecine traditionnelle
Africaine
30
Tableau 4 : Comparaison des coûts (en
francs CFA), triés par catégories, rattachés à
chacun des itinéraires thérapeutiques d'après une
étude réalisée au Cameroun en 2002)
Types de recours
|
Catégories de coûts
|
Coûts totaux
|
|
Déplacement
|
Hospitali- sation
|
Examen
|
Médicame nts
|
|
896
|
464
|
2154
|
3162
|
9427
|
17060
|
Consultation traditionnelle
|
1675
|
369
|
313
|
469
|
3386
|
6637
|
Automédication moderne
|
-
|
-
|
-
|
-
|
1079
|
1079
|
Automédication traditionnelle
|
-
|
-
|
-
|
-
|
443
|
443
|
Cout moyen en FCFA
|
312
|
147
|
673
|
961
|
3411
|
5326
|
|
Source : Hamel (2006, p. 23) ; vente illicite des
médicaments de la rue dans les pays en développement.
Thèse doctorat en pharmacie.
Les chiffres présentés sont à titre
purement indicatif. Ils permettent d'apporter un ordre d'idée et des
points de comparaison. Le tableau met en évidence les coûts
liés aux différents itinéraires thérapeutiques en
cas de maladie (de la consultation jusqu'à l'achat des
médicaments).
Une observation plus poussée mérite être
faite sur les coûts épargnés lors du recours au
marché illicite des médicaments. Il apparait que le coût
total du traitement est énorme et cela fait que les ménages
à faibles revenu ont recourt au circuit informel.
Le coût d'opportunité défini ici est
direct. Il découle du temps perdu par le malade lorsqu'il se rend
à l'hôpital. Ou lorsqu'il ira faire le tour des pharmacies
à la recherche des médicaments. Parfois il faut faire le tour de
la ville plusieurs jour s'il y'a rupture de stock. Dans ce contexte se procurer
des médicaments sur le marché informel ne présentera pas
d'inconvénients et reste le moyen répondant efficacement au
besoin du client.
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