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Le consommateur face a la distribution informelle des medicaments : cas de la ville de Douala-Cameroun


par Eric Charli KWUYAH TATDJA
Université de Douala - Master 2 recherche 2016
  

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A-Notion d'attitude

Les fonctions remplies par les attitudes nous permettent de comprendre les raisons de leur formation dans l'esprit du consommateur (D'astous et al. 2006).

Katz (1960) a mis au point une approche fonctionnelle permettant de justifier 1'utilité des attitudes. Selon cette approche, il existe quatre fonctions principales des attitudes :

Ø La fonction utilitaire : Les attitudes aident les gens à fonctionner dans leur environnement.

Ø La fonction d'expression des valeurs : L'attitude permet à l'individu d'exprimer, aux autres ainsi qu'à lui-même, les valeurs et les principes qu'il juge primordiaux.

Ø La fonction de protection de l'ego : Les attitudes peuvent être adoptées afin de protéger l'image que la personne souhaite projeter. Ainsi, certaines personnes forment des attitudes positives envers des objets, des personnes ou même envers des comportements cohérents avec son ego.

Ø La fonction d'organisation des connaissances : Une attitude correspond à une façon de percevoir le monde, c'est une sorte de schéma de synthèse de la perception de l'individu sur différents sujets. C'est une sorte de filtre à travers lequel l'individu organise sa pensée. Les attitudes permettent ainsi de filtrer et organiser toutes l'information stockée dans la mémoire de l'individu et ceci dans le but de la simplifier. Ce qui sera à l'origine de son comportement.

B-Comportement du consommateur

Plusieurs chercheurs ont travaillé sur la notion de comportement et les différentes attitudes observés chez les consommateurs. Suivant Dussart « le comportement du consommateur représente l'expression des efforts des individus pour satisfaire leurs besoins et leurs désir centrées sur la consommation ». Des études ont également été réalisées sur le comportement du consommateur face à l'achat et l'utilisation de différents types de biens (Engel, Kollat et Blackwell, 1978 ; Kammoun et Turki, 2010 ; Basti, 2010).

Dans ce contexte, on trouve selon Basti (2010) trois modèles explicatifs à la base du comportement du consommateur face à un bien ou un objet.

Le premier qui traite principalement de la formation d'attitude chez l'individu. Selon cette vision tridimensionnelle, pour connaitre l'attitude d'une personne envers un objet, il faut examiner en même temps les croyances ou connaissances de cette personne à l'égard de l'objet

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(la dimension cognitive), ses sentiments envers celui-ci (la dimension affective) ainsi que les intentions ou comportement s'y rattachant (la dimension conative). Un second qui traite l'ensemble des actes des individus directement reliés à l'achat et à l'utilisation des biens. Ce modèle s'appuie sur les différentes étapes de l'achat d'un bien. La phase préachat (recherche, collecte et analyse d'informations) ; l'achat proprement dit (décision et acte d'achat) ; la phase post-achat (évaluation du bien acheté et de la satisfaction qu'il procure). Le dernier qui fait une analyse complète du comportement de l'acheteur. Celui-ci non seulement passe au peigne fin les différentes étapes d'un achat, il ressort également cinq différents rôles principaux que peuvent jouer les individus au cours d'un achat (initiateur, prescripteur, décideur, acheteur, et consommateur).

Il est à noter que le sentiment, ne se forme jamais, sans la disposition d'informations en avance, c'est à dire des croyances concernant l'objet en question et même parfois d'une intention d'achat. De ce fait, une exploration de l'achat et l'adoption du circuit informel semble plus important dans notre conteste de travail.

C-Comportement du consommateur et adoption de la distribution informelle des médicaments

Le comportement du consommateur comme « le processus par lequel l'individu élabore une réponse à un besoin. Ce processus combinera des phases surtout cognitives et des phases d'action qui sont l'achat et la consommation proprement dite » (Kotler, 2006). Le comportement du consommateur se trouve au coeur de l'étude de la demande, notamment dès lors que sont considérés les produits de grande consommation ou de premier nécessité.

De nombreuses études consacrées au comportement du consommateur cherchent à répertorier les principales variables qui expliquent les différences observées entre les comportements individuels. Cette recherche des principales variables qui déterminent les comportements des consommateurs s'est traduite par l'élaboration progressive de modèles de comportements de consommateurs.

D'après Chikhi et Benhabib (2007), de nombreuses variables ont été identifiées comme responsable de l'adoption des produits ou des objets, certains sont propres au consommateur et d'autres non. Ceux qui relèvent du consommateur sont de nature socio démographique comme l'âge, le genre, le niveau d'éducation et de revenu (Nia et al. 1995) ou de nature psycho-graphique, comme l'estime de soi (Bloch et al. 1993), le matérialisme (Wee et al., 1995), l'aversion à l'égard du risque (Wee et al. 1995). D'autres déterminants

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concernent directement les attributs du produit, qu'ils soient intrinsèques comme la qualité perçue (Nia et Zaichkowsky, 2000 ; Wee et al. 1995) ou extrinsèques comme le prix ou la marque (Nia et Zaichkowsky, 2000). « Les chercheurs se sont également intéressés au milieu de l'achat et à son impact sur la propension à acheter des produits au travers de variables telles que l'implication à l'égard de la catégorie de produit (Bloch et al. 1993 ; D'Astous et Gargouri, 2001), de la satisfaction retirée d'achats antérieurs de contrefaçons (Tom et al., 1998), du lieu d'achat - magasin vs marché - (Bloch et al. 1993 ; Cordell et al. 1996 ; Tom et al. 1998) et du risque perçu associé à la catégorie de produit (Cordell et al. 1996) » (Chikhi et Benhabib,2007).

En effet, comme nous l'avons vu plus haut, le comportement de consommation peut être différent ou spécifique sur le circuit informel, ainsi l'attitude du consommateur envers les biens et services vendus sur les marchés informels pourrait changer ou pas.

2-LES MEDICAMENTS ISSUS DU CIRCUIT INFORMEL : UNE OFFRE

ECONOMIQUEMENT ALLECHANTE POUR LES MENAGES

Pour certains usagers, il est clair que les médicaments de la rue sont moins chers et les avantages économiques associés sont considérables. Mais le médicament est-il vraiment moins cher dans la rue ?

A- L'automédication : pratique dominante de la distribution informelle des médicaments

Des études ont mis en évidence qu'en cas de paludisme, les personnes recourent au secteur privé et informel de distribution du médicament, ce dernier étant bien souvent assimilé au privé, situé à proximité de leurs déplacements quotidiens (Nyato, 2010 ; Djralah et al. 2015).

Cette situation est bien observable dans la plupart des pays en voie de développement et surtout dans les pays francophones au sud du Sahara. L'automédication est largement pratiquée dans ces pays et se produit dans des proportions tout à fait significatives comme le montre la figure ci-dessous.

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Tableau 3: modalités d'achat des médicaments dans les lieux « classiques » de la distribution pharmaceutique au Bénin

Modes d'achat

Pharmacie urbaine

Pharmacie rurale

Vendeur informel

Demande spontanée

73%

65%

70%

Ordonnance

20%

30%

10%

Demande de conseils

7%

5%

20%

 

Source : Baxerres et al. (2016) : l'automédication en question : un bricolage socialement et territorialement situé. Colloque internationales et pluridisciplinaire de Nantes.

On observe que l'automédication est largement pratiquée quelques soit le lieu de l'achat. Environ 73% des achats en pharmacie de ville renvoient à l'automédication ; 65% des achats dans les pharmacies en milieu rural sont également des pratiques d'automédication ; et enfin 70% des achats du secteur informel ne passent pas par une prescription médicale (Baxerres, 2016). Nous pouvons conclure sans risque de nous tromper que l'automédication est une pratique largement observée en consommation des médicaments ; que cet achat soit réalisé en milieu formel ou informel. A présent la question la plus pertinente semble être la raison principale de cette ruée vers une pratique apparemment irrationnelle.

Pour répondre à cette interrogation, nous étudierons les dépenses liées à chaque stade du traitement d'une maladie. De la consultation à l'achat des médicaments. Cette analyse nous permettra d'apprécier les coûts liés à chaque étape du processus.

Illustration : Supposons un malade atteint de fièvre qui se rend dans un centre de santé ou un hôpital de district. Ce dernier dans la plupart de cas, son processus de recherche de santé comprend 5 étapes chacune ayant un coût : à savoir le déplacement, la consultation, l'examen, hospitalisation et achat des médicaments.

Il faut également noter que les itinéraires thérapeutiques possibles sont nombreux : le patient peut consulter (un tradipraticien3, un médecin) ou avoir recours à l'automédication, le patient peut acheter son médicament dans une structure autorisée (hôpital, dispensaire, ...) ou non. Une étude réalisée au Cameroun en 2002 permet d'apporter des chiffres comparatifs qui sont présentés dans le tableau suivant.

3 Pratiquant de la médecine traditionnelle Africaine

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Tableau 4 : Comparaison des coûts (en francs CFA), triés par catégories, rattachés à chacun des itinéraires thérapeutiques d'après une étude réalisée au Cameroun en 2002)

Types de
recours

Catégories de coûts

Coûts
totaux

 

Déplacement

Hospitali-
sation

Examen

Médicame
nts

 

896

464

2154

3162

9427

17060

Consultation traditionnelle

1675

369

313

469

3386

6637

Automédication moderne

-

-

-

-

1079

1079

Automédication traditionnelle

-

-

-

-

443

443

Cout moyen en FCFA

312

147

673

961

3411

5326

 

Source : Hamel (2006, p. 23) ; vente illicite des médicaments de la rue dans les pays en développement. Thèse doctorat en pharmacie.

Les chiffres présentés sont à titre purement indicatif. Ils permettent d'apporter un ordre d'idée et des points de comparaison. Le tableau met en évidence les coûts liés aux différents itinéraires thérapeutiques en cas de maladie (de la consultation jusqu'à l'achat des médicaments).

Une observation plus poussée mérite être faite sur les coûts épargnés lors du recours au marché illicite des médicaments. Il apparait que le coût total du traitement est énorme et cela fait que les ménages à faibles revenu ont recourt au circuit informel.

Le coût d'opportunité défini ici est direct. Il découle du temps perdu par le malade lorsqu'il se rend à l'hôpital. Ou lorsqu'il ira faire le tour des pharmacies à la recherche des médicaments. Parfois il faut faire le tour de la ville plusieurs jour s'il y'a rupture de stock. Dans ce contexte se procurer des médicaments sur le marché informel ne présentera pas d'inconvénients et reste le moyen répondant efficacement au besoin du client.

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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King