A- L'encadrement textuel
Le Cameroun, comme d'autres pays africains, fait du droit de
l'environnement un outil essentiel de la protection de la nature et de ses
ressources. C'est pourquoi un dispositif institutionnel destiné à
faciliter la mise en oeuvre de ce droit84 est mis en place. Outre
ces textes d'origines nationales, il convient de mentionner un grand nombre de
conventions internationales à vocation universelle ou régionale
consacrées à la gestion du milieu naturel auxquels fait partie le
Cameroun et qui ont acquis force juridique au plan national du fait de leur
ratification par les autorités nationales85. L'on
présentera donc les dispositifs nationaux (1) et les
instruments juridiques internationaux de l'environnement
(2).
1- Le dispositif national de l'environnement
Bien que relativement jeune, le droit camerounais de
l'environnement connait depuis la colonisation, un développement
significatif avec la participation du Cameroun à la
Conférence des Nations Unies sur l'Environnement et le
Développement (CNUED) à Rio en
83 Voir les développements de KAMTO
(Maurice) sur les sources du droit de l'environnement en Afrique. In,
Droit de l'environnement en Afrique, Sénégal,
décembre 2004, p. 66.
84 Lire à ce sujet les développements
de NDOUBE BILLE (Stéphane) « Les moyens de mise en oeuvre du
droit de l'environnement », in Evolution des institutions de mise
en oeuvre du droit de l'environnement et du développement RJE 1993,
pp. 5-10.
85 Il faut dire ici que le Cameroun a
ratifié la plupart des conventions internationales (universelles et
régionales) sur l'environnement. Ce qui l'engage à donner une
application effective au plan national desdites conventions. A cet
égard, le droit camerounais de l'environnement constitue une dynamique
marquée par la vitalité et la diversité de règles
qui le composent.
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: cas des droits des peuples autochtones de la
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1992. Ce développement s'est traduit en effet par la
multiplication d'instruments législatifs et règlementaires
relatifs à la conservation du milieu. Toutefois, tout ce dispositif
normatif environnemental trouve son fondement dans la Constitution du 18
janvier 1996 portant modification de la Constitution du 02 juin 1972 et
modifiée en 2008 qui jette dès lors les bases
juridiques86de protection de l'environnement.
Bon nombre de Constitutions africaines ont adopté
à peu près les mêmes formulations unifiées par
référence à l'article 24 de la Déclaration des
Droits de l'Homme et des Peuples87. Cette
référence à l'environnement est formulée dans la
Constitution du Cameroun, dans son préambule en ces termes :
Le peuple Camerounais [est] résolu
à exploiter ses richesses naturelles afin d'assurer le bien-être
de tous. [...] Toute personne a droit à un environnement sain. La
protection de l'environnement est un devoir pour tous. L'Etat veille à
la défense et la promotion de l'environnement88. Cette
formulation n'est pas sans effet car elle garantit un droit de l'environnement
mais aussi des obligations à tous les acteurs de ses
démembrements de « défendre et de conserver le milieu
naturel au profit des générations présentes et futures
»89.
C'est de façon inconsciente et par des voies
détournées que le droit camerounais postcolonial s'est
intéressé à la protection de l'environnement. Fort est de
constater que le droit camerounais de l'environnement connait une
évolution significative depuis la
86 La Constitution est dans tout Etat, selon
l'expression du Doyen Vedel «la base de tout système juridique
».
87 Au sens de cet article, «tous les
peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global propice
à leur développement».
88 La lettre de l'article 65 du texte
constitutionnel de 1996 intègre expressément le préambule
au sein de la Constitution. Cette déclaration explicite implique de
facto que l'ensemble des dispositions contenues dans le préambule
font partie intégrante de la loi fondamentale. Toutes ces dispositions
se trouvent ce faisant alignées sur l'ensemble du régime des
autres dispositions constitutionnelles (V. MINKOA SHE (Adolphe), Droits de
l'homme et droit pénal au Cameroun, Paris, Economia, Coll. «
La Vie du Droit en Afrique », 1999 p. 26). Ainsi, l'affirmation de la
valeur juridique du préambule de la constitution n'a pas
épuisé la problématique de la force contraignante des
normes qui y sont édictées. Toutefois, il convient, du reste dans
le texte, d'identifier les normes dont la violation peut donner matière
à un contrôle de constitutionnalité et dont la violation
peut être sanctionnée par le juge et celles qui ne
répondent pas aux critères d'identification des normes
juridiques. En effet, la force juridique de chacune des normes inscrites dans
le préambule est détachable de la valeur juridique globale du
texte du préambule. Bien plus, le droit requérant
précision, certitude et étant exclusif des principes faiblement
déterminés, il convient de séparer dans le
préambule les normes certaines, des normes incertaines (V. MOUANGUE
KOBILA (James), « Le préambule du texte constitutionnel du 18
janvier 1996 : De l'enseigne décorative à l'étalage
utilitaire », Lex Lata, n° 23-24, févr. Mars
1996, p. 36.
89Paulo affonse leme MACHADO, «
L'environnement dans la Constitution brésilienne », Les Cahiers
du Conseil Constitutionnel n° 15, 2003.
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participation du Cameroun à la Conférence de
Rio de 199290. Ce qui fait du Cameroun depuis plusieurs
années un vaste chantier normatif en la
matière91.
Bien plus, il n'existe aucune réglementation
récente d'actualité en matière de ressources biologiques
et de protection des écosystèmes marins et côtiers, de
même en ce qui concerne le patrimoine culturel et l'aménagement du
territoire. Quid d'instrument juridique international.
2- Les instruments juridiques internationaux de
l'environnement approuvé par le Cameroun
La spécificité du droit de
l"environnement92 a conduit les autorités publiques
camerounaises à adopter des mécanismes spécifiques pour la
sauvegarde de leur environnement naturel. En plaçant la
règlementation internationale dans le registre des mécanismes
développés par le droit international93, on ne peut en
exclure les différentes Conventions internationales relatives à
l'environnement dont fait partie le Cameroun.
Le Cameroun a adhéré à de nombreuses
conventions internationales, qui participent au renforcement de la
coopération internationale, régionale et sous régionale.
Sans prétendre à une énumération exhaustive de
toutes les conventions auxquelles fait partie le Cameroun, nous allons
énumérer quelques-unes à vocation universelle, d'une part
et régionale d'autre part.
Le Cameroun a ratifié certaines conventions
internationales à vocation universelle de protection de l'environnement
à l'instar de :
- Le Commerce International des espèces de faune et
flore sauvages menaces d'extinction ratifiée le 07 septembre 1981
;
90 KAMTO (Maurice), op.cit., note 27. pp.
66-67. Pour l'auteur, certes depuis Stockholm et quelque fois avant, [le
Cameroun] a édicté des normes relatives à la protection
des espaces et des espèces fauniques. Mais c'est seulement, depuis le
début des années 1990 qu'apparait dans le [droit camerounais] des
normes spécifiques à la protection de l'environnement. Plus
couramment, la question était abordée indirectement à
travers certaines branches du droit tel le droit des espaces, le droit de
l'urbanisme et de la construction, le droit minier, le droit forestier.
91 KAMTO (Maurice), op. Cit, note 27, p.
67.
92 Le droit de l'environnement a pour objet
l'étude de l'ensemble de normes juridiques relatives à la
protection de l'environnement sous ses diverses formes terrestres, naturelles,
culturelles, spatiales etc. C'est un droit transversal, technique et complexe.
Ses champs tendent à se diversifier au fur et à mesure des
avancées scientifiques et techniques. A juste titre, Michel Prieur dit :
« Chacun sait que l'environnement n'a pas de frontière ; c'est
pour cette raison que les Etats ont été obligés
d'élaborer de nouvelles règles de droit international pour lutter
contre les pollutions, pour protéger la faune et la flore
».
93 Ces mécanismes ne sont pas propres au
droit international. Pour la plupart, ils ont émergé dans les
droits nationaux. Voir KISS (Alexandre), BEURIER (Jean-Pierre), Droit
international de l'environnement, revue juridique de l'environnement,
2ème édition, 2001, p. 177.
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- La Convention cadre sur les Changements Climatiques
ratifiée le 14 juin 1982 ;
- La Convention sur la lutte contre la Désertification
ratifiée le 29 mai 1997 ;
- La Convention sur la Diversité Biologique
ratifiée le 19 octobre 1997 ;
- La Convention de Bâle sur le Contrôle des
Mouvements Transfrontières - des Déchets
dangereux et leur élimination ratifiée le 11
février 2001 ;
- Le Protocole de Kyoto ratifié le 23 juillet 1989
;
- La convention de Paris sur la désertification en
Afrique du 17 juin 1994.
Le Cameroun a ratifié les instruments à vocation
régionale qui se déploient tant au plan continental qu'au niveau
sous régional tels que :
- La Convention Africaine d'Alger sur la conservation de
la nature et des ressources naturelles du 15/09/1968, révisée le
11 juillet 2003 à Maputo en Nairobi, et devenue Convention de Maputo du
23 septembre 2003 ;
- La Convention de Nairobi sur les changements climatiques
du 14/06/1992 ;
- Le Traité relatif à la conservation et la
gestion durable des écosystèmes forestiers d'Afrique Centrale
;
- L'Accord de Libreville(Gabon) de coopération et
de concertation entre les Etats de l'Afrique Centrale sur la conservation de la
faune sauvage du 16/04/1983 ;
- L'Accord d'Enugu (Nigéria) sur le
règlement conjoint relatif à la faune et à la flore dans
le bassin conventionnel du lac Tchad du 03/12/1977.
Fondamentalement, le fait pour le Cameroun d'intégrer
dans son cadre normatif interne les mécanismes de protection de
l'environnement traduit l'attachement des pouvoirs publics aux
mécanismes juridiques internationaux. En clair, les textes nationaux
sont renforcés et complétés par des conventions
internationales en matière d'environnement auxquels fait partie le
Cameroun. L'ensemble de ces textes consacrent le corpus juridique
environnemental qui concourt à donner un sens au droit de
l'environnement camerounais. C'est ce qui traduit la volonté du
législateur camerounais à vouloir résoudre les
problèmes que pose notre environnement.
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