II- LA NECESSITE D'UNE REORGANISATION JURIDIQUE DES
DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES
Dans l'objectif de reconnaissance des peuples autochtones en
Afrique et particulièrement au Cameroun, il a fallu intégrer le
concept de peuples autochtones selon le contexte propre de chaque pays selon le
droit international. Pour le cas du Cameroun, la
254 Conseil d'administration, 289e session, mars 2004,
Réclamation en vertu de l'article 24 de la Constitution de
l'OIT, Mexique, GB.289/17/3, paragraphe 134.
255 Cas décrit dans: La consultation et la
participation des populations autochtones «pygmées» à
l'identification et la protection de leurs usages des ressources
forestières et fauniques dans l'aménagement forestier:
expérience de l'UFA Kabo de la CIB Nord du Congo, OIT 2008.
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Droits de l'homme et conservation de l'environnement
: cas des droits des peuples autochtones de la
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définition qui a été donnée pose
encore problème pour les pygmées en général. Une
tentative de réforme de la définition peut donc être
envisagée (A). De même faudrait-il
réformer des lois (B) compte tenu de l'absence de
textes spécifiques en la matière.
A- La réforme du concept de « peuples
autochtones » au Cameroun
La nécessité de redéfinir la notion de
peuple autochtone se pose pour permettre de clarifier les confusions que l'on
se fait sur ces peuples autochtones. De ce fait nous allons tenter de tabler
sur le défi de reconnaissance des droits des peuples autochtones
(1) et une analyse comparative de clarification de la
définition de population autochtone (2).
1- Les défis de reconnaissance des droits des
peuples autochtones
Il existe un rapport entre la population autochtone et le
territoire où la culture autochtone se développe depuis des temps
immémoriaux. Les Nations Unies ont développé le concept de
peuple autochtone en le définissant comme celui qui est titulaire de
droits. Il possède aussi le droit à l'autodétermination,
à la différence des populations qui ont simplement la
faculté d'être consultées (comme les minorités
nationales)256. L'on peut trouver la définition des concepts
dans le Dictionnaire de droit international public dirigé par
le juriste Jean Salmon257. Il fait allusion ici aux accords
internationaux adoptés par l'Assemblée Générale et
aux résolutions produites par différents organismes de Nations
Unies. Il faut dire qu'il y'a une grande différence conceptuelle entre
les termes « autochtone» et « minorité». Cependant
le dictionnaire Le Robert quotidien258 voulant expliquer
ces deux notions parle de :
« Qui est né sur le territoire issu du
sol même où il habite, qui est censé n'être pas venu
par immigration ». Il est synonyme d'aborigène, indigène et
originaire. Indigène est défini comme celui : « qui
appartient à un groupe ethnique existant dans un pays avant sa
colonisation ». Par ailleurs une minorité s'entend d'un : «
Groupe englobé dans une collectivité plus importante et qui
possède des droits protégés par l'Etat
».
Ceci revient à dire en effet, qu'un autochtone peut
appartenir à une minorité, mais une minorité n'est pas
nécessairement un peuple autochtone. Voilà d'où
réside la distinction claire
256 YUPANQUI HUERTO (Pierina), Les enjeux contemporains de
la protection de connaissances traditionnelles environnementales: quel
rôle pour les états partis de la convention sur la
diversité biologique ?, Université du QUÉBEC,
MONTRÉAL, mémoire du Département de sciences juridiques,
septembre 2009, p161.
257 SALMON (Jean), dir. Dictionnaire de droit
international public, 1ére éd., Paris, Universités
Francophones, 200l, s. V. «droit intemational », « droits de
l'homme» [Salmon], p. 1200.
258 Le Robert quotidien, 1996, s. v. « autochtone »,
« minorité», p. 2181.
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: cas des droits des peuples autochtones de la
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que l'on peut avoir de la notion de peuple autochtone en
Afrique. On peut aller plus loin en faisant une analyse comparative de la
définition faite de population autochtone.
2- Analyse comparée d'une possibilité de
clarification de définition de « population autochtone
»
En Amérique du Nord, en Amérique Centrale et
Méridionale, les Indiens se définissent comme populations
indigènes ou comme populations autochtones259. A l'inverse,
clarifier et appliquer la notion de population autochtone ou de peuple
indigène n'est pas aussi évident dans le contexte africain. En
effet, la notion d'autochtonie est prise ici comme un vécu, un statut
social et un statut légal sur la base du passé historique.
Cependant, toutes les populations noires présentes aujourd'hui en
Afrique sub-saharienne ont des éléments de définition dans
chaque pays africain qui abrite plusieurs ethnies.
De manière fondamentale, toutes ces ethnies sont des
populations indigènes et sont autochtones en Afrique. C'est cela qui
induit des problèmes lorsqu'on soulève la question de savoir qui
est autochtone et qui ne l'est pas. Cependant, certains groupes ethniques
nationaux sont structurellement dans une position dominée260,
par rapport à d'autres groupes ethniques et à l'Etat central. De
tels groupes finissent par être des populations marginalisées.
C'est sur cette situation diversifiée que devrait s'appuyer la forme
moderne du concept de population indigène ou autochtone. En dépit
de la complexité qui entoure la notion de population autochtone, des
efforts définitionnels avaient été déployés
sous la colonisation, qui avait plus de sens à ce moment-là. Mais
avec les indépendances, la notion de population autochtone a
revêtu une autre signification. De plus, le fait pour la constitution
camerounaise de ne pas faire cette clarification crée une discrimination
sociale et raciale, voire une marginalisation.
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