A- Déni du droit à la représentation
politique et au travail
Le peuple autochtone de la forêt comme tous les autres
citoyens camerounais, devrait travailler pour défendre leur droit et
l'amélioration de leur condition de vie. De ce fait, ils devraient se
manifester dans la vie politique (1) et avoir des
activités génératrices de revenus (2).
1- Déni du droit à la représentation
politique
L'émancipation et la reconnaissance politique sont
importantes pour s'assurer que les peuples autochtones participent à la
vie politique et sont représentés dans tous les processus
politiques. Les peuples autochtones peuvent être
représentés au parlement et dans les autres structures politiques
de leurs régions respectives. Mais dans beaucoup de cas, leur
226 Articles 27 à 32 du Décret
n°95/531/PM du 23 août 1995 fixant les modalités
d'application du régime des forêts.
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Droits de l'homme et conservation de l'environnement
: cas des droits des peuples autochtones de la
forêt
représentation est soit réduite au minimum, soit
inefficace. Ce qui fait que les questions qui les concernent ne sont pas
traitées de façon adéquate. Beaucoup de facteurs
structurels sont à l'origine de cette situation, notamment le manque de
professionnels instruits227. Cela constitue une violation indirecte
de l'article 13 (1) de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples228 qui reconnaît à tout citoyen le droit
de participation à la direction des affaires publiques de son pays.
De par l'histoire, les peuples autochtones ont
été utilisés par les autres communautés plus
puissantes de la société pour porter haut leurs
préoccupations. On a par exemple, les chefs Bagyeli qui n'ont pas les
mêmes pouvoirs que les chefs Bantu. Ils participent rarement aux
réunions du village et ils ne jouent aucun rôle dans les processus
consultatifs et de prise de décisions. Leur rôle majeur est de
faire des rapports à leurs collègues Bantu sur la situation qui
prévaut dans leurs campements. Par contre, dans le village de Mayos, le
chef traditionnel est celui de toute la communauté. Mais de
manière générale, les Pygmées ont rarement le droit
de prendre la parole aux réunions des villages et ne sont pas inclus
dans les organisations bantous locales. C'est pourquoi ils seront difficilement
représentés si ce n'est par des personnes qui ne sont
véritablement pas pygmées. Les Bantous du village
représentent les Pygmées et leurs intérêts, mais
cette représentation pose des problèmes. Par exemple, ce sont les
Bantous, et non les Pygmées, qui négocient avec les
sociétés forestières et avec les gens qui cherchent
à exploiter les ressources minières ou qui ont des projets. Alors
que ces derniers ne savent pas réellement ce que c'est la forêt et
ce qui s'y passe. Ce problème est général aux
communautés autochtones marginalisées et cela se produit
également en ce qui concerne leur droit au travail.
2- Le droit au travail des pygmées
Après des entretiens avec la communauté Baka de
Mayos, il ressort que celle-ci connait de sérieuses difficultés
à trouver des emplois stables, dignes et rentables dans la
société. En effet, la discrimination en est l'une des causes,
à tel point que ceux même qui ont réussi à trouver
de bons emplois dissimulent leur identité de pygmée Baka à
la société. Leurs frères restés au village ne
peuvent donc pas bénéficier de leur aide. Cela peut s'illustrer
par deux
227 Rapport du groupe de travail d'experts de la commission
africaine des droits de l'homme et des peuples sur les
populations/communautés autochtones Présenté en vertu de
la « Résolution sur les droits des
populations/communautés autochtones en Afrique »
Adoptée par La Commission Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples lors de sa 28ème session ordinaire en 2005 , ACHPR et IWGIA,
Copenhague, Danemark.
228 Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples de
juin 1981.
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: cas des droits des peuples autochtones de la
forêt
Baka de Mayos qui après avoir été
vacataire dans la petite école de Mayos, après l'absence de
salaire, ont été pris par un particulier et une ONG occidentale,
et ont quitté le village.
Les pygmées en général sont
qualifiés par la société comme des « sous-hommes
», des indigènes dépourvus de toute civilité et donc
ne méritent pas d'accéder à un quelconque statut dans la
société. C'est pour cette raison que, dans l'arrondissement
d'Abong Mbang où l'on retrouve de nombreux pygmées Baka, et parmi
lesquels ceux scolarisés, il est presque rare de trouver un qui soit
employé à la mairie, ou dans une autre institution publique. Il
en va de même des travaux les plus simples. Cela démontre à
suffisance le manque de représentativité des pygmées dans
la ville. Plus encore, lorsque les Baka produisent leurs efforts pour gagner
honnêtement leur vie, leurs initiatives sont banalisées par les
bantous. Ils arrivent à qualifier les pygmées de «
voleurs » parce qu'ils passent leur journée à ne rien
faire.
De par leur naïveté, les Baka se font la plupart
de temps exploiter par les employeurs. Ils sont facilement trompés avec
des sachets d'alcool et ne les paient pas au rendement du travail
effectué. En outre, c'est au cours des exploitations forestières
que les Baka sont employés en tant que guide ou en tant que manoeuvre
pour les jeunes qui doivent transporter le bois de la forêt. Avec des
salaires peu consistants, les exploitants forestiers, avant le début de
tout projet, offrent aux Baka des présents qui sont le plus souvent
constitués de nourriture et d'alcool. Tel est le cas à Mayos,
où ils se sont contentés de sac de riz, d'alcool, et quelque fois
de moto pour rendre tout type de service leur permettant d'être ouverts
au monde extérieur.
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