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L'union européenne et le kosovo


par Eloïse GUILLERON
Université Rennes 1 - Ecole Normale Supérieure de Rennes - Master 2 Droit de l'Union européenne, Droit de l'Organisation Mondiale du Commerce 2016
  

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Section 1 : L'UE, actrice de la normalisation des relations Serbie-Kosovo

La question de la souveraineté serbe sur le Kosovo est un enjeu très sensible. Considéré comme « le coeur historique de la nation serbe », l'ancienne province maintenant indépendante est source de crispations et de tensions au sein de la population serbe, qui a vécu la DUT comme une dépossession89. Cette sensibilité explique que des crises diplomatiques interviennent régulièrement entre les deux Etats, chaque incartade d'un côté ou de l'autre de la frontière étant automatiquement perçue comme une agression ou une provocation. Dans ce climat tendu, l'Union s'est rapidement imposée comme l'instigatrice et médiatrice d'un dialogue entre Belgrade et Pristina (T). Pour que ce dialogue soit réellement fonctionnel, l'UE a décidé d'en faire une part intégrante de sa conditionnalité envers les deux Etats dans le cadre du PSA. Ainsi une conditionnalité inédite « Serbie-Kosovo » a été introduite dans l'ASA UE-Kosovo (TT)

I) L'UE instigatrice et actrice du dialogue Belgrade-Pristina

La perspective européenne constitue le moteur et incitatif le plus puissant à la coopération régionale. En effet il faut rappeler que l'Union européenne s'est construite et continue à se construire grâce à la création de liens étroits entre les États membres dans des domaines très variés. La réconciliation des voisins par l'intégration est considérée comme faisant part de l'ADN

89 Au-delà de nos lectures, nous avons eu confirmation de cet attachement viscéral lors de conversations avec de nombreux serbes et bosno-serbes que nous avons eu l'occasion de rencontrer.

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européen, et donc comme un exercice qui devrait également porter ses fruits dans les Balkans occidentaux. Convaincue du rôle fondamental de la coopération et du dialogue pour endiguer le cycle de la violence, l'UE fait de la coopération régionale un élément déterminant dans le processus de stabilisation et d'association.

La coopération et la réconciliation ayant pour l'Union européenne cette importance toute particulière, l'Union s'est rapidement engagée en faveur d'un dialogue entre Belgrade et Pristina. On peut rattacher cette volonté à la philosophie générale de l'action extérieure de l'Union, essentiellement préventive. Consciente que les tensions toujours très présentes entre la Serbie et le Kosovo sont problématiques, l'UE s'emploie à désamorcer celles-ci, en encourageant à la tenue d'un dialogue constructif (A). Cette stratégie et la forte conditionnalité autour du problème kosovar pourrait d'ailleurs être en train de porter leurs fruits (B).

A) L'encouragement à la tenue d'un dialogue constructif

L'UE a un intérêt fondamental à la stabilisation des Balkans occidentaux qui sont devenus une très proche périphérie depuis l'adhésion de la Croatie. Dans cette optique, il faut rappeler que le conflit Belgrade-Pristina constitue une poudrière potentielle, si l'Union européenne n'agit pas comme médiatrice pour empêcher la situation de s'envenimer. Il faut en effet garder à l'esprit que le point de départ du conflit en ex-Yougoslavie fût la cristallisation de tensions ethniques entre la Serbie et le Kosovo. Face à ce pôle potentiellement déstabilisateur, l'Union européenne s'est posée en médiatrice, se servant de sa capacité d'influence pour tenter de trouver un règlement au conflit. On notera ici que cette posture de supervision n'est pas sans équivalent en droit international qui prévoit le recours à l'arbitrage de personnalités emblématiques pour régler des différends internationaux. Dans ce cadre, et en l'espèce, l'Union européenne dispose d'une crédibilité en tant qu'instigatrice et actrice d'un dialogue réconciliateur en ce qu'elle est elle-même composée de pays ayant choisi la voie de la réconciliation.

Pourquoi une normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo est-elle nécessaire ? Après la déclaration unilatérale d'indépendance du Kosovo, des tensions ethniques ont continué de tendre les relations déjà compliquée entre la Serbie le Kosovo. Les populations ont connu de nombreux heurts et la Serbie a encouragé la création de structures parallèles au nord Kosovo ne respectant pas la souveraineté du nouvel État. L'Union européenne s'est alors engagée à favoriser le dialogue entre les deux États, en faisant notamment de ce dialogue un élément de conditionnalité incitative pour les deux pays. La Serbie s'est ainsi vu reconnaitre le statut d'État

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candidat à l'adhésion après avoir signé l'accord de février 2012 relatif à la représentation du Kosovo dans les forums régionaux.

Le dialogue entre la Serbie et le Kosovo a débuté une première fois en octobre 2003 sous le nom de « dialogue direct » grâce à l'impulsion de l'Union européenne. Celui-ci constituait en la réunion de groupes de travail chargés des questions de l'Energie et des personnes disparues à partir de mars 2004. Néanmoins, cette première tentative de dialogue a pris fin du fait des violentes émeutes à Mitrovica à la mi-mars90.

Le dialogue Belgrade-Pristina a repris le 8 mars 2011 sous égide de l'Union européenne, à plus haut niveau, et donc symboliquement, à Bruxelles. Ce dialogue a abouti à la conclusion d'accords techniques, le 2 juillet 2011 (liberté de circulation, reconnaissance mutuelle des diplômes, état civil), le 2 septembre 2011 (cadastre et tampons douaniers), le 2 décembre 2011 (gestion intégrée des frontières) et enfin l'accord de février 2012 sur la représentation du Kosovo dans les forums régionaux. A l'issu de ces dialogues, les deux pays ont repris leurs échanges commerciaux, la Serbie a vu se consolider son statut de pays candidat, et le Kosovo a pu bénéficier d'une étude de faisabilité.

A partir de 2012, les premiers ministres serbes et kosovars se sont réunis à 9 reprises, à l'initiative de Catherine Ashton, alors représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères. Ces rencontres à visée politique et instiguée par l'Union européenne ont permis un certain nombre d'avancés sur des points de tensions entre les deux États (la mise en place d'une unité spéciale de police spécialement consacrée à la protection du patrimoine orthodoxe au Kosovo ou encore la mise en place d'un fond de développement dédié au Nord Kosovo). A la suite de ces nombreuses rencontres au niveau gouvernemental, les présidents serbes et kosovars se sont rencontrés le 6 février 2013. De cette rencontre est né l'accord historique du 19 avril 2013 sur la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo, dit « Accord de Bruxelles », signé par les premiers ministres serbes et kosovars. Selon une interview réalisée par le site « Toute l'Europe » du ministre serbe de l'intégration européenne Branko Ruzic le 17 novembre 2013 « l'accord de Bruxelles a été l'élément déclencheur dans le processus d'ouverture des négociations de l'adhésion ». De plus, l'accord de Bruxelles a été qualifié par Branko Ruzic de « tango à trois entre Belgrade, Pristina et l'UE ».

L'accord de Bruxelles porte pour une grande partie sur la problématique de la zone nord du Kosovo, peuplée majoritairement par une population d'origine serbe. En échange de la garantie

90 Communication « Un avenir européen pour le Kosovo », COM(2005) 156 final, 20/04/2005

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de sécurité et d'autonomie offertes à une Communauté des communes serbes du Kosovo, en matière socio-économique mais également de police, de justice et d'une forme de démilitarisation temporaire assurée par l'OTAN, la Serbie s'engage au démantèlement des structures parallèles qu'elle avait jusqu'à lors maintenue, dans les domaines de la police, du renseignement et de la Justice.

En février 2015, à la suite de l'accord de Bruxelles un accord sur la Justice est conclu. En décembre 2016, le Kosovo s'est vu octroyer son propre indicatif téléphonique (+383). Il faut d'ailleurs noter que si la Serbie n'a pas reconnu l'effet impératif de l'accord de Bruxelles, elle applique cet accord, en ce que sa mise en oeuvre est un pré-requis pour le bon déroulement des discussions relatives à l'adhésion.

Le dialogue entre la Serbie et le Kosovo est en pause depuis février 2015. Néanmoins au vu de l'importance de ce dialogue dans la conditionnalité de l'Union européenne envers ces deux Etats dans le cadre du processus de stabilisation et d'association, le Président Hashim Thaçi a dernièrement salué l'élection d'Aleksandar Vucic. Les deux hommes auraient « convenu de poursuivre le dialogue » et de « travailler ensemble sur la recherche de solutions a toutes les questions communes ». De plus Ana Brnabic, Première ministre serbe dit vouloir poursuivre « une politique de paix et de coopération avec le Kosovo afin d'atteindre un compromis et une réconciliation historique avec le peuple albanais »91 (B).

B) Une envisageable reconnaissance de facto du Kosovo par la Serbie

Depuis quelques semaines les relations Serbie-Kosovo connaissent un tournant singulier. Depuis sa réélection à la tête de la Serbie, Aleksandar Vucic a placé l'adhésion à l'Union européenne comme sa première priorité en ne cessant de prendre des mesures audacieuses. Par le choix de sa Première Ministre on l'a déjà vu, mais également vis-à-vis de la question du Kosovo qui pourrait connaître une résolution rapide.

Profitant en effet du calme estival, Vucic multiplie les déclarations, d'abords ambigües, puis désormais claires, en faveur d'une reconnaissance de facto de l'État kosovar. Au mois de juin 2017, peu de temps après sa réélection le Président serbe a fait une première mention de « l'opportunité d'ouvrir un dialogue sur les futures relations entre la Serbie et le Kosovo »92. Cette déclaration d'abord assez peu relayée a néanmoins ouvert largement la boite de Pandore et des

91 Source diplomatique. AFP Europe, 28/06/2017

92 « Is the power of the Kosovo myth fading ? », Bosnia Daily, june 30, 2017

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figures d'audience publique se sont emparées du sujet, se prononçant en faveur de l'indépendance kosovar. C'est par exemple le cas de Bosko Jaksic, journaliste de renommée internationale, qui a publié dans le quotidien Polika une tribune intitulée « Le temps du courage » où la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo est présentée comme le seul moyen d'éviter une nouvelle guerre balkanique dans les dix ou vingt prochaines années93. Slobodan Samarzic, intellectuel souverainiste, professeur de sciences politiques à l'Université de Belgrade et ancien Ministre serbe pour le Kosovo a quant à lui déclaré que le dialogue Belgrade-Pristina initié par l'Union européenne ne pouvait pas aboutir à « une solution favorable pour les serbes ». Enfin, Vuk Draskovic, dirigeant du « Mouvement pour le Renouveau de la Serbie » et ancien Ministre des Affaires étrangères serbe a lui écrit dans un éditorial pour le quotidien Blic que « la souveraineté serbe sur le Kosovo n'existe que dans le préambule de la Constitution serbe. En s'asservissant à cette norme hors de toute réalité, l'État subit d'énormes pertes, sur les plans politique, de développement, démocratique, démographique et monétaire ».

C'est en effet désormais au sein de la Constitution serbe que réside la clé du futur du Kosovo. Dans le préambule de celle-ci est affirmé la souveraineté de la Serbie sur la province du Kosovo, coeur historique de la nation serbe. Par conséquent, afin de pouvoir « laisser partir » le Kosovo et reconnaitre de facto l'indépendance de son ancienne province, la Serbie doit réformer sa Constitution, ce qui pendant très longtemps a été considéré comme un tabou absolu.

C'est pourtant l'Union européenne qui pourrait donner à Aleksander Vucic l'opportunité de procéder à cette modification cruciale. Continuant de camper sur une position un peu ambigüe, que les observateurs internationaux comparent à celle du Général De Gaulle à la fin de la Guerre d'Algérie94, il ne cesse d'appeler à un « réalisme politique » et enjoint à une réforme constitutionnelle rapide dans le cadre de la réforme de la Justice. Cette réforme, nécessaire pour que la Serbie se conforme à l'acquis de l'Union européenne, pourrait bien être l'occasion pour ouvrir un processus de révision constitutionnelle, qui ne pourrait jamais se faire sur la base de la normalisation des relations Serbie-Kosovo95.

Le dialogue entre Belgrade et Pristina est très présent dans le paysage politique serbe actuel, du fait qu'il conditionne l'avancée de la Serbie dans son processus d'adhésion. Le Kosovo, beaucoup

93 Source diplomatique.

94 TANNER Marcus « Might Vucic become Serbia's De Gaulle on Kosovo ? », Balkan Insight, 01/08/2017.

95 RUDIC Filip, « Serbia's Vucic Sparks Intrigue over Constitution changes », Balkan Insight, 11/08/2017.

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moins avancé sur ce chemin, est lui aussi soumis à cette conditionnalité, qui s'insère au sein d'un clause inédite dans l'ASA UE-Kosovo (II).

II) L'insertion d'une conditionnalité « Serbie-Kosovo » inédite dans l'ASA UE-

Kosovo

Si l'ASA UE-Kosovo innove de par sa non mixité, on a démontré que celle-ci n'avait qu'une faible incidence sur le contenu de l'accord. Néanmoins, il innove sur un autre aspect en introduisant une nouvelle conditionnalité inédite (B) liée à la normalisation des relations avec la Serbie (A).

A) La création d'une clause essentielle liée à la normalisation des relations Serbie Kosovo

Les clauses dites « clauses essentielles » sont apparues en 1992 dans les accords externes de l'Union européenne. Ces clauses ont tout d'abord eu trait aux respects des droits de l'homme et des principes démocratiques. Ces clauses ont par la suite évolué, pour coller aux défis de la relation entre l'UE et son partenaire. En effet, les clauses élements essentiels, insérées au sein du Titre Premier des accords intitulé « Principes généraux » permettent à l'UE de développer les points politiques dont le respect lui semble indispensable pour maintenir sa bonne relation avec le partenaire. Un lien est établi au sein des clauses éléments essentiels entre la ou les valeurs que l'Union souhaite défendre et une possible dégradation des relations si le partenaire ne respecte pas la clause. Dans le cas où des contre-mesures seraient prises par l'UE, en cas de non-respect des dispositions d'une clause dite élément essentiel, le partenaire ne pourra obtenir aucune réparation de la perte qu'il subit, quand bien même la contre mesure irait jusqu'à la suspension de l'accord96. Dans ce cadre, les clauses « élément essentiel » constituent une facette importante du pouvoir normatif de l'UE dans ses relations avec ses partenaires internationaux.

96 Cette clause, appelée « clause bulgare » laisse l'Union européenne libre de convenir de « toute mesure appropriée » visant à sanctionner le non-respect de la clause élément essentiel, pouvant aller jusqu'à la suspension de l'accord.

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L'ASA UE-Kosovo introduit deux nouvelles clauses essentielles ventilées au sein de deux articles. L'article 597 (le principe) et l'article 1398 (la mise en oeuvre) de l'ASA posent comme éléments essentiels de l'accord, la pleine coopération du Kosovo avec la mission EULEX mais surtout, la normalisation des relations Kosovo-Serbie.

L'article 5 de l'ASA UE-Kosovo pose pour le Kosovo une obligation de moyen et de résultats, via l'utilisation de la formule « Le Kosovo s'engage à oeuvrer sans relâche à l'amélioration visible et durable de ses relations avec la Serbie ». Cette formule est reprise à l'identique dans l'article 13 de l'ASA, ce qui en renforce la portée. L'article 5 de l'ASA pose d'ailleurs que ce processus de rapprochement est un moyen, dans le sens d'un média obligatoire, pour la Serbie et le Kosovo de poursuivre leur marche respective vers l'UE. A l'article 13 il est d'ailleurs précisé que cette progression se fera « tout en empêchant que l'un d'eux puisse bloquer l'autre dans ses efforts ». La conséquence de cette affirmation est qu'il est officiellement posé que la Serbie ne pourra pas adhérer à l'Union européenne tant que les relations avec le Kosovo ne seront pas normalisées. Le Kosovo de son coté, se verra pénalisé dans ses relations avec l'UE dans le cadre de l'ASA s'il ne s'implique pas suffisamment dans la normalisation de ses relations avec la Serbie.

Ce dialogue entre Serbie et Kosovo est une nouvelle fois réaffirmé comme étant un dialogue tripartite. L'article 13 de l'ASA pose dans son 1) que « le dialogue politique et stratégique, selon le cas contribuent au processus de normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie ». Il faut ici rappeler que le dialogue politique et stratégique dont il est question n'est pas le dialogue supervisé entre les autorités serbes et kosovares sous l'égide de l'Union européenne, mais bien les dialogues qui auront vocation à prendre place au sein du Conseil de stabilisation et

97 Article 5 : « Le Kosovo s'engage à oeuvrer sans relâche à l'amélioration visible et durable de ses relations avec la Serbie et à coopérer de manière effective avec la mission déployée dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune pendant toute la durée du déploiement de celle-ci, comme indiqué de manière plus détaillée à l'article 13. Ces engagements constituent des principes essentiels du présent accord et sous-tendent le développement des relations et de la coopération entre les parties. Si le Kosovo ne respecte pas ses engagements, l'Union européenne peut prendre les mesures qu'elle juge appropriées, y compris suspendre le présent accord en tout ou partie.

98 Article 13 : 1. Le dialogue politique et le dialogue stratégique, selon le cas, contribuent au processus de normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie. 2. Comme prévu à l'article 5, le Kosovo s'engage à oeuvrer sans relâche à l'amélioration visible de ses relations avec la Serbie. Ce processus permet au Kosovo et à la Serbie de poursuivre leur marche respective vers l'Europe, tout en empêchant que l'un d'eux puisse bloquer l'autre dans ces efforts, et devrait progressivement mener à la normalisation des relations complètes des relations entre le Kosovo et la Serbie, sous la forme d'un accord juridiquement contraignant, avec pour perspective qu'ils puissent tous deux exercer leurs droits sans restrictions et assumer pleinement leurs responsabilités. 3. Dans ce cadre, le Kosovo veille en permanence à : a) mettre en oeuvre de bonne foi tous les accords conclus dans le cadre du dialogue avec la Serbie ; b) respecter pleinement les principes d'une coopération régionale ouverte à tous ; c) résoudre grâce au dialogue et à l'esprit de compromis les autres problèmes en suspens, à l'aide de solutions concrètes et durables, et coopérer avec la Serbie sur les questions techniques et juridiques qui le nécessitent ; d) coopérer efficacement avec la mission déployée dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune pendant toute la durée du déploiement de celle-ci

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d'association. Par l'ajout de cette mention, l'UE informe son partenaire kosovar que la question du dialogue de normalisation des relations rejoint désormais le système normatif mis en place par l'ASA, ce qui lui fait gagner en cohérence, mais aussi en force contraignante, une attitude jugée trop peu volontaire de la part du Kosovo pouvant désormais faire l'objet de contre-mesures économiques et non pas de simples pressions politiques. D'autre part, l'inclusion de la normalisation des relations Serbie-Kosovo dans les sujets d'intérêt du Conseil de stabilisation et d'association envoie le message au Kosovo, que c'est un sujet duquel il ne pourra pas se soustraire car désormais constitutif du corps de l'accord. Cet appareil coercitif autour de la normalisation des relations Serbie-Kosovo présente donc un grand intérêt, d'autant qu'elle est inédite au sein du PSA (B).

B) Une clause inédite au sein du PSA

La clause relative à la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo présente dans l'ASA UE-Kosovo est inédite au sein du PSA. En effet, cette clause est sans équivalent dans les ASA signés par l'UE et les autres pays de la région. Les ASA précédemment conclus par l'Union reposent à chaque fois sur le même motif : le premier article du Titre intitulé « Principes généraux » énumère un certain nombre d'éléments posés comme des élements essentiels de l'accord. Il s'agit toujours d'un engagement au respect des principes démocratiques, des droits de l'Homme, de l'économie de marché, d'une coopération avec le TPIY et parfois d'une lutte contre la prolifération des armes de destruction massive99100101102. Cette clause très complète et multisectorielle se retrouve également dans l'ASA UE-Kosovo103, mais est accompagnée de la clause relative à la normalisation des relations avec la Serbie, qui comme on l'a déjà vu, fait l'objet de deux articles dédiés. Pourquoi l'UE a-t-elle ajouté cette clause inédite au sein de l'ASA UE-

99 Stabilisation and Association agreement between the European Communities and their Members States, of the one part, and the Republic of Montenegro, of the other part, L108/3, 29.04.2010

100 Accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Serbie, d'autre part, L278/16, 18.10.2013

101 Accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la Bosnie-Herzégovine, d'autre part, L164/2, 30.6.2015

102 Accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Albanie, d'autre part, L107/166, 28.4.2009

103 Article 3 : Le respect des principes démocratiques et des droits de l'homme, tels qu'ils sont proclamés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies de 1948 et tels qu'ils sont définis dans la Convention européenne de protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950, dans l'Acte final d'Helsinki, et dans la Chartre de Paris pour une nouvelle Europe, le respect des principes du droit international, y compris la coopération totale avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et son mécanisme résiduel, la Cour pénal internationale, et le respect de l'état de droit ainsi que des principes de l'économie de marché, tels qu'ils sont exprimés dans le document de la conférence de Bonn sur la coopération économique de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, servent de base aux politiques de l'Union européenne et du Kosovo et constituent des élements essentiels du présent accord.

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Kosovo ? Pour répondre à cette question, nous pouvons avancer que d'une part, le facteur temporel a son importance. En effet, l'ASA UE-Kosovo est le dernier né d'une série d'accords, qui ont tous été paraphés avant la déclaration unilatérale d'indépendance du Kosovo.

D'autre part, le conflit latent entre la Serbie et le Kosovo constitut un potentiel déstabilisateur très important et que depuis 1999, l'UE s'est engagée en faveur d'une résolution du problème statutaire kosovar. Cet objectif est d'ailleurs précisément explicité dans l'ASA UE-Kosovo qui indique que cette résolution sera « complète » et prendra la forme « d'un acte juridiquement contraignant »104. Par cet ajout l'UE renforce encore sa position d'actrice et d'instigatrice du dialogue Serbie-Kosovo en posant quelle forme devait revêtir la résolution du problème statutaire. Cette clause est un message en direction du Kosovo comme de la Serbie, qui a déjà ouverts les chapitres de négociations en vue d'une adhésion, que la Serbie ne pourra pas adhérer à l'UE tant que ses relations avec le Kosovo ne seront pas normalisées. En effet, dans l'attente d'une résolution du problème statutaire, la Serbie comme le Kosovo ne sont pas en accord quant à la délimitation de leurs frontières respectives et l'UE ne veux pas avoir à gérer un nouveau cas similaire au cas chypriote, dont l'adhésion à l'UE n'avait pas réussi à entrainer un règlement du problème territorial.

Un fait intéressant est à noter : en s'impliquant aussi profondément dans la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo, en faisant du Kosovo un interlocuteur de niveau régional et international, l'UE stabilise indirectement l'Etat kosovar. Ce domaine n'est pas le seul où l'Union joue un rôle majeur pour l'affirmation souveraine du Kosovo et l'on constate qu'en l'incluant dans le PSA, l'UE s'est en fait engagée dans processus de long terme de state building de l'Etat kosovar (Section 2).

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire