3.2.2.2- Pauvreté
Ledoux, (1995), souligne que « la pauvreté
accroit la vulnérabilité de population, et les risques naturels
augmentent la pauvreté ». Généralement, ce ne
sont que des pauvres qui y habitent par manque de moyen pour s'offrir des
terrains hors danger. Ainsi, pendant la saison de pluie, ces personnes vivent
dans des conditions insupportables. Elles bâtissent dans les champs,
c'est ainsi qu'en période pluvieuse, elles rencontrent des
difficultés en commençant par l'humidité des chambres
ainsi que des devantures qui deviennent des mares d'eau. Ces
81
personnes sont souvent victimes des morsures de serpent, de
piqûres des scorpions ainsi que des maladies hydriques et vectorielles
qui s'enchainent.
Le 9eme arrondissement de la ville de N'Djamena
regorge en son sein une grande partie de la population rurale. Certaines
d'entre elles sont descendues en ville à la recherche du travail et
mener une vie meilleure. Louer une maison ou chambre en pleine ville n'est pas
à leur porté, donc elles sont tournées vers les quartiers
périphériques non urbanisés où le coup d'achat du
terrain est moins cher. Dans les zones marécageuses ou encore non
urbanisées, les terrains sont moins chers que dans les zones
urbanisées. C'est ce qui fait que certaines populations sont
obligées de construire dans les zones marécageuses par manque de
moyen. Koum, exprime son expérience comme suit :
J'ai vécu toutes les crises des inondations. En
1963, on a vécu les inondations et nous vivons encore dans les
inondations, mais à notre temps, l'inondation ne causait pas des
dégâts aussi catastrophiques que de nos jours. Entretemps, nous
vivons sur les parties élevées, c'est pour vous dire que depuis
que je suis à Walia l'inondation ne m'a jamais casser la maison, c'est
pour dire qu'aujourd'hui là, je sais quels lieux l'eau peut passer,
quels lieux l'eau occupe, par où l'eau vienne et par où l'eau se
retire ; je connais tout çà. C'est la pauvreté qui a fait
aux gens d'habiter les espace inondables. Avec le changement climatique, on ne
vit pas comme avant. Quand l'inondation arrive, l'eau reste jusqu'à la
ceinture ou même jusqu'à la poitrine. (Koum, 64 ans,
secrétaire général a la mairie du 9eme arrondissement,
à Walia, 03 août 2021).
De ces propos nous comprenons mieux que la pauvreté est
un des facteurs aggravant les inondations dans cette commune. Cette
dernière regorge en son sein la majorité des populations pauvres
ou du moins de classe moyenne.
3.2.2.3- Occupation anarchique des espaces
Les inondations qui sont un phénomène naturel
lié au débordement des eaux des rivières, sont aujourd'hui
aggravées par les pressions issues des activités humaines.
Celles-ci résultent de très forte concentration de l'habitat
(Kenlack, 2019). La partie avare de notre zone d'étude est
caractérisée par un étalement urbain qui ne respecte aucun
plan d'urbanisation. Dans cette partie du bassin colonisée par les
populations du 9eme arrondissement, des aménagements non
adaptés sont bâtis sur des zones très sensibles
qualifiées de « non aedificandis » par la
communauté urbaine. Malgré l'interdiction de l'occupation de ces
espaces à risques, on voit des maisons construites jour après
jour à proximité des drains et/ou sur des drains, ou encore des
maisons en terre battues dans les marécages. Au cours de notre
enquête sur le terrain, nous
82
avons observé plusieurs habitations installées
sur les lits des cours d'eau. Dans les quartiers comme Digangali, N'Gueli,
Walia, Ngoumna et Toukra, les maisons sont régulièrement
inondées à cause de la position qu'elles occupent sur la partie
aval des cours d'eau (Chari-Logone), certains habitants sont même
installés en empiétant sur le lit mineur. Cette installation
anarchique empêche le passage normal de l'eau. Les occupations des
espaces des lits des cours d'eau constituent l'un de facteurs gravant les
risques d'inondations dans la zone d'étude. A cet effet l'on observe
l'installation anarchique de certaines personnes sur les exutoires naturels de
l'eau. Celles-ci y construisent leurs maisons, empêchant ainsi le
ruissellement des eaux de pluie. Dans cette perspective, notre informateur nous
explique une des causes des inondations dans son quartier en ces termes :
L'inondation ça cause énormément de
dégât, ça, c'est un phénomène naturel. La
cause des inondations ce que on a construit dans le passage de l'eau, dans le
lit de l'eau, et quand l'eau monte et que ça déborde maintenant,
même les digues qu'on a construite récemment, l'eau le casse et va
dans son lit et pendant les trois (3) mois elle se retire. (Entretien avec
Albe, 47 ans, délégué, à Walia, 21 septembre
2021).
Dans ces propos nous retenons que les populations construisent
sur le passage de l'eau, ce qui fait que quand la pluie tombe et que le Chari
ou la digue est plein, sa déverse dans les quartiers et causes des
dégâts énormes. Le même enquêté assume
d'être dans la zone inondable et argumente en ce sens :
Pour lutter contre l'inondation-là y a qu'une seule
solution, c'est de fuir pour ne pas perdre sa vie. Parce que nous habitons sur
le passage de l'eau et la pluie vient sans prévenir quelqu'un ; parfois
nous croyons que la saison pluvieuse est fini, et à la dernière
minutes, l'inondation nous surprenne. (Entretien avec Albe, 47 ans,
délégué, à Walia le 21 septembre 2021).
Dans ces propos pour lutter contre l'inondation, l'unique
stratégie c'est de prendre fuite pour sa survie. Nous retenons aussi que
certaines personnes sont conscientes du danger dont elles sont sujets, mais
s'accrochent par contrainte parce qu'elles ne savent où aller.
Des entretiens avec les autorités communales nous ont
permis d'avoir des informations sur la question des occupations des espaces non
aménagés. Il ressort que l'occupation anarchique des terres
s'observe surtout dans les zones non loties ou marécageuses. La
population s'installe à leur guise sans se soucier du caractère
insalubre des secteurs d'installation. Dans les quartiers/villages de la
commune de 9eme arrondissement l'on note l'absence quasi-totale de
réseau d'assainissement pouvant assurer l'évacuation des eaux.
Cette situation ne peut engendrer que les inondations. Dans cette situation
d'occupation anarchique
83
de terre, l'Etat aussi est impliqué. C'est dans ce
contexte que notre informateur tient le propos ainsi :
Je peux dire que les responsabilités sont
partagées, d' une part, c'est la population elle-même et d'autre
part c'est l'Etat. Avant dans cette zone, il n'y avait pas des maisons, c'est
le lit d'eau et comme N'Djamena est devenu petit et avec l'urbanisation de la
ville, l'Etat a procédé à des déguerpissements des
espaces de l'Etat, donc tous ceux qui se retrouvent dans les zones
déguerpis à l'exemple de quartier ancien Gardolé Djedit,
Bololo, Djambal bar ; ces habitants-là étaient obligé de
venir ici pour trouver de l'espace croyant que cet espace serait viable. A leur
grande surprise, ils sont sur le lit d'eau, donc, je peux dire que
c'était par obligation aussi s'ils sont dans cette situation.
(Entretien avec serge, 46 ans, enseignant et secrétaire
général adjoint à la mairie du 9eme
arrondissement, à Walia le 09 août 2021).
Dans ces propos nous pouvons retenir que ce ne sont pas
seulement que les populations qui sont à l' origine des occupations
anarchiques des espaces dans cet arrondissement mais l'Etat aussi en est
l'origine parce que, il fait semblant ou il ne maitrise ou pas les zones
inhabitables, et c'est ainsi qu'il attribue de terre sans études au
préalable.
Photo 1 : Inondation à
Digangali
![](Recrudescence-et-gestion-endogene-des-inondations-dans-le-9e-arrondissement-de-NDjamena-contrib14.png)
Source : MOUKHTAR Adoum, 2021
Sur cette image nous pouvons percevoir dans le quartier
Digangali une chambre construite en terre cuite, sans fenêtres
submergée dans l'eau. Nous pouvons observer aussi l'eau stagnée,
des sacs remplis de sable pour la devanture de ladite chambre ; nous observons
également la présence d'un père et ses enfants. Le
père qui lave ses habilles avec l'eau stagnée tant disque deux de
ses enfants nagent dans l'eau, un assis tranquillement sur la digue et deux de
ces filles sont debout.
84
3.2.2.4- Insalubrité
L'insalubrité est désormais un problème
de comportement, d'incivisme dû à la mauvaise gestion des
déchets et à l'ignorance de la population. Certaines ordures
ménagères dégagées sont jetées souvent dans
les caniveaux et constituent un blocus au drainage des eaux des pluies dans le
9eme arrondissement. Le système de drainage actuel dans ledit
arrondissement est très pauvre. On note un manque de caniveaux.
Lorsqu'ils existent, ceux-ci sont creusés par la population
elle-même et sont dans la plupart de cas surchargés par les
ordures ménagères.
Au niveau des ménages, nous pouvons observer les
devantures sont pleines d'ordures qui ne sont pas régulièrement
enlevées. A ces dégâts matériels, s'ajoutent les
risques sanitaires liés en grande partie aux matériaux
transportés : déchets ménagers de tout genre,
matières fécales et matériaux hétéroclites.
Dans la plupart des quartiers, les mauvaises conditions d'hygiènes,
notamment la présence des latrines et des fosses septiques aux abords
des lits des rivières et des zones humides, qui augmentent la
propagation des maladies hydriques. En effet, l'évacuation des
excrétas humains et animaux, et la présence de déchets
constituent de gros facteurs de propagations des maladies. Il faut aussi noter
que l'inaccessibilité de cette commune pendant la saison pluvieuse est
due à la présence des ordures dans les cours d'eau. Des personnes
inciviques continuent à remblayer clandestinement les ouvrages des
conduits d'eau sans se rendre compte du risque péril. Ces ordures
empêchent l'écoulement de l'eau. Alors ce qui cause les
inondations parfois très violentes par débordement. On comprend
à ce point que la population est parfois responsable du malheur qui les
frappe. Ainsi la majorité des enquêtés interrogés
lors de notre enquête avoue se débarrasser de leurs ordures dans
les cours d'eau. C'est le cas de notre informateur lance ces propos en ce terme
:
Je suis dans ce quartier depuis 9 ans déjà,
je connais tous les quartiers qui ses habitants sont propres et qui ont le
comportement civique tant disque dans certains quartiers a l'instar de mon
quartier, nous vivons même dans les saletés, certaines concessions
n'ont même pas les toilettes, les enfants et les grandes personnes sans
honte font leurs besoins a l'air libre. Les femmes aussi avec leurs
déchets ménagères qui jettent dans les caniveaux nous
cause vraiment des maladies et ces déchets ménagères
là, bouchent les caniveaux et empêchent l'eau de circuler et ce
qui fait pendant la saison pluvieuse, ce quartiers connais l'inondation.
(Entretien avec Elis, 62 ans, délégué de
sinistré de Toukra, à Toukra, 27 août 2021).
Dans ces propos nous pouvons retenir que les populations sont
à l'origine de l'insalubrité et cette dernière cause
d'énormes inondations dans cette commune. Jeter de
85
déchets ménagers, causant l'encombrement des canaux
de drainages, matières fécales causant également des
maladies.
Photo 2 : Rigole bouchée par
les déchets
![](Recrudescence-et-gestion-endogene-des-inondations-dans-le-9e-arrondissement-de-NDjamena-contrib15.png)
Source : MOUKHTAR Adoum, Juin 2021
Sur la photo si dessus nous pouvons observer une grande rigole
encombrée par les eaux usées, les bouteilles, des verres, des
plastique et bien d'autres. A l'extrême droite, on observe les devantures
des maisons en tôles. Aux environs de rigole, on remarque
également la présence des ordures de tout genre qui sont
débordées par les pluies.
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