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Les passerelles entre économie solidaire et économie collaboratve


par Eugenie Lobe
Conservatoire national des arts et métiers  - Master Sciences humaines et sociales 2017
  

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II.2.b) Echelle territoriale

? Dimension locale et économie de proximité

Les circuits courts sont organisés autour d'une économie de proximité, locale, permettant la réduction du nombre d'intermédiaires au strict minimum. Cette économie de proximité se définit tant par son mode d'organisation autour de la relation directe (consommateurs/producteurs), par des valeurs partagées, que par son ancrage dans le territoire local. Les producteurs sont contactés par les responsables

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de ruche dans un rayon moyen de 43 kilomètres, et de 250 kilomètres au maximum. Les consommateurs, les « abeilles », sont le plus souvent des habitants du quartier.

Selon Yuna Chiffolleau , spécialiste des circuits courts alimentaires, « l'entreprise a inventé une fonction que l'épicier de proximité occupait : celle d'intermédiaire de marché qui rapproche producteurs et consommateurs, et sait parler des produits et faire du lien ».68 Des propos entrant en résonance encore une fois avec les porteuses de projet, comme Régine: « Mais je pense que nous les valeurs qu'on veut vraiment développer c'est l'aspect convivial, chaleureux et le lien social, qui n'est pas mis en priorité par la ruche MAMA. Après, c'est peut-être plus facile pour nous car on est local et la ruche MAMA, c'est du global, national voire international avec la Grande-Bretagne, la Belgique... »

La relation au territoire est quasiment affective, comme l'atteste les entretiens. Régine appartient à la troisième génération de La Courneuve et a vu s'étioler une vie de quartier autrefois dynamique, qu'elle souhaite revitaliser à travers cette initiative. Et Perrine renchérit :« Moi, je pense être un peu comme une maman. On ne cherche pas à théoriser notre activité. Encore une fois, parce que c'est une intention vraiment citoyenne et aussi, on ne l'a pas dit, mais en fait ma mère a grandi ici. C'est aussi ses parents, son père a grandi à La Courneuve aussi, aux 4-Routes. Enfin, la maison familiale date de plusieurs générations. C'est quelque chose qui nous tient à coeur dans notre famille en fait, la ville de La Courneuve. Du coup, notre intention c'est pas de théoriser notre activité ou vouloir faire des plans, des projets et tout. Mais c'est juste parce qu'on aime La Courneuve et on a envie de participer à la vie de notre ville. C'est plus ça, notre intention. Du coup, après... ça parle pas vraiment d'économie. »

? Dimension globale : nationale et internationale

La Ruche qui dit oui se déploie, six ans après sa création, à l'échelle nationale à travers 800 ruches locales en France. Ce maillage lui permet de couvrir la quasi-

68 Dossiers Alternatives Economiques, « L'économie collaborative, le nouvel eldorado » A.D, P.60

totalité du territoire avec une forte concentration autour des zones urbaines et périurbaines.

Egalement présente à l'international, la ruche a progressivement déployé son modèle d'essaimage en s'adaptant au mieux à la culture d'entreprise du pays d'implantation du site. Ainsi, la structure expérimente avec la Norvège un nouveau modèle de duplication dans lequel l'équipe est locale, non francophone, maîtrisant la langue et les codes du pays. Elle couvre également les territoires : belge, anglais, allemand, espagnol et italien, à travers 250 ruches, représentant 8 000 producteurs actifs sur l'année (contre 5 000 sur le territoire français) et 50 000 clients actifs (130 000 en France).

La reconnaissance au niveau européen et international se fait aussi à travers les certifications et labels reçus : B Corp obtenu en 2016, et Agritech. Ces reconnaissances sont mutuelles car elles attestent également de l'intérêt de La Ruche qui dit oui pour une expansion territoriale à l'international.

Cela souligne aussi leur volonté d'investir le champ de l'innovation technologique, mis au service de l'agriculture afin d'en améliorer le rendement. Il est difficile d'évaluer l'impact de ces innovations technologiques (drones, robotique, micropuces, objets connectés) sans recul suffisant, tout comme il est difficile de ne pas mettre cet essor technologique en lien avec le processus de mécanisation agricole, qui a conduit à la mécanisation progressive du travail d'agriculture afin d'en augmenter la productivité.

Le concept des AMAP, qui regroupent autour d'une association des sympathisants de la défense de la cause paysanne, existe à travers le monde entier et depuis des décennies. On le retrouvait déjà dans les premières formes d'initiatives solidaires remontant aux années 1970. L'intérêt pour ce mode de consommation, de production et de distribution va croissant, en raison de l'adhésion d'un plus grand nombre de personnes au projet politique des AMAP. Pour autant, les entités dépendant de MIRAMAP, l'organe fédérateur des AMAP en France, ne se déploie pas à l'international et se focalise surtout sur une approche locale et militante.

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? Dimension numérique :

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La dimension numérique représente moins un territoire augmenté qu'une interface nécessaire aux commandes réalisées en ligne les ruches.

Ainsi, le réseau de la ruche MAMA a une certaine centralité car, d'une part, il héberge les blogs des ruches locales et, d'autre part, c'est sur ce réseau que les producteurs s'inscrivent. « Sans ce réseau, on n'existe plus », admet Perrine.

Le territoire numérique rejoint ainsi, comme le souligne les travaux de Yoshai Benkler, la notion de commun en y associant un cadre générique beaucoup plus vaste que celui de propriété partagée d'une plateforme numérique, générant des profits. La question du renouveau démocratique, de la coopération, de la responsabilité partagée les uns envers les autres et de la dimension sociale de la production, au sein de ce commun, est également abordée par Benkler, et correspond complètement à la façon dont La Ruche qui dit oui investit cet espace.

L'espace numérique, est la prolongation de l'espace publics de proximité que sont les lieux de distribution, où se rencontrent et se co-construisent l'offre et la demande, en marge des offres conventionnelles existantes. Ce sont à la fois des espaces de débats, d'échanges d'idées et de pratiques, et de réajustement de l'offre à la demande, et inversement, avec une acuité plus fine que celles des habituelles études de marché.

La plateforme numérique est, par exemple, une interface de communication, qui permet de fluidifier les échanges entre producteurs et membres de la ruche. Elle comprend également une partie support de formation, avec des outils à destination et disposition des responsables dans leur gestion des ruches. De plus, la plateforme est conçue de telle sorte qu'il est impératif de passer par elle pour accéder à n'importe quelle ruche locale : il faut créer et renseigner une sorte de profil avec prénom, nom, numéro de téléphone et mail, ce qui permet également de fédérer l'ensemble en communauté.

Le site internet, tout comme l'écran devient une nouvelle forme de désintermédiation-réintermédiation, particip à la fonctionnalité de l'échange et à la proximité géographique entre producteurs péri-urbains et consommateurs urbains. La ruche sur Internet devient ainsi leur espace commun de rencontre. De leur côté, les intermédiaires sont en charge de l'organisation des modalités de l'échange et de la distribution. « En outre, l'écran d'ordinateur devient médiateur d'une proximité

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relationnelle construite, non seulement parce que les consommateurs peuvent « visiter » les fermes des producteurs présentées sur le site, mais également par l'élaboration d'un discours et d'un graphisme porteurs de valeurs partagées. Notons enfin que dans les deux cas, les prix de vente restent bien maîtrisés par les agriculteurs, soit du fait que la vente est directe, soit de fait de la proximité organisée avec les intermédiaires. »69

Ces différentes strates de désintermédiation et réintermédiation, si l'on prend en compte tout acteur se situant entre le producteur et le consommateur, pose la question nouvelles formes de ré-intermédiation, et tout particulièrement de leur nature.La dimension numérique est un nouvel intermédiaire. Le responsable de ruche local en est également un. L'entité qu'est la ruche Mama, qui emploie 75 personnes, est également un autre intermédiaire. Chaque producteurreverse, d'ailleurs, des frais de 16,7 % de son chiffre d'affaires hors taxe au responsable de ruche locale et à la tête de réseau.

De plus, le fait de stocker certains produits comme cela a pu arriver au sein de La Ruche qui dit oui, en attendant les jours de distributions, n'est-ce pas une forme d'intermédiation supplémentaire dans le cadre très spécifique du circuit court ? C'est une position que réfute Solenne Mutez, responsable partenariats et relation presse de la ruche MAMA, qui ne se considère pas comme un intermédiaire, tant au niveau national que local.

Finalement, ces 3 échelles territoriales, se fondent dans une dimension hybride, le « Glocal » qui reprend les spécificités d'un essaimage au niveau local d'un modèle pensé et conçu en amont, par une entité centralisatrice. Le territoire immatérielle du numérique permet la duplication, à une échelle rapide, su modèle et l'extension d'un nouveau territoire et place de marchés, par le même biais.

69Praly Cécile, Chazoule Carole, Delfosse Claire et al., « Les circuits de proximité, cadre d'analyse de la relocalisation des circuits alimentaires », Géographie, économie, société, 2014/4 (Vol. 16), p. 455-478. DOI : 10.3166/ges.16.455-478. URL : http://www.cairn.info.proxybib.cnam.fr/revue-geographie-economie-societe-2014-4-page-455.htm

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote