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Utilisation des monnaies virtuelles a l'epreuve du droit monetaire congolais: une étude des crypto-monnaies bitcoin et ethereum


par Oscar UFOYURU
Université de Kisangani (UNIKIS) - Licence 2022
  

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A.2 Un projet de régulation des cryptomonnaies au Maroc

Au Maroc, Abdellatif JOUAHRI, le gouverneur de Bank Al Maghrib (BAM), la banque centrale du royaume, a annoncé un projet de réglementation des cryptomonnaies. Première étape importante sur la route qui pourrait conduire le pays à les autoriser officiellement, sous certaines conditions. Cette annonce constitue une rupture du font constitué par le ministre de l'économie et des Finances, l'Autorité marocaine de régulation des marchés financiers et, bien sûr, la BAM. Tous les trois jusqu'alors sur une même ligne, celle de s'opposer vent debout à des cryptomonnaies non régulées. Pour Abdellatif JOUAHRI, la situation particulière du Maroc, augmentation de 120% des cryptomonnaies entre juillet 2021 et juin 2022, malgré leur interdiction formelle, ne pouvait perdurer en l'état, celui d'unités de comptes échappant à tout contrôle des institutions monétaires nationales ou internationales.

Ce projet, s'il est adopté, permettrait aux cryptomonnaies d'être tolérées dans un premier temps, mais aussi de superviser leur bon usage. En ligne de mire, sans doute, la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Ce projet s'inscrit aussi dans une réflexion à plus long terme sur la monnaie digitale de banque centrale (MDBC).

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L'annonce concomitante, par la BAM, de ce projet et de création d'un comité étudiant l'opportunité, les modalités et les conséquences de l'émission d'une MDBC marocaine, donne force à cette hypothèse. Comme beaucoup de banquiers centraux africains comme européens, Abdellatif est de ceux qui pensent que l'on peut interdire les cryptomonnaies, sans condamner les blockchains, bien au contraire les soutenir, et avec elles réguler de façon efficace l'usage des monnaies numériques, l'avis que nous avons toujours partagé.

B. Des initiatives récentes venant de la CEMAC et de l'UEMOA

Le CEMAC regroupe 6 Etats : Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad. Deux d'entre eux font partie de top 10 des pays détenteurs de cryptomonnaies en % de leur population selon la statistique présentée précédemment. Entre octobre 2020 et mai 2021, la commission de surveillance du marché financier de l'Afrique centrale (COSUMAF) s'est exprimée à deux reprises, de façon contradictoire sur la nature des offres de placement et d'investissement en lien avec les crypto-actifs.

En affirmant, le 23 octobre 2020, que : « l'exercice des activités de crypto-actifs ne fait pas l'objet d'encadrement réglementaire », elle leur signifiait qu'aucun prestataire d'actifs numériques ne peut proposer de tels services. Ce qui confirmait le point de vue officiel d'interdiction. Par contre, le 27 mai 2021, en assimilant les prestations de service sur cryptos-actifs à des activités en lien avec l'appel public à l'épargne et les instruments financiers, soumis à l'agrément préalable de la CONSUMAF, elle revenait quelque peu sur ses affirmations d'octobre 2020, laissant penser que l'usage des cryptomonnaies, après agrément était chose possible. Il appartient désormais au régulateur bancaire de la CEMAC, la Banque des Etats de l'Afrique centrale (BEAC).

L'UEMOA, Union économique et monétaire ouest-africaine, regroupe 8 autres pays: Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo. Dans un communiqué du CREPMF (Conseil régional de l'épargne publique et des marchés financiers) du 18 mars 2021, l'équivalent de la CONSUMAF, il affirme assimiler les offres de placement et d'investissement, en lien avec les cryptomonnaies, à des opérations relevant de l'appel public à l'épargne. Ce qui revient à banaliser et à accepter, implicitement, l'usage des cryptomonnaies. Reste comme pour la CEMAC, à avoir l'avis de la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO), régulateur bancaire de l'UEMOA, qui se fait attendre.

C. Une CEDEAO divisée

La CEDEAO parait divisée sur la ligne à adopter concernant l'usage des cryptomonnaies. Composée de 15 États, dont huit de l'UEMOA et sept autres pays : le Cap-Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Libéria, le Nigeria et la Sierra Leone. Et parmi ces 7 pays, on retrouve deux du top 10 des pays, en % de leur population, regroupant le plus grand nombre d'usagers des cryptomonnaies : bien sûr le Nigeria mais aussi le Ghana. Avant dernier dans ce classement, le Cap-Vert. Pour ces 3 Etats la ligne officielle diffère totalement de celle de l'UEMOA.

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Premier pays d'Afrique à proposer, depuis octobre 2022, une MDBC « le eNaira », version numérique de sa propre monnaie, le Nigeria mise sur le eNaira pour contrer la menace du bitcoin sur sa souveraineté monétaire et mettre sa monnaie à l'abri de l'inflation. Interdites depuis 2011, les cryptomonnaies n'ont cessé cependant de se développer. Plutôt que de rechercher à les réguler, comme le Maroc, les autorités nigérianes ont choisi le recours immédiat à une MDBC pour freiner et ralentir leur usage, plus particulièrement celui du bitcoin. Même démarche au Ghana, considéré comme une terre d'innovation pour les cryptomonnaies, dont la situation économique (crise bancaire, endettement, inflation), va le conduire à annoncer dès septembre 2021 à sa propre monnaie numérique, « le e-cedi », dont l'officialisation pourrait ne pas tarder.

Quant au Cap-Vert, où les cryptomonnaies sont tolérées sans aucune réglementation, il est probable, à court et moyen termes, que rien ne change, l'usage des cryptomonnaies dans ce pays ne concernant que 1 % de sa population.

I.2 La réglementation des cryptomonnaies en Europe

A la suite de la publication d'un rapport le 2 octobre 2020,67 la BCE a indiqué lancer une consultation sur la création d'un « euro numérique ou e-Euro ». Il consisterait en (une MDBC ou une MNBC), une monnaie virtuelle « différente » des cryptomonnaies, celles-ci considérées comme vouées à être très volatiles et risquées puisque non adossées à une Banque centrale.

Les plateformes des cryptomonnaies quant à elles doivent être enregistrées avec le statut de prestataire de service sur les actifs numériques auprès de l'Autorité des Marchés Financiers. La plateforme française Coinhouse a été la première à obtenir ce statut. Binance a reçu l'autorisation de l'Autorité des Marchés Financiers pour exploiter sa plateforme d'échange de cryptomonnaie en France. La France a été le premier pays européen à prouver le site68.

Section II. Recommandations pour un usage sain de la blockchain en République
Démocratique du Congo

Pour faire respecter efficacement les restrictions tacites sur l'utilisation des cryptomonnaies en RDC, quelques mesures pourraient être envisagées : la sensibilisation et l'éducation de la population congolaise, précisément « les usagers d'internet » sur les différents enjeux de l'utilisation de cet outil notamment « les recours aveugles aux cryptomonnaies et à d'autres tendances similaires », la mise en place d'un cadre réglementaire adapté à cette nouvelle tendance technologique, la surveillance et suivie des utilisateurs et des offreurs de ces genres de produits, le renforcement des mesures liés à la protection des consommateurs.

67 Banque Centrale Européenne, Rapport, op.cit.

68 DA SILVA Sigolène, op.cit.

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II.1 Sensibilisation et éducation

Il est important de sensibiliser le grand public, y compris les utilisateurs potentiels de cryptomonnaies, sur les risques et les défis associés à leur utilisation. Des campagnes d'information et d'éducation pourraient être menées pour fournir des informations objectives sur les avantages et les risques des cryptomonnaies.

Il est évident que la RDC souffre du problème de vulgarisation, et c'est dans presque tous les secteurs, à titre d'exemple : « sur le plan législatif, des lois qui sont adoptées tous les jours et pourtant plus de 90 % de la population ignore l'existence, à contrario, soumise au principe nul n'est censé ignoré la loi ».

La RDC reste avec ce défi à relever sur tous les plans. A ce titre, nous estimons que des campagnes d'information et d'éducation pourraient fournir des informations objectives non seulement sur les avantages et les risques liés à l'utilisation de la technologie blockchain mais également sur le caractère illicite de son utilisation.

II.2 Surveillance et suivie

Les autorités devraient renforcer les capacités de surveillance et de suivi des activités liées aux cryptomonnaies, notamment en utilisant des outils technologies tels que la blockchain pour suivre les transactions. Cela permettrait de détecter les activités illégales telles que le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. En outre, les autorités pourraient mettre en place un système de signalement des activités suspectes pour que les citoyens puissent signaler les activités illégales liées aux cryptomonnaies.

Enfin, la RDC pourrait également travailler avec des experts en cybersécurité pour renforcer la sécurité des échanges sur la technologie blockchain et minimiser les risques de piratage et de vol de données, si elle l'adoptait.

II.3. Mise en place d'un cadre réglementaire adapté

Les autorités congolaises pourraient envisager de mettre en place un cadre réglementaire clair et transparent pour encadrer l'utilisation des cryptomonnaies. Cela pourrait inclure l'enregistrement obligatoire des plateformes d'échange de blockchain, la surveillance des transactions sur internet et la lutte contre le blanchiment d'argent.

Ce cadre pourrait selon que le pays le veut, pourrait prévoir des interdictions strictes des échanges de cryptomonnaies et/ou des autorisations légales de la technologie de Blockchain.

En rapport avec l'interdiction, par exemple la Banque centrale pourrait ordonner à toutes les plateformes congolaises offrant des services en cryptomonnaie de fermer et attendre l'autorisation légale.

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Cette étude a démontré que l'attrait des cryptomonnaies tient aussi au fait qu'elles sont totalement décentralisées et non réglementées. Il est clair qu'en les encadrant, on les rattache implicitement à un système. En les soumettant à la réglementation, on limite leur facilité d'utilisation. Ainsi, il serait difficile de constater que les futurs utilisateurs de cryptomonnaies, rattachées à un système et soumises aux réglementations, soient aussi nombreux qu'aujourd'hui.

« Il n'y a rien de pire que le statut quo entre une interdiction non respectée et une tolérance non encadrée. S'il y a interdiction, qu'elle soit une interdiction tolérance zéro, à la chinoise, avec les moyens de la faire respecter. Et si c'est une tolérance, c'est la tolérance encadrée juridiquement qu'il faut privilégier ».

Section III Perspectives d'avenir : stratégies pour capitaliser les avantages liés à la technologie blockchain en Droit monétaire congolais

III.1 Intérêt porté sur les cryptomonnaies par le gouvernement

Depuis avril 2022, le site d'information officiel congolais CIO MAG, a publié que le gouvernement congolais par le truchement du ministère du numérique a exprimé son intérêt pour les cryptomonnaies et la blockchain69, l'information confirmée par le site officiel dudit ministère70.

Selon le ministère du numérique, les discussions se portent actuellement sur « la règlementation et les conditions de succès de son expansion au pays ». Mais la question peut tourner au tour du pourquoi de cet intérêt soudain et des raisons de sa valeur ajoutée à l'économie congolaise, une autre thématique à mieux développer dans une étude prochaine.

III.2 Levier d'intégration

Pour le ministère du numérique, plusieurs raisons expliquent la démarche de la RDC. Premièrement, elle s'inscrit dans le cadre « du plan national, horizon 2025 ». Un vaste programme visant à faire du numérique congolais, un levier d'intégration, de bonne gouvernance, de croissance économique et de progrès.

En réaction, Roger CIBALANGA, un expert de la finance, estime que la démarche du gouvernement congolais dont a rapporté le ministère du numérique, est biaisée. « C'est imprudent pour un pays comme la RDC de s'intéresser à cette technologie alors qu'elle a encore plusieurs défis à relever, déclare-t-il ». Il illustre son point de vue par la faible portion de la population congolaise ayant accès au numérique ».

L'autre crainte exprimée, est l'absence d'un cadre légal en vigueur spécifique aux cryptomonnaies en RDC. La blockchain, nous rappelons, est une technologie qui échappe au contrôle des Etats et des structures en charge de la régulation financière. Il s'est avéré que même les académiciens restent partagés sur cette question.

69 BULONZA Enock, op.cit.

70 Ministère du numérique, op.cit.

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Cependant, quoi proposer au ministre du numérique qui a tendu la main aux acteurs du secteur, parmi lesquels la firme de la blockchain The open network pour la règlementation et les conditions de son expansion en RDC ? Le point suivant donne de propositions à cette question.

III.3 Réflexion sur une monnaie virtuelle de la banque centrale (e-Franc congolais)

Avant d'approfondir cette idée du « e-Franc congolais », il importe d'appréhender d'abord sa notion.

Différente des plateformes de finance (monnaie mobile) comme M-Pesa, Orange money, Airtel money, le « e-Franc congolais » ne fonctionnerait pas de la même manière que les cryptomonnaies. Le e-Franc congolais serait un type de monnaie numérique au modèle du e-Naira du Nigéria ou de e-Euro (en projet) qui sont tous des Monnaies Numériques de la Banque Centrale (MNBC) ou des Monnaie Digitales de la Banque Centrale (MDBC).

Il s'agira, pour la RDC, essentiellement d'une version numérique du Franc congolais papier avec la même valeur.

Nous estimons que la RDC devrait plutôt miser sur la MDBC qui pourrait constituer une véritable innovation numérique du fait qu'elle :

1. Permettrait toujours d'encourager l'exploration de la technologie de la blockchain par la création d'une monnaie numérique de la banque moins risquée ;

2. Constituerait une alternative entre les restrictions à l'utilisation des cryptomonnaies et la passion des utilisateurs à la Blockchain ;

3. Constituerait une monnaie sécurisée de la Banque sur laquelle, celle-ci pourrait exercer tous ces pouvoirs règlementaires reconnus par la Constitution, la loi organique n°18/027 du 13 décembre 2018 portant organisation et fonctionnement de Banque Centrale du Congo et l'Ordonnance-loi n° 67/272 du 23 juin 1967 relative au pouvoir règlementaire de Banque Centrale du Congo ;

4. Fonctionnerait sur la blockchain dont la technologie avancée rend difficile la falsification et donc, il serait beaucoup plus difficile de les contrefaire ;

5. Constituerait une solution aux utilisateurs de la blockchain en leur offrant la garantie et la protection par un produit qui pourrait faciliter l'inclusion financière, la traçabilité, la rapidité des échanges et la facilitation des transactions internationales. Les utilisateurs n'auront pas besoin d'un intermédiaire comme une bancaire ou une autre société pour effectuer les transferts d'argent, d'où la réduction du temps et des coûts.

6. Faciliterait également les paiements transfrontaliers et ;

7. Eviterait les risques liés à l'utilisation des cryptomonnaies, entre autre, à des fins criminels car les MDBC n'offrent pas l'anonymat comme la plupart des crypto-actifs.

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Bien que, comme d'autres MDBC et les crypto-actifs, il fonctionnera sur le grand livre Blockchain, à la différence des crypto-actifs, toutes les transactions et tous les enregistrements de la propriété seront stockés dans une base de données informatique décentralisée mais que seule la Banque Centrale pourrait frapper, émettre, distribuer ou détruire. Contrairement aux monnaies cryptographiques, qui peuvent être créées par n'importe quel ordinateur, n'importe où dans le monde et sur base d'un algorithme.

Les MDBC n'aideront pas à résoudre les problèmes d'inflation car rattachées aux monnaies papier auront le même taux de change officiel et seront confrontés donc aux mêmes problèmes du pouvoir d'achat. Puisque l'une des raisons de la croissance des cryptomonnaies en RDC, évoquée précédemment est le problème de la dévalorisation perpétuelle du Franc congolais.

Afin, en Afrique nous rappelons, la Banque centrale du Nigéria a été la première à lancer avec succès une Monnaie numérique alimentée par la blockchain. Le Ghana lui emboite le pas avec le e-Cedi. En Afrique de l'Ouest francophone, la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest étudie toujours la question par le biais de son centre ouest-africain d'études et de formation bancaires. Mais le Maroc s'y est lancé aussi. La RDC étant l'un des pays avec un nombre important d'utilisateurs de la Blockchain, devrait également emboiter le pas avec un projet du e-Franc congolais pour pallier aux différents problèmes que posent le recours à la Blockchain à travers les cryptomonnaies.

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