1.1.2. De l'insécurité à la
migration
Depuis plusieurs décennies, le monde est
bouleversé par une crise sécuritaire qui provoque une forte
mobilité des réfugiés et un déplacement massif des
populations.
L'une des grandes caractéristiques de nos jours est la
visibilité de l'intensification de crises de tout genre (ADAMOU MOUSSA
I, 2019), selon le même auteur les crises sécuritaires sont
conséquence de plusieurs facteurs notamment le fonctionnement et le
comportement des Etats, des sociétés voire des rapports
socioculturels, socioéconomiques.
L'Afrique n'est pas épargnée des conflits
armés. Des indépendances au début des années 1990,
un nombre impressionnant de pays africains ont été touchés
par des conflits. De ce fait ces derniers sont la résultante de
plusieurs facteurs.
Les facteurs démographiques, la pauvreté, les
calamités naturelles et l'instabilité politique sont les
principales causes qui amplifient la migration en Afrique (CAMBREZY L et
LASSAILLY JACOB V, 2005)
Ainsi depuis les années 60 l'Afrique est plongée
dans un cycle d'instabilité chronique. A titre illustratif en Afrique
l'ouest entre 1967 et 1970 une guerre civile bouleversa la république
fédérale du Nigéria. Elle est suivie par celle du Liberia
et de la Sierra Léone respectivement
1 Refugee studies sont un champ de recherche en
langue anglais crée en 1981 centré sur l'étude des
réfugiés et de leurs déplacements.
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entre 1989-1996 et1991-2001. En plus, il eut le
déclenchement de la rébellion au Niger et au Mali dans les
années 1990 et enfin une guerre civile a vu le jour en
Guinée-Bissau en 1999. La liste n'est pas exhaustive mais toutes ces
guerres ont généré un déplacement forcé de
plusieurs couches sociales (LUNTUMBUE M, 2012).Les autres régions du
continent ne sont pas exemptées par des crises sécuritaires
violentes.
Selon la Banque Mondiale la situation de déplacements
forcés en Afrique de l'ouest se caractérise non seulement par une
intensification des conflits et de violence tout au long de l'année
2018, mais aussi par des sécheresses, des inondations et des
tempêtes qui ont contraint des millions de personnes à fuir leur
domicile. Cette situation a entrainé environ 7,4 millions de nouveaux
déplacements liés aux conflits et violence et 2,6 millions
liés aux catastrophes naturelles, un total représentant 36 % des
déplacements globaux (BM,2019).
Selon plusieurs auteurs comme LUNTUMBUE M (idem) les conflits
armés en Afrique peuvent être idéologiques, ethniques et
interétatiques. En Afrique de l'ouest les foyers de conflits sont
surtout animés par des groupes armés qui sont de trois ordres
:
? Ceux qui visent la conquête du pouvoir de
l'État ou le changement radical du modèle institutionnel et
social (Al-Qaïda au Maghreb islamique, Boko-Haram);
? Ceux qui revendiquent une autonomie politique pour des
motifs identitaires et ou pour un partage de ressources (Mouvement pour
l'Emancipation du Delta du Niger, MEND dans le Delta du Niger);
? Ceux qui luttent pour une plus large autonomie de type
indépendantiste(AQMI).
Tous ces conflits s'inscrivent dans un système
chronique et interétatique, se produisant pratiquement comme un
égrainage de chapelet, comme l'a montré LUNTUMBUE M (ibid.). Pour
cet auteur les conflits transfrontaliers naissent et perdurent en raison de
liens transnationaux de nature économique, sociale et culturelle entre
les pays.
« Les systèmes de conflits de la zone
sahélo-saharienne englobe les frontalières qui vont de la
Mauritanie à l'Algérie et du Mali au Niger. Son épicentre
se situe sur la frontière entre l'Algérie, le Mali et le Niger et
correspond à la poussée vers le sud des djihadistes
algériens(AQMI) » (LUNTUMBUE M, ibid).
La question de l'insécurité est aujourd'hui
d'actualité et sa présence provoque une forte mobilité
forcée des populations. Cet état de fait confère à
la question un caractère omniprésent dans la vie quotidienne
« rares sont les sujets évoqués dans lesquels elle n'est
pas mentionnée, ne serait-ce qu'une seule fois. Il y est fait allusion
tant dans les discussions quotidiennes que dans les débats politiques.
Elle-même est devenue l'un des enjeux sociaux les plus importants dans le
monde actuel » (BOUTELLIER H(2008).
Les intenses mobilités des réfugiés
causées par des crises, transforment la région africaine en un
pôle régional d'intervention humanitaire internationale. GUICHAOUA
A(1999) affirme qu'entre 1994 et 1996 en Afrique centrale une juxtaposition de
conflit régional a débouché sur plus de deux(2) millions
de réfugiés et déplacés internes impliquant une
dizaine des pays.
En Afrique de l'Ouest, la question de mobilités
forcées des populations est au coeur de l'actualité. Les
violences placent la zone sahélienne en tête du classement
international, pour
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avoir affecté des milliers de populations les obligeant
à se réfugier à la quête des espaces apaisés
et calmes, (VOISIN E, 2018).
De façon particulière, le Niger, de par sa
situation géographique, se trouve au coeur des foyers de tension dans
cet espace. Depuis 2011 avec la chute du régime de Mouammar Kadhafi en
Libye, la crise sécuritaire au Mali et au Burkina Faso, et le Boko-Haram
au Nigeria, sa situation sécuritaire s'est
détériorée. Aux problèmes sécuritaires
s'ajoutent la pauvreté et la vulnérabilité des
populations. En effet, les facteurs socioéconomiques sont les premiers
facteurs conditionnant les membres de la communauté à
l'insécurité. Ce sont les facteurs qui prédisposent les
individus à la radicalisation et à la violence (HD idem)
compliquant davantage la situation sécuritaire du Niger.
Plusieurs groupes terroristes comme Al-Qaida au Maghreb
islamique (AQMI) dans la région sahélo-saharienne, Boko haram
dans la région du lac Tchad, Al-Shabaab dans la corne de l'Afrique,
Ansar al-Sharia et l'Etat islamique(EI) dans la région du Maghreb, ont
mené de nombreuses attaques qui ont mis plusieurs personnes dans une
situation de migration forcée (ADAMOU MOUSSA I, idem).
Ces crises ont engendré plusieurs déplacements
forcés à travers les pays. En effet, la crise du Mali et celle de
Boko haram au Nigeria ont poussé des milliers de réfugiés
à s'installer sur le territoire nigérien, notamment dans les
trois régions frontalières à savoir Tillabéry,
Tahoua et Diffa. (PARCA, 2018)
Ces réfugiés sont accueillis soit dans des
camps, soit sur des sites d'accueil. Les régions qui accueillent ces
réfugiés ont dû faire face à une dégradation
de leur propre situation sécuritaire, à cause d'attaques
terroristes qui ont visé les forces de défense et de
sécurité chargées de la protection des camps et de la
population (PARCA, 2018, idem). La question de protection des
réfugiés constitue une préoccupation majeure pour les pays
d'accueil et les acteurs humanitaires.
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