Chapitre 2:. Les nouveaux accords de
coopération
Les nouveaux accords de coopération
franco-sénégalaise ont été signés le 29 mars
1974 à Paris. Ces accords couvrent presque tous les domaines que ce soit
politique, économique, social et culturel. Désormais les
relations franco-sénégalaises sont régies par ces nouveaux
accords. Nous allons choisir quelques exemples afin d'avoir un aperçu
sur ces derniers. Tout d'abord, il faut savoir que les accords de
coopération entre la France et le Sénégal ont un socle ou
un gage qui n'est autre que le traité d'amitié et de
coopération. C'est un texte qui définit les grandes lignes ainsi
que les modalités d'exécution de la coopération entre les
deux pays. Son préambule met en avant entre autres la
consécration des liens d'amitié existants entre les deux pays, le
développement et le renforcement de la coopération dans les
domaines politique, économique, social, culturel et technique sans
oublier le fondement de cette coopération sur la base de
l'égalité et du respect mutuel de la souveraineté
nationale. Ce traité prévoit la création d'un
comité ministériel franco-sénégalais qui sera
l'organe exécutif : « Article 6. Pour veiller à la mise en
oeuvre des principes et à la poursuite des objectifs définis dans
le présent traité, il est créé un comité
ministériel franco-sénégalais composé de
délégations des deux pays présidés par leurs
ministres des affaires étrangères ou tous autres ministres
désignés à cet effet. Toutes les relations de
coopération ainsi que l'application des différents accords
conclus entre les deux États relèvent de sa compétence
»76. En outre, ce traité affirme dans son article 4 la
nécessité de renforcer la coopération dans les domaines de
la culture, des sciences, de la technique et de l'éducation. Ces points
sont prioritaires pour le gouvernement sénégalais surtout dans le
domaine culturel qu'il considère comme le commencement et la fin de tout
développement. Nous n'avons pas besoin de souligner la place qu'occupe
la culture dans la vision et la pensée du président Senghor.
L'intervention française est plus importante en ce qui concerne
l'assistance technique. Nous verrons dans la partie suivante que cette
dernière a été au coeur des préoccupations des deux
parties depuis l'application des nouveaux accords. Le traité
d'amitié et de coopération affiche un texte tout à fait
nouveau par rapport à celui de 1960. Néanmoins, il a gardé
son principe et reflète avant tout les relations amicales voire
étroites entre les deux peuples. Nous n'avons pas eu l'occasion de
vérifier si la France a conclu un tel traité avec d'autres pays
africains, mais dans l'esprit du gouvernement sénégalais il
permet de préserver ce lien étroit. Ce traité n'a pas
manqué de prendre en compte le droit international en matière de
coopération et se veut conforme à la Charte des Nations Unies.
C'est une innovation majeure car la coopération
70
franco-africaine est entrain dans une phase de «
normalisation » comme l'a souligné Jean Touscoz : « La
coopération bilatérale de la France avec les pays africains
francophones a traversé depuis le début de la présente
décennie une crise grave ; elle fait actuellement l'objet d'une certaine
normalisation. [...] Cette normalisation tend à soumettre la
coopération bilatérale de la France avec les pays africains
francophones au droit commun de la coopération internationale
»77. Dans le cas sénégalais, nous avons
remarqué que la quasi-totalité des accords de coopération
avec la France font désormais référence au droit
international. Du point de vue de la forme, cela inclut un grand changement
quant à la réalité il reste à déterminer la
pratique et les impacts. Nous en reviendrons dans notre dernière partie.
A part ce traité d'amitié et de coopération qui est
l'accord cadre, nous allons voir les accords que nous avions abordé dans
le chapitre précédent. Mais avant nous voulons juste souligner la
part importante qu'occupe le domaine politique dans cette coopération.
Malheureusement dans le chapitre précédent nous n'avons pas
abordé d'accord politique car nous avons considéré que les
négociations n'étaient pas très houleuses par rapport aux
exemples que nous avons choisis. Cependant y'a eu un changement surtout en
matière de représentation diplomatique. En effet, le nouveau
texte a supprimé l'existence des Hauts Représentants et du
Décanat d'office au profit de l'Ambassadeur de France. Et l'article 1 le
confirme : « Chacun des Etats accrédite auprès de l'autre un
représentant ayant rang et titre d'Ambassadeur extraordinaire et
plénipotentiaire et dont l'ordre de préséance dans le
corps diplomatique est fixé conformément à la pratique
internationale ». En outre y'a plus de référence au
truchement du Gouvernement français pour la transmission des directives
de celui sénégalais aux agents diplomatiques et consulaires
français. Donc plus de consultation dans le domaine de la politique
étrangère et l'article 2 du nouveau texte stipule que : « La
République française assure à la demande de la
République du Sénégal sa représentation
auprès des Etats et organisations là où la
République du Sénégal n'a pas de représentation
propre. Dans ce cas les agents diplomatiques et consulaires ainsi que les
délégués français agissent conformément aux
directives du Gouvernement du Sénégal transmises par
l'intermédiaire des autorités françaises
»78. La rédaction de ce texte a su respecter le droit
commun de la coopération internationale. Toujours dans le cadre des
nouveaux accords, nous allons revenir sur les exemples du chapitre
précédent à savoir la convention d'établissement,
l'accord sur la
77 Touscoz J. (1974). « La normalisation de la
coopération bilatérale de la France avec les pays africains
francophones » (aspects juridiques). Études
internationales, 5(2), pp.208-211.
78 Archives nationales, Paris, Coopération,
Cabinet et service rattachés au Ministre, Chargé de mission
(1959-1985),, cote 20000137/1.
79 Idem.
71
circulation des personnes, la convention sur le concours en
personnel et l'accord en matière d'enseignement supérieur.
Les négociations sur la convention
d'établissement n'étaient pas faciles mais plutôt
houleuses. Dans le but de parvenir à un accord le 29 mars, les deux
parties ont dû faire des concessions car le nouveau texte n'a pas
intégré les premiers articles du texte sénégalais.
Finalement, il est constitué sur la base du texte français qui
n'affiche pas un grand changement par rapport à l'accord
précédent. Les articles 1 et 2 sont formulés ainsi :
« Article 1. Tout national de l'une des parties contractantes jouit des
libertés publiques sur le territoire de l'autre dans les mêmes
conditions que les nationaux de cet Etat. Ces libertés s'exercent
conformément à la législation en vigueur sur le territoire
de chacune des parties contractantes : « Article 2. Sous réserve
des accords entre les deux parties contractantes sur la circulation des
personnes, les nationaux de chacune des parties peuvent entrer librement sur le
territoire de l'autre, y voyager, y établir leur résidence dans
le lieu de leur choix et en sortir à tout moment. [...]
»79. Même si ces deux articles ont l'air identiques au
texte précédent, il faut savoir qu'une notion importante a
été supprimée à savoir celle d'assimilation et de
statut particulier. Il faut noter, chose importante, que le projet
sénégalais est absent dans ce nouveau texte. Mais le tir semble
être rectifié sur un point dans l'échange de lettre qui a
suivi cet accord pour confirmer l'article 4 du projet sénégalais
: « Les nationaux de chacune des parties contractantes
bénéficieront sur le territoire de l'autre partie, de la
législation du travail, des lois sociales et de la
sécurité sociale dans les mêmes conditions que les
nationaux de cette partie ». Il est nécessaire de préciser
quand même que le nouveau texte comporte de nouveaux articles qui
s'adaptent à la situation. Il s'agit des articles 11 et 12:
article 11 « Les nationaux français, personnes
physiques ou morales, établis sur le territoire sénégalais
à la date d'entrée en vigueur de cette présente convention
peuvent continuer à exercer leurs activités. Les nationaux
sénégalais, personnes physiques ou morales, établis sur le
territoire français à la date d'entrée en vigueur de cette
présente convention peuvent continuer à exercer leurs
activités. » ;
article 12 qui renchérit en ces termes : « Est
considéré comme établi sur le territoire de l'une des
Parties, tout national de l'autre Partie y exerçant ses activités
depuis au moins trois mois avant la date de signature de la présente
convention ».
80 Ibid.
72
Enfin, les deux parties décident d'étendre le
statut particulier à d'autres Etats dans l'article 13 « Chaque
partie se réserve le droit d'accorder le cas échéant, un
traitement plus favorable aux ressortissants d'un Etat tiers voisin ou
appartenant à une même zone de solidarité économique
ou politique »80.
Nous pouvons affirmer que les modifications ont
été importantes et donnent un air nouveau à la convention
d'établissement, signée le 29 mars, et dont l'entrée en
vigueur était prévue dans deux mois après la signature.
Nous verrons dans la troisième partie que ce nouvel accord a eu
d'énormes impacts au niveau des pays. Il en va de même pour
l'accord sur la circulation des personnes.
Celui-ci est complémentaire de la convention
d'établissement. C'est pour cela qu'il est indispensable de les analyser
ensemble. Nous avons vu lors des négociations que l'atmosphère
était trop tendue entre les deux parties et il s'est avéré
difficile de trouver un terrain d'attente. Finalement un accord sera conclu le
29 mars. Ce nouvel accord peut être qualifié d'innovant par
rapport au précédent. L'examen de ce nouvel accord nous laisse
constater que les propositions des deux parties ont été prises en
compte. Les changements apparaissent dès les premiers articles qui
étaient proposés par la partie sénégalaise. La
délégation française l'a adoptée après la
suppression de quelques alinéas. Désormais les articles 1 et 2
stipulent que : « Article 1. Pour se rendre sur le territoire de la
République du Sénégal, les nationaux français quel
que soit le pays de leur résidence, doivent être en possession
d'un passeport en cours de validité, ainsi que des certificats
internationaux de vaccinations obligatoires exigés par la
législation en vigueur dans cet État. Ils doivent
également garantir leur rapatriement.
Article 2. Pour se rendre sur le territoire de la
République française, les nationaux sénégalais,
quel que soit le pays de leur résidence, doivent être en
possession d'un passeport en cours de validité, ainsi que des
certificats internationaux de vaccinations obligatoires exigés par la
législation en vigueur dans cet État. Ils doivent
également garantir leur rapatriement ».
Même si ces deux premiers articles ont fait la
différence par rapport au texte précédent, les deux
innovations majeures à l'instar du certificat d'immigration et
l'attestation d'hébergement sont absentes du texte. Pourtant ces deux
éléments allaient changer la donne en matière de
circulation des personnes entre les deux parties. En revanche, les articles 6
et 7
73
ont régularisé les modalités
d'entrée et de séjour. En effet, l'article 6 affirme que : «
Les nationaux de chacune des parties contractantes désireux d'exercer
sur le territoire de l'autre partie une activité professionnelle
devront, en outre, pour être admis sur le territoire de cette partie,
justifier de la possession :
1. D'un certificat de contrôle médical
délivré par [...].
2. Les nationaux de l'une des parties, désireux
d'exercer sur le territoire de l'autre partie une activité
professionnelle salariée devront, en outre, pour être admis sur le
territoire de cette partie, justifier de la possession d'un contrat de travail
écrit et revêtu du visa du Ministère du travail du pays
d'accueil ».
L'article 7 ajoute que : « Pour tout séjour en
territoire sénégalais devant excéder trois mois, les
ressortissants français doivent posséder et présenter
à toute réquisition l'autorisation de séjour ou la carte
d'identité d'étranger délivrée par les
autorités sénégalaises compétentes. Pour tout
séjour en territoire français devant excéder trois mois,
les ressortissants sénégalais doivent posséder et
présenter à toute réquisition le titre de séjour
délivré par les autorités françaises
compétentes »81.
Tenant compte du nombre important d'expatriés(quarante
milles français et vingt trois milles sénégalais) dans les
pays et le brassage qui s'est établi entre populations au fil des
siècles, un article spécifique a été
rédigé. Il s'agit de l'article 13 qui stipule que : « Les
ressortissants de l'une des parties contractantes résidant sur le
territoire de l'autre partie au 1er janvier 1974 sont automatiquement
dotés d'un titre de séjour renouvelable dont la validité
ne saurait inférieure à cinq ans. Ce document devra être
demandé dans un délai qui ne pourra pas excéder six mois
à compter de l'entrée en vigueur de la présente convention
».
Ces quelques lignes résument bien la nouvelle
convention sur la circulation des personnes entre les deux pays. Cependant, le
gouvernement sénégalais n'avait pas cessé de formuler une
demande de quotas d'immigrés pour les Sénégalais lors des
négociations et au-delà. Cette requête n'a pas
été prise en compte dans cette présente convention mais
des promesses lui ont été faites dans l'échange de lettres
qui a suivi la signature. On peut retenir ceci : « J'ai l'honneur de vous
faire savoir que le Gouvernement français fera ce qui est en son pouvoir
pour répondre au voeu ainsi exprimé, dans les limites compatibles
avec la conjoncture économique et sociale française
»82. Il faut savoir qu'en ce moment les autorités
françaises
81 Idem.
82
83 Idem.
74
avaient gelé en quelque sorte l'immigration et
craignaient qu'en accordant ce quota au Sénégal, elles vont
être obligées de l'étendre vers d'autres pays. La nouvelle
convention entrera en vigueur plutôt que prévu et les
conséquences n'ont pas tardé à se faire sentir dans les
deux pays. Nous y reviendrons dans la troisième partie.
Un autre accord très significatif relatif à la
coopération franco-sénégalaise est celui qui porte sur le
concours en personnel. Il régla les modalités de l'assistance
technique entre les deux pays. L'enjeu de cet accord était important du
fait de la sénégalisation en cours des emplois et de son
économie.
À la différence du texte précédent
qui prenait en compte la différence de statut de certains personnels, le
nouvel accord tend à uniformiser le statut des coopérants et
marque une volonté de la mainmise du Gouvernement
sénégalais sur le personnel d'assistance technique. Ainsi,
l'article 1 marque cette volonté d'uniformisation quand il affirme que :
« La présente convention s'applique à toutes les
catégories de personnel mis à la disposition du Gouvernement de
la République du Sénégal par la République
française. Certains concours en personnel pourront cependant faire
l'objet de conventions annexes ou particulières, notamment pour le
fonctionnement de certains services ou établissements et pour
l'exécution de missions temporaires à objectifs
déterminés ». Parmi les innovations majeures de ce texte
figurent le but et les objectifs précis du concours en personnel. En
effet, l'alinéa 2 de l'article 2 l'a bien mentionné. Cependant,
le texte a limité l'objectif de contrôle des coopérants
français par le Gouvernement sénégalais. Ce dernier peut
prendre des initiatives mais il lui faut toujours l'aval de l'autre partie.
Certains passages justifient nos propos, comme dans l'alinéa 1 de
l'article 3 : « Le gouvernement de la République du
Sénégal communique au Gouvernement de la République
française la liste des emplois à pourvoir comportant pour chacun
de ceux-ci : indication du lieu de résidence, description des
attributions et des qualifications souhaitées » ; ou encore dans
l'article 5 : « Toute mutation d'un agent visé par la
présente convention envisagée par le Gouvernement de la
République du Sénégal dont le résultat serait de
changer le lieu d'affectation, le niveau ou la nature de l'emploi auquel il a
été nommé en vertu de l'alinéa
précédent, devra faire l'objet d'une consultation entre
l'autorité sénégalaise compétente et la
représentation française au Sénégal
»83.
En ce qui concerne la répartition des charges
financières, les modalités sont restées les mêmes
à savoir une participation de la part du Sénégal et le
reste revenant à la République
84 Archives nationales, Paris, Coopération,
Cabinet et services rattachés au Ministre, Chargé de missions
(1959-1985), cotes 20000137/1- 20000137/2.
75
française. C'est le protocole d'application de
l'article 17 de cette présente convention qui a déterminé
les modalités de la charge. Selon ce protocole, « le Gouvernement
de la République du Sénégal s'engage à verser
à compter de la date d'entrée en vigueur de la convention
relative au concours en personnel apporté par la République
française à la République du Sénégal,
à titre de contribution à l'ensemble des charges prévues
à l'alinéa 1 de l'article 17, pour chacun des agents
considérés et pour toute la durée de mise à
disposition comprenant la durée du congé administratif
réglementaire faisant suite au séjour accompli, une allocation
forfaitaire mensuelle de cinquante-cinq mille francs CFA contre valeur de mille
cent francs français. Le personnel d'enseignement supérieur
étant pris en charge par le ministre français de
l'éducation nationale ne donnera pas lieu au versement de l'allocation
forfaitaire mensuelle prévue »84.
Malgré le souci d'uniformisation exprimé, des
conventions annexes ont été conclues pour déterminer le
statut de certains personnels. C'est le cas pour le personnel enseignant dont
l'annexe a défini les modalités de notation en ces termes «
Afin de permettre le déroulement normal de la carrière du
personnel enseignant, le Gouvernement de la République du
Sénégal autorise le contrôle pédagogique de ces
personnels et leurs examens professionnels dans les conditions prévues
par la réglementation en vigueur dans la République
française ». Il en va de même pour les magistrats qui «
continuent à être régis par les dispositions statutaires
qui leur sont propres sans préjudice des dispositions du présent
accord ». Enfin, les personnels militaires cadres hors budget dont
l'annexe « a pour but de déterminer les mesures
particulières applicables aux personnels militaires autre que ceux
visés à l'annexe 1 de l'accord de coopération en
matière de défense ».
La nouvelle convention relative au concours en personnel a
été adaptée en fonction de la situation et des besoins du
Sénégal. Cependant nous avons assisté dès son
entrée en vigueur, des plaintes de la part du Gouvernement de ce dernier
relatives aux coopérants mis à sa disposition. Ce point sera
amplement développé dans la dernière partie.
Pour clôturer l'analyse de ces nouvelles dispositions,
nous allons nous intéresser au nouvel accord en matière
d'enseignement supérieur. Nous avons déjà abordé
les accords précédents à savoir ceux de 1961, 1964 et
1970. Celui de 1974 n'affiche aucun changement par rapport à celui de
1970. La seule différence notable est le silence relatif au personnel
africain pris en charge provisoirement par la France. Il fallait l'inclure dans
la révision mais
76
l'essentiel des réajustements ont été
faits dans l'accord précédent. Ce dernier devrait être
appliqué pour pouvoir répondre aux besoins du gouvernement
sénégalais en cadres et dans sa politique de
sénégalisation. Pourtant, il faut savoir que le personnel de
l'enseignement supérieur n'a pas pu répondre aux attentes du
gouvernement. Par conséquent, plusieurs notes ont été
adressées aux autorités françaises pour souligner les
manquements de l'assistance technique d'une manière
générale et particulièrement l'enseignement
supérieur.
Lors de leur déclaration à la presse, les deux
gouvernements ont affirmé qu'ils ont révisé leurs accords
de coopération « sans bruit, ni propagande intempestive ».
Cette expression est fondée car les négociations ont eu lieu
à huis clos car l'opinion publique n'était pas impliquée
ou du moins n'a pas réussi à se faire entendre sur le sujet. Il
est difficile d'avoir le point de vue de l'opposition sénégalaise
ainsi que des populations à cette époque. Cependant, nous avons
vu que certaines phases des négociations étaient plutôt
délicates et nous reviendrons sur quelques incidents diplomatiques dans
notre prochaine partie. Ce que nous pouvons retenir à propos de cette
phase des relations franco-sénégalaise est, entre autres, que
plusieurs facteurs ont été décisifs pour expliquer la
réadaptation des accords de coopération : les changements
économiques et socio-politiques intervenus au Sénégal, les
réformes administratives françaises en politique
étrangère, l'impact du nouvel ordre économique mondial et
le désir de changement des pays africains. Ce n'a pas été
pas une opération facile car un système mis en place depuis une
décennie se retrouve totalement remis en cause. Ainsi, les relations
franco-sénégalaises jugées trop étroites devraient
être « normalisées ». Les deux parties ont essayé
de conserver une certaine proximité entre les deux peuples mais il s'est
parfois avéré difficile d'allier amitié et droit
international. En tout état de cause, dans la quasi-totalité des
nouveaux accords, le préambule fait toujours référence
à l'amitié entre les deux peuples.
En somme, vingt-huit accords ont été
signés en mars 1974 à Paris et publiés dans le Journal
officiel. Trois autres accords ont été paraphés en
septembre à Dakar sur trente neufs qui ont été
listés par le gouvernement sénégalais. Précisons
que nous n'avons pas pris en compte les accords de coopération en
matière de défense du fait qu'ils sont classés secrets. La
plupart des nouveaux accords sont entrés en vigueur en 1975 sauf ceux en
matière de circulation des personnes et d'établissement qui
avaient été anticipés. Il nous faut désormais nous
pencher sur les impacts que ces nouveaux accords ont eu sur les deux pays.
77
TROISIÈME PARTIE:
APPLICATION ET IMPACTS DES NOUVEAUX ACCORDS
78
Les accords de coopération
franco-sénégalaise ont été réadaptés
le 29 mars 1974 dans l'ensemble. Le contenu des nouveaux accords dessine une
nouvelle forme de relation. En effet, les relations très étroites
entre les deux peuples ont tendance à disparaître au profit de
liens fondés sur le droit commun international. Cette rupture a eu des
impacts au niveau des deux pays surtout dans les domaines économique,
social et politique. Nous verrons dans cette partie l' application des nouveaux
accords ainsi que leurs impacts.
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