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CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
Il est de toute évidence qu'en matière de
protection des droits humains, la question la plus importante n'est pas celle
de l'existence des instruments de protection, mais plutôt leur
effectivité. Au Tchad, le législateur a prévu des
règles quoique insuffisantes, qui garantissent aux victimes
d'expropriation le droit d'être relogées, autrement dit de
retrouver leur niveau de vie initiale. Il est toutefois dommage de constater
que l'application de ces règles à l'occasion de nombreux cas
d'expropriations intervenus au Tchad, notamment celui de la population de
Nguéli est ineffective. Cette expropriation est fortement marquée
par une série de violations des droits des victimes. Il est donc de la
responsabilité du législateur, du juge de l'expropriation et de
l'administration d'assurer une protection plus efficace du droit au logement
des personnes expropriées, en mettant en oeuvre des nouvelles mesures et
moyens tels que suggérés.
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En définitive, la question de la protection du droit au
logement des victimes d'expropriation pour cause d'utilité publique pose
problème dans bon nombre de pays africains où chaque
année, de centaines de milliers de personnes sont expulsées de
force par l'Etat ou des acteurs non-étatiques, en violation des textes
régionaux et internationaux qui protègent ce droit. Au Tchad, le
problème s'est fait ressentir durant les deux dernières
décennies, où l'Etat s'est livré à toute une
série d'expropriations dont la plupart est intervenue sans
procédure régulière et surtout sans garantie de relogement
des expropriés. Le cas le plus intéressant de cette série
d'expropriations est sans doute celui de la population de Nguéli,
expulsée en 2013. Toutes les mesures édictées par le
législateur pour la préservation du droit au logement des
victimes ont été violées par l'administration. Les groupes
vulnérables, notamment les femmes, les enfants et les personnes
handicapées ont été particulièrement
affectées. Cette expulsion forcée de la population, intervenue
avec un manque d'humanisme caractérisé a entrainé la
violation d'autres droits économiques, sociaux et culturels, comme
l'accès à l'eau potable, l'emploi, la santé et
l'éducation. Or, en vertu de son obligation de respect et de protection,
l'Etat est tenu de garantir et de protéger le droit à un logement
convenable et d'éviter de procéder à des expulsions
forcées. C'est au regard de cette grande messe de violation de la
dignité humaine organisée par l'Etat à Nguéli, que
nous avons formulé de multiples suggestions et recommandations à
l'endroit de l'administration.
Notons pour finir que l'adoption d'un Code d'expropriation
pour cause d'utilité publique qui prendra en compte toutes ces
propositions et recommandations, constituerait pour le Tchad une avancée
considérable dans sa lutte pour la protection des droits de l'homme et
la préservation de la dignité humaine.
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