SECTION II : LA PROCÉDURE ET LES EFFETS DE
L'INDEMNISATION DES
EXPROPRIÉS
L'indemnisation des expropriés est régie en
droit tchadien par les principes de la loi n° 25 sur la limitation des
droits fonciers citée supra et de son décret d'application
n° 187/PR/67 du 1 août 1967, qui sont sur un certain nombre de
points dérogatoires à une évaluation de la valeur du bien
exproprié dans les conditions « normales » tenant à la
valeur de marché d'un bien. Les spécificités de cette
indemnisation tiennent tant à la procédure suivie (PARAGRAPHE I)
qu'aux effets qu'elle produit (PARAGRAPHE II).
Paragraphe I : La procédure d'indemnisation des
expropriés
Les différentes étapes de cette
procédure sont entre autre l'évaluation des biens (A) et la
fixation du montant de l'indemnité (B).
71 Cons. Const., 21 janvier 2011, n° 2010-87
QPC.
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A- L'évaluation de la valeur des biens à
exproprier
Lorsqu'une opération d'utilité publique
nécessite une expropriation, cette dernière est
précédée d'une enquête d'un mois au moins et quatre
mois au plus72. Cette enquête est ouverte par un
arrêté du Ministre des finances, pris après avis du
Ministre ou de Ministres chargés de l'opération motivant
l'expropriation. L'une des finalités de cette période
d'enquête préalable est de permettre que soit
procédé à une évaluation des biens qui seront
frappés par l'expropriation envisagée.
En droit commun, le préjudice est évalué
par le juge civil ou pénal or, en matière d'expropriation,
l'évaluation des biens mis en cause est l'oeuvre de la commission de
constat et d'évaluation. Contrairement au droit camerounais, les textes
législatifs qui régissent l'expropriation au Tchad ne
prévoient aucune disposition relative à la composition et
à la mission de la commission de constat et d'évaluation, moins
encore les modalités d'évaluation des biens à exproprier.
Au Cameroun, l'évaluation des maisons touchées par
l'expropriation est règlementée par l'arrêté n°
00832/Y.15.1/MINUH/D 000 du 20 novembre 1987 fixant les bases de calcul de la
valeur vénale des constructions frappées d'expropriation pour
cause d'utilité publique. Aux termes de cet arrêté, la
valeur des constructions est visée et calculée sur la base d'un
taux forfaitaire au mètre carré variant. A la
vérité, cette évaluation doit consister à
déterminer la valeur exacte des biens que les occupants seront
contraints de céder au profit de la personne expropriante. Elle doit
être effectuée préalablement afin que soit
déterminé le montant à payer aux victimes à titre
d'indemnisation.
Dans le cas précis de la population de Nguéli,
l'expropriation est intervenue sans qu'aucun constat, ni évaluation
préalable des biens ne soit effectué. Ce n'est qu'après la
démolition des habitations, que le comité de gestion de crise,
avec l'appui du collectif d'avocats et d'huissiers de justice constitué,
a procédé au recensement et à l'évaluation des
biens.
Selon le rapport présenté par le comité
de crise de Nguéli-sud, au total 1062 habitations ont été
détruites, soit 89 habitations construites en dur, 120 en semi dur, 638
en matériaux non durables et enfin 215 bâties (des investissements
d'une ou de deux chambre)73. Le coût total des investissements
est estimé à 326 000 000 de francs CFA.
72 Art. premier du décret n°187,
supra.
73 Cf. rapport présenté par le
comité de crise de Nguéli-sud sur les estimations des coûts
d'investissements et dommages intérêts, p.2.
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Suivant la procédure normale, la phase du constat et
d'évaluation des biens est suivie par celle de la fixation du montant de
l'indemnité.
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