12 CHAPITRE II : LES MOTIFS DU CHOIX DE RECOURS
La perception de la nature de la maladie par le
patient ou par son entourage, oriente le plus souvent son lieu de recours. Le
choix du mode de recours est spécifié par l'impression dont le
patient a de sa maladie.
12.1.1 II-1/ LES MOTIFS CULTURELS
Ici la conception de la maladie change, « elle n'est
plus d'origine naturelle, résultat d'un déséquilibre
quelconque au niveau de l'organisme, mais relève du mauvais sort, du
mauvais esprit, du mauvais oeil » Touré,(1997) « le
tradipraticien devient alors le recours le plus efficace ».
Ce choix est aussi spécifié par la
qualité et la confiance accordées aux lieux de soins, aux
praticiens soit par l'intermédiaire d'une tierce personne qui a
traité avec succès une maladie similaire soit par la
société qui influe fortement sur le vécu quotidien.
Le village de Diofior reste l'un des derniers bastions de la
culture sérère ce qui lui confère son caractère de
société traditionnaliste. Les habitants ont
développés et pérennisé pendant très
longtemps des pratiques culturelles, relevant des sciences occultes (les
pangols). Mais avec l'islamisation qui concerne plus de 98% de la population,
le recours à ces pratiques se fait de plus en plus de manière
discrète.
Ici, la maladie trouve une explication à travers une
vision non scientifique du monde. Elle est souvent d'origine surnaturelle. Le
traitement de certaines maladies n'est pas connu de la médecine moderne.
« C'est là où le processus psychique joue un rôle
important expliquant ainsi le recours au guérisseur, au marabout, au
sorcier lors de la maladie » Touré,(1997).
Le choix d'un type de recours est déterminé
certes par les critères de proximité mais beaucoup plus par son
aptitude à soigner efficacement la maladie selon sa nature et sa
gravité supposées. Les facteurs sociaux et culturels agissent
plus sur l'attitude du malade à recourir à tel ou tel type de
soins que les facteurs géographiques « l'utilisation des
structures de soins se situe à la rencontre de l'organisation du
système de soins et de la représentation que l'utilisateur se
fait de sa maladie » Thouez, (1987).
12.1.2 II-1-2/ LES MOTIFS SOCIOECONOMIQUES
Dans cette partie, nous allons étudier la
fréquentation de la population aux soins de santé et ensuite
analyser les raisons qui poussent la population à adopter certaines
attitudes.
Pour cela, une classification en catégories sociales de
quelques patients pris au hasard est proposée à travers le
tableau suivant :
Tableau 19: Typologie des
catégories sociales
Classe
|
Catégorie
Sociale
|
Professions
|
Revenus en (FCFA)
|
Effectif de patients en VA
|
Effectif de patients en VR
|
A
|
Catégorie sociale
PAUVRE
|
Sans profession, ménagère
|
<30 000
|
56
|
40
|
B
|
Catégorie sociale
INFERIEURE
|
Tailleur, teinteur, vendeur, tresseuse
|
30 000<R<50 000
|
36
|
25,7
|
C
|
Catégorie sociale
INTERMEDIAIRE
|
Petits commerçants, restaurateurs, maîtresse de
cuisine, couturier, mécanicien, ouvrier
|
50 000<R<100 000
|
29
|
20,7
|
D
|
Catégorie sociale
NANTIE
|
Instituteur, professeur, agent, infirmier, sage-femme
|
>100 000
|
19
|
13,6
|
Source : DIOUF, enquêtes sur le terrain,
2013
Cette classification est très relative. Les
catégories sociales ont été élaborées en
fonction des revenus.
Toutefois, il peut arriver qu'une des professions change de
catégorie dans une autre zone où le niveau économique est
soit plus élevé, soit moins élevé que celui de
notre zone d'étude. Par exemple est classé dans la
catégorie sociale inférieure.
Il peut être classé dans la catégorie
sociale intermédiaire puisque notre zone d'étude est une commune
rurale où la principale activité est l'agriculture.
La classification fait ressortir quatre (4) groupes de
catégories sociales :
- La classe A/ la catégorie sociale pauvre qui
constitue (40 %) des patients ;
- La classe B/ la catégorie sociale inférieure
(25,7%) des patients ;
- La classe C/ la classe sociale intermédiaire (20,7
%) ;
- La classe D/ la classe sociale nantie (13,6%).
Cette classification nous permet d'étudier à
travers le tableau les comportements sanitaires de la population par rapport
à la structure de santé.
L'insuffisance de revenus paralyse souvent l'accès aux
soins de santé. A mesure qu'un traitement touche à sa fin, les
coûts de consultations deviennent de plus en plus élevés du
fait du changement du niveau de consultations. En effet, les premières
consultations sont effectuées par des médecins, des infirmiers ou
des sages-femmes. Les traitements sont suivis par ces mêmes praticiens.
Mais les dernières consultations sont impérativement
contrôlées par des médecins. Ceci pour mieux statuer sur
l'évolution du malade.
Les coûts de prestation diffèrent alors en
fonction de la catégorie professionnelleet du niveau de soins. Ils sont
plus chers pours les médecins.
Pour Touré, (1996), le problème
d'accessibilité financière des structures modernes constitue un
obstacle à leur utilité ». Et pour La Rocque,(1996)
sachant « qu'on ne se présente pas dans une structure de soins
sans argent », les malades ont tendance à négliger de
plus en plus les soins modernes.
Ainsi, la population démunie ne disposant pas de moyens
suffisants pour accéder correctement aux soins de santé dont les
coûts leur paraissent élevés. Les importantes charges
qu'impose la maladie, les difficultés auxquelles elles sont
confrontées et les répercussions des dépenses
financières effectuées en soins de santé sur leur niveau
de vie font dire à Salem que la pauvreté a un
prix « povertyisexpensive ». Pour combler ce
déficit, elles y associent la médecine traditionnelle dont les
coûts de prestations, leur sont plus abordables.
Cette attitude irrégulière de la
fréquentation est perçue par Niang, (1997). Dans une étude
réalisée dans la vallée du fleuve Sénégal,
elle affirme que « les ménages aisés se
réfèrent le plus souvent aux structures de soins de santé
secondaires alors que les ménages à faible revenu
fréquentent plus la médecine traditionnelle, les structures
primaires et s'adonnent à l'automédication ».
|