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La gestion des déchets biomédicaux dans le district sanitaire de Bogodogo: cas de l'hôpital du district


par Théophile 2e Jumeau KABRE
Université Joseph Ki-Zerbo - Mémoire de Maîtrise en géographie 2013
  

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4.1. Les contraintes ou dysfonctionnements

4.1.1. Les contraintes institutionnelles et organisationnelles

L'ampleur du problème lié aux déchets biomédicaux est déterminée non seulement par l'importance de la production des déchets, mais aussi par le risque d'infection qu'ils représentent pour la santé de l'homme et pour l'environnement. Dans les établissements de soins où les règles d'hygiène générales, individuelles ou collectives, ne sont pas respectées, les professionnels de santé et les patients peuvent être victimes d'infections nosocomiales.

Les textes législatifs et réglementaires régissant des DBM au Burkina Faso sont suffisamment clairs sur les dispositions à respecter aussi bien pour la pré-collecte, la collecte, le stockage, le transport, l'évacuation, l'élimination des DBM, que pour le personnel de gestion, les mesures de sécurité et les équipements de protection. La section 1 du chapitre 2 du décret N°2008-009/PRES/PM/MS/MECV du 10 janvier 2008 portant organisation de la gestion des déchets biomédicaux et assimilés, stipule que les déchets infectieux, anatomiques et déchets issus des activités de soins (gants, compresses, cotons, pansements, champs opératoire) doivent être collectés dans des sacs-poubelle; les déchets piquants ou tranchants (aiguilles, lames de bistouri, mandrins) sont collectés dans des boîtes de sécurité de couleur jaune ; les déchets de laboratoires (boîte de pétri, pipette) et déchets spéciaux (médicaments périmés, restes de produits, métaux lourds, produits chimiques, déchets radioactifs) sont collectés dans des sacs-poubelle de couleur rouge ; enfin, les déchets assimilables aux ordures ménagères dans des sacs-poubelle de couleur noire.

Cependant, il n'existe aucune structure chargée de contrôler la mise en oeuvre de ces lois et l'application effective des sanctions. Dans la pratique, les textes existants ne sont pas suffisamment vulgarisés dans les formations sanitaires, ce qui limite leur application. En effet, la dernière journée d'information sur la politique sanitaire nationale et le code de l'hygiène publique au district sanitaire de Bogodogo a eu lieu depuis le 10 mai 2007. Une autre insuffisance réside dans l'absence de dispositions relatives aux autorisations ou aux permis de créer des sociétés, des associations ou des entreprises privées, chargées spécifiquement du traitement des DBM à l'image

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des services privés de collecte des déchets ménagers. Pour une gestion efficace des DBM, chaque formation sanitaire doit s'associer à une société de traitement des déchets.

La gestion des DBM à l'hôpital du district sanitaire de Bogodogo se situe à l'étape embryonnaire malgré les efforts consentis par le bureau d'hygiène hospitalière. Cette gestion présente de ce fait quelques insuffisances : l'absence d'une structure de supervision impliquant l'ensemble des acteurs de l'hôpital ; l'absence d'une réglementation interne sur la gestion des DBM ; l'absence d'un budget spécifique alloué à la gestion des DBM. Les autres contraintes majeures portent sur l'absence de données sur les quantités des DBM produites. Le bureau d'hygiène souffre d'une léthargie par manque de moyens matériel et financier, de personnel, de motivation, de programme et de soutien administratif. Au moment où l'enquête était menée, le bureau d'hygiène était en train de mettre en place un plan de gestion des DBM.

? Les contraintes humaines et matérielles

A priori, le personnel soignant dispose d'un niveau de connaissances dans la mesure où il bénéficie d'une formation sur la prévention des infections (PI) au début de sa carrière professionnelle, mais les attitudes et les pratiques ne respectent pas les normes en matière de gestion des DBM. C'est le cas par exemple du service du bloc opératoire où nous retrouvons parfois des aiguilles, et même des seringues sur les bocaux d'aspiration ou les champs opératoires. Les programmes de formation continue des agents de santé de l'hôpital du district par le biais de cours de perfectionnement ou de séminaires de recyclage sont rares, et, cela, du fait de la baisse du budget réservé à cet effet ces deux dernières années. Cela multiplie les possibilités d'accident pour le personnel de soins, surtout pour les garçons et filles de salles qui nettoient les salles d'opération. Nous avons aussi constaté que le personnel de santé de l'hôpital consacre peu de temps aux tâches de gestion des DBM comme l'affirme un enquêté « Je ne m'occupe pas de la gestion des déchets, il faut voir le personnel de nettoyage ». En 2010, les cas d'accidents par exposition au sang et par piqûre à l'hôpital du district de Bogodogo se chiffraient entre 12 et 16 personnes. Le personnel d'entretien et de nettoyage qui dispose en général d'un niveau de connaissances relativement bas a des comportements à risque lors de la manipulation des DBM.

En ce qui concerne le public qui fréquente l'hôpital du district de Bogodogo, notamment les accompagnants des malades et les visiteurs, l'observation directe a montré qu'il n'est pas conscient des dangers liés à la gestion des DBM. Cela s'explique par le fait que des excrétas humains ont été retrouvés, au cours de notre enquête, dans la cours de la morgue et aux alentours des incinérateurs qui sont des endroits à fort risque d'infection.

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Les responsables des services d'hygiène doivent prendre en compte ces besoins car l'insuffisance du matériel de protection et des équipements de conditionnement, le manque de formations du personnel de gestion des DBM, les coupures d'eau et d'électricité sont de véritables obstacles qui s'opposent au respect des règles d'hygiène hospitalière, et partant, celui des normes de gestion des DBM.

La plupart des services enquêtés réalisent uniquement le tri entre les déchets piquants ou coupants et les autres types de déchets. Cela peut s'expliquer par le fait que les récipients de pré-collecte ne sont pas en nombre suffisant dans les unités de soins et ne sont pas appropriés à la manutention. En effet, les boîtes de sécurité utilisées pour le tri des objets piquants ne sont pas adaptées car le carton est perforable par les termites et est très sensible à l'humidité. Le mélange de déchets courants et de déchets infectieux augmente les risques d'infection (cf. Photo 8, page 56). De plus, nous notons une insuffisance de sacs-poubelles et de boîtes de sécurité, ainsi qu'un manque d'équipements de protection adéquats pour le personnel de gestion des DBM. Il n'existe ni un système de code couleur à l'hôpital du district qui puisse faciliter l'identification des déchets selon leur catégorie, ni un symbole international du risque biologique ou du risque des radiations ionisantes sur les poubelles.

Les boîtes de sécurité des différents services de l'hôpital du district sont incinérées par l'incinérateur Baeul car l'incinérateur De Montfort spécifiquement destiné à incinérer ces types de déchets n'est plus fonctionnel. Ce dernier vient remplacer l'incinérateur De Montfort qui nécessite beaucoup plus de combustibles et qui ne produit pas suffisamment de chaleur. Il est en mesure d'incinérer une trentaine de sacs poubelles et plus de vingt boîtes de sécurité par jour. Au regard du nombre de boîtes de sécurité usagées chaque année dans l'ensemble du district (3184 en 2011), il est impératif que chaque formation sanitaire aie un incinérateur, ne serait-ce que pour l'élimination de boîtes de sécurité. Tous les autres types de déchets sont brûlés, à ciel ouvert à l'intérieur de l'hôpital et les cendres sont accumulées à l'air libre (cf. Photo 6, page 51). Cette situation est contraire à l'article 13 de la loi N° 022-2005/ AN portant code de l'hygiène publique au Burkina Faso et à l'article 49 de la section 7 de la loi N° 005/97/ADP portant code de l'environnement au Burkina Faso. Si les responsables du service d'hygiène et de l'entreprise de nettoyage pouvaient fournir suffisamment de sacs-poubelle, tous les déchets allaient être brûlés au niveau des incinérateurs. Selon l'OMS, il faut une température d'au moins 800° C pour détruire les germes pathogènes contenus dans les DBM or, à ciel ouvert, on n'excède pas 100° C.

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Il n'y a qu'un seul préposé à l'incinération ; s''il tombe malade, il n'y a personne pour le remplacer ; les déchets peuvent alors demeurer au pied de l'incinérateur jusqu'à trois semaines, voire un mois. Les déchets courants, les déchets radioactifs et les autres types de déchets infectieux sont collectés et entassés à l'intérieur de l'hôpital, à ciel ouvert, constituant ainsi un dépôt sauvage, mais les déchets courants peuvent parfois séjourner pendant 48 à 72 heures avant d'être évacués ; ceci par manque de personnel de collecte et à l'inadéquation du moyen de transport. En effet, le moyen de transport utilisé n'est pas adapté ; au lieu d'un chariot, il n'y a qu'une seule brouette pour transporter tous les déchets des différents services jusqu'au site de traitement qui se trouve à environ deux cent mètres de ces derniers. Néanmoins, le site de dépôt des déchets n'est pas accessible par les enfants compte tenu du fait que l'hôpital est bien clôturé et que les habitations y sont un peu distantes (Figure 3, page 21). Cependant, certaines personnes viennent parfois couper les herbes dans la cour l'hôpital pour aller nourrir leurs animaux domestiques. Elles rentrent par la porte principale sans aucune forme d'interdiction car les responsables de l'hygiène ont du mal à gérer les herbes qui poussent dans la cour, source de prolifération de reptiles très dangereux (serpents); c'est la raison pour laquelle ils autorisent les femmes du service de nettoyage à cultiver des arachides ou du haricot dans l'enceinte de l'hôpital afin de réduire la superficie à défricher. Ces faits sont étayés par les propos du préposé à l'incinérateur qui dit : « J'ai payé un jeune homme à mes propres frais pour qu'il désherbe l'alentour des incinérateurs ; on ne pouvait même pas y accéder ». Ces pratiques vont à l'encontre des règles d'hygiène et de sécurité en milieu hospitalier.

Les caractéristiques du site de stockage ne sont pas conformes aux réglementations nationales. Les déchets biomédicaux font l'objet d'un dépôt sauvage sur le site qui ne dispose d'aucune clôture capable de restreindre l'accès aux individus ou les mettre à l'abri des intempéries, de certains animaux, oiseaux sauvages et des insectes. Des études déjà effectuées montrent que ces êtres vivants peuvent transmettre des germes pathogènes aux personnes qui les consommeront (KANKOUDRI, 1995-1996).

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Photo 8 : Un mélange d'ordures ménagères et de déchets de soins.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius