Les difficultés des armées nationales à lutter contre le terrorisme. Cas de l'armée camerounaise.par Germain GaàƒÂ«tan ABOMO BENGONO Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences politiques 2016 |
PARAGRAPHE 2 : L'ACTION DE L'ARMEE FRANCAISE DANS LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME EN AFGHANISTANLes forces armées françaises ont été engagées sur les théâtres d'opérations aux côtés des forces armées américaines en Afghanistan. Cependant, la France avait refusé d'inscrire son action dans le cadre de la « guerre globale contre le terrorisme ». Elle a par ailleurs, refusé d'intervenir en Irak aux côtés des Etats-Unis, allant jusqu'à dénoncer la stratégie américaine84(*). En cela, « l'approche française » se distingue clairement de celle développée par l'administration Bush. Les autorités françaises font ainsi valoir que, l'intervention militaire en Afghanistan, ne traduise pas un engagement dans le cadre de la « guerre au terrorisme ». Mais, dans celui de la résolution 1368, adoptée dès le 12 septembre 2001 par le Conseil de sécurité (droit à la légitime défense reconnu par la charte des Nations Unies). Dans la logique française il ne s'agissait pas tant de combattre les « terroristes », que de mettre un terme au régime des Talibans afin d'empêcher que les attentats comme ceux du 11 septembre ne se reproduisent. Ce qui relevait bien d'objectifs militaires. Ceci explique que certains officiers français aient avancé qu'en Afghanistan il n'y avait pas de stratégie française affichée et singulière85(*). Plus fondamentalement, ces propos mettent en exergue la particularité et l'ambigüité de l'engagement français en Afghanistan et explique par conséquent le fait qu'il a été « modeste et mesuré »86(*). Ainsi, cette partie du travail sera structurée sur l'engagement des forces françaises dans le théâtre afghan (A), et l'enlisement de celles-ci dans ce conflit (B). A-L'ENGAGEMENT DES FORCES ARMEES FRANCAISES DANS LE THEATRE AFGHANAu lendemain des attentats de New York, une équipe militaire de liaison a rejoint l'état-major du commandement américain, le Central Command (CENTOM)87(*) basé à Tampa en Floride afin d'assurer le contact entre les autorités militaires des deux pays. La France a été sollicitée pour participer, sous le commandement américain, à l'opération Enduring Freedom autorisée par la résolution de l'ONU 1368 du 12 septembre 2001. En effet, le déploiement de l'armée française dans un pays étranger est désigné sous le nom de l'OPEX (Opération Extérieure). L'OPEX Afghanistan implique en permanence environ 3500 soldats français. Ceux-ci appartiennent, en majorité, en des compagnies de combat de l'armée de terre, notamment des bataillons de chasseurs alpins, des régiments d'infanterie de marine et des régiments étrangers d'infanterie ou de parachutistes (Légion étrangère). L'engagement des armées françaises sur le théâtre afghan avait un triple objectif, de chasser les talibans de Kaboul, de détruire les camps d'entrainement d'Al-Qaïda et de permettre la constitution d'une force de défense nationale afghane. Le 31 octobre 2014 marque la fin de l'opération Pamir, nom donné à l'intervention française en Afghanistan. Participent à cette mission un détachement aérien, un bataillon français déployé à Kaboul (le BATFRA) et une composante aéromaritime en océan Indien dans le cadre d'Enduring Freedom. A partir d'août 2003, un groupement de forces spéciales de 200 hommes est également intégré à l'opération. Les soldats français contribuent aux opérations de combat contre les insurgés. Dès 2002, la France monte un détachement d'instruction (Epidote) destiné à assurer la formation des forces afghanes au sein d'Enduring Freedom (formation de bataillons de combat et de cadres) alors inexistantes. Les forces françaises se sont directement engagées dans la lutte contre le terrorisme en assurant des missions terrestres (2 septembre 2001- 31 janvier 2002)88(*) et maritimes89(*). Par ailleurs, la France contribuait aux actions de sécurisation, de stabilisation et de formation conduites par la Force internationale d'assistance à la sécurité90(*) de l'OTAN (FIAS ou ISAF). Le plus grand effectif français sur le théâtre afghan, accomplissaient de multiples opérations. Entre autres, les missions de protection dans les villages, les officiers qui participaient aux Shuras (réunion avec les chefs de villages afghans). Le personnel militaire français menait, des actions auprès de la population (visites médicales, distribution des tracts, etc.). Les militaires français assuraient également, la protection des opérations de reconnaissance (visant à vérifier la sécurité dans une zone ou d'un itinéraire), ou des opérations de capture des talibans ou de confiscation d'armes. Enfin, ils assuraient la sécurité des convois logistiques (transportant par exemple de la nourriture ou les colis de famille). Elles sont acheminées en VAB (Véhicule de l'Avant Blindé) ou en hélicoptères sur les lieux de mission. La France s'est par ailleurs engagée à contribuer largement à la formation de l'armée afghane (Operational Mentoring and Liaison Team qui visait à compléter les actions de formation en accompagnant les forces afghanes au combat)91(*). Figure N°3 : Projection de deux VBCI français en Kapisa et Surobi en Afghanistan. Source : SIRPA Terre. http://.defense.gouv.fr/terre Annoncé en juin 2011 par le président de la république française, le désengagement des armées françaises en Afghanistan, celui-ci a débuté à l'automne de la même année. Fin 2012 les forces combattantes françaises sont totalement retirées d'Afghanistan. Les militaires de la force se sont alors concentrés sur les opérations logistiques de désengagement ainsi que sur l'accomplissement des responsabilités françaises restantes au sein de l'ISAF. Au terme de 13 ans d'intervention, les armées françaises ont ainsi contribué à la formation des forces de défense et de sécurité afghanes capables d'affronter de façon autonome, les défis sécuritaires qui se posent dans le pays. Depuis 2001, plus de 70000 militaires français ont été engagés au sein dans l'opération Pamir. Au plus fort des opérations, 4000 militaires y participaient. Cet engagement a coûté la vie à près de 89 soldats français et fait plus de 700 blessés. Mais l'objectif de cet engagement n'a pas été atteint dans la mesure où l'Afghanistan reste toujours l'épicentre du terrorisme international où, les Talibans gardent toujours leur capacité de nuisance et maintiennent toujours l'initiative contre les forces afghanes. Le terrorisme quant à lui est monté d'un cran avec l'apparition de l'organisation de l'Etat Islamique. * 84 « (...) Contre le terrorisme, ce n'est pas une guerre qu'il faut engager » ; déclaration du gouvernement français sur la situation du Proche-Orient et la participation de la France à la mise en oeuvre de la résolution 1701 (2006) adoptée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, par Dominique de Villepin, 7 septembre 2006. * 85 Général Vincent Desportes, « enseignement stratégiques et militaires du conflit afghan », affaires-stratégiques.info, septembre 2011, p. 17. * 86 Voir les propos de Yann Braem lors du colloque CERI/SD « l'action militaire extérieure de la France : enjeux et perspectives », 14 juin 2007. * 87 Le CENTOM joue un rôle très important dans la lutte contre le terrorisme. Il a été créé en 1983 et son quartier général se trouve à Mac Dill en Floride. Il couvre une zone de responsabilité de 25 pays parmi lesquels les pays du Proche-Orient et les pays d'Asie centrale. Et la campagne militaire américaine d'Afghanistan a été sous son commandement. * 88 Engagement d'une compagnie renforcée du 2e régiment d'infanterie marine (21e RIMa) chargée de sécuriser l'aéroport de Mazar-e- Sharif et Kaboul afin d'évaluer la situation et de prendre contact avec les forces spéciales américaines et les acteurs locaux ; engagement d'un détachement de 200 membres des forces spéciales aux côtés des forces spéciales américaines dans le sud de l'Afghanistan dans des actions de lutte contre les Talibans (missions de reconnaissance aérienne - 21 octobre 2001 - 8 février 2002 ; opérations aériennes offensives conduites par l'aéronavale et l'armée de l'air en appui direct des forces terrestres américaines). * 89 La marine nationale contribuait à la guerre globale au terrorisme au travers du dispositif allié Enduring Freedom. A trois reprises, la France a assuré le commandement de la Task Force 150 (septembre 2003 - janvier 2004, juin - septembre 2004 et août - décembre 2005), une force marine composée de près de 10 bâtiments appartenant à huit pays, dont les USA, la Grande-Bretagne, le Pakistan, l'Allemagne, la France. * 90 Créée le 20 décembre 2001, la résolution 1386 crée la Force Internationale d'Assistance et de Sécurité sous l'égide de l'OTAN et l'autorise à opérer en Afghanistan, avec pour missions : protéger le peuple afghan par lutte contre l'insurrection ; renforcer les capacités des forces de sécurité afghanes ; permettre le développement économique et la reconstruction politique du pays. * 91 En visite en Afghanistan le 17 décembre 2006, le Ministre de la Défense a annoncé le retrait, en janvier 2007, de 200 Forces Spéciales qui opéraient sous commandement américain (proche de la frontière avec le Pakistan) et le lancement d'un programme d'entrainement des forces spéciales afghanes. |
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