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La légalite des moyens de preuve dans le procès pénal en droit français et libanais


par Ali Ataya
Ecole doctorale 88 Pierre Couvrat (Poitiers) - Droit et Sciences Politique, Université du Maine - Thèse de doctorat en Droit privé 2013
  

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Partie I

La notion de légalité de la preuve

25. Exposé du problème de la légalité de preuve. Il est clair que la liberté de preuve comme principe domine tout le procès pénal, mais normalement il n'y a pas de liberté dans la recherche de la preuve pénale sans limite parce qu'une liberté totale en matière de preuve sans

limite et borne risque vite de se transformer en abus 213 . Selon M. Jérôme Bénédict, les États démocratiques confèrent à leurs agents des pouvoirs étendus, mais en même temps avec

214

fermeté, parallèlement, ils fixent des limites strictes à leur action

.

26. Distinction entre légalité des preuves et preuves légales. Il est important de remarquer qu'il ne faut pas confondre les notions de « légalité des preuves » et de « preuves légales ». Le problème de la légalité des preuves a trait à la question de l'admissibilité de ces dernières, et

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non à celle de leur valeur probante . Les limites à la liberté des preuves découlant des principes généraux sont beaucoup plus importantes que celles résultant des textes juridiques. Les premières (découlant des principes généraux) s'appliquent, à toutes les infractions et devant toutes les juridictions pénales à tous les autres stades de la procédure pénale. Les organes étatiques et judiciaires doivent les respecter, quel que soit le moyen de preuve, tels que les interrogatoires, la détection sensorielle et la perquisition. Le principe de la légalité de preuve tend à éliminer les moyens illégaux et d'autres moyens scientifiques du cadre du procès pénal. En ce qui concerne la personne poursuivie, c'est le respect des libertés individuelles, de la sécurité physique et morale de l'individu et des droits de la défense qui l'imposent. Pour la justice pénale, c'est la dignité et les valeurs fondamentales de la civilisation moderne qui les justifient. La question ne concerne pas seulement le recensement

216

.

de la preuve, mais comprend aussi les manières dont ces preuves sont obtenues

213 V. H. Matsopoulou, Les enquêtes de police, Thèse de droit, L.G.D.J., Paris, 1996, n° 879, pp. 711-712 : «... la liberté de preuve ne permet pas toutes recherches. Dans ce domaine, les principes généraux condamnent, outre la torture, l'astreinte, le serment imposé au prévenu, le duel judiciaire ».

214 J. Benedict, Le sort des preuves illégales dans le procès pénal, Thèse de droit, Université de Lausanne, Éditions Pro Schola, Lausanne, 1994, p. 18.

215 J. Benedict, Le sort des preuves illégales dans le procès pénal, op. cit., p. 23.

216 V. en langue arabe : E. Nammour, Cour criminelle. Etude comparative, 1e éd., Éditions Juridiques Sader, Beyrouth (Liban), 2005, t.2, n°1347, p. 929.

27. Comment trouver le bon équilibre? On peut dire d'une manière générale que la procédure pénale a pour objet de concilier deux intérêts présentés comme antagonistes afin de

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trouver l'équilibre le plus satisfaisant

. Selon M. Jean Pradel, « la preuve est peut-être de

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toutes les branches de la procédure pénale, celle qui est la plus vivante et surtout la plus complexe et, par conséquent, la moins sûre, la moins fixée. On doit rappeler en effet que la preuve se trouve au confluent de deux logiques antagonistes : celle des droits de l'individu (à l'intégrité corporelle, à la vie privée) et celle des droits de la société, ces droits que l'on est tenté de défendre en profitant des technologies modernes et en bâtissant au profit des

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autorités de police et de justice un système de pouvoirs importants » . La procédure pénale donc a pour mission de réaliser l'équilibre le plus satisfaisant possible entre deux exigences opposées : la nécessité de protéger la société contre les délinquants et les criminels qui la menacent d'un part, et celle de garantir les droits de l'individu et le respect de la personne

humaine d'autre part 219 . Plus précisément, la problématique qui concerne la recherche de la preuve s'articule autour de l'idée de trouver l'équilibre entre la liberté et la légalité dans la recherche et l'administration de la preuve en matière pénale. Un autre concept d'équilibre s'exprime par un juste équilibre entre les intérêts publics et privés qui est à notre avis une

. Pour

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notion ou un critère de distinction ambigu et qui reste toujours un équilibre difficile

mettre en oeuvre cet équilibre souhaitable, comment chercher efficacement une solution qui n'affaiblit pas le principe de la légalité de la preuve? Il faut trouver une solution juridique qui permet ou a pour objet de déterminer minutieusement le sort des preuves illégales dans le procès pénal. Certains auteurs, comme M. Jérôme Bénédict considèrent que s'agissant d'une preuve illégale, dans un cas comme dans l'autre, il est possible d'envisager deux solutions extrêmes et opposées, suivant que l'on entend faire prévaloir l'intérêt de la société ou celui de l'individu : 1° : Poursuivre et juger les délinquants est un objectif prioritaire, de telle sorte

217 V. G. Levasseur, A. Chavanne, J. Montreuil, B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et procédure pénale, 14e éd., Dalloz, 2002, n° 274, p. 121 : « L'intérêt social voudrait une procédure rapide, mais une certaine prudence est nécessaire car il faut laisser à la personne poursuivie la possibilité d'organiser sa défense ».

218 J. Pradel, « La preuve en procédure pénale comparée (Rapport général) », in Revue internationale de droit pénal, 1er-2e trimestre1992, vol. 63, Actes du Séminaire International organisé par l'Institut Supérieur International de Sciences Criminelles à Syracuse (Italie) du 20 au 25 janvier 1992, pp.13-32. V. spec. p. 13.

219 J. Benedict, Le sort des preuves illégales dans le procès pénal, Thèse de droit, Université de Lausanne, Éditions Pro Schola, Lausanne, 1994, p. 18.

220 V. C. Robinson et A. Eser, « Le droit du prévenu au silence et son droit à être assisté par un défenseur au cours de la phase préjudiciaire en Allemagne et aux États-Unis d'Amérique », in R.S.C., juillet-septembre 1967, n°3, pp. 567-618, V. spec. p. 581 : « Combien il est difficile de trouver un équilibre satisfaisant, entre d'une part l'intérêt public, qui exige une enquête vigoureuse et sans entraves, et d'autre part l'intérêt individuel du suspect qui a besoin d'un appui pour sa défense ».

qu'il convient d'admettre tout moyen de preuve propre à asseoir la conviction des juges, sans

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tenir compte du vice dont il pourrait être entaché

. 2° : Lorsque le législateur a adopté la

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règle transgressée, c'était la protection des individus qu'il avait en vue ; or, ce but ne peut être vraiment atteint que si l'on soustrait à l'appréciation du tribunal les preuves obtenues par des

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procédés illégaux . En effet, la seule réponse serait de dire clairement que la légalité comme principe fondamental dans le procès pénal surtout dans la recherche de preuve peut vivre et exister à côté de la liberté de preuve sans pour autant perdre l'efficacité de la procédure pénale dans la recherche et l'administration des preuves, mais à condition que le principe de la liberté de la preuve qui domine la procédure pénale soit sous le contrôle et la limite imposés par le principe de la légalité qui nécessite à son tour d'être appliqué de manière stricte, obligatoire et de façon satisfaisante. De cette manière, on peut trouver un équilibre satisfaisant entre l'efficacité du système pénal et l'effectivité des droits accordés à l'individu, c'est-à-dire un équilibre entre légalité et efficacité. À notre avis, cet équilibre introuvable aujourd'hui en droit libanais et français nécessite indéniablement le renforcement du principe de légalité de preuve. Cela signifie renforcer les outils de l'exclusion de la preuve obtenue d'une manière illégale en droit libanais et français, dans la mesure où il semble que la théorie des nullités telle qu'elle est en vigueur aujourd'hui au Liban et en France ne peut assurer la sanction des formalités prévues par la loi et ne constitue pas une règle efficace d'exclusion de toutes les preuves illégales.

28. Une approche de la notion de principe de la légalité de la preuve. La procédure pénale a pour objectif principal la recherche de la vérité judiciaire et non celle d'une culpabilité, à savoir la preuve de la vérité. La preuve en matière pénale est libre, ce qui implique le libre choix des moyens de preuve. Mais cette liberté de preuve signifie que tous les moyens de preuve sont admissibles, sous réserve d'avoir été légalement obtenus parce que la preuve ne

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doit pas être obtenue de façon illégale . La recherche de la preuve en matière pénale revêt

221 J. Benedict, Le sort des preuves illégales dans le procès pénal, op. cit., pp. 19-20.

222 J. Benedict, Ibid., p. 20.

223 V. en ce sens : A. Leborgne, « L'impact de la loyauté sur la manifestation de la vérité ou le double visage d'un grand principe », in RTD Civ., juillet-septembre 1996, n°3, p. 535 : « En procédure pénale, liberté des preuves ne peut signifier illégalité ».

224 V. définition preuve : E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Éditeur et Maresc Ainé Éditeur, Paris, 1873, t.1, n°6, p. 6 : « Le mot preuve, pris dans le sens le plus large, désigne tout moyen direct ou indirect d'arriver à la connaissance des faits » ; V. J. Bentham, Traité des preuves judiciaires, traduit par Etienne Dumont, Bossange frères Libraires-Éditeurs, Paris, 1823, t. 1, p. 16 : « Qu'est ce qu'une preuve ? Dans le sens le plus étendu qu'on puisse donner à ce mot, on entend par là un fait supposé vrai, que l'on considère comme devant servir de motif de crédibilité sur l'existence ou la nonexistence d'un autre fait ».

une importance décisive 225 et qui mérite d'attirer toute l'attention 226 parce que cette preuve

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227 228

doit décider de la culpabilité ou de l'innocence de la personne accusée pour avoir commis

une infraction 229 . La liberté de la preuve pénale dominant sur l'opération de la recherche de la preuve pénale signifie liberté dans le choix des moyens de preuve, à cause de l'impossibilité

de limiter ceux-ci à un type défini d'infraction en général230. En effet, la raison logique est que la perpétration de l'infraction constitue souvent des actes dont la forme est inattendue, et par conséquent, il était impératif de faire place à la liberté du choix des moyens de preuve pour la recherche de la preuve pénale et pour prouver les éléments constitutifs de l'infraction. Une question s'impose selon Mme Coralie Ambroise-Castérot : « prouver avec quelles preuves? Le principe est celui de la liberté de la preuve, .... Mais il convient de ne pas se méprendre sur le

225 V. E. Mathias, Procédure pénale, 2e éd., Bréal, 2005, p. 8 : « Une infraction (crime, délit ou contravention) prévue par le Code pénal ou par un autre texte est commise. Cet acte pénalement sanctionné ne doit pas demeurer impuni : il faut chercher son auteur et le juger, c'est-à-dire constater son éventuelle culpabilité et lui appliquer une sanction dans les limites abstraitement formulées par le texte d'incrimination ».

226 V. S. Guinchard et J. Buisson, Procédure pénale, 9e édition, LEXIS NEXIS/LITEC, 2013, n° 515, p. 557 : importance de la preuve : « La preuve revêt dans le procès pénal une importance qu'elle n'a dans aucune autre matière. Parce qu'elle touche aux garanties des personnes, notamment à la présomption d'innocence à laquelle elle peut porter atteinte, comme elle concerne directement l'ordre public. Parce que toutes les règles de procédure n'ont, en définitive, d'autre finalité que la recherche et l'administration de la preuve. Ainsi, s'explique sans doute l'unité de la théorie de la preuve, dans son principe comme dans ses règles, à toutes les étapes de la procédure pénale, depuis la phase de la police judiciaire jusqu'à celle du jugement définitif ; car on ne peut concevoir une preuve qui soit, en amont du procès pénal, différente de celle qui régira la phase de jugement. La logique juridique rejoint le bon sens commun pour affirmer l'unité du régime de la preuve, que commande la finalité globale et unique de la procédure, à chacune de ses phases.».

227 A. Decocq, J. Montreuil et J. Buisson, Le droit de la police, Litec, Paris, 1991, n°1050 : MM. André Decocq, Jean Montreuil et Jacques Buisson expriment très clairement cette idée d'importance de la preuve particulièrement dans le contentieux pénal : «Depuis la constatation de l'infraction jusqu'au jugement de son auteur, toute la chaîne pénale est articulée autour de la question cardinale de la preuve, et le régime de la preuve est nécessairement identique à toutes les hauteurs de la procédure, même en amont du procès pénal : dans la phase policière, c'est-à-dire dans la phase préparatoire de ce procès».

228 V. sur l'mportance de la preuve pénale : R. Merle et A. Vitu, Traité De Droit Criminel, 5e éd., Cujas, Paris, 2001, t. 2 Procédure Pénale, n°140, p. 177 : « La procédure pénale tout entière gravite autour du problème de la preuve, ce qui explique la place éminente que lui réservent certains droits étrangers, par exemple anglo-saxons ».

229 V. G. Danjaume, « Le principe de la liberté de la preuve en procédure pénale », in D., 1996, chron., pp. 153156. V. spec. p. 153 :« En procédure pénale, la preuve revêt une importance toute particulière dans la mesure où elle va permettre de statuer sur la culpabilité. Ainsi, la preuve constitue le point central du procès pénal ».

230 V. en ce sens : J. Buisson, « Perquisitions : Pouvoirs de l'officier de police judiciaire. Constatation d'une infraction prévue par une loi spéciale », Note sous Cass. crim., 25 juin 2003, M., non publié, in R.S.C., 2004, p. 424 :« Ce principe de la liberté de la preuve, qui doit être concilié avec celui de la légalité, s'est imposé en droit pénal non seulement parce qu'il s'agit de prouver des faits pour lesquels aucune preuve ne peut normalement être préconstituée, mais aussi parce que les intérêts supérieurs de la société exigent de ne pas désarmer la répression par un système de preuve trop rigide tandis que les droits du prévenu commandent de lui permettre de faire valoir tous moyens de nature à démontrer sa non-implication dans les faits reprochés ».

sens et la portée de ce principe » 231 . Cependant, cette liberté de la preuve pénale n'est pas

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hasardeuse, étant donné qu'elle doit dépendre de moyens harmonieux ou compatibles avec les droits de l'Homme, ainsi qu'avec les textes de la loi et les principes généraux. On ne peut pas considérer que la violation de l'intégrité du corps du suspect, la violation de sa liberté, de sa volonté, de son droit à la vie privée, ou encore les droits de la défense consacrés à son

avantage font partie de la liberté de la preuve 232 . Les outils juridiques prescrits par le législateur pour la recherche de la preuve doivent permettre d'atteindre la vérité lors d'un procès pénal, c'est-à-dire convaincre le juge qu'une infraction a été commise et que l'accusé est l'auteur de cette infraction, sans commettre aucune violation des droits de la personne. Toute suggestion contraire rendrait l'existence du Code de procédure pénale, qui réglemente les moyens et les méthodes de la recherche de la preuve pénale, inutile, et l'obtention de la preuve pénale serait donc possible en ayant recours à tous les moyens, même illégaux, sans aucun égard aux droits du suspect ni à la présomption d'innocence qui l'accompagne jusqu'au jugement prononçant sa condamnation. En d'autres termes un renforcement de la légalité peut paraître nécessaire pour mieux garantir l'État de droit pour éviter la recherche de la preuve pénale à tout prix et par tout moyen afin d'atteindre la vérité, sans aucune restriction ou garanties, ce qui représenterait une application radicale de la liberté absolue de preuve en droit pénal.

29. Le concept de la légalité de la preuve. Le concept de la légalité de la preuve pénale signifie que les autorités de l'État et de la justice généralement doivent dans la recherche des preuves et des auteurs d'infractions respecter les lois et les règles de procédure parce que la recherche de la vérité impose nécessairement de « concilier les droits fondamentaux de la personne humaine avec une recherche d'efficacité des autorités d'enquête et de poursuite dans la mise en cause des auteurs d'infraction à la loi pénale et qui mettent par là même en

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cause l'équilibre de la vie en société ». De cette manière, on peut dire que l'objet de la procédure pénale sera de permettre la conciliation des principes protecteurs de l'individu avec

231 C. Ambroise-Castérot, « Recherche et administration des preuves en procédure pénale : la quête du Graal de la Vérité », in AJ Pénal, 2005, pp. 261 et s.

232 V. Ph. Bonfils, « Loyauté de la preuve et droit au procès équitable », Note sous Cass. 2e civ., 7 octobre 2004, in D., 13 janvier 2005, n°2, juris., p. 122 : « On le sait bien, être titulaire d'un droit est une chose, et pouvoir en rapporter la preuve en est souvent une autre. Cette difficulté explique que, parfois, certains se laissent tenter par le recours à des procédés déloyaux voire illicites, et cette tentation peut même paraître d'autant plus grande que les progrès scientifiques et techniques en multiplient les possibilités ».

233 P. Bolze, Le droit à la preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit, Université Nancy 2, 2010, p.

49.

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une efficacité extrême dans la recherche de la preuve . Donc, la preuve pénale se trouve

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pratiquement au confluent de deux logiques antagonistes ou qui sont en contradiction : celles des droits et libertés des individus protégés par la loi et celles des droits de la société. Un auteur belge, M. Franklin Kuty, évoque l'idée de la bonne administration de la justice qui protège une grande série de droits individuels pour éclaircir la notion de la légalité ou de la

régularité de la preuve en matière pénale 235 . Le principe de la liberté des preuves n'est pas un principe absolu puisqu'il s'agit de la limitation de l'exercice de la liberté de la preuve pénale en respect des dispositions de la loi, notamment le Code de procédure pénale réglementant la recherche et la production de la preuve pénale, ainsi que des principes fondamentaux généraux dominant le processus de la recherche et de la production de la preuve pénale au cours des différents stades du procès pénal, et de la phase précédente, ou en d'autres termes la phase d'investigation dans le procès pénal. À cet égard, la légalité de la preuve pénale s'intéresse seulement au moyen d'obtention et à l'administration de la preuve pénale qui doit refléter sur l'admission de la preuve obtenue de manière illégale, non à sa valeur probante. En effet, le moyen d'obtention de la preuve pénale doit être compatible avec le principe de la légalité des preuves en matière de production de preuve, et par conséquent la liberté de la preuve ne signifie pas que tous les moyens sont autorisés pour l'atteinte de la

vérité dans le cadre d'un procès pénal236 . Il est incontestable que l'application du principe de la liberté de la preuve, dominant la recherche de la preuve pénale, doit également respecter le principe de la loyauté de la preuve pénale, qui est d'ailleurs un principe complémentaire et relatif au principe de la légalité de la preuve pénale. Le principe de la

234 V. en ce sens : P. Bolze, Le droit à la preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit, Université Nancy 2, 2010, p. 49.

235 F. Kuty, « La sanction de l'illégalité et de l'irrégularité de la preuve pénale », in F. Kuty et D. Mougenot (Dir.), La preuve questions spéciales, Anthémis, Vol. 99, Liège, janvier 2008, pp. 7-62, V. Spec. p. 11 : « La notion de régularité de la preuve renvoie aux valeurs considérées comme essentielles à une bonne administration de la justice et qui ne sont pas formulées, en tant que telles, dans un texte de loi » ; V. encore : F. Kuty, « La sanction de l'illégalité et de l'irrégularité de la preuve pénale », in F. Kuty et D. Mougenot (Dir.), La preuve questions spéciales, Anthémis, Vol. 99, Liège, janvier 2008, pp. 7-62, V. Spec. p. 11-12 : L'exigence de régularité de la preuve selon M. Franklin Kuty « Il s'agit, en d'autres termes, des exigences de dignité de la justice et de loyauté dans la recherche des preuves qui, toutes deux, touchent au respect de la personne, de la dignité humaine, des principes généraux du droit et des droits de la défense ».

236 V. P. Hennion-Jacquet, « L'encadrement relatif de la liberté de la preuve par la Convention européenne des droits de l'homme », in D., 2005, p. 2575 et s., V. spec n° 2 : Mme Patricia Hennion-Jacquet décrit l'intervention du principe de la légalité de preuve dans le système de preuve libre : « la preuve pénale ne fait l'objet d'aucune théorie générale : elle peut être rapportée par tous moyens, le mode de preuve n'étant ni imposé, ni interdit. C'est pourquoi, le système probatoire français est qualifié de système de preuve libre. Cette qualification impropre procède d'une assimilation inopportune entre la liberté de principe concernant la recevabilité de la preuve et la légalité de son obtention ».

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légalité de la preuve pénale n'est pas surprenant ou étranger au système juridique en vigueur dans l'État de droit, où la souveraineté et la dominance reviennent à la légalité sur laquelle se basent les travaux de toutes les autorités publiques et judiciaires dans le cadre de l'affaire pénale, et qui représente ainsi une couverture juridique pour toutes les actions menées par les autorités en charge de la recherche des preuves pénales et de la détection des infractions commises afin de déceler l'identité de leur auteur. Il est devenu nécessaire de réévaluer certaines définitions radicales répandues dans l'introduction du concept du principe de la liberté la preuve en matière pénale, en révélant ainsi la liberté excessive contenue dans le principe de liberté de la preuve pénale, sous la forme d'une liberté absolue sans aucune restriction, sans limites, sans lignes directrices. Il semble qu'un concept large (vague), non discipliné et incontrôlé de liberté de la preuve ne convient pas à un État de droit, étant donné qu'il représente un outil et un moyen de domination, d'oppression et d'abus de pouvoir portant atteinte aux droits et libertés des individus garantis par les dispositions de la loi.

30. Coexistence possible entre liberté et légalité des preuves. La procédure pénale est la description de l'intervention des autorités étatiques (police mais également procureur et juges) dans le but de rechercher la preuve qui permet d'aboutir à la vérité pour identifier l'auteur de l'infraction. Selon M. Édouard Verny « la procédure pénale recouvre l'ensemble des règles relatives à la recherche et au jugement des personnes soupçonnées d'avoir commis une

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infraction ». Le système juridique doit être en mesure de fournir et d'assurer les garanties juridiques des droits et libertés des individus dans le cadre du procès pénal, en vertu du principe de la légalité, en parallèle avec l'application du principe de la liberté de la preuve pénale afin de détecter les criminels et les preuves de l'infraction, sans risquer de porter

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atteinte à leurs droits fondamentaux. Cet équilibre délicat entre la garantie du principe de la légalité d'une part, et d'autre part, la garantie de l'atteinte de l'objectif principal du procès pénal, est inaccessible sans une application effective du principe de la légalité de la preuve pénale, à côté du principe de la liberté de la preuve pénale.

237 É. Verny, Procédure pénale, 3e éd., Dalloz, 2012, n° 1, p. 1.

238 V. G. Levasseur, A. Chavanne, J. Montreuil, B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et procédure pénale, 14e éd., Dalloz, 2002, n° 274, p. 121 : « Les règles relatives à la procédure pénale sont particulièrement importantes, tant pour la protection de la société (car la procédure doit permettre de confondre les coupables en dépit de leurs dénégations) que pour la sauvegarde de la liberté individuelle (car elles doivent permettre à l'innocent d'éviter d'être victime d'une erreur judiciaire, et au coupable de faire valoir ses moyens de défense, de façon à ce que la peine qui sera éventuellement prononcée contre lui soit vraiment équitable). ».

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La détermination de la notion de la légalité de la preuve pénale nécessite la détermination du rôle et de la relation entre le principe de la légalité et de la loyauté de la preuve pénale d'une part, et celui du principe de la liberté de la preuve d'autre part, afin de fixer les limites de leur relation et éliminer toute confusion ou ambiguïté pouvant être soulevée. Le premier titre dans cette thèse porte sur la relation entre légalité, loyauté et liberté de la preuve. En outre, la détermination du concept de la légalité de la preuve pénale exige la caractérisation et l'étude de la notion de la preuve illégale afin d'illustrer cette idée, de fixer les aspects d'un concept clair permettant de distinguer les cas dans lesquels la preuve est considérée illégale lors du procès pénal, de déterminer les cas touchant la preuve d'illégalité ou de comprendre la notion de preuve entachée de vices d'illégalité. Le second titre de cette thèse porte sur la notion de preuve illégale.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984