L'application du concept de la responsabilité de protégerpar Grâce AWAZI Université de Goma - Licence 2019 |
SECTION 2. L'APPLICATION DE LA RESPONSABILITE DE PROTEGER DANS LA CRISE IVOIRIENNEDans la présente section, nous allons d'une part analyser le conflit postélectoral ivoirien et les différentes violations des droits de l'homme visées par la responsabilité de protéger (§1) et d'autre le déclenchement de la responsabilité de protéger dans la crise postélectorale ivoirienne de 2010-2011. §1. LE CONFLIT POSTELECTORAL IVOIRIEN ET LES VIOLATIONS DES DROITS HUMAINS VISES PAR LA RESPONSABILITE DE PROTEGERA. Origine de conflitIl s'agit ici de répondre à la question de savoir quel est l'élément déclencheur du conflit postélectoral de 2010-2011 ? C'est ainsi, face à l'impasse politique liée à l'application des différents accords de paix signés depuis la tentative de coup d'Etat en septembre 2002, les principaux acteurs de la crise entament un « dialogue direct » avec la facilitation du Président burkinabé Blaise COMPAORE. La signature en mars 2007 de l'Accord Politique de Ouagadougou (APO) par le Président Laurent GBAGBO et le Secrétaire Général des Forces Nouvelles Guillaume SORO, a permis d'apaiser le climat socio-politique et d'aboutir à l'organisation des élections présidentielles en octobre et novembre 2010146(*). Cependant, ces dernières prendront une allure dramatique après les résultats du second tour ayant opposé le Président sortant Laurent Gbagbo à Alassane Ouattara, candidat de l'opposition. La Commission Electorale Indépendante proclame Alassane Ouattara vainqueur face au Président sortant, tandis que le Conseil Constitutionnel rend une décision proclamant Laurent GBAGBO vainqueur. En dépit des différentes médiations (CEDEAO et Union Afrique) visant à convaincre Laurent GBAGBO de céder le pouvoir au Président élu Alassane OUATTARA, la crise va progressivement se militariser, plongeant le pays dans un conflit qui va durer de décembre 2010 à avril 2011. La Côte d'Ivoire va connaitre ainsi une des pages les plus tristes de son histoire avec plus de 3000 morts, des milliers de blessés et environ un million de personnes fuyant les violences déplacées à l'intérieur du pays147(*). Le 4 décembre 2010, Laurent GBAGBO prête serment devant le Conseil Constitutionnel et met en place par la suite un gouvernement. Retranché à l'hôtel du Golf avec ses collaborateurs et alliés du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), Alassane OUATTARA prête également serment le 5 décembre 2010, affirmant ainsi son statut de nouveau chef d'Etat. Il forme également un gouvernement et nomme SORO K. Guillaume, Secrétaire Général des Forces Nouvelles, comme Premier Ministre et Ministre de la défense. Le Président élu procède à la nomination d'un nouveau directeur général à la tête de la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI). Le RHDP appelle ainsi la population, le 14 décembre 2010, à marcher sur la RTI en vue d'installer le nouveau directeur. Le camp de Laurent GBAGBO considère cet appel comme une manoeuvre de déstabilisation. Ainsi, des moyens militaires sont mis en place pour empêcher le déferlement des militants du RHDP vers la RTI. Le 16 décembre 2010, date prévue de la marche, les manifestants du RHDP sont violemment réprimés par les éléments des Forces de défense et de sécurité (FDS) restés fidèles à Laurent GBAGBO. Cette répression s'est soldée par plusieurs morts (une trentaine), des femmes violées et de nombreux blessés graves. Les faits documentés par les défenseurs des droits de l'Homme montrent que les personnes ciblées l'ont été à cause de leur identité ethnique/religieuse ou de leur appartenance politique148(*). * 146 Rapport du groupement des acteurs ivoiriens des Droits Humains, Côte d'Ivoire : une décennie de crimes graves non encore puni, les victimes demandent réparations, Mars 2014, p. 19. Disponible à l'adresse : https://freedomhouse.org consulté le 2 juillet 2019 à 8h58'. * 147 Rapport du groupement des acteurs ivoiriens des Droits Humains, p. 19. * 148 Ibid, pp. 19-20. |
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