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L'application du concept de la responsabilité de protéger


par Grâce AWAZI
Université de Goma  - Licence 2019
  

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B. En matière de la protection des droits de l'homme

Depuis la fin des années 1990, nombre de textes internationaux consacrent la sécurité des populations comme un droit de l'Homme et affirment que la protection de ces dernières incombe non seulement aux États dont elles relèvent, mais aussi à la communauté internationale. Avec solennité, le Document final du Sommet mondial des Nations unies (adopté le 15 septembre 2005) affirme la responsabilité de chaque État de protéger sa population du génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Faisant reposer la responsabilité de protéger sur le principe de la « souveraineté comme responsabilité », il énonce que la communauté internationale est résolue à aider les États à protéger leur population.

L'un des mérites du concept de la responsabilité de protéger est en effet de dépasser l'opposition qui a dominé les années 1990, entre les États attachés à une stricte application du principe de souveraineté et ceux qui défendent les interventions militaires à des fins humanitaires : l'émergence du concept part de l'idée que la sécurité internationale doit être pensée, non plus uniquement en fonction de la sécurité des États dans le cadre d'un conflit interétatique, mais également en fonction de la sécurité des populations civiles victimes d'un conflit armé, surtout interne91(*).

La Charte des Nations Unies établit que le principe central du droit international est l'égalité souveraine des États et le droit des peuples à l'autodétermination92(*). Tous les États étant formellement égaux en droit, ils ne peuvent utiliser la force contre un autre État ou intervenir dans ses affaires internes, sauf en cas de légitime défense, ou afin de rétablir la paix ou la sécurité internationale, et ceci seulement après autorisation du Conseil de sécurité de l'ONU93(*). Ce principe essentiel à la stabilité des relations internationales a été répété à plusieurs reprises et notamment dans la résolution 2625 de l'Assemblée générale (AG) des Nations Unies (1970). Quand la Charte des Nations Unies a été adoptée, la possibilité d'intervenir pour protéger les civils a été discutée et rejetée par les gouvernements d'alors.

On craignait que les États les plus forts n'abusent de ce principe contre les États les plus faibles, ce qui représentait un trop grand risque pour la stabilité internationale et la souveraineté de ces États plus faibles. En fait, « les États du Sud considèrent que le principe de souveraineté et son corollaire concernant la non-intervention représentent, en pratique, leur dernière protection contre les règles d'un monde inégal »94(*) R2P demande aux états de reconnaître que la souveraineté implique une responsabilité de protéger leurs populations, et encourage la communauté internationale à assumer sa responsabilité de réagir quand un Etat est incapable ou manque la volonté de protéger ses populations. Ce sujet ne doit pas être apprécié comme une atteinte au droit d'intervention de l'Etat mais plutôt comme une nécessité d'assurer la protection des populations vulnérables.

La souveraineté emporte pour effet permanent et traditionnel de protéger l'Etat de toute atteinte à son intégrité physique et à son indépendance. Les principes de non-ingérence dans les affaires intérieures et de non-intervention tierce sur un territoire étatique, sauf autorisation expresse de l'Etat territorial lui-même ou habilitation du Conseil de sécurité sur la base du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, sont des garanties fondamentales du respect des souverainetés. Cette conception classique de la souveraineté, tournée entièrement vers sa défense, a et gardera toujours une importance primordiale comme garante de l'indépendance des Etats95(*).

Mais l'évolution du droit international montre que la souveraineté dont se prévaut l'Etat ne l'autorise plus, aux yeux des autres, à commettre à l'abri de ses frontières toutes les exactions que bon lui semblerait contre sa population96(*).

La très large adhésion des Etats aux normes internationales des droits de l'homme et aux normes du droit international humanitaire, a eu au moins deux conséquences fondamentales: l'Etat reconnaît de plus en plus largement à l'individu la possibilité d'exiger de lui le respect de ses droits, comme lui-même s'est engagé à rendre compte à ses partenaires conventionnels de la manière dont il garantit les droits individuels dans son ordre interne; les violations des droits de l'homme et/ou du droit international humanitaire, a fortiori lorsqu'elles sont massives, sont désormais l'affaire de tous, car, au-delàde l'engagement volontaire des Etats à tout un réseau d'engagementsconventionnels, il s'agit de normes ergaomnes, comme la Cour international de Justice l'a depuis longtemps mis en évidence, quand elles n'ont pas, comme le droit à la vie notamment, valeur de normes de jus cogens. L'importance acquise par ce corpus juridique qu'est venue parachever l'affirmation de la justice pénale internationale, donne ainsi toute sa pertinence et sa légitimitéau concept de responsabilité de protéger qui trouve là ses racines lesplus profondes97(*).

Portée par toutes ces évolutions dont elle est un prolongement rationnel et logique, la responsabilité de protéger conduit à mettre en avant l'idée que, dans le monde du XXIème siècle, un Etat souverain digne de cettequalité doit s'acquitter pleinement de ses devoirs à l'égard de sa propre population. C'est là l'une de ses missions essentielles car, la souveraineté n'est pas une fin en soi, mais doit s'exercer au bénéfice du bien-être et de la sauvegarde des populations dont l'Etat a la charge98(*).

* 91 André CABANIS. Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, Op. Cit., p. 9.

* 92 Article 2 point 4 et 7 de la Charte des Nations Unies.

* 93 Chapitre 7 de la Charte des Nations Unies et en particulier les articles 42 et 51.

* 94 André CABANIS. Jean-Marie CROUZATIER et Ciprian MIHALI, Op. Cit., p. 12.

* 95 Julie LEMAIRE, Op. Cit., p. 7.

* 96 Sandra SZUREK, Op. Cit., p. 53.

* 97Sandra SZUREK, Op. Cit., p. 54.

* 98 Ibid :

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