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Publicités commerciales et protection du consommateur en Côte d'Ivoire.


par Paul-Philippe DJEDJESS
Université Catholique de l'Afrique de l'Ouest - UCAO - Master 2 - Droit économique et des affaires 2018
  

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PARTIE 1 : LE CADRE JURIDIQUE ETABLI POUR LA PROTECTION DU CONSOMMATEUR

Les pouvoirs publics et le législateur ivoirien soucieux des dangers que peuvent présenter la publicité commerciale ont mis en place un cadre juridique afin de maintenir un climat de saine concurrence entre les opérateurs économiques mais surtout pour protéger les droits des consommateurs. Cette première partie de notre étude aura pour objet, de présenter le cadre juridique encadrant la publicité commerciale au travers de l'existence d'un cadre textuel protecteur du consommateur (Chapitre 1), et d'un cadre institutionnel protecteur du consommateur (Chapitre 2).

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CHAPITRE 1 : L'EXISTENCE D'UN CADRE TEXTUEL PROTECTEUR DU CONSOMMATEUR

La protection du consommateur contre la publicité commerciale est assurée par des textes législatifs et règlementaires. On retient une réglementation publicitaire générale par l'interdiction de principe de la publicité mensongère ou trompeuse adoptée par le législateur ivoirien à travers la loi n°91- 1000 du 27 décembre 1991 portant interdiction et répression de la publicité mensongère ou trompeuse (Section 1) pour lutter contre les informations fausses transmises aux consommateurs. Aussi, les pouvoirs publics ont mis en place une règlementation publicitaire spécifique visant à protéger le consommateur en raison de la publicité faite pour une catégorie de produits et services (Section 2).

Section 1 : Une règlementation publicitaire générale

Généralement pour être punissable, l'agent ou le prévenu doit avoir accompli des actes répréhensibles par la loi avec l'intention qui le motive. La publicité mensongère ou trompeuse est un délit qui obéit à un régime répressif. Apres avoir montré les conditions de caractérisation du délit de publicité mensongère ou trompeuse (Paragraphe1), il conviendra d'évoquer le caractère peu dissuasif de la sanction attachée (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les conditions de caractérisation du délit de publicité mensongère ou trompeuse

La caractérisation du délit de publicité mensongère ou trompeuse passe essentiellement par la réunion de trois éléments : l'élément légal et intentionnel (A); l'élément légal qui tire sa source dans le principe de la légalité des délits et des peines21 en vertu duquel l'incrimination d'une infraction doit résulter d'un texte de loi. L'élément intentionnel constitue la volonté entretenue par l'auteur de l'infraction de la commettre. Au-delà de ce que prévoient les textes,

21 Art. 08 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (DDHC) : « (...) nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. »

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il faut, pour exister concrètement que le délit de publicité mensongère ou trompeuse soit matérialisé par un acte qui constituera l'élément matériel (B).

A. L'élément légal et intentionnel

La publicité mensongère ou trompeuse reste en droit pénal ivoirien, définie essentiellement par la loi 91-1000 du 27 Décembre 1991 portant interdiction et répression de la publicité mensongère ou trompeuse qui dispose :

« Est considérée comme publicité mensongère ou trompeuse, toute publicité comportant sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications, ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur ou à créer le doute ou la confusion dans l'esprit du consommateur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs des éléments ci-après :

Existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, quantité, mode et date de fabrication, propriétés, prix et conditions de leur utilisation, motifs ou procédés de la vente ou de la prestation de service, portée des engagements pris par l'annonceur, identité, qualité ou aptitudes du fabricant, des revendeurs, des promoteurs ou des prestataires. »22

Ce texte de loi est inspiré de la législation française. C'est une loi du 27 décembre 1973 dite « Loi Royer »23 qui laisse entrevoir au travers de la publicité trompeuse, toute publicité constituée par des détails exacts mais présentés de manière fallacieuse susceptibles de faire croire à des qualités que le produit ne possède pas en réalité ou encore celle qui pourrait créer un doute ou une confusion entre les produits ou entreprises. Alors que la publicité mensongère consiste à porter aux consommateurs des informations qui sont fausses24. L'objectif de la distinction est de donner à la loi plus de ténacité et d'élargir son champ d'application en interdisant à la fois les publicités objectivement « fausses », mensongères, ainsi que celles qui le sont plus subjectivement. C'est-à-dire de « nature à induire en erreur », trompeuses25.

22 Art. 3 de la loi n°91-1000 du 27 décembre 1991, portant interdiction et répression de la publicité mensongère ou trompeuse.

23 Art. 44 de la loi d'orientation du commerce et de l'artisanat du 27 décembre 1973 modifiée par la loi 78-23 du 10 janvier 1978

24 Exemple d'un produit présenté comme composé d'éléments naturels uniquement alors que comprenant des composants chimiques.

25 BIOLAY (J.-J.) Promotion des ventes et Droit de la publicité, 1e éd., Encyclopédie DELMAS pour la vie des affaires, P.171

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Le champ d'application précise que la loi s'applique à « toute communication à caractère commercial, industriel, ou professionnel faite dans le but de promouvoir la fourniture de biens ou services et de manière générale, tous les moyens utilisés pour faire connaître une personne physique ou morale, ou bien, un produit ou un service ou pour inciter à l'achat ou à la demande de bien ou service quels que soient les supports utilisés y compris les emballages, les étiquettes ainsi que les documents commerciaux. »26 Il est nécessaire par conséquent, d'exclure toute communication ou information dépourvue de l'invitation à l'achat. En d'autres termes, toute information n'étant pas faite dans le but de stimuler et de provoquer la demande de biens ou services. Au-delà du texte de loi, pour que le délit de publicité mensongère ou trompeuse puisse être retenu faut-il nécessairement un élément intentionnel ?

L'élément moral ou intentionnel du délit de publicité mensongère ou trompeuse consiste à l'intention frauduleuse de son auteur d'induire les consommateurs en erreur en divulguant des informations fausses sur le produit ou service. L'exigence de cet élément dans la constitution d'une infraction résulte du Code Pénal ivoirien qui dispose que « l'infraction n'est commise que lorsque tous ses éléments constitutifs sont réalisés et réunis »27. Constituant l'élément commun à toutes les infractions, cette volonté devrait être indispensable à la constitution du délit de publicité mensongère ou trompeuse.

Pourtant dans ce délit, l'élément moral a évolué pour avoir une importance moindre pour son incrimination. Le droit positif ivoirien n'ayant traité du délit de publicité mensongère ou trompeuse que seulement à partir de la loi n°91-1000 du 27 décembre 1991 sus-indiquée, il convient de s'appuyer sur l'évolution remarquable que ce délit a subie en droit positif français28 afin d'y apporter un aménagement. Ce faisant, la répression du mensonge en publicité est apparue comme infraction spécifique dans la loi française du 02 juillet 1963, et a pris la forme de publicité mensongère. Toutefois, pour faire l'application de cette loi, il convenait de démontrer l'existence d'une intention de tromper les destinataires du message publicitaire litigieux. Il fallait donc pour la partie plaignante de rapporter la preuve de la mauvaise foi de l'annonceur - sa volonté de tromper, pour espérer voir s'appliquer la loi. Ce qui était en pratique très pénible à faire29.

26 Art. 1 de la loi n°91-1000, suscitée.

27 Art. 22 al. 1 du Code Pénal Ivoirien

28 L'évolution de la notion de publicité mensongère ou trompeuse en C.I a hérité du modèle français. C'est donc ce modèle qui sera exposé.

29 CALAIS-AULOY (J.) et STEINMETZ (F.), Droit de la Consommation, 9e éd., 2011, Dalloz, p.137.

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Face à cette difficulté de réprimer le délit de publicité mensongère, l'article 44 de la loi française dite Royer30 a eu le mérite d'élargir l'incrimination en remplaçant mensongère par le délit de publicité trompeuse. La particularité de cette requalification tient à ce que par rapport à la publicité simplement mensongère, la publicité trompeuse est constitué dès lors que les éléments du message publicitaire sont de nature à induire en erreur les consommateurs, peu importe l'intention délictueuse de l'auteur. La mauvaise foi n'est plus alors recherchée31. A ce stade, il importe peu que l'auteur de l'infraction ait eu l'intention de la commettre, il suffit que les éléments de la publicité litigieuse soient incriminés par l'article 03 de la loi n°91-1000 précitée.

Le délit de publicité mensongère ou trompeuse étant constitué en l'absence d'intention de tromper. Il est une catégorie d'infraction perpétrée sans intention de la commettre et qui constitue un délit lorsque la loi le prévoit. Il s'agit des infractions non-intentionnelles, qui impliquent en l'absence de volonté d'accomplir l'acte délictueux, une faute pouvant être due à l'imprudence, la négligence, ou au manquement à une obligation de sécurité prévue par la loi. S'il est établi que compte tenu de sa qualité ou des fonctions qu'il occupe, l'auteur n'a pas agi diligemment32. Dans ce cas, malgré le fait que l'auteur n'ait pas manifesté l'intention de commettre un acte délictueux, il ne doit pas échapper à la répression correspondante puisqu'il a, par une faute constituée par son imprudence ou sa négligence, causé un trouble à l'ordre public. De ce fait, en n'exigeant pas de faire la preuve de la mauvaise foi de l'auteur de la publicité litigieuse pour que celle-ci soit établie comme trompeuse, le législateur français a fait ainsi entrer ce délit dans la catégorie des délits non intentionnels, constitués en cas d'imprudence ou de négligence de l'auteur.

L'annonceur ne pouvant se réfugier sur sa négligence, a tout de même le droit de prouver sa bonne foi devant le juge face à la présomption de responsabilité qui pèse sur lui. Cette présomption lui impose une vigilance accrue à l'égard des tiers à qui il confie le soin de concevoir la publicité33. L'annonceur a l'obligation de vérifier l'exactitude des mentions qu'il fait figurer dans son annonce sous peine de voir sa responsabilité engagée pour des faits qu'il n'aurait pas voulu.

30 Loi n°73-1193 du 27 décembre 1973 portant orientation du commerce et de l'artisanat.

31 Ch. crim., 4 dec.1978, 77-92.400.

32 Art. 121-3 al.3 du Code Pénal Français.

33 Code de déontologie publicitaire en Côte d'Ivoire, Chapitre V, 21.

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Il faut cependant noter que si malgré l'absence de recherche active de l'intention de l'annonceur de tromper, sa publicité tombe sous le coup de la loi, le délit est d'autant plus constitué dans le cas où l'auteur de la publicité a eu l'intention de tromper et peut être sévèrement réprimé34. Cependant, l'on ne doit pas s'arrêter en si bon chemin, à la simple pensée, la seule volonté de commettre un acte. Car, au-delà de ce que prévoit la loi, pour exister concrètement, l'infraction doit être matérialisée par un acte.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery