Para II. Conditions liées au délinquant
L'autre condition nécessaire pour recourir
à la transaction pénale concerne le délinquant et a trait
à la reconnaissance des faits et des droits de ce dernier ainsi
qu'à sa resocialisation. Le délinquant doit par ailleurs
être majeur.
A- Reconnaissance des faits
L'idée dominante de la procédure de
transaction est que le délinquant doit reconnaître sa
participation aux faits reprochés. D'ailleurs, qu'il s'agisse du «
plea bargaining » américain, de la « confession » du code
de procédure pénal portugais ou de la comparution sur
reconnaissance préalable de culpabilité de la loi Perben II, tous
ces noms sont évocateurs du préalable de l'aveu du
délinquant dans la mise en oeuvre de la procédure. C'est dire
l'importance de l'aveu et de la compréhension par le délinquant
du sens de son geste.
96 John Locke
cité par Pradel. (J.), Histoire des doctrines pénales. Que
sais-je ? PUF. 1991
97 Selden
cité par Pradel,ibid.
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1-L'aveu
« L'objet de toute procédure
pénale est la découverte de la vérité
»98 parce que celle-ci doit aboutir à la
démonstration de la culpabilité (ou de l'innocence) de
l'accusé ou prévenu. La recherche de cette vérité
prend divers chemins dans les preuves que peut rassembler le juge
d'instruction. Mais traditionnellement, l'aveu a toujours été
considéré comme un moyen idoine d'atteindre la manifestation de
la vérité. Pour cette raison, la procédure pénale a
pendant longtemps été orienté vers la recherche de l'aveu.
Tous les moyens même les plus imaginables et les plus odieux comme la
torture, étaient alors mis en oeuvre pour obtenir l'aveu
considéré jadis comme « la reine des preuves
»99
Les longs débats qui précèdent
l'établissement de la vérité et de la culpabilité
du prévenu ont conduit à rechercher un raccourci : l'aveu. Or
avec la procédure transactionnelle, cet aveu est recherché de
façon instantanée, ce qui a le mérite d'éviter les
tortures et autres pratiques pour l'obtention de celui-ci. Ici
précisément, plus que l'aveu, l'inculpé ou le suspect doit
reconnaître les faits. Autrement dit, il ne suffit pas qu'il dise qu'il
plaide coupable, il faudrait encore que cela puisse être vrai pour
être pris en compte. Il se pose alors le problème de la valeur
probante de l'aveu. Le code pénal et le code d'instruction criminelle en
vigueur au Cameroun ne font aucune allusion à ce mode de preuve. Mais le
projet de code de procédure pénal en son art 315 al 4
déclare que « la force probante de l'aveu est laissée
à l'appréciation du tribunal qui ne peut l'admettre ou le rejeter
que par décision motivée ». L'aveu est donc
contrôlé car la conviction du juge doit se fonder sur un
élément indiscutable. Il doit donc être obtenu sans
contrainte d'aucune sorte, ni morale, ni matérielle. Il doit être
fourni en pleine connaissance de cause par l'inculpé ou le
prévenu conscient de ses paroles. Le juge ou le ministère public
doit pouvoir rejeter les aveux manifestement mensongers passés par des
alcooliques ou des dégénérés. C'est d'ailleurs dans
ce souci que le délinquant
98 Garrand,
Instruction Criminelle, T 1er, n°227 p 475
99 V. Nkolo
(P.), La recherche des preuves dans l'avant projet de code de
procédure pénale, thèse doctorat 3ecycle
p. 30
63
doit être non seulement majeur, mais jouir de
toutes ses facultés. Dans la pratique allemande de la transaction,
l'aveu n'est valable que si la culpabilité ne fait aucun
doute.
Si ces conditions sont respectées, il n'y a pas
de raison que l'on ne prenne pas en compte l'aveu car nous pensons avec FAUSTIN
HELIE que « quand un homme avoue qu'il est l'auteur d'une action
immorale, cette déclaration emporte avec elle la présomption
qu'il dit vrai car, il n'est point dans la nature humaine de subir remords qui
l'agitent, que, cédant au cri du remord ou à un besoin
impérieux de vérité, il fait l'aveu de sa faute
volontairement l'imputation d'un fait honteux lorsque cette imputation est
mensongère » puisque ajoute- t- il « c'est en proie
au trouble qui le domine, au remords qui l'agitent que, cédant au cri du
remord ou à un besoin impérieux de vérité, il fait
l'aveu de sa faute ».100
2-Implication de l'aveu
Si l'on pose comme condition de prise en compte de
l'aveu que celui-ci soit obtenu en toute licéité et sans violence
et qu'il soit fourni en connaissance de cause et en toute conscience, c'est
parce qu'un tel geste a des conséquences importantes sur la
procédure et sur les droits de la personne poursuivie. Dans un
procès classique, l'aveu entraîne l'arrêt des débats
et le juge prononce la sentence, l'aveu étant considéré
comme preuve suffisante. Ce geste peut être autrement plus lourd de
conséquences puisqu'il met en jeu les droits de la
défense.
Dans la procédure de comparution sur
reconnaissance préalable de culpabilité, l'aveu ou si l'on
préfère la reconnaissance des faits emporte renonciation au droit
au silence, au droit de plaider coupable ou non de la personne poursuivie.
Parfois même, il est perçu comme une renonciation à la
présomption d'innocence qui gouverne le procès pénal.
C'est pour cela que les partisans de l'exclusion de toute transaction
pénale ont estimé que cette dernière foulait
au
100 Nkolo (P) op. cit. p. 32
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pied les garanties de la défense. Ce qui semble
un peu exagéré car plusieurs garanties entourent la mise en
oeuvre d'une telle pratique.
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