B- Le recul des capacités d'intervention
humanitaire
Si les militaires nationaux et les forces de paix
multinationales sont critiqués par les ONG pour leur empiètement
de plus en plus manifeste sur le terrain humanitaire, la dérive
politique de certaines ONG est tout aussi manifeste. Nous sommes bien loin des
affirmations d'indépendance par rapport aux États durant les
années soixante-dix, et de la volonté de rendre compte des
réalités constatées sur le terrain, aussi
dérangeantes soient-elles pour les puissances. Mais les ONG n'ont pas le
choix, en raison de la part croissante dans leurs budgets de financements
institutionnels, et de la pression des bailleurs de fonds publics : l'UE, les
États-Unis déterminent les priorités et orientent l'aide,
et les ONG doivent volens nolens142 s'y adapter ; ou elles
seront dans l'impossibilité d'obtenir leur part sur le «
marché » des crises humanitaires. Les notions
d'impartialité, d'indépendance et d'éthique semblent
aujourd'hui bien désuètes. C'est ainsi que les bailleurs de fonds
décident des sujets à la mode : Droits de l'homme et promotion
des femmes, puis plus récemment lutte contre la corruption, et
sauvegarde de l'environnement. C'est ainsi que les ONG deviennent leurs
prestataires de services, éléments complémentaires des
stratégies militaires143. Il est certain que l'accès
aux populations les plus vulnérables ne sera possible que si un climat
de confiance s'établit entre humanitaires et acteurs locaux. Cela
nécessite une transparence dans
142 Locution latine synonyme de l'expression « bon
gré mal gré ». En droit international public, cette locution
signifie : « qui est indépendant de la volonté des parties
».
143 CROUZATIER Jean-Marie, La responsabilité de
protéger : avancée de la solidarité internationale ou
ultime avatar de l'impérialisme, in revue aspect n° 2,
2008, p. 27.
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La mise en oeuvre de la responsabilité de
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leursmanières d'opérer (au profit exclusif des
civils dans le besoin), leurs objectifs et leur identité qui se doit
d'être neutre, indépendante et impartiale. Aussi, dans une
perspective optimiste faudra t-il envisager l'action militaire de la
responsabilité de protéger comme un continuum dans
lequel la communauté internationale a un droit de regard, et dont celui
qui s'engage doit exécuter les trois paliers du principe dont la
reconstruction, troisième palier, estaussi important que les autres.
Cette perception de la responsabilité de protéger permettra de
diluer certains maux décriés ci-haut.
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CONCLUSION PARTIELLE
La mise en oeuvre de la responsabilité de
protéger en Afrique présente différentes facettes
notamment en ce qui concerne les fondements de l'intervention dans les
différentes crises analysées ainsi que les divers moyens
déployés en vue de leur résolution.
D'abord, en ce qui concerne les fondements des interventions,
notre étude relève une imprécision et une
variabilité des conditions d'intervention. Cet état de choses
réside principalement dans l'imprécision du cadre d'application
du principe de la responsabilité de protéger. Alors que dans
certains cas, l'imminence de la commission de crimes internationaux a servi de
fondement à l'intervention, dans d'autres cas, l'on a attendu que ces
crimes soient commis avant d'intervenir.
En outre, les moyens mis en oeuvre notamment militaires et
humanitaires dans le cadre de la responsabilité de protéger,
présentent des risques en ce sens que l'humanitaire est de plus en plus
confiée aux militaires ; ce qui altère forcément la
neutralité de l'action humanitaire.
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