Paragraphe 2 : Les missions « intégrées
» de maintien de la paix
Le maintien de la paix est une tâche essentielle des
Nations unies. Les opérations de maintien de la paix de l'ONU se sont
diversifiées (A) au fil du temps ; allant des opérations
traditionnelles de maintien de la paix115, aux opérations
élargies de maintien et d'imposition de la paix116, puis aux
opérations de soutien de la paix117.
115 Pendant la première phase, les Nations Unies ont
développé et mis en pratique ce que l'on appelle aujourd'hui des
opérations traditionnelles de maintien de la paix. L'accent y
était mis sur le consentement et la coopération, ainsi que sur le
non-recours à la force, excepté en cas de légitime
défense. Ces missions ont consisté à veiller au respect
d'accords de cessez-le-feu et d'armistice dans le cadre de conflits
armés internationaux, à surveiller des frontières,
à jouer le rôle de tampon entre belligérants, à
assister à des opérations de retrait de troupes, et à
contrôler ou même organiser des élections. Elles se sont
clairement révélées à la fois distinctes des
activités humanitaires et complémentaires de ces
dernières.
116 Dans la période de l'immédiate
après-guerre froide, le concept de maintien de la paix a acquis une
dimension plus large et plus ambitieuse. Les opérations ont conduit les
Nations Unies à s'engager toujours davantage dans toute une série
de conflits armés non internationaux, ainsi qu'à participer au
processus de reconstruction politique nationale, notamment la
réhabilitation de structures étatiques effondrées.
Certaines des tâches assignées aux forces de maintien de la paix
n'étaient plus clairement distinctes de l'action humanitaire, par
exemple dans des contextes où il s'agissait notamment de distribuer des
secours humanitaires. Dans certains cas, l'attribution floue
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Le maintien de la paix implique de plus en plus un volet
humanitaire en plus du volet militaire. Il convient d'analyser la portée
de l'élargissement des activités de maintien de la paix(B).
A- La nature des missions
A observer les activités de l'ONU depuis le milieu des
années 1990, on se rend compte que les opérations humanitaires
sont de plus en plus militarisées; le recours aux forces armées
dans les tâches d'assistance humanitaire est désormais la
règle. Tout comme les armées occidentales ont
développé le concept d'Actions civilo-militaires, le
Département des opérations de maintien de la paix des Nations
unies a développé la notion de mission «
intégrée » ou « multidimensionnelle » : le chef de
la mission de paix (représentant spécial du Secrétaire
général) dirige les militaires mais coordonne également
les agences spécialisées (PAM, UNICEF, HCR, OMS...). De
même, le concept, d'origine militaire, de CIMIC (Civil Military
Cooperation) défini comme : « la coordination et la
coopération, dans l'appui à une mission, entre le commandant et
les acteurs civils, incluant la population nationale, les autorités
locales, ainsi que les organisations non-gouvernementales et les agences
internationales et régionales », consiste à nouer des
contacts avec les civils, en réalisant des projets de court terme
intéressant la population, afin de « gagner les esprits et les
coeurs ». De plus, les quick impact projects menés par les
unités combattantes sont censés faciliter l'acceptation de la
force dans la zone concernée. Il peut s'agir de la création ou de
la réfection des infrastructures, d'aide à l'agriculture, de
soutien éducatif ou sanitaire.
Depuis le début des années 2000, un nombre
croissant d'opérations de paix ont vu inclure dans leurs mandats des
clauses relatives à la protection des civils en situation de conflit
armé. En 2000, le Conseil de sécurité établissait
dans sa résolution 1296118 que les pratiques qui consistent
à prendre délibérément pour cible des civils,
à commettre des violations systématiques, flagrantes et
généralisées du droit international humanitaire, ainsi
qu'à refuser au personnel humanitaire l'accès aux civils durant
un conflit armé, pouvaient constituer une menace contre la paix et la
des responsabilités s'est vue aggravée par le
fait que les objectifs politiques des forces de maintien de la paix et
d'imposition de la paix étaient peu clairs et leurs mandats mal
définis.
117 Certains signes indiquent aujourd'hui que les Nations
Unies entrent dans une nouvelle phase en matière de maintien de la paix,
une phase marquée par un accroissement de l'assistance humanitaire.
118 Résolution sur la protection des civils dans les
conflits armés, S/RES/1296 (2000).
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sécurité internationales. Le Conseil de
sécurité affirmait être disposé, le cas
échéant, à prendre les mesures appropriées et
à veiller à ce que les opérations de maintien de la paix
se chargent, si possible, de la protection des civils en cas de menace
imminente contre leur intégrité physique119. Cet
engagement a été honoré à l'occasion de nombreuses
opérations de paix et conformément aux recommandations du rapport
Brahimi120, la protection humaine dimension, désormais
primordiale du maintien de la paix s'est reflétée dans les
mandats121, les règles d'engagement et dans les effectifs des
missions. La notion de sécurité élargie ou globale,
défendue par de nombreux États, est à cet égard
venue appuyer les politiques de sécurité humaine mises en oeuvre
au sein des opérations complexes.
Les missions militaires des Nations Unies constituent un
élément essentiel de la gestion réussie d'un conflit. Dans
certains contextes chaotiques, elles peuvent se révéler
indispensables pour assurer le respect du droit international humanitaire et
rétablir ainsi les conditions de sécurité
nécessaires à la conduite d'activités humanitaires. Cela
dit, il conviendrait que les opérations de maintien de la paix, et
spécialement celles d'imposition de la paix, se distinguent clairement,
de par leur nature, des activités humanitaires122. Les forces
militaires ne devraient pas être directement impliquées dans
l'action humanitaire. En effet, si c'était le cas, les organisations
humanitaires seraient associées, dans l'esprit des autorités et
de la population, à des objectifs politiques ou militaires qui vont bien
au-delà des préoccupations d'ordre humanitaire.
119 S/RES/1296 (2000), par. 15 : Le Conseil de
sécurité « Se déclare disposé à
examiner s'il est approprié et possible de créer des zones de
sécurité provisoires et des couloirs de sécurité
pour la protection des civils et l'acheminement de l'assistance lorsqu'il y a
menace de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de
guerre contre la population civile ».
120 Rapport du Groupe d'étude sur les opérations
de paix de l'Organisation des Nations Unies, Doc. A/55/305-S/2000/809, 21
août 2000.
121 Résolutions 1973 (2011), 2100 (2013), 2121 (2013).
122 Cornelio Sommaruga, président du Comité
international de la Croix-Rouge. Discours prononcé lors d'une
conférence sur l'action humanitaire et les opérations de
maintien de la paix, [organisée par l'Institut des Nations Unies
pour la formation et la Recherche (UNITAR), l'Institute of Policy
Studies (Singapour) et le National Institute for Research
Advancement (Japon). Elle s'est tenue à Singapour, du 24 au 26
février 1997], soulignait que « Le recours à la force contre
la volonté des parties à un conflit à même pour des
raisons humanitaires valables, par exemple pour permettre la fourniture de
l'assistance à transformerait nécessairement l'action humanitaire
en opération militaire ». Pour lui, « la simple menace
d'employer la force dans le but de faciliter l'action humanitaire peut
compromettre celle-ci, en particulier parce qu'une telle menace ne peut
être maintenue indéfiniment. »
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