La redynamisation des "assistés" par le support du sport. Le rôle des encadrants comme possible inflexion d'une logique portée par l'institution ? le cas d'une action atypique de remobilisation par l'activité physique.par Clément Reussard Université de Bretagne Occidentale - Master 2 SSSATI 2012 |
Partie II - Description de l'action « EnAvant Toute ! » 1. Historique 1. Genèse L'action « En Avant Toute ! » a été créé en 1998 après que Patrice Daviaud alors assistant social au Centre Départemental d'Action Sociale (CDAS) de Quimper, ait soulevé quelques interrogations sur la situation de l'homme au sein du couple lors des demandes d'aide sociale. Le constat était le suivant : les femmes sollicitent davantage une aide psychologique ou financière que les hommes. C'est pourquoi, l'idée originale était de mettre en place des activités sportives sur le territoire de Quimper dans le but de toucher un public homme, et plus particulièrement, les hommes allocataires du Revenu Minimum d'Insertion (RMI). Le public visé était donc, à l'origine, exclusivement masculin. L'essentiel des activités sportives ont été conçues et mises en place dans un premier temps par Patrice Daviaud, qui avait pris quelques contacts au sein du tissu sportif quimpérois, notamment auprès d'une piscine et d'une salle de musculation. Bernard Moulin a dès le départ été embauché pour encadrer l'ensemble des activités. Son premier contrat de travail était alors un Contrat à Durée Déterminée (CDD) à temps partiel, mais il convient de préciser d'emblée qu'il n'était pas employé par le Conseil Général. En effet, depuis la création d' « En Avant Toute ! », c'est l'Association Départementale pour la Sauvegarde de l'Enfance, de l'Adolescence et des Adultes du Finistère (ADSEA29) qui sert d'association support et qui emploie Bernard Moulin. Une association qu'il connaissait déjà pour l'avoir côtoyé lorsqu'il travaillait à Avel-Mor, une Maison d'Enfance à Caractère Social (MECS), d'autant plus qu'il connaissait son directeur de l'époque, Dominique Odot. C'est pourquoi, l'ADSEA29 a facilement accepté de servir de « boîte aux lettres » pour l'action, dans la mesure où elle recevait la subvention du Conseil Général, et la reversait d'une part, à Bernard Moulin sous forme 32 de salaire, et d'autre part, à « En Avant Toute ! », pour couvrir financièrement son fonctionnement. Subventionnée exclusivement par le Conseil Général, l'expérience originale a duré quatre mois. Il s'agissait en fait d'un premier essai, qui a fait l'objet d'un premier bilan par le Conseil Général, qui a décidé de reconduire l'action sur un plus long terme. A partir de là, l'action « En Avant Toute ! » s'est progressivement développée sur le territoire finistérien et en s'élargissant à de nouveaux publics. 2. Principales évolutions Ouverture à d'autres publics Tout d'abord, la première évolution importante a été d'ouvrir très rapidement l'action aux femmes car il n'y avait aucune raison que seuls les hommes puissent bénéficier d'activités sportives. Par ailleurs, l'action s'est progressivement élargie à une plus grande diversité de publics. Bien qu'à l'origine, elle s'adressait uniquement aux hommes allocataires du RMI, l'action s'est peu à peu ouverte à d'autres minimas sociaux, tels que l'Allocation Adulte Handicapé (AAH), l'Allocation de Solidarité Spécifique (ASS) ainsi qu'aux personnes touchant des indemnités de chômage par l'ASSociation pour l'Emploi Dans l'Industrie et le Commerce, plus connu sous le nom d'A.S.S.E.D.I.C. L'action s'est également ouverte aux demandeurs d'asile, aux personnes en situation d'invalidité, puis aux personnes en formation. Cette ouverture à différents publics est intéressante à bien des égards puisqu'elle a permis non seulement de diversifier son public, mais également de varier les sources de financement. Nous reviendrons plus tard sur ce point. Développement sur le territoire Concarneau-Quimperlé Depuis 2008-2009, l'action « En Avant Toute ! » s'est développée sur le territoire de Concarneau et Quimperlé sous l'impulsion du Conseil Général du Finistère avec l'embauche à temps plein d'un deuxième éducateur sportif, Florent Philippe. Il dispose d'un bureau au CDAS de Concarneau et de Quimperlé. Il s'occupe du public des secteurs de Concarneau et Quimperlé de façon autonome. Toutefois, il reste quotidiennement en contact avec Bernard Moulin. 33 À noter qu'une étude de faisabilité a été menée en 2010 sur la possibilité d'un élargissement de l'action au Finistère-nord et plus précisément sur le territoire brestois. Les conclusions de l'étude étaient plutôt encourageantes mais des problèmes de financement persistent. Prestations de services et nouvelles sources de financement Depuis 2006, « En Avant Toute ! » a mis en place un partenariat avec le Centre d'Adaptation et de Formation Professionnelle100 (CAFP) puis avec différents Instituts Bretons d'Education Permanente (IBEP) du département (Douarnenez, Quimperlé, Concarneau, Pont-l'Abbé). Désormais, l'action accueille sur différentes activités des jeunes en formation dans l'une des deux structures en échange d'une contrepartie financière. 2. Publics accueillis Un document de présentation de la structure présente le public d' « En Avant Toute ! » de cette façon : « Il s'agit d'hommes et de femmes sans emploi, de 18 à 60 ans, de toutes origines sociales, culturelles, et géographiques, bénéficiaires des minima sociaux et inscrites dans une démarche d'emploi. » 1. Les caractéristiques des publics d' « En Avant Toute ! » « En Avant Toute ! » permet aux personnes qui s'y inscrivent de pouvoir se « reconstruire » après avoir été confrontées à des « accidents de vie (chômage, séparation, maladie, déplacement, etc.)101 » pour reprendre ici les termes employés sur la page web102 qui présente l'action. Toujours selon cette même page, « les personnes sans emploi subissent souvent un choc émotionnel qui provoque un véritable bouleversement intérieur103 », qui se décline « principalement » sous cinq aspects : 100 Qui fait également partie de l'ADSEA 29. 101 Dans un document de présentation de l'action, d'autres « accidents de vie » sont évoqués : « accident, dépression, blessure, méforme, immigration. » 102 Consultable à l'adresse : < http://www.adsea29.org/index.php?option=com_content&view=article&id=82&catid=43&Itemid=78 > 103 Dans d'autres documents, l'expression « bouleversement intérieur » est remplacée par « séisme intérieur », encore plus forte à mon sens. 34 - « Une perte de repère temporel » - « Un changement de statut » - « Une détérioration du lien social » - « Une diminution de l'estime de soi » - « La dégradation de la santé et de l'hygiène de vie » Il me paraît important d'expliciter davantage les cinq bouleversements évoqués qui peuvent survenir à la suite « d'accidents de vie » en se basant, là-aussi, sur de la documentation interne à la structure : - La « perte de repère temporel » fait ici référence à un « changement de rythme de vie104 » que peut provoquer ces « accidents de vie ». Bernard Moulin revient souvent sur cette question du temps à travers son ouvrage105 dans un chapitre intitulé « les milliardaires du temps perdu ». Pour lui, le temps constitue une « richesse », « une fortune », « un trésor incalculable » dont il faut savoir tirer profit. Pourtant, généralement ces situations sont vécues difficilement. « Le temps qui passe devient le temps du doute », et peu à peu il devient synonyme d'un « temps mort social ». - Le « changement de statut » peut être vécu comme « dramatique » car « la considération et la reconnaissance viennent du statut de travailleur ». Le chômage, quant à lui, « est vécu comme une humiliation, un désaveu des compétences professionnelles et des capacités relationnelles. » - La « détérioration du lien social » peut être un effet logique de la perte d'emploi, car de fait, on ne bénéficie plus des relations professionnelles internes à une entreprise ou une institution. - La « diminution de l'estime de soi » est souvent liée au changement de statut social vécu après la perte d'un emploi. - La « dégradation de la santé et de l'hygiène de vie » se constate dans bien des cas, chez des personnes soumises à de tels bouleversements. La personne sans emploi peut alors sombrer dans une « léthargie destructrice et une déchéance physique, en route vers la dépression et son lot de conduites associées (alcool, tabac, médicaments, drogue, télévision, boulimie, anorexie, inaction, apathie) ». 104 Là aussi, tous les termes et expressions entre guillemets proviennent de documents internes ou de présentation de l'action. 105 Moulin B., Guilbaud S., Sport, emploi, et performances... sociales. Être ou avoir ?, édité à compte d'auteur, 2009. 2. Les différents statuts Sur l'année 2010, 255 personnes étaient inscrites à « En Avant Toute ! ». Un nombre en hausse chaque année depuis la création de l'action en 1998. Les 255 personnes inscrites peuvent être réparties selon les différents statuts et dispositifs dans lesquels ils sont insérés (voir Tableau 1 et Graphique 1) :
35 Tableau 4 et Graphique 4 - Répartition par statuts des personnes inscrites du 1er janvier au 31 décembre 2010 dans l'action « En Avant Toute ! », sur l'ensemble des secteurs Quimper/Concarneau/Quimperlé 3. L'orientation Les personnes inscrites à « En Avant Toute ! » ont été orientées par différents organismes ou institutions. Cette grande diversité constitue une des principales caractéristiques d' « En Avant Toute ! ». En effet, les inscrits n'ont pas tous été orientés dans l'action par des travailleurs sociaux de CDAS ou de Centres Communaux d'Action Sociale (CCAS). Beaucoup le sont par professionnels du secteur médical (médecins, centres de bilan de santé, centres d'alcoologie, centres médico-psycho-pédagogique, etc.) ou quelquefois par des personnes évoluant dans la sphère de l'insertion 106 CAE : Contrat d'Accompagnement dans l'Emploi « Le contrat d'accompagnement dans l'emploi (CAE) est un contrat de travail à durée déterminée, destiné à faciliter l'insertion professionnelle des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d'accès à l'emploi. Ce contrat s'adresse aux employeurs du secteur non marchand (collectivités territoriales, associations loi 1901, ...). » < http://www.travail-emploi-sante.gouv.fr/.../le-contrat-d-accompagnement.html > 36 professionnelle (Mission Locale, Plan Local pour l'Insertion et l'Emploi, etc.). De plus, il ne faut pas sous-estimer le rôle joué par le bouche à oreille et les réseaux informels. Voici, par ordre d'importance, les différents organismes qui orientent les personnes vers l'action (en gras le nombre de personnes concernées, en italique, le pourcentage que cela représente) :
Tableau 5 - Orientation des personnes inscrites du 1er janvier au 31 décembre 2010 dans l'action « En Avant Toute ! », sur l'ensemble des secteurs Quimper/Concarneau/Quimperlé Une sous-partie consacrée aux différents partenariats reviendra ultérieurement sur le rôle joué par chacun de ces partenaires, et l'importance de développer et pérenniser ces partenariats dans un maximum de domaines (social, professionnel, santé, sport). 4. Les conditions d'inscriptions Pour s'inscrire à « En Avant Toute ! », il faut seulement pouvoir justifier d'un certificat médical de non contre-indication à la pratique sportive. 37 Un entretien avec Bernard Moulin ou Florent Philippe, selon le secteur concerné, a également lieu avant de pouvoir intégrer une activité et de se joindre au reste du groupe. Celui-ci a pour objectif de mieux cerner les motivations de la personne ainsi que de réduire les appréhensions, souvent nombreuses, avant d'intégrer le groupe. Lors de cette rencontre, la personne comptant s'inscrire doit remplir une fiche de renseignement qui se décompose en trois rubriques : - « Identité » (nom, prénom, adresse, email, téléphone, situation familiale, nombre d'enfants) - « Situation Professionnelle » (situation, statut, dernière activité, niveau d'études, domaine de recherche d'emploi, loisirs, véhicule) - « Motivations » (faire du sport et/ou rompre la solitude et/ou rencontrer des gens) Il n'y a pas ici à signer de règlement intérieur. Bien sûr, il existe des règles implicites à respecter, inhérentes au bon fonctionnement de tout groupe, comme par exemple : être à l'heure, prévenir à l'avance de ses intentions, participer aux tâches collectives (aider à faire les courses avant de partir sur une activité, participer à la vaisselle au retour, etc.). Mais ces règles ne sont inscrites dans aucun règlement intérieur ou document écrit. Ici, le bon fonctionnement du groupe repose avant tout sur le respect d'autrui. 3. Objectifs Les objectifs de l'action sont multiples et sont basés sur des « constats de carence et de modification de l'environnement de la personne privée d'emploi » évoqués plus haut via les caractéristiques des publics concernés. Sur la page consacrée à « En Avant Toute ! » sur le site de l'ADSEA29107, nous pouvons lire ceci : « Afin de redynamiser les personnes, il est fondamental : - de rompre l'isolement - de redonner une image valorisante afin de reprendre confiance en soi - de redynamiser les énergies et stimuler le potentiel physique, mental et relationnel, d'améliorer l'état de santé et l'hygiène de vie 107 Consultable à l'adresse : < http://www.adsea29.org/index.php?option=com content&view=article&id=82&catid=43&Itemid=78 > 38 - d'accéder aux loisirs - d'établir un emploi du temps » Ces objectifs fondamentaux de l'action répondent quasiment point par point aux « bouleversements » engendrés par les « accidents de vie » (évoqués précédemment), et apparaissent ainsi comme des solutions précises répondant à des problèmes précis. Toutefois, on note la présence d'un nouvel enjeu qui est celui « d'accéder aux loisirs » qui vient s'ajouter aux autres objectifs fondamentaux. Les termes employés pour définir les principaux objectifs de l'action peuvent varier légèrement d'un document à un autre. Par exemple, l'objectif « d'établir un emploi du temps » est parfois substitué par « donner des repères temporels » ou « donner des repères dans le temps (programme) ». A noter que sur des documents internes plus récemment mis à jour, un nouvel objectif apparaît : il s'agit de « lutter contre les barrières sociales et générationnelles ». 4. Fonctionnement 1. Personnel Le personnel d' « En Avant Toute ! » est aujourd'hui constitué de deux salariés à temps plein, à savoir Bernard Moulin, éducateur sportif et animateur socioculturel, présent sur l'action depuis 1998, et Florent Philippe, éducateur sportif embauché en 2009. On peut souligner que la structure accueille régulièrement des stagiaires au sein de l'action. Ces stagiaires proviennent de différents horizons et de différentes formations : étudiants en Science et Technique des Activités Physiques et Sportives (STAPS) comme ce fut mon cas, étudiants en formation d'éducateur spécialisé, étudiants en Brevet Professionnel de la Jeunesse, de l'Education Populaire et du Sport (BPJEPS) option « Animation Sociale » (comme Yannick, stagiaire sur la même période que moi, et une nouvelle stagiaire arrivée après moi), etc. 39 2. Activités Participation En premier lieu, il convient de rappeler ici que toutes les personnes inscrites à « En Avant Toute ! » ne participent pas aux activités, comme le montre le tableau suivant :
Tableau 6 - Taux de participation des inscrits sur l'année 2010 Ainsi, sur les 255 personnes inscrites dans l'action sur l'année 2010, seulement 173, soit 67,8% ont participé à au moins une des activités proposées au cours de l'année. Cette non-participation à hauteur de 32,2%, soit près d'un tiers des inscrits, s'explique par de multiples raisons, comme la peur d'affronter le groupe, une santé trop fragile ou encore le retour à une vie professionnelle peu de temps après l'inscription. Fréquentation La fréquentation reste très variable selon les saisons, les activités proposées et les conditions matérielles qui lui sont liées. Du reste, sur l'année 2010 les groupes pris en charge sont en moyenne composés, par jour, de cinq à six personnes sur le secteur de Quimper, et trois à quatre personnes sur le secteur de Quimperlé / Concarneau. Bien sûr, il s'agit là de moyennes qui ne mettent pas en lumière les écarts relativement considérables de fréquentation qui subsistent et nécessitent une grande capacité d'adaptation au quotidien. La durée de présence dans l'action est environ de six mois, il s'agit là également d'une moyenne et cela varie très fortement d'une personne à une autre sans compter que beaucoup viennent par période, c'est-à-dire qu'ils peuvent venir pendant des mois, disparaître quelques semaines, puis revenir quelques semaines, etc. 40 Programme mensuel Chaque fin de mois, un programme du mois suivant est distribué par courrier ou par mail à l'ensemble des personnes inscrites ainsi qu'aux différents partenaires de l'action susceptibles d'orienter des personnes vers celle-ci. Ce programme détaille les différentes activités qui vont être organisées, le lieu où elles vont se dérouler, ainsi que les heures et lieux de rendez-vous pour le départ108. Parfois, une activité initialement prévue peut être remplacée ou modifiée selon les envies du groupe, ou les conditions climatiques. Il est précisé sur ces programmes qu' « afin d'organiser les activités (transport, matériel) » les personnes intéressées doivent s'inscrire « la veille au plus tard ». Cette règle n'est que partiellement respectée puisqu'il arrive que des personnes se décident le jour même, ne préviennent pas de leur venue ou au contraire oublient de se décommander. Journée type Une journée type commence à neuf heures du matin, heure de rendez-vous. Un café est servi à ceux qui en veulent, le temps que tout le monde arrive au bureau d' « En Avant Toute ! » situé au sein même du CDAS. S'il s'agit d'une journée marche, c'est parfois l'occasion de décider collectivement du lieu de balade en fonction des envies mais aussi du temps. On prend les affaires dont on aura besoin (reste de nourriture, ustensiles de cuisine) puis tout le monde monte dans le fourgon pour aller faire les courses du midi. Chacun participe aux courses, aide à remplir le caddie et décide du menu109. Il est environ dix heures, le moment de partir sur le lieu d'activité. S'il s'agit d'une activité prévue sur toute la journée, chacun porte une partie du pique-nique dans son sac à dos. Vient l'heure du repas, un moment très important pour le groupe, comme l'explique Bernard Moulin : « Les repas préparés ensemble sont l'occasion d'échanges très riches, très vifs parfois, de confidences et de coups de griffes mais heureusement l'humour a souvent le dernier mot. Ce mélange de cultures, d'expériences diverses, d'âges et de motivations différentes apporte au groupe les richesses que chacun veut bien déposer ou puiser. Ces moments conviviaux permettent à tous de s'exprimer, aux tensions de s'apaiser, au groupe de se réguler et aux estomacs de se caler. Ces moments 108 Voir annexe. 109 Le menu reste un menu basique de pique-nique : pain, salade de crudités, jambon/poulet, chips, fruits, eau, etc. 41 de pause indispensables ont permis au groupe de se souder et aux personnes de vraiment se rencontrer et de créer des liens110 ». L'activité continue l'après-midi, et le retour au CDAS se fait vers seize heures. La journée n'est pas encore finie puisqu'il faut encore laver la vaisselle du midi avant de rentrer chez soi. Quelles activités ? « Certaines activités se pratiquent toutes les semaines (piscine, marche), d'autres sont saisonnières (kayak de mer, voile, vélo, badminton) ou occasionnelles (musculation, orientation, ping-pong, pêche, visites d'expositions, etc.). En fonction des contraintes météorologiques et humaines, le programme proposé mensuellement peut être remis en cause et les activités adaptées à la situation du moment. 111 » A l'échelle de l'année 2010, voici comment se répartissent la participation aux différentes activités proposées sur l'ensemble des secteurs de Quimper, Quimperlé et Concarneau :
Tableau 7 - Répartition des activités
proposées par « En Avant Toute ! » sur l'année 2010
sur Ce tableau permet de rendre compte de la prédominance de certaines activités sur les autres. Ainsi, la combinaison des activités marche et piscine atteint 62,6% de la participation sur la totalité des activités proposées sur l'année 2010 dans l'ensemble des secteurs. Parmi les autres activités proposées par « En Avant Toute ! » : le kayak (9,7%) et le badminton (8,8%) jouent un rôle important ainsi que dans une moindre mesure le vélo (3,5%) et la musculation (3,3%). 110 Moulin B., Guilbaud S., Op. Cit., p.119 111 Ibid., p.111 112 Il s'agit là du nombre total de participants pour chaque activité durant toute l'année, ce qui inclut les participants qui viennent à plusieurs reprises sur la même activité. Le choix des activités « Les activités physiques ont été choisies pour la facilité de leur organisation et leur adaptabilité au nombre fluctuant de stagiaires. J'utilise la pratique sportive comme moyen d'expression permettant de rétablir la confiance en soi. A la technicité nécessaire à toute pratique sportive, je préfère privilégier les émotions qu'elle suscite, la solidarité qu'elle nécessite afin de parvenir au terme d'une étape, au bout d'une épreuve. J'essaie dans la mesure du possible de supprimer les causes d'échec et les jugements de valeur en adaptant les activités aux personnes et non l'inverse.113 »
42 113 Moulin B., Guilbaud S., Op. Cit., p.111 Bilans individuels et collectifs Des bilans individuels et collectifs sont mis en place quelque fois dans l'année. Dans son livre, Bernard Moulin les justifie ainsi : « Nous avons mis en place des outils d'évaluation afin de cerner le bien-fondé de cette action. Après quelques mois de présence dans l'action, il est proposé un bilan individuel aux stagiaires qui « s'installent » dans le dispositif ou qui ont besoin d'une aide spécifique. C'est le moment des mises au point par rapport à certains comportements, des conseils personnalisés, des observations sur les progrès réalisés ou des incitations à découvrir d'autres horizons. Ces bilans personnalisés permettent surtout une écoute et un recadrage par rapport aux finalités de l'action « En Avant Toute ! ». Cette action est bien centrée sur la remobilisation vers l'emploi et n'est en aucun cas un atelier occupationnel. Ce bilan individualisé permet de baliser le chemin vers la sortie du dispositif et de repartir sur de nouvelles bases. C'est un moment d'écoute très important où les confidences, les espoirs, les doutes sont exposés. Les bilans collectifs quant à eux sont des rencontres indispensables afin de dynamiser le groupe. Les projets collectifs, les progrès individuels, les difficultés relationnelles et d'organisation, sont abordés lors de ces réunions annuelles. Ce groupe étant en perpétuelle évolution, il est parfois difficile de concilier les bonnes résolutions prisent à un moment donné avec les nouvelles personnes qui intègrent le dispositif en cours d'année.114 » 43 114 Moulin B., Guilbaud S., Op. Cit., p.119 44 5. Financement 1. Répartition des subventions Voici comment se répartissent les subventions allouées à « En Avant Toute ! » et comment elles ont évoluées entre 2006 et 2010 :
Tableau 8 - Evolution des subventions (de 2006 à 2010) On constate que : - Entre 2006 et 2010, les subventions allouées
à « En Avant Toute » ont plus que - Certaines subventions (notamment celles concernant la
Promotion de la Santé, le - En 2010, la subvention attribuée par le Conseil
Général a diminué en comparaison Cette réduction ainsi que la non-reconduction d'autres subventions auparavant obtenues, a conduit « En Avant Toute ! » à développer ses prestations de service pour pallier ce déficit de financement.
Dans le souci de varier ses sources de financement, « En Avant Toute ! » a dû développer des prestations de services auprès de structures comme le Centre d'Adaptation à la Formation Professionnelle (depuis 2006), et l'Institut Breton d'Education Permanente (depuis 2010). Il s'agit en fait d'une convention de sous-traitance qui permet de dégager de nouvelles rentrées d'argent en échange d'une prise en charge hebdomadaire de jeunes dans le cadre d'activités physiques et de découverte. Selon l'activité proposée et les conditions matérielles inhérentes à celle-ci, le nombre de jeunes pris en charges peut varier. Ainsi parfois, ils constituent l'unique public pris en charge sur la journée (comme par exemple pour une activité kayak) alors que d'autres fois, ils peuvent être mélangés avec le public habituel d' « En Avant Toute ! » (notamment sur les randonnées). Sur l'année 2010, le montant réalisé pour cet accord est de 6 153, 80 € pour le CAFP et de 9 730 € pour l'IBEP, pour une somme totale de 15 883, 80 €, un revenu non négligeable en ces temps de restriction budgétaire.
Il arrive parfois que l'action obtienne des récompenses ou des prix, généralement remis par des entreprises privées qui souhaitent valoriser leur image. Par exemple, en mars 2011, « En Avant Toute ! » a gagné 300 € lors d'une remise de prix organisée par la Caisse d'Epargne. 6. Partenariats Au cours de diverses présentations d' « En Avant Toute ! » ou d'échanges informels, Bernard Moulin ne cesse de souligner la nécessité de tisser un bon réseau de partenaires pour ce type d'action, et ce en outrepassant les clivages habituels. Selon lui, « le partenariat mis en place a grandement contribué à cautionner l'importance de travailler en réseaux afin de considérer la personne dans sa globalité115 ». « En Avant Toute ! » mêle en effet des partenaires issus de domaines qui se rencontrent rarement, tels que ceux issus du social, de la santé, de l'emploi et du sport qui sont pourtant complémentaires à bien des égards dans le cadre de cette action. Les articles 20 et 21 de la loi 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale mettent l'accent sur la coordination et la coopération dans le travail social. Le partenariat est défini comme « une association active de différents intervenants qui, tout en maintenant leur autonomie, acceptent de mettre en commun leurs efforts en vue de réaliser un objectif commun, dans lequel ils ont un intérêt, une responsabilité, une motivation, voire une obligation »116. Un partenariat existe donc 115 Bernard Moulin, article « Sport et travail social », à paraître ... 116 Barreyre J-Y (sous la dir. de), Dictionnaire critique de l'action sociale, Fayard, Paris, 1995. 47 lorsque deux institutions ayant des compétences différentes s'engagent autour d'un projet commun pour répondre aux besoins des usagers. C'est ce que fait « En Avant Toute ! » dans le cadre de partenariats recouvrant le l'insertion sociale, l'insertion professionnelle, la santé ou encore l'animation et les partenariats extérieurs. 1. Partenariat Insertion Sociale « En Avant Toute » est en contact permanent avec le CDAS et le CCAS de Quimper, le bureau étant dans les mêmes locaux. C'est un détail important dans la mesure où les assistants sociaux ne peuvent oublier l'existence d' « En Avant Toute », et orientent les personnes qu'elles accueillent qui pourraient en tirer bénéfice vers l'action. De même, « En Avant Toute » est connu de l'association An Treiz117, du Centre d'Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS) de l'Escale et des communautés Emmaüs alentours qui peuvent également diriger des personnes vers l'action. 117 «An Treiz est une association qui a pour objet de favoriser dans la durée l'insertion sociale et professionnelle de personnes présentant une déficience intellectuelle et/ou un handicap psychique et/ou cognitif, ainsi que de sensibiliser, d'accompagner, soutenir et former l'environnement professionnel de la personne. » Article 2 des statuts d'An Treiz 48 2. Partenariat Insertion Professionnelle « En Avant Toute ! » travaille également en partenariat avec des acteurs locaux de l'insertion professionnelle. Ainsi, elle est connue par la Mission Locale, l'ACTIFE118 (ex « PLIE »119) par exemple. Elle travaille également en partenariat avec l'IBEP et le CAFP, comme nous l'avons vu précédemment, se constituant ainsi une autre source de financement. Enfin, elle met en place des ateliers pour aller à la rencontre de possibles employeurs tels que le chantier naval de Trégunc, les ostréiculteurs de la Forêt Fouesnant, Nautisme en Finistère (NEF), etc. afin de découvrir quelques métiers de la mer (via le « module mer »). 118 ACTIFE : Action Territoriale pour l'Insertion, la Formation et l'Emploi. 119 PLIE : Plan Local pour l'Insertion et l'Emploi
L'action dispose de certains partenaires dans le domaine de l'animation comme par exemple la ville de Quimper, pour obtenir des créneaux pour des gymnases. 120 CCAA : Centre de Cure Ambulatoire en Alcoologie. 121 SAMSAH : Service d'Accompagnement Médico-Social pour Adultes Handicapés (traumatisés crâniens). 50 5. Partenariat Interventions Extérieures Enfin, « En Avant Toute ! » ne manque pas d'élargir ses contacts dès qu'elle le peut en présentant son action dans différentes écoles (ITES122 de Brest ou IFSI123 Quimper), ainsi que dans divers colloques. 7. Perspectives Les perspectives de l'action sont difficiles à évaluer en raison de la reconduction ou non des financements d'une année sur l'autre et de la politique adoptée par le Conseil Général. L'objectif premier d' « En Avant Toute ! » est de pérenniser l'action autour du secteur de Quimper et de Quimperlé/Concarneau. Le secteur de Quimper fonctionne très bien, grâce à la réputation acquise par l'action depuis sa création, le bouche à oreille, les partenaires de longue date. Encore très récent, le secteur de Quimperlé / Concarneau ne jouit pas encore de la même reconnaissance et des mêmes tissus de partenaires. De plus, le public n'est pas le même, il est davantage isolé car davantage rural. L'élargissement de l'action à d'autres territoires évoqué et même évalué un temps ne semble plus à l'ordre du jour du fait de restrictions budgétaires. 122 ITES : Institut pour le Travail Educatif et Social (école de formation en travail social). 123 IFSI : Institut de Formation en Soins Infirmiers. 51 |
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