Discussion
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Discussion
Le but de cette étude est d'évaluer les valeurs
énergétiques et nutritionnelles de certaines recettes
traditionnelles algériennes destinées aux nourrissons.
Avant ce travail, une enquête a été
réalisée auprès de 60 mères sur plusieurs
paramètres concernant leurs nourrissons.
Le poids de naissance des nourrissons recrutés dans
cette étude était normal. Il est bien connu qu'un faible poids de
naissance est impliqué dans l'apparition de certaines maladies
chroniques à l'âge adulte, dont l'obésité,
l'hypertension, le diabète et les maladies cardiovasculaires
(Kramer, 2000). Le poids et la taille des nourrissons ont
permis de calculé l'indice de masse corporelle (IMC) ou de corpulence
qui est un bon reflet de l'adiposité et rend compte de la corpulence
d'un individu. Chez le nourrisson, il est un des meilleurs critères
diagnostique et pronostique de l'excès de poids. En se
référant aux courbes de corpulence du PNNS (2010) adaptées
à la pratique clinique, on retient les définitions suivantes:
insuffisance pondérale: IMC <3e percentile (11-17) ; corpulence
normale: = 3e percentile, IMC <97e percentile (17-26) (Thibault et
al,.2010) donc les nourrissons de notre étude sont
normo-pondéraux.
Malgré une population pédiatrique
majoritairement maigre ou en insuffisance pondérale, 15 % des enfants
algériens présentent un surpoids. De plus, la malnutrition recule
puisque entre 1995 et 2002, la maigreur de l'enfant a été
réduite de 4% et l'insuffisance pondérale de 10%, alors que
parallèlement le surpoids a augmenté de 17% (Corriol,
2005). Dans le monde, 15% des nourrissons étaient obèses
en 2004 (Stettler,2004).
Dans notre société, on remarque souvent que le
premier responsable de la famille est le père, puis la mère en
second lieu. La quasi-totalité des pères bénéficie
d'une activité professionnelle, par rapport aux mères qui sont en
majorité sans profession, Plus que la moitié des parents a un
niveau d'instruction moyen à élevé (secondaire ou
universitaire) et peu de parent ont un niveau bas, cela signifie que la
majorité des nourrissons sont issus de familles instruites, ainsi le
niveau d'instruction de la mère reflète la façon dont le
nourrisson est alimenté.
La fréquence et le choix des recettes,
intégrées dans l'alimentation du nourrisson, sont un grand
défit vis-à-vis des difficultés de la vie et la peur de la
mère de ne pas «être à la hauteur». Diverses
études ont identifié le niveau d'instruction de la mère
comme un atout
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crucial pour de bonnes pratiques de soins et un
déterminant important de la croissance des enfants dans les 18 premiers
mois de la vie (Amar-Klemesu, 2000).
La moitié des mères ont rapporté qu'elles
ont été informées sur la diversification alimentaire et
l'alimentation de leurs enfants et que leur source d'information est
généralement la famille, principalement les belles mères
et les grands mères ou le pédiatre ou la puéricultrice et
ont déclaré faire toujours attention à l'équilibre
des repas de leurs nourrissons ? Toutes les mamans pensent éveiller leur
enfant aux goûts et aux différentes saveurs, tels que les fruits
et légumes,elles ont toutes rapporté que leur nourrisson
consommaient des fruits et légumes tous les jours,plus de la
moitié d'entre eux mangent des féculents à tous les repas.
La viande blanche est le type de viande le plus privilégié par
les mères et l'oeuf est considéré comme l'aliment le plus
consommé par les nourrissons et le poisson est retrouvée chez la
majorité d'entre eux. Pour ce qui est des produits laitiers, la
quasi-totalité prend du fromage et du yaourt, à raison de 2-fois
et plus dans la journée. La plupart des mamans ont débuté
la diversification alimentaire de leurs nourrissons entre 4 et 6 mois et
essayent d'introduireles différents groupes d'aliments dans un
même repas..
Les parents doivent donc commencer progressivement à
donner à leur nourrisson d'autres aliments, en plus du lait maternel,
notamment, de la viande hachée, des produits laitiers, puis ajouter peu
à peu une variété d'aliments provenant des
différents groupes de denrées de base, à savoir les fruits
et les légumes, la volaille, le poisson et les oeufs
(WHO,2011).
L'alimentation joue évidemment un grand rôle dans
le développement, non seulement elle conditionne la croissance physique
et, notamment, celle du cerveau, mais elle constitue également, dans les
premiers mois de la vie un des moyens essentiels d'échange entre la
mère et le nourrisson, Parmi les activités familiales, les repas
ont une très grande influence sur le développement psychologique
de l'enfant et pourtant on ne leur prête pas suffisamment d'attention
(Rolland-Cachera, 2004.). Dans notre population, plus de la
moitié des mamans préparent des recettes traditionnelles
typiquement algériennes pour leurs nourrissons. Quatre-vingt-neuf %
parmi ces mères déclaré que la fréquence de
préparation est à raison de 2-fois par semaine et plus.
Dans ce travail, 19 recettes traditionnelles
algériennes les plus populaires ont été collectées
auprès des 60 mamans ainsi que des personnes âgées. Il
s'agit de la soupe de légumes Algérienne Bouyoun, la soupe
aux lentilles et au cumin, la soupe citrouille poireau carotte pomme de terre,
la purée de courgette, la purée de petits pois et patates douces
Assida
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Algérienne,la semouline aux oeufs, la soupe de
semoule au poulet et à la courgette, la purée de semoule
algérienne (Ayerni), Zreguaau lait, la soupe de pois cassés et
vermicelle, le vermicelle au lait, la purée pomme de terre façon
chtithaau poulet, la purée de cervelle, la purée de merlan, la
purée de foie, la compote de pommes, la purée carotte banane, le
Mhalbi et la crème de riz au lait.
Il existe d'autres recettes traditionnelles, telle que Rouina
,Mhamsaau lait et oeufs...
En général, les recettes traditionnelles sont
quasiment presque identiques dans toutes les wilayas du pays, bien que certains
ingrédients et dénominations diffèrent selon les
régions ; par exemple Assida dans presque toutes les
régions et Iwzan en Kabylie.
Cependant, des particularités sont notées dans
certains plats, telle que la Purée à la semoule
algérienne (Ayerni) qui est une spécialité à
base d'un tubercule qui pousse uniquement dans la région de Collo,
wilaya de Skikda, ainsi que la Semouline aux oeufsqui est originaire de la
wilaya de Tlemcen. Le bouyoun et assida, Vermicelle au lait,
ainsi que Mhalbi sont les recettes traditionnelles les plus populaires
en Algérie.
Ce travail a permis de constaté que les mamans
algériennes préservent toujours les recettes traditionnelles de
grands-mères même si elles utilisent des petits pots industriels
comme complément pur leurs nourrissons.
L'estimation de la valeur énergétique et
nutritionnelle des 19 recettes traditionnelles sélectionnées
montre que la valeur énergétique et les teneurs en nutriments
varient, en raison du mode de préparation et de cuisson, ainsi que les
différents ingrédients intégrés dans la recette.
Ses résultats sont en accord avec ceux d'une étude
réalisée par (Traoré, 2007). Et qui avait
pour objectif de vérifier, en situation réelle,
l'efficacité de bouillies améliorées, par incorporation de
farine maltée et de micronutriments, en comparant les compositions en
ingrédients et en nutriments des bouillies améliorées et
traditionnelles. Le but était d'augmenter les ingérés
énergétiques et promouvoir la croissance et un bon statut en
micronutriments, chez les enfants de 6 à 10 mois, dans un village de la
province du Boulgou située au Sud-Est du Burkina Faso.
Par ailleurs, les résultats de l'étude
menée au Burkina Faso ont montré que les quantités de
bouillie consommée étant faibles, la contribution des bouillies
améliorées et traditionnelles à la couverture des besoins
énergétiques journaliers (77 kcal/kg/jour) chez les enfants de 6
à 10 mois) reste faible (14% vs 4%, respectivement pour les
bouillies améliorées et les bouillies traditionnelles)
(Dewey etal., 2003).
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L'évaluation de l'apport énergétique
total (AET) moyen montre que les différentes recettestraditionnelles
algériennes, destinées aux nourrissons, sont peu
énergétiques. Il est possible d'en consommer deux plats par jour,
sans atteindre la limite des besoins énergétiques
recommandés pour les nourrissons.
Dewey & Brown, (2003).ont
mentionné queles besoins en énergie d'un nourrisson,
âgés de 6 à 8 mois, en bonne santé et allaité
au sein, sont de 615 kcal/j, de 686 kcal/j pour les 9 à 11 mois et 894
kcal/j pour les 12 à 23 mois.
En général, les soupes sont
considérées moins énergétiques par rapport aux
autres plats à base de légumes, de féculents et de
viandes, les mets contenant des pâtes alimentaires, tels que Assida
algérienne, Semouline aux oeufs, Purée à la semoule
algérienne (Ayerni), Zreguaau lait, Soupe de pois cassés
et vermicelle, Vermicelle au lait, sont les plus énergétiques.
Les pâtes rentrent dans l'alimentation des enfants à partir de 6
mois, âge auquel les mères commencent à leur donner le plat
familial. Pour garantir un apport en protéines de qualité, quand
le lait et les autres aliments d'origine animale ne sont pas consommés
en quantité suffisante, l'enfant doit manger chaque jour à la
fois des céréales et des légumineuses, si possible au
cours du même repas (EDS, 2000).
Les aliments riches en vitamine C sont importants, non
seulement parce qu'ils sont source de vitamine C, mais aussi, pour augmenter
l'absorption du fer non-héminique. Les vitamines B sont essentielles
pour la croissance et le développement de l'enfant et la riboflavine, la
vit. B6 et l'acide folique sont souvent en quantités trop
limitées dans la nourriture des jeunes enfants, dans les pays en voie de
développement (Dewey & Brown, 2003) En ce qui
concerne notre étude, les teneurs moyennes en vitamines et en
minéraux des recettes évaluées, notamment les Vit C et E,
ainsi que le fer sont très faibles. Cela veut dire que les aliments
constituant ces recettes apportent en faible quantité ces
micronutriments.
L'étude deSaidaniet al.,(2015) sur le
statut martial, chez des nourrissons âgés de 15 à 36 mois,
de la commune d'Es-Sénia (Oran), a montré que parmi les
nourrissons recrutés, la moitié présentait une
anémie légère et deux avaient une anémie
modérée. Cela explique que les parents de ces nourrissons
inculquaient à leurs enfants, très tôt dans la vie, de
mauvaises habitudes alimentaires, d'où certaines carences
nutritionnelles (Soualiet al., 2015).
Il est à noter que la préparation des plats
traditionnels nécessite une hygiène et un mode de cuisson
idéal permettant de préserver, au maximum, la valeur
nutritionnelle des aliments. Les cuissons rapides, à température
modérée, sont à privilégier. La meilleure
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cuisson est la cuisson à la vapeur, suivie du
blanchiment, de la cuisson à l'étouffée et à l'eau.
Le gout et la couleur sont encore plus naturels.
Il est important de différencier, pour l'enfant, la
nourriture faite maison de l'alimentation infantile industrielle, aussi
appelée le baby-food. Cuisiner soi-même pour son enfant reste la
règle pour la majorité des jeunes parents en Belgique,
l'industrie de l'alimentation infantile souffre non seulement de la
substitution par les repas faits maison mais également du faible taux de
natalité en Europe ( Keijer&Hoevenaars, 2014).
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