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Crise politico-religieuse en Afrique centrale. Cas de la RCA.par Matthieu Alidor Kabeya Université de Lubumbashi - Graduate en Relations Internationales. 2017 |
2.2. La MISCA et la MINUSCAOn ne saurait appréhender dans toute sa globalité la situation d'instabilité et les crises à répétition en République centrafricaine sans prendre en compte le contexte régional d'insécurité. Car en raison de la contiguïté géographique, de la porosité des frontières et de la similarité des facteurs, le conflit en République centrafricaine entretient des rapports directs avec les conflits et l'insécurité dans les régions d'Afrique centrale et orientale. De fait, et sans forcer le trait, on se rend bien compte que la situation de chaos en Centrafrique illustre à plusieurs titres la dimension régionale des conflits africains. En effet, On trouve dans un territoire de plus de 600.000 km2, non contrôlé, la contagion des conflits et crises régionaux. La quasi-totalité des pays frontaliers sont confrontés à des rebellions. C'est le cas de la République démocratique du Congo qui est constamment en crise avec une violence chronique à l'intérieur de ses frontières, du Tchad périodiquement confronté à des violences politiques sur fond de lutte pour le contrôle du pouvoir politique, du Soudan longtemps déchiré par le conflit du Darfour et du Soudan du Sud. Le Congo-Brazzaville a connu une guerre civile de juillet 1993 à décembre 1999. Le Cameroun est confronté depuis le début de l'année 2014 à des incursions fréquentes des insurgés nigérians de la secte islamiste Boko Haram. Même des rebellions dans les pays non limitrophes de la Centrafrique exploitent son territoire comme base arrière ; c'est le cas dans le Sud-est avec l'armée de résistance du Seigneur de Kony venant de l'Ouganda, l'extrême Nord avec les militants de Boko Haram du Nigeria.111(*) Dans cette configuration de violence exacerbée en RCA, il eut fallu apporter des réponses dans le sens d'une stabilisation et d'un maintien de la paix. Dans ce sens, la force multinationale des États d'Afrique centrale (FOMAC), soldats de maintien de la paix de la région déployés en RCA grâce à un accord signé fin 2007 avec la Communauté économique des États d'Afrique centrale (CEEAC), dans le cadre de la Mission de consolidation de la paix en République centrafricaine (MICOPAX) déployée en 2008, s'est montrée incapable de stopper la Seleka. En avril 2013, la CEEAC a décidé de déployer 2000 soldats supplémentaires pour appuyer la MICOPAX dont l'effectif très limité ne permettait pas de stabiliser le pays. Cependant, alors que la situation en République centrafricaine se dégradait dangereusement au cours de l'année 2013 avec un nouveau cycle de violence et de représailles qui menaçait de diviser le pays sur des bases religieuses et ethniques et, éventuellement de dégénérer pour devenir incontrôlable, le Conseil de sécurité autorise l'Union africaine quant à l'envoi d'une force africaine de maintien de la paix capable de stopper le cycle de violence, a voté la résolution 2127 du 5 décembre 2013, autorisant le déploiement de la Mission internationale de soutien à la République centrafricaine sous conduite africaine (MISCA). Les paragraphes 49 et 50 de la résolution traitent de l'action de la France et précisent que les « forces françaises présentes en RCA devenues l'opération Sangaris sont autorisées à prendre toutes mesures nécessaires pour appuyer la MISCA dans l'exercice de son mandat » Les objectifs et priorités des opérations des Nations Unies et, partant, leur configuration et leurs activités ont été adaptés au cours des affrontements en fonction de l'évolution de la situation du pays et des besoins du peuple. Ainsi, durant la phase initiale de son déploiement, l'opération MISCA a eu pour objectifs d'assurer un climat de sécurité, condition indispensable aux progrès dans d'autres secteurs, d'aider le Gouvernement de transition à exercer les fonctions essentielles de l'État, d'appuyer les efforts de paix et de réconciliation, de protéger les droits de l'homme fondamentaux et de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire.112(*) Son effectif autorisé par la Commission de paix et de sécurité de l'Union africaine était de 3652 hommes, dont 2475 militaires et 1 025 policiers et 152 civils. Les composantes militaire, civile et de police de la MISCA doivent aussi oeuvrer de concert pour appuyer le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des ex-combattants centrafricains, ainsi que le rapatriement de combattants étrangers. En décembre 2013 il a été décidé par la Commission de paix et de sécurité de l'UA de porter l'effectif de la MISCA de 6000 hommes. En raison des difficultés logistiques financières, matérielles, de projection de forces et d'inter-opérationnalité, la MISCA a été très vite dépassée par la situation de chaos sur le terrain. Ainsi, peu après sa constitution, la MISCA comme avant elle, la FOMUC, la FOMUC4, la MICOPAX.113(*) Ainsi le 15 septembre 2014, au terme de son mandat et en accord avec la résolution 2149 du 10 avril 2014 la MISCA a officiellement laissé la place à la MINUSCA. La majorité des effectifs de la MISCA a été transférée à l'opération de maintien de la paix des Nations Unies, et complétée par d'autres éléments choisis en fonction de la politique de vérification des antécédents de respect des droits de l'homme, de façon à parvenir à l'effectif autorisé selon la résolution, soit « 10 000 hommes, dont 240 observateurs militaires, 200 officiers d'état-major, et un maximum de 1 820 membres de la police civile et 10 unités de police constituées comprenant 1 400 membres des unités de police constituées, 400 policiers et 20 spécialistes des questions pénitentiaires en détachement ». Ces effectifs ont été déployés en même temps qu'une importante composante civile et le personnel d'appui requis. Enfin, le Conseil de sécurité suivant les recommandations du Secrétaire général de l'ONU a décidé le 28 avril 2015 par les résolutions 2212 du 26 mars 2015 et 2217/du 28 avril 2015 de proroger le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) jusqu'au 30 avril 2016 et procédé également à son renforcement : son effectif maximal autorisé est porté à 10 750 militaires et à 2 080 policiers, soit une augmentation de 750 militaires et de 280 policiers.114(*) * 111ARNAUD SEMNINAKPON HOUENOU, art. Cit., P.25 * 112 ARNAUD SEMNINAKPON HOUENOU, art. Cit., P.25 * 113Idem, P.25 * 114ARNAUD SEMNINAKPON HOUENOU, art. Cit. P.25 |
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