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Crise politico-religieuse en Afrique centrale. Cas de la RCA.par Matthieu Alidor Kabeya Université de Lubumbashi - Graduate en Relations Internationales. 2017 |
3.2. A. Signature d'un accordLe vendredi 11 janvier 2013, le gouvernement annonce officiellement la signature d'un accord entre les forces gouvernementales et les rebelles. Cet accord stipule que le président en fonction, François Bozizé, restera à la tête du pays jusqu'en 2016, date où sont prévues les prochaines élections présidentielles. Le samedi 12 janvier, le Premier ministre Faustin-Archange Touadera est démis de ses fonctions par le dirigeant centrafricain, conformément à l'accord passé entre le gouvernement et la Seleka. Le texte stipule qu'un « nouveau Premier ministre issu de l'opposition » devra être nommé par le chef de l'État, et ne sera pas révocable. Également, une dissolution de l'Assemblée nationale devrait avoir lieu, afin d'organiser des élections législatives dans les douze mois à venir. « Le Premier ministre ainsi que les autres membres du gouvernement ne peuvent être candidats à la prochaine présidentielle » de 2016, signale ledit accord, alors qu'un « retrait de toutes les forces militaires étrangères » est prévu, excepté la Fomac (Forces multinationales de l'Afrique centrale). Reprise des combats et prise de Bangui par la Seleka.98(*) Le 17 mars à Sibut, à une centaine de kilomètres de Bangui, les rebelles de la Seleka rompent les négociations avec le gouvernement centrafricain auquel ils lancent un ultimatum. Ils réclament la libération de leurs prisonniers, la validation des grades des officiers rebelles, l'intégration de 2 000 de leurs combattants dans l'armée nationale et le départ des militaires sud-africains. La Seleka affirme que si ces exigences ne sont pas accordées dans les trois jours, elle reprendra son offensive.99(*) 3.3. Troisième Guerre Civile Centrafricaine (2012-2014)La troisième guerre civile centrafricaine est un conflit intercommunautaires apparu au cours de l'année 2013 en République centrafricaine .Elle oppose notamment les milices de la Seleka, à majorité musulmane et fidèle au président Michel Djotodia, à des groupes d'auto-défense chrétiens et animistes, les anti-balaka, fidèles à l'ancien président François Bozizé et accusés d'être soutenus par des anciens militaires des Forces armées centrafricaines.Le conflit se caractérise par de nombreuses exactions contre les civils, musulmans ou chrétiens. Un grand nombre d'entre eux fuient les villages pour se réfugier dans la brousse. La situation débouche sur une crise humanitaire importante, aggravée par le chaos sécuritaire.100(*) À la suite de la victoire militaire de Michel Djotodia sur François Bozizé en mars 2013 à l'issue de la deuxième guerre civile de Centrafrique, la stabilité n'est pas revenue dans le pays. Les combats entre milices d'autodéfense appelées anti-balaka « anti machettes » et les troupes de la Seleka se multiplient à partir d'octobre 2013 et l'État ne semble plus en mesure de faire régner l'ordre. La force multinationale de l'Afrique centrale déployée par la Communauté économique des États de l'Afrique centrale pour aider à sécuriser la région est dépassée. Le 5 décembre 2013, par la résolution 2127, le conseil de sécurité des Nations unies autorise le « déploiement de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (MISCA) pour une période de 12 mois » officiellement pour mettre fin à la «faillite totale de l'ordre public, l'absence de l'état de droit et les tensions interconfessionnelles ». La MISCA est appuyée par des forces françaises autorisées à prendre « toutes les mesures nécessaires ».101(*) Entre mars et juin 2013, de très nombreuses exactions sont commises par les membres de la Seleka, milice musulmane. Human Rights Watch, présent sur place, chiffre à un millier le nombre de maisons ou habitations détruites, et dénombre des dizaines de victimes. Un total de 34 villages comme Bogoro, Bobafio, Kadi ou Gbadene ont été entièrement brûlés. Plusieurs dizaines de cas de viols ont été recensés. Le 27 mars, la Seleka tue 17 habitants du quartier Damala, de Bangui. Le 13 avril, une voiture de la Seleka fonce dans un cortège funéraire, déclenchant de la part de la foule des hostilités avant que les miliciens n'ouvrent le feu, tuant 18 civils. Les 13 et 14 avril, les membres de la Seleka investissent le quartier de Boy-Rabé, majoritairement chrétien, tuant 28 personnes dont des enfants. Le 15 avril, voulant réquisitionner de force un camion, des miliciens abattent l'épouse et l'enfant de 8 mois du chauffeur. Courant avril, des habitants découvrent les corps de nombreux membres des Forces armées centrafricaines, exécutés. Le 19 mai, 12 personnes tentant de fuir sont abattues sur la route de Bossangoa- Boguila. En juin 2013, Claude Guéant est reçu par Djotodia à Bangui. Début juillet 2013, une vingtaine d'employés d'une société de sécurité privée prennent en charge la protection rapprochée de Djotodia. Le 18 juillet Jean-Christophe Mitterrand rend visite au président centrafricain putschiste Djotodia. Début août Gomboc est nommé conseiller spécial chargé de la sécurité du président de la transition Djotodia. Le 7 septembre, 2 membres d'une ONG française sont tués, probablement par des membres de la Seleka. Devant les critiques, le président par intérim, Michel Djotodia, déclare dissoudre la coalition Seleka, mais la majorité des miliciens refusent de désarmer.102(*) L'insurrection anti-balaka Début septembre 2013, des villageois, excédés par les exactions de la Seleka, créent des milices d'auto-défense, les anti-balaka. Ils sont surtout concentrés dans la région de Bossangoa, ancien fief du président Bozizé. Le 6 septembre, ces milices attaquent des bases de la Seleka et des communautés musulmanes, tuant plusieurs dizaines de personnes. Ces premières attaques ont lieu notamment à Zéré. Des réfugiés commencent à arriver à Bossangoa le 8 septembre. Le 15, ils sont 15 000 à être réunis sur les terrains de l'archevêché. Le 9 septembre, des heurts à Bouca sont provoqués par une attaque d'anti-balaka. Une quarantaine de musulmans sont tués, 250 maisons brûlées. En représailles, la Seleka investit à son tour la ville, tuant une trentaine de chrétiens, et détruisant 300 maisons.103(*) Début octobre, à quelques jours de la visite de Laurent Fabius, les agents de sécurité français engagés par Michel Djotodia, le président de la transition, quittent la Centrafrique. Nommé en août conseillé spécial chargé de la sécurité du président de la transition, Gomboc reste pour sa part à Bangui. Le 26 octobre, des miliciens anti-balaka attaquent la ville de Bouar où sont présents des membres de la Seleka. Les combats font 5 morts chez ces derniers, et 6 miliciens anti- balaka. Deux membres de la Seleka visent une maison où se seraient retranchés des anti-balaka, tuant en réalité 18 civils et en blessant 12 autres. Le 10 novembre, les forces de la Seleka incendient le village de Camp Bangui, détruisant 235 habitations104(*). Perte de vies humaines selon un rapport publié le 1ernovembre 2014, l'ONU estime que les violences ont fait 3 000 morts entre le 5 décembre 2013 et le 14 août 2014. * 98Idem, P.18 * 99GAEL COGNE, art. Cit., P.19 * 100Idem, P.19 * 101Ibidem, P.19 * 102GAEL COGNE, art. Cit., P.20 * 103Idem, P.20 * 104GAEL COGNE, Op.cit., P.21 |
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