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Société rurale face aux enjeux et défis de la participation dans les projets de développement local. Cas des communautés paysannes de Bria dans la haute Kotto.


par Ali Guy ABOUKAR
Université de Bangui - Master 2 de sociologie 2017
  

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3.2.2-Le suivi-évaluation et la gestion des affaires locales

Il faut noter ici que 7% de nos enquêtés disent avoir participé au suivi-évaluation et à la gestion des affaires locales en matière de participation au développement endogène. La communauté met en place dans certains cas une commission composée essentiellement des jeunes et des sages pour le suivi des travaux d'intérêt collectif. Un agent participe auprès de la communauté rurale à l'élaboration et à la mise en oeuvre des projets communautaires. Il s'agit de l'agent de développement local (ADL) qui est sous la supervision du Chef de service préfectoral de Plan.

Le suivi, l'évaluation et la gestion des affaires locales sont tenus par les sages de la communauté, les chefs coutumiers et les élus locaux.

Ces problèmes sont également mentionnés par certains acteurs villageois interrogés qui les considèrent même comme le principal obstacle à la pérennité des actions de développement menées dans leur village : « La viabilité des projets est une question

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de bonne gestion. Les gens doivent faire une bonne gestion et ne doivent pas se dire que c'est le projet qui a fait car alors ils ne vont pas bien gérer.»15

Selon notre analyse, l'insuffisance du dispositif d'appui et de formation ainsi que l'absence d'un programme d'alphabétisation fonctionnelle explique la faiblesse de ces comités.

Pour le directeur exécutif de l'ONG VITALITE PLUS, les comités de gestion mis en place ne sont toujours pas en mesure d'assurer la pérennité des actions menées :

« La plupart des comités ont encore besoin de formation et de sensibilisation. On doit obligatoirement mettre l'accent là-dessus puisque la finalité des projets ce n'est pas l'école ou la case de santé en tant que telle mais plutôt de créer une dynamique qui favorisera une prise en charge à long terme du développement par les populations locales. Le problème actuel est vraiment le manque d'appropriation. On construit des écoles et des puits et ensuite ça se perd. Les gens parlent de l'école du projet, du puits du projet alors que celui-ci ne devrait être qu'un simple outil. Présentement, il n'y a pas suffisamment d'efforts qui sont faits pour leur expliquer que ça leur appartient. Très souvent, on voit des villages qui attendent que l'État ou le projet vienne pour faire les réparations sur une infrastructure. Il faut vraiment oeuvrer à changer les mentalités. En ce sens, les activités de formation et de renforcement des capacités jouent un rôle majeur. »

3.2.3-La prise en compte des attentes de la population

A la lumière de cette étude, 13% de nos enquêtés nous ont confirmé que leurs aspirations ont été prise en compte. L'analyse de la manière dont s'effectue le choix des actions de développement qui sont réalisées dans les villages, dans le cadre du Développement Local (DL), confirme l'écart entre la perception des villageois et celle des agents de projet. L'analyse de ce processus de prise de décision nous permet

15 Prise de position d'un membre du comité de gestion du village Kongbo, entretien le 15 juin 2016.

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en fait de constater la persistance d'un modèle descendant en ce qui concerne le choix des priorités et actions de développement.

Cette logique de développement de haut en bas se dégage clairement du discours des acteurs villageois interrogés. Lors de nos entretiens avec des membres de Comités Villageois de Développement, nous avons demandé comment s'est effectué le choix des projets réalisés dans le village. Pour la majorité d'entre eux, le choix entre telle ou telle infrastructure s'est fait en fonction de l'information que les délégués villageois ont obtenue sur le DL :

« C'est au cours d'une assemblée que nous avons appris qu'avec le DL nous pouvions faire telle ou telle chose16. »

« Lors de l'assemblée de zone, on voit ce que le projet peut offrir, on revient avec l'information au village et ensuite si ça nous intéresse, on fait une demande17. »

« C'est le comité villageois de développement qui capte les informations et convoque une assemblée. Il informe alors tout le monde que selon les informations qu'ils ont reçues lors de l'assemblée communale, qu'il y aurait telle ou telle possibilité. Et c'est sur cette base qu'ils vont décider de ce qu'ils vont faire18. »

Contrairement aux perceptions villageoises, les agents communautaires mentionnent à l'unanimité que c'est lors d'une assemblée villageoise que se discutent et se définissent les «vrais besoins» et les priorités de développement d'un village. Toutefois, nos entretiens avec les villageois révèlent que cette assemblée est alimentée selon une logique de haut en bas où des informations recueillies par des délégués déterminent le choix des projets qui seront subséquemment présentés au DL pour fins d'approbation. Plutôt que d'être un espace d'échange et de négociation des priorités, cette assemblée villageoise représente donc davantage un espace d'information où le choix des villageois se fait à partir de ce qu'offre le projet.

16 SABELENGA Eric membre du groupement, village Yambelé entretien le 26 juillet 2016 à 10h 15Mn)

17 AZOUKANDJE Constantin Délégué Technique, village de Yangoungba 2, entretien le 30 juillet 2016 à14h 50Mn

18 POUNOUTROUMON Gustave membre d'une Organisation paysanne village Kocha, entretien le 22 juillet 2016 à 15h 15Mn

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Au même titre que le choix des projets villageois soumis au Comité de Gestion de Commune, le choix des priorités et orientations de développement de chaque zone est perçu par les acteurs villageois comme étant descendant. L'assemblée de zone, telle que mentionnée plus haut, a le rôle formel d'effectuer le choix des priorités de développement de la zone, par voie de consensus, en fonction des besoins exprimés par les villages. Toutefois, aucun des acteurs villageois interrogés ne fait mention d'un espace d'échange et de débat en ce qui concerne la définition des priorités de la zone. En effet, plusieurs d'entre eux croient que le choix des activités de la zone se fait non pas en fonction de leurs besoins mais plutôt à partir de la programmation du comité cantonal de développement.

La plus faible proportion représente 13,60% de nos enquêtés qui mettent l'accent sur la prise en compte des attentes de la population. On revanche, la prise en compte des savoirs locaux demeure problématique.

Notre recherche sur la participation au développement local dans la commune de Bria, nous a permis de constater un écart entre le rôle formel attribué aux différentes structures de participation mises en place et leur rôle tel que perçu par les différents acteurs villageois interrogés. Ainsi, ce constat rend compte de la présence d'un processus au sein duquel les villageois se sont appropriés à leur manière les structures mises en place. Bien que d'un projet à l'autre, il semble y avoir d'importantes similitudes en ce qui concerne les rôles et responsabilités attribués aux structures de participation.

La participation des populations est essentielle pour les projets afin de s'assurer de leur volonté et de leur engagement à faire de ces actions un succès. Cette participation prend la forme d'une contribution matérielle, financière et physique et permettrait, selon l'idéologie participationniste, une appropriation locale des actions entreprises.

Selon l'un des responsables de l'ONG OXFAM, « dès qu'il y a réalisation d'une infrastructure, il y a toujours une contrepartie physique et .financière que doit fournir la population pour la rendre consciente que la réalisation est en fait sa

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propriété. Elle doit se rendre compte que le projet lui appartient. C'est la seule manière pour qu'elle porte attention à son bien et qu'elle en assure l'entretien19. »

Au sein du modèle de participation à Bria, la participation physique prend quant à elle la forme d'une contribution des villageois aux travaux en échange d'un perdiem visant à compenser l'arrêt des activités quotidiennes génératrices de revenus.

II est intéressant ici de remarquer que plusieurs des acteurs villageois interrogés font référence à la présence de rédacteurs alphabétisés venus des villages voisins afin d'élaborer leur demande.

Notre recherche sur le terrain nous a permis de constater que les villageois avaient acquis une perception très différente du rôle associé à cette structure. En fait, ils attribuent aux membres de ce groupement un rôle essentiellement de circulation d'information :

« Les délégués collectent les informations au niveau du projet. Ensuite, ils les divulguent aux membres du groupement pour que chacun dans leurs hameaux en fasse part à leur communauté20. »

« Maintenant, avec le Comité villageois de développement (CVD), s'il y a de l'information par rapport au projet, les délégués la ramènent et convoquent une assemblée. C'est le seul changement que cela a apporté21. »

Au sujet de la fréquence des rencontres, plusieurs membres des organisations paysannes nous ont affirmé qu'il n'y en a jamais eu. C'est juste pour faire circuler l'information sur le Projet. Dans ce contexte, on suppose que la maîtrise d'ouvrage n'est pas l'oeuvre collective de ce comité. En effet, aucun des acteurs interrogés n'attribue un tel rôle au CVD. La prise de décision en ce qui concerne l'approbation des microprojets qui seront réalisés dans les villages s'effectue au niveau de la zone. Tout d'abord, une assemblée de zone composée des trois délégués de chaque village a pour rôle d'élire les 10 membres (6 hommes et 4 femmes) appelés à constituer le

19 Point de vue d'un responsable de suivi-évaluation à l'ONG OXFAM à Bria

20 Opinion d'un membre de groupement au village Ngoubi, entretien le 14 Août 2016.

21 Opinion d'un membre de groupement au village Ngoubi, entretien le 14 Août 2016.

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Comité d'Octroi Zonal. Tout dépend du nombre de villages par zone, cette assemblée peut regrouper de 33 à 75 personnes. Cette assemblée a également pour responsabilité de définir les priorités et orientations de développement de la zone et d'élire les délégués qui seront présents au niveau communal.

Ainsi, on observe de manière générale, à travers l'analyse des projets, un écart entre le rôle formel attribué aux structures de participation par les acteurs extérieurs et celui perçu par les villageois. On remarque par ailleurs que les structures de développement villageois, plutôt que d'être un lieu de prise de décision tel que prévu par le projet, représentent dans la pratique un espace d'information.

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