B- Les clivages liés à la mondialisation,
les mouvements et les flux migratoires
Dans son ouvrage Dialogue des cultures, le premier
président du Sénégal indépendant Léopold
SEDAR SENGHOR écrit : «Toutes les cultures de tous les
continents, races et nations sont, aujourd'hui, des cultures de symbiose
où les quatre facteurs fondamentaux que sont la sensibilité et la
volonté, l'intuition et la discussion jouent, de plus en plus, des
rôles équilibrés». La mondialisation ouvre une
nouvelle séquence marquée par des brassages et des ponts entre
les différentes cultures décloisonnées, et par
conséquent de plus en plus en position d'échange, de dialogue et
d'appropriation des éléments des unes et des autres. Cependant,
il faut redouter des tendances hégémoniques de cette formidable
ouverture des marchés, ponctuée par la libre circulation des
biens et des services et y faire face. Cette tendance est mise à rude
épreuve par la nouvelle quête hégémonique qui, parce
qu'ayant un versant culturel manifeste, risque d'être à l'origine
des conflits les plus sanglants, les plus longs et donc les plus coûteux.
Les Etats de la sous-région doivent se prémunir de tels clivages
dans la gestion de la diversité culturelle.
Dans la plupart des Etats de l'Afrique Centrale,
l'immensité des territoires n'offre pas plus d'exutoire intérieur
pour une fraction de la paysannerie condamnée dans un proche avenir
à quitter la terre. Les dynamiques qui ont permis un délestage
des espaces surpeuplés comme dans le cas de la transmigration ne
pourraient jouer ici que dans le cadre d'espaces transfrontaliers. Dans ce
cadre, les adeptes du présidentialisme triomphant qui s'affrontent au
niveau macro politique ont privilégié les discours
xénophobes et anxiogènes sur les migrations et les
étrangers, empêchant ainsi la création d'une
identité sous régionale plurielle183.
Les migrations sous contrainte créent des conditions de
vie très artificielles, plus ou moins éphémères,
généralement dans des camps gérés par le HCR, signe
tangible de leur non-intégration dans le pays d'accueil. Une
réflexion d'ensemble sur l'Afrique centrale ne peut éluder un
questionnement sur l'avenir des populations réfugiées, et sur les
possibilités de résorption des camps, soit par des politiques de
retour, soit par des politiques d'intégration. Tous les pays de la
sous-région sont concernés car ils ont tous été
affectés, à des degrés divers, par ces chassés
croisés transfrontaliers de populations en fuite. Les migrations
lointaines, en direction des pays riches, concernent plutôt la frange
aisée de la population, issue de la classe politique, du monde des
affaires, des milieux intellectuels. Les diasporas sont constituées
de
183 Chrysantus AYANGAFAC, 2008, « The Political Economy
of Regionalisation in Central Africa », cité par le Premier rapport
d'évaluation stratégique sous régionale du PNUD, Mars
2017.
112
Les politiques publiques de gestion de la diversité
culturelle dans les processus de construction de la paix en Afrique centrale
populations disposant d'un capital culturel sans commune
mesure avec les migrants restés dans la région184. Les
migrations régionales, conséquences de la pauvreté et des
conflits, impliquent surtout les petites gens, paysans, soldats et autres
mercenaires qui dans leur diffèrent déplacements peuvent
contribuer à rendre instables les sociétés qui les
accueillent.
|