2 L'innovation disruptive : la blockchain au travers de
la revue de littérature
La lecture des ouvrages dédiés à la
technologie de la blockchain fait apparaître une grande concordance dans
la définition des concepts, dans les domaines d'utilisation possibles et
dans les points de rupture.
Nous avons organisé notre revue de littérature
afin de présenter les innovations qu'entraîneront
l'intégration de la blockchain dans les relations contractuelles inter
et intra des entreprises.
2.1 Les origines techniques
Certaines innovations qui étaient initialement
destinées à une utilisation particulière dans un contexte
spécifique peuvent se développer par la suite pour apporter des
solutions que leurs concepteurs n'auraient pu imaginer.
Ce fut le cas d'Internet développé dans les
années 60 par la recherche militaire américaine sous le nom
d'ARPANET. Il s'agissait de construire un réseau de commandement pouvant
résister à une attaque nucléaire soviétique. Suite
à la détente entre les deux superpuissances, ce concept de
réseaux interconnectés et décentralisés passa dans
le civil via les universités américaines et aboutit à
l'invention du WEB en 198920, puis au développement
d'innombrables applications et de toute une industrie (Google, Amazon,
Facebook, Apple) qui ont bouleversé nos modes de vie et dont nous
pourrions difficilement nous passer au quotidien.
C'est à une autre innovation que nous allons nous
intéresser et celle-ci devrait également suivre un chemin qui
n'est pas forcément celui qu'avait envisagé son ou ses
concepteurs. Comme exposé dans le chapitre précédent, les
entreprises sont confrontées à divers coûts et contingences
dans leur fonctionnement quotidien et leur besoin d'investissement :
coûts d'agence et de transaction, coûts de contrôle et frais
de contentieux, rôle des intermédiaires, des tiers de confiance et
des monopoles qui vont affecter l'établissement de transactions
optimales. Nous allons voir quel rôle la Blockchain pourrait jouer dans
ce contexte.
20 Berners-Lee, T. (1989), La naissance du web, consulté
le 12 janvier 2018.
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Le développement de la Blockchain et de son application
la plus médiatisée, le Bitcoin, a nécessité au
préalable un certain nombre d'innovations et d'expérimentations
techniques et financières, parfois accompagnées de tentatives de
remise en question des modèles économiques régissant les
entreprises et les monnaies. En voici quelques-unes :
2.1.1 La signature électronique
Cette technique consiste à valider le contenu d'un
document non modifiable tout en étant capable d'en authentifier le
signataire. Elle est apparue vers 2000 et avait pour but de lutter contre la
fraude. Elle aurait donc dû connaître un développement
rapide par l'intérêt qu'elle pouvait représenter pour les
entreprises et les administrations. Pourtant, elle n'a été
adoptée que très progressivement. Une des raisons tient à
des différences de transposition de la directive 1999/93/CE du Parlement
européen qui est à l'origine de la signature électronique,
ainsi qu'à des choix techniques différents entre Etats qui ont
nui au développement des échanges transfrontaliers. Un nouveau
règlement n° 910/2014/UE dit « eIDAS » entré en
vigueur en septembre 2014 a permis de corriger ces
défauts21.
Cette nouveauté a favorisé le
développement d'un type d'intermédiaire que sont les prestataires
de services de confiance souvent nommés tiers de confiance. Ceux-ci sont
qualifiés par l'ANSSI (L'Agence Nationale de la Sécurité
des Systèmes d'Information). Ces services de confiance incluent des
notions d'identification électronique de personnes physiques ou morales,
d'authentification de site Internet, d'horodatage électronique, de
validation et de conservation de signature électronique, de preuve
d'intégrité de données. Ces différents services
vont se retrouver dans la Blockchain.
Il faut noter que la signature électronique n'a pas
empêché le recours au contentieux, par exemple du fait de
débiteurs de mauvaise foi qui contestent la validité d'une
signature électronique. Ce recours a un coût pour le
créancier et ce problème reste donc à traiter pour
être éliminé ou tout au moins être
évité le plus possible.
D'une manière générale, il ne faut pas
sous-estimer le risque de lenteur de diffusion d'une nouveauté
malgré l'intérêt qu'elle peut présenter. Cela peut
venir des coûts de mise en oeuvre et de fonctionnement, des changements
de fonctionnement qu'elle implique ou de difficultés techniques ou de
réglementation.
21 ANSSI (2018), Le règlement eIDAS, consulté le 12
janvier 2018.
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