IV.1.3.1- Les avantages d'une coordination
budgétaire
Selon Buiter et Marston (1985) la stabilité d'une union
monétaire est assurée par la crédibilité du policy
mix. L'intérêt de la coordination internationale des politiques
budgétaires dépend de façon cruciale du type de
règles adoptées et de la capacité des autorités
monétaires et budgétaires à s'engager de manière
crédible. Ainsi, la suggestion d'une coordination des politiques
budgétaires nationales dans une union monétaire est souvent
soutenue dans la littérature économique par l'existence
d'externalités négatives. Il s'agit d'éviter les nuisances
qu'engendreraient les effets de débordement négatifs d'une
politique budgétaire d'un ou de plusieurs Etats sur les autres de
l'union.
Les travaux de Debrun et Wyplosz (1999) s'intéressent
notamment à l'interaction entre la politique monétaire et les
politiques budgétaires nationales en union monétaire, en raison
des problèmes de crédibilité et de coordination que
soulève
95
le policy mix. Selon Kassé (2003) la mise en place des
organisations a pour but d'éliminer les dissemblances, par une mise en
cohérence des politiques économiques entre les Etats membres. Les
organisations favorisent d'une part la promotion d'intégration
économique et la consolidation des acquis importants de l'union et
d'autre part, elles garantissent le respect d'un certain nombre de
critères de convergence économique d'ordre monétaire,
budgétaire et financier.
L'intérêt de la coordination est
indéniablement une meilleure transmission des mesures de politique
communautaire à l'ensemble des économies de l'union. Elle
constitue de ce point de vue la solution pour contourner les effets
négatifs des politiques de certains pays sur leurs voisins (Rosemberg,
1995). La mise en oeuvre d'une règle budgétaire souple
apparaît d'autant plus importante que le mécanisme de
stabilisation ne doit pas être discrétionnaire, car une
stabilisation efficace nécessite généralement une action
rapide des pouvoirs publics (Schalck, 2002). Cependant, le constat
général est qu'un supplément de coordination serait
souhaitable, parce que la politique monétaire commune de l'union ne peut
plus répondre aux chocs asymétriques (Villieu, 2003).
IV.1.3.2- Les Limites d'une coordination
budgétaire
La coordination des politiques budgétaires
n'apparaît pas comme une évidence dans la théorie
économique. Certains économistes comme Guerrien et Vergara (1997)
; Baldacci E. et al, (2003) ; Barbier-Gauchard et Villieu (2003) pensent que la
coordination est inutile, voire nuisible. En effet, le passage à la
monnaie unique a entraîné, pour chaque État membre de
l'union monétaire, la perte d'un instrument de politique
économique indépendant. Lorsqu'un État membre est
touché par un choc macroéconomique spécifique, seule la
politique budgétaire peut être utilisée pour tenter
d'amortir le choc. Il est donc important que chaque État membre conserve
la pleine liberté d'utiliser la politique budgétaire pour ses
besoins propres. Outre, la coordination des politiques budgétaires est
très coûteuse en énergie pour un résultat
nécessairement fragile. Par ailleurs il est
96
nécessaire de mettre les gouvernements devant leurs
responsabilités25 (Bénassy-Quéré,
2007).
Pour d'autres thèses hostiles à une coordination
budgétaire, des auteurs comme Alesina et al., (2001) montrent que la
nécessité d'une coordination ne se fait plus sentir quand les
responsables des politiques monétaire et budgétaire font
correctement leur travail, tiennent leurs ménages respectifs en ordre.
Si, par exemple, un déficit budgétaire est causé par une
récession, alors l'inflation prévue va diminuer et les
autorités monétaires peuvent mener une politique plus expansive.
La prévision d'inflation sera en revanche revue à la hausse si le
déficit budgétaire est causé par un excès
structurel de dépenses visant à stimuler l'économie
au-delà de son équilibre de plein emploi. La politique
monétaire sera automatiquement resserrée sans que dans ce cas
également il n'y ait nécessité de coordination entre les
autorités monétaires et budgétaires. De plus, s'il y a
coordination, le risque est que les responsables budgétaires fassent
pression pour retarder le resserrement de la politique
monétaire26. Bennett et Loayza (2000) à l'aide de la
théorie des jeux démontrent que ce soit en équilibre de
Nash ou en équilibre de Stackelberg, une faible coordination des
autorités budgétaires et monétaires a des effets sur le
déficit primaire ainsi que sur le taux d'intérêt
réel et donc sur l'inflation et la production.
La surveillance multilatérale n'est pas sans risque.
Ondo Ossa (2006) dans ses travaux portant sur la zone CEMAC, montre qu'elle est
un obstacle à l'usage des budgets nationaux comme outil stabilisateur
pendant les récessions. Les politiques budgétaires deviennent
pro-cycliques en cas de ralentissement de l'activité économique,
parce que les gouvernements sont contraints de réduire les
dépenses et/ou d'accroître les impôts pour satisfaire ces
restrictions. De plus, la
25 Laisser jouer une concurrence par comparaison entre les
gouvernements des différents Etats afin que les électeurs
sanctionnent les gouvernements inefficaces, ou bien ceux qui ne poursuivent pas
la maximisation du bien-être social.
26 À notre sens, en période de
stagflation notamment, une coordination portant sur une discussion du `mix' de
politique économique et aboutissant à un compromis sur le
dosage des instruments peut quand même être utile.
97
surveillance multilatérale ne permet d'améliorer
la crédibilité de la politique économique que s'il est
possible d'infliger des sanctions à l'Etat indiscipliné.
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