INTRODUCTION
1. Contexte et justification
La prévision économique est une discipline qui
se donne pour objet d'anticiper le contexte dans lequel des décisions de
politique publique ou d'entreprise sont susceptibles d'être mises en
oeuvre. Elle porte le plus souvent sur des variables telles que la croissance,
l'inflation, l'évolution des finances publiques. Le terme (quelques mois
ou quelques années), le niveau d'analyse (l'ensemble de
l'économie ou un secteur particulier) et la précision vers
laquelle elle doit tendre dépendent des besoins des décideurs qui
peuvent être des dirigeants d'entreprises publiques ou privées, ou
des responsables politiques. Si leurs besoins sont quelque peu
différents, la méthodologie utilisée est
généralement comparable et s'efforce d'être identique
à celle des autres sciences expérimentales.
Il est cependant très difficile de construire des
expériences dans la démarche prévisionnelle en
matière économique ; on se contente souvent de celles que
l'histoire a fournies et on en tire des hypothèses. Si celles-ci sont
justes, le cours des événements les vérifiera. La
prévision économique n'est pas une activité nouvelle,
encore moins en Afrique. Dès leur accession à
l'indépendance dans les années 1960, les pays africains y
recourent pour l'élaboration de plans de développement. À
partir de 1970, les besoins de prévision à court terme pour ces
pays s'intensifient avec les importantes fluctuations des prix des
matières premières et l'inflation dues à la crise
mondiale. La demande croissante de modèles de prévision
macro-économiques s'associe au désir des techniciens de
travailler sur des modèles sophistiqués en phase avec le
progrès et mettant en oeuvre les théories macroéconomiques
les plus récentes ou les outils économétriques de pointe.
L'importance des prévisions dans le processus de prise de
décision dans nos pays de nos jours s'est ainsi opérée.
Elles permettent aux Etats, organismes nationaux et internationaux de
promouvoir une culture de la prévention et de la mise en place de
stratégies de surveillance de l'activité économique, de
projection à des fins d'alerte précoce et de diffusion en temps
voulu d'informations utiles à la prise de décision. Outre ces
intérêts, le cas particulier de la prévision des recettes
fiscales s'inscrit généralement dans l'objectif de permettre aux
finances publiques d'améliorer leur gestion, d'assurer leur
soutenabilité et d'améliorer leur rendement. Dans ce cadre, les
projections s'accompagnent souvent des reformes visant à remédier
à une alerte ou à atteindre un but. Au Cameroun, on parlera de la
réforme de 1994 où
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Patrick SA'A, Elève Ingénieur Statisticien
Economiste, CEMAC-ISSEA
Dynamique du PIB et prévision du rendement des
impôts et taxes
dans la foulée de la dévaluation
monétaire de 50%, le gouvernement camerounais entreprit une
réforme majeure de sa politique fiscale et commerciale ; la mise en
oeuvre de la TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée) en 1999 ; etc.
Les recettes fiscales sont indispensables dans
l'exécution du budget de l'État, le Revenu National étant
l'un des concepts les plus importants de toute économie. Elles
permettent de construire et de contrôler la dynamique des indicateurs de
résultats sur les dépenses relatives au financement des
activités de l'État. Il existe plusieurs sources de financement
de l'État, parmi lesquelles les recettes fiscales. Ces dernières
servent à financer non seulement le fonctionnement de l'État,
mais aussi le service public collectif. Depuis 2003 au Cameroun, les recettes
fiscales constituent en moyenne plus 70% des recettes propres de l'État.
En 2016, l'administration camerounaise des Impôts (DGI) a mobilisé
des recettes de l'ordre de 1724,6 milliards FCFA (Franc de la
Coopération Financière en Afrique Centrale) pour le
Trésor, soit 60,0% des recettes budgétaires propres de l'Etat
(hors dons et emprunts) contre 56% un an auparavant, selon le dernier rapport
publié par ce service. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
restant le principal poste des recettes fiscales avec un montant
mobilisé de FCFA 557,0 milliards, soit 34,5% des recettes fiscales non
pétrolières. Cette rentrée financière est suivie
dans les autres postes par ordre d'importance de l'impôt sur les
sociétés non pétrolières (21,8%), de l'impôt
sur le revenu des personnes physiques (17,8%), des droits d'accises (12,3%) et
de la taxe spéciale sur les produits pétroliers (6,5%).
N'étant seulement pas des ressources pour l'État mais aussi de
véritables indicateurs de performance financière et
budgétaire, la qualité des prévisions des impôts et
taxes de la DGI s'avère donc primordiale et a une influence
déterminante sur la sincérité des projets de lois de
finances.
La loi de finances fait l'objet d'une préparation,
d'une exécution et d'un contrôle au titre de chaque exercice
budgétaire. Et l'exécution du budget de l'État
nécessite un acte d'autorisation et un acte de prévision
préalable. En effet, toute exécution budgétaire doit
être prévue et autorisée en vertu de la loi de finances de
l'année budgétaire. Le budget de l'État se
décompose en recettes publiques et en dépenses publiques tant en
respectant le principe de l'équilibre général de la loi de
finances. Les recettes fiscales en tant qu'élément du budget de
l'État s'exécutent à posteriori d'un acte de
prévision et un acte d'autorisation.
Cependant durant les dernières années, les
impôts et taxes de la DGI prévues à ce stade ne sont
effectués pas par la DGI elle-même et ne coïncident pas
toujours avec la réalisation de l'année fiscale. Par exemple les
recettes issues de l'impôt sur les sociétés
pétrolières ont connu un taux
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Patrick SA'A, Elève Ingénieur Statisticien
Economiste, CEMAC-ISSEA
Dynamique du PI3 et prévision du rendement des
impôts et taxes
de réalisation de 72,7% en 2016. Ainsi des
écarts généralement appelés « GAP » sont
constatés entre la prévision initiale et la réalisation
des recettes. Cela entraîne la mise à jour de la prévision
selon les conjonctures économiques de l'année. Cette
instabilité de la prévision des recettes fiscales pose des
problèmes du fait du changement très fréquent au niveau
des chiffres prévisibles, alors que ces chiffres sont les
références non seulement pour l'administration publique mais
aussi pour les bailleurs de fond. D'où l'importance de cette
étude portant sur la conception d'un premier modèle robuste de
prévision des recettes des impôts et taxes au niveau de la DGI qui
plus est : facilement analysable, exploitable.
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