Pour Ortis, les Daigou sont actuellement des marketeurs, des
distributeurs (40% des ventes sur la Chine) et surtout leurs premiers porte
étendards. Nous avons pu identifier leur présence sur tous les
réseaux sociaux les plus importants en Chine, alors que la marque n'y
est présente ni de façon officielle, ni via la présence
d'une quelconque entité spécialisée telle que des
influenceurs ou autre entité marketing. Cette présence des
Daigou, fait de leur abandon progressif des produits un évènement
majeur pour l'entreprise. Nous pourrions comparer la situation d'Ortis à
celle de Bellamy en Australie, quand elle a choisi de déléguer
ses ventes à des distributeurs en Chine, puis à la suite de la
baisse importante de son chiffre d'affaires a décidé de laisser
à nouveau un espace aux Daigou dans leur distribution.
Ortis n'a pas véritablement planifié son
introduction sur le marché chinois, car celle-ci y a été
portée inconsciemment par ces intermédiaires. Dans le cas
où Ortis ne prend pas une décision stratégique rapidement,
elle se trouvera dans une impasse résultant par la perte totale de ces
intermédiaires. À ce jour, si les Daigou continuent de vendre le
Fruits & Fibres malgré leur baisse de compétitivité
c'est en raison de la demande qu'ils ont eux-mêmes créée
auprès des consommateurs chinois par le passé ainsi que de
l'existence de la promotion « duo pack - 50%» que nous avons
identifiée durant notre analyse sur le Haitao. Grâce à
l'analyse précédente nous pouvons affirmer que l'utilité
des Daigou pour Ortis a été d'une extrême importance,
puisque ces derniers lui ont créé sa place sur le marché
et ont fait connaître ses produits auprès des consommateurs.
Ortis a donc deux solutions afin de reforger les bases de son
expansion en Chine tout en intégrant les Daigou dans sa
stratégie. Les contrats de distribution étant des contrats
à durée limitées sont renégociables, renouvelables
où résiliables à échéance.
Reprendre le contrôle de sa distribution :
La première solution consisterait à reprendre le
contrôle de sa distribution via un modèle CBEC B to C
contrôlé en direct et ainsi gérer ses
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différentes politiques en matière de prix comme
elle l'entend. Mais cela impliquerait un budget conséquent pour
l'entreprise, car celle-ci devrait se réapproprier le marketing sur les
différents territoires (places de marché) sur lesquels les
partenaires vendent actuellement ainsi que le circuit logistique et les actions
marketing à mener sur les diverses plateformes individuellement, ce qui
représente un coût mais aussi une réorganisation afin de
disposer des compétences requises en interne ou en externe capables de
gérer un tel projet.
De plus la chine n'est pour le moment pas son marché
principal et n'y génère qu'une petite partie de son CA global.
Réadapter sa politique commerciale :
La deuxième solution consisterait à réadapter
légèrement sa politique commerciale sur le marché chinois
tout en gardant son réseau de distribution actuel. L'objectif serait
d'établir une synergie stratégique entre tous les acteurs issus
de son tissu CBEC, c'est-à-dire les Daigou, les distributeurs et les
points de vente à forte clientèle sinophone en Europe afin que
tout le monde travaille pour un seul et même projet « le
développement d'Ortis sur le marché chinois » et non
seulement dans le cadre de motivations individuelles.
Pour ce faire, l'entreprise devra redéfinir les termes
du contrat de distribution avec ses partenaires et redéfinir la
politique de prix exercée par les partenaires afin de laisser une place
aux revendeurs C to C (Daigou). En échange, Ortis pourrait par exemple
s'engager dans la création d'une campagne marketing digitale
indépendante sur les réseaux sociaux chinois depuis l'Europe
venant soutenir les actions marketing des partenaires sur leurs
différents territoires. Cela renforcera les ventes de manière
globale, tant pour les partenaires et indirectement pour les Daigou. Le but
à ce stade-là est d'augmenter la notoriété de
l'entreprise auprès d'un plus grand nombre de consommateurs.
Selon moi, La deuxième proposition la plus
intéressante. En effet, pour Ortis l'utilisation des Daigou devrait
être valorisée dans un but commercial et d'étude afin que
l'entreprise elle-même se familiarise avec ce marché et puisse
prendre ses futures décisions en toute connaissance de cause. De plus,
les Daigou et la communauté chinoise en Europe, sont des ressources
à portée de main, qu'elle peut beaucoup plus aisément
aborder que les consommateurs ou d'autres possibles partenaires se trouvant en
Chine. L'entreprise ayant déjà un réseau de distributeur
opérationnel en Chine, les Daigou ne devraient pas être
ciblés comme de « Grands distributeurs » car cette profession
n'est pas assurée dans le temps, celle-ci peut encore évoluer ou
disparaitre. Il faut donc les cibler comme une source de
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connaissance, un appui marketing et de ventes venant appuyer un
objectif long terme qui est le renforcement de son réseau de
distribution officiel et l'augmentation de sa notoriété.
Le développement et le soutien des réseaux de
Daigou peuvent participer au renforcement des ventes du réseau officiel
de distribution de l'entreprise ainsi qu'à l'augmentation de sa
notoriété. En effet, les Daigou disposent d'un fichier client
conséquent ainsi que d'une position de prescripteur auprès des
consommateurs chinois à l'affût de produits étrangers. Ces
derniers ayant déjà lancé le produit Fruits & Fibres
sur le marché, ils pourraient très bien en lancer un autre ou
valoriser encore plus le produit précédemment cité. Par
exemple, Ortis pourrait dans un premier temps, initier diverses actions
d'études auprès des Daigou via l'utilisation d'applications comme
E-centime en France qui combine une place de marché D to C et une
communauté de plus de 200k d'utilisateurs actifs par jour
échangeant sur l'application composée en grande partie de Daigou,
de consommateurs chinois locaux et de touristes suivant des promotions en cours
en Europe sur des dizaines de points de vente localisés principalement
en France.
Ortis pourrait donc initier questionnaires et sondages autour
de ses produits afin d'identifier les produits à potentiel fort
auprès des Daigou.
Dans un second temps, Ortis pourrait pousser l'introduction
des produits précédemment identifiés sur le marché
chinois via la sollicitation des Daigou en les positionnant sur les points de
ventes des grandes métropoles européennes à forte
fréquentation chinoise ainsi que sur des points de vente en ligne D to C
tel que celui appartenant à Ecentime. C'est-à-dire les points de
vente fréquentés par les touristes, la communauté chinoise
locale (consommateurs, Daigou, touristes).
Ces points de vente on/off line font office de
première vitrine, si les produits n'y sont pas positionnés, une
marque étrangère a peu de chance d'atteindre le succès
attendu, même en disposant d'une boutique phare sur Tmall global... De
plus, cela permet de créer une communication en cascade où les
points de vente communiquent sur les réseaux sociaux pour leur propre
compte auprès des Daigou et de la communauté chinoise dans son
ensemble. Ceux-ci communiquent à leur tour sur les réseaux
sociaux afin de vendre des produits pour les Daigou et partager leur
expérience consommateurs pour la communauté chinoise (Exemple de
communication de point de vente sur WeChat en annexe 6). Nous
pourrions citer les parapharmacies Parabaya, YY, Boticinal et leurs points de
vente on et off line du groupe Boticinal, Powersanté, Le groupe Monge,
la parapharmacie qui a récemment ouverte au sein
des Galeries Lafayette à Paris et bien d'autres...
Cela permettra à Ortis de concentrer les achats des Daigou, d'orchestrer
des opérations promotionnelles sur les points de vente et
d'évaluer l'impact des promotions et le profil des acheteurs (Daigou
etc.).
Figure 9 : Communication en cascade
des points de vente en France vers le consommateur en Chine
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Figure 10 : Exemple d'une réduction
Ecentime créée pour la pharmacie Monge via un QR code pour les
Daigou ou la communauté chinoise en France.
Ce type de QR code, fourni aux utilisateurs d'Ecentime est
scanné en caisse sur les points de vente disposant de la technologie
adéquate. Ils permettent effectivement à une marque X de jauger
l'impact de sa communication promotionnelle en magasin dans le cadre d'une
campagne X auprès des Daigou.
Dans un troisième temps, une fois les produits en
rayon et les promotions décidées, il est nécessaire
d'établir une campagne de marketing digital. Il faudra donc faire appel
à des influenceurs (Key opinion leaders et Key opinion costumers souvent
trouvables via l'aide
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d'agences marketing spécialisées en Europe). La
campagne devra durer sur X temps ciblant dans un premier temps, les
consommateurs chinois locaux et les Daigou pour enfin atteindre le consommateur
en Chine.
L'agence en question devra donc aussi bien disposer d'espaces
de communications sur les réseaux qui lui sont propres (WeChat, Weibo,
Red book, application lui appartenant etc.) afin de rédiger des articles
de Branding mais aussi disposer d'influenceurs leur permettant de
témoigner sur la bonne utilité des produits. Les influenceurs
faisant la promotion de produits européens sont souvent établis
en Europe et non en Chine.
Figure 11 : Exemple d'un
influenceur faisant la promotion de marques de rouges à lèvres
: