Chapitre 1 . Revue de la littérature
1.1. Croissance urbaine et ses conséquences
L'urbanisation est un phénomène universel et a
connu une accélération particulière en Afrique
subsaharienne. Cette croissance forte s'est faite dans un contexte
économique particulier marqué par des politiques de rigueur
(Philippe, 1997). Il existe maintenant 28 mégapoles à travers le
monde qui accueillent plus de 10 millions d'habitants (UN, 2014). Tokyo est la
plus grande de ces mégapoles avec une population qui
s'élève à environ 40 millions de personnes. De plus, les
continents qui s'urbanisent ne sont plus les mêmes qu'autrefois. C'est
présentement certaines régions de l'Afrique et de l'Asie qui
subissent les plus fortes croissances urbaines au monde (SCBD, 2012; UN, 2014).
Dans certaines villes d'Afrique centrale, la situation devient de plus en plus
alarmante.
La ville de Bukavu est particulièrement sujette aux
mouvements gravitaires et les versants affectés sont parmi les plus
peuplés de la ville (Birembano, 2012).
Il est question dans ce point de dresser un portrait plus
détaillé des grandes tendances d'urbanisation mondiale en
générale et en particulier celles de la zone d'étude.
1.1.1. Les tendances d'urbanisation dans le monde
C'est en 2007 que la population urbaine a
dépassé la population rurale et que l'homme est devenu pour la
première fois de son histoire une espèce urbaine (figure 1.1)
(UN, 2014). Ceci est le résultat du phénomène
d'urbanisation qui a eu lieu au cours des six dernières
décennies. Aujourd'hui, près de 3,9 milliards d'êtres
humains vivent en milieu urbain, soit 54% de la population humaine. Si les
tendances se maintiennent, ce chiffre atteindra 6,3 milliards en 2050 et
représentera 66% de la population mondiale. Cette croissance urbaine se
produira dans les villes de petite et moyenne taille, et non pas dans les
mégapoles (UN, 2014).
Il va sans dire que cette augmentation de la population
urbaine sera accompagnée d'une expansion des zones urbaines. Les
tendances actuelles démontrent que les surfaces artificialisées,
soit les infrastructures, les immeubles, les pelouses ou les parcs, se
développement plus rapidement que les populations urbaines. En effet, le
total de ces surfaces augmente en moyenne deux fois plus rapidement que les
populations urbaines. Cela suggère un développement urbain plus
étalé qu'autrefois (Seto et al., 2011).
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Figure 1.1. Population urbaine et rurale dans le
monde, 1950-2050 (UN, 2014).
1.1.2. Situation de la ville de Bukavu
La géographie de Bukavu, se caractérise par des
terrains fragiles à cause des failles (cassures) qui apparaissent en
surface à plusieurs endroits. Les couches qui constituent les terrains
comportent des roches d'origine volcanique (basaltes et trachytes surtout)
fortement altérées, décomposées et pourries
responsable de la formation des sols argileux très bien connus à
Bukavu (Birembano, 2012). A plusieurs endroits, ces couches de roches
volcaniques sont séparées entre elles par des dépôts
d'argiles rouges appelées « lits argileux rouges ». C'est au
niveau de ces lits argileux rouges qu'apparaissent souvent à Bukavu les
sources d'eaux. Au contact avec l'eau les lits argileux rouges sont glissant et
se comportent donc comme couches-savons, ce qui facilite le glissement des
terrains superficiels qu'ils supportent, surtout quand ces derniers sont
gorgés d'eau et qu'ils se trouvent sur une pente. Ce processus
géologique explique en partie les érosions et notamment les
déplacements auxquels les habitants de Bukavu ont souvent
été soumis, déplacements qui surviennent le plus souvent
après des catastrophes (Ndyanabo, et al., 2010). En plus, la
ville n'est pas exemptée de toute forme de pression anthropique. Elle
subit depuis quelques années une forte croissance démographique
(Birembano, 2012).
Avec une population qui s'accroit d'année en
année, la densité de la ville de Bukavu est estimée
à 13 449 habitants /km2 (Godding, 2013). Cette croissance a
été plus spectaculaire après l'indépendance
(Figure1.2). La population de Bukavu était estimée en 1935
à 2 050 habitants dont 450 Européens. Elle est passée
à 2 501 habitants en 1939, à 15 865
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habitants en 1944, et à 27 087 habitants en 1950 avec
un taux annuel de croissement de 8,21 % (Chamaa et al., 1981).
Figure 1.2. L'évolution de la population
de Bukavu de 1958 à 1976 (Chamaa et al., 1981).
Cette croissance démographique résulte de
plusieurs facteurs, notamment (Chamaa et al., 1981) :
a. L'exode rural : la croissance
démographique de la ville Bukavu connaissait une augmentation lente
assise sur une politique administrative sérieusement
contrôlée. Toute personne désireuse de se rendre en ville
devait d'abord obtenir de l'administration du territoire une feuille de route
et demander un permis de séjour à son arrivée. L'octroi de
ce permis pour une durée très longue ne pouvait se justifier que
par un emploi. Après un certain temps le contrôle fut
complétement relâché et ce qui a conduit à
déséquilibre total.
b. Les facteurs répulsifs :
L'hinterland de Bukavu a une très forte
densité moyenne par rapport au reste du pays. En effet, dans les
zones de Kabare et de Walungu fortement
peuplées, l'insuffisance des terres cultivables accentuée par le
régime foncier de type féodal, entraîne le départ
des ruraux vers Bukavu à la recherche d'autres moyens de survie. Mais
aussi la population vit dans un climat d'insécurité qui
occasionne un départ en milieu urbain pour assurer leur survie.
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c. Les facteurs attractifs : A la recherche
d'une ample aisance, la population rurale a
fini par abandonner son quotidien artisanal et laisser place aux
activités étrangères.
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