Les conséquences du principe que de responsabilité pénale des personnes morales en droit camerounais.par Ivan De Nguimbous Tjat Limbang Université de Yaoundé II - Soa - Master en droit privé 2018 |
B. Les effets du cumul sur la dépénalisation100. Le mécanisme décrit à l'alinéa (c) de l'article 74-1du code pénal camerounais laisse supposer que la commission d'une seule et même infraction peut donner lieu à la mise en jeu de la responsabilité de personnes différentes. Ce qui ne serait pas une curiosité en droit pénal dans la mesure l'on envisage déjà répression de la coaction. L'idée principale étant de s'écarter de la logique de substitution de la responsabilité pénale des décideurs à celle de la personne morale, pour envisager une logique d'addition des deux responsabilités. Le cumul de responsabilité a donc pour impacte d'empêcher la dépénalisation des agissements des personnes physiques tout d'abord à travers une raniment de la pression pénale pesant sur eux (1), mais aussi en imposant un cumul de sanction (2). 1- L'exclusion de la dépénalisation à travers la réanimation de la pression pénale pesant sur les personnes physiques auteurs des actes incriminés 101. Aux termes de l'article 74-1 alinéa (c) « La responsabilité pénale des personnes physiques, auteurs des actes incriminés, peut se cumuler avec celle des personnes morales. » il exclut donc du moins principiellement la dépénalisation en ce qu'il maintien constante la pression pénale sur les décideurs. Cette démarche est intéressante dans la mesure où reconnaitre la part de responsabilité des personnes morales pour les infractions commises en son sein ne doit pas être synonyme d'impunité pour les personnes physiques ayant participé à l'infraction, même si c'était pour le compte de la personne morale271(*). 102. Bien plus, la solution du cumul a une importance préventive certaine, elle constitue un moyen de discipliner les personnes physiques organes ou représentants, qui agiront en connaissance de ce qu'elles doivent respecter les prescriptions légales. Comme l'affirmait déjà Juliette TRICOT« [le cumul de responsabilité] tisse un filet de sécurité pour retenir dans ses mailles les personnes physiques dont il serait choquant et « contre-préventif » de les voir échapper à leurs responsabilités »272(*). Cela est d'autant plus important que dans la codification de la responsabilité pénale des personnes morales sur le plan international, plusieurs textesretiennent le cumul de responsabilité entre les personnes physiques auteurs des faits incriminés et les personnes morales. Sans prétention à l'exhaustivité il s'agit du deuxième protocole joint à la Convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes273(*) ; de la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains274(*). Le cumul de responsabilité influe également sur la sanction pénale. 103. Le cumul de sanction implique que la personne morale et la personne seront soumis chacune à une sanction prononcée par le juge pénal. Mais, il peut aussi avoir cumul de sanction de nature différente entre sanction pénale et sanction fiscale par exemple. Tout d'abord le principe général de responsabilité pénale des personnes morales en faisant d'abord le choix d'abandonner le principe de spécialité expose la personne morale à une double sanction, qui pourrait être administrative et pénale. Ensuite en admettant la règle du cumul de responsabilité des personnes physiques et morales, il accentue la répression de telle sorte qu'elle peut même paraitre excessive. En effet, même lorsque les poursuites ont été engagées contre la personne physique, la personne morale peut faire l'objet d'une sanction fiscale pour les mêmes faits275(*). Ce qui pourrait être analysé comme une violation du principe du « non bis in idem ». S'il faut reconnaitre que le cumul de responsabilité permet sanctionner deux fautes distinctes, l'on regrette qu'elle ne se soit pas accompagnée d'une vision globale de politique criminelle qui aboutirait à une seule réponse à la criminalité afin d'éviter le cumul de sanction administratives et pénales276(*). Au fond il faut saluer la réforme en elle-même et espérer que les autorités de poursuites en font un usage rationnel. * 271REINALDET DOS SANTOS (T-J), La responsabilité pénale à l'épreuve des personnes morales : étude comparée franco-brésilienne, op.cit. pp. 281 et s. * 272TRICOT (J.), « Le droit pénal à l'épreuve de la responsabilité des personnes morales : l'exemple français »op.cit., p. 44. Et s. * 273« La responsabilité de la personne morale en vertu des paragraphes 1 et 2 n'exclut pas les poursuites pénales contre les personnes physiques ». * 274 L'article 22, §4 « cette responsabilité est établie sans préjudice de la responsabilité pénale des personnes physiques ayant commis l'infraction ». * 275 Ch. Crim. C.cass. 6 décembre 2017. * 276TRICOT (J.), « Le droit pénal à l'épreuve de la responsabilité des personnes morales : l'exemple français », op.cit. pp. 44 et s. |
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