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La justice répressive et la protection de la faune sauvage au Congo et au Cameroun

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par Edson Wencelah TONI KOUMBA
Faculté de Droit et Sciences Économiques de Limoges  - Master2  2016
  

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Chapitre I : L'existence d'un corpus juridique

adapté à la répression des atteintes contre la faune

sauvage.

Le droit de l'environnement est « par essence cosmopolite »38, aussi dans le domaine de la protection de la faune sauvage, chaque Etat en mettant en place un cadre juridique destiné à la répression des atteintes contre les espèces fauniques fait appel à une internormativité. On constate à cet effet, que le droit interne congolais et camerounais puisent leur source, en partie, dans le droit international de l'environnement qui lui-même est composé à la fois des normes de portée sous-régionale, régionale et mondiale. Or, cette porosité législative qu'impose le droit de l'environnement aux Etats s'adapte mal avec le principe de souveraineté pénale. En effet, depuis la naissance des Etats modernes, il existe toujours un lien intime qui unit la souveraineté et le « ius puniendi ». Autrement dit : « Le droit de punir est l'expression du souverain (de l'Etat) à l'égard de sa population et de son territoire »39. Aussi, le juge pénal qui est lui-même soumis au principe de la légalité des délits et des peines, laquelle a pour corolaire celui de l'interprétation stricte de la loi pénale, doit d'abord et avant tout recourir aux normes répressives de droit interne comme source cardinale dans la répression des infractions fauniques (Section 1).

Mais ensuite, il doit tenir compte du fait que le droit pénal protégeant la faune sauvage, en tant qu'un aspect du droit de l'environnement, ne saurait être considéré comme une bulle isolée dans un monde juridique composé de source diversifiée. La nécessité de réprimer une criminalité dont les enjeux dépassent parfois les sphères nationales conduit le juge à « une certaine émancipation (...) il se libère du droit interne au profit d'un droit international ». C'est pourquoi, en matière de protection de la faune sauvage, la norme de droit international de l'environnement peut constituer pour le juge répressif une source de référence (Section2).

Section1 : Des normes répressives de droit interne comme source cardinale pour la protection des espèces fauniques par le juge pénal.

Les préoccupations environnementales axées sur une nécessité de préserver la biodiversité à travers la conservation des écosystèmes dans le Bassin du Congo à conduit le Congo et le Cameroun, au cours de ces dernières décennies, à mettre en place respectivement un arsenal juridique relatif à la protection des ressources fauniques suffisamment fourni.

38 LECUCQ (O) et MALJEAN-DUBOIS (S), Le rôle du juge dans le développement du droit de l'environnement, 1ère édition, Bruxelles, BRUYLANT 2008, page 24.

39SFDI, « La souveraineté pénale de l'Etat au XXI ème siècle », in colloque annuel de la Société Française pour le Droit International (SFDI), Lille les 18, 19 et 20 mai 2017.

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Ce dispositif comportant à la fois des textes d'incriminations et des aspects procéduraux suis generis a facilité l'apparition d'un droit pénal spécifique à la protection de la faune sauge. Aussi, on peut parler de l'existence d'un régime de protection pénale de la faune sauvage en droit interne congolais (§1) qui est distincte de celui mis en place en droit interne camerounais (§2).

Paragraphe1 : Le régime de la protection pénale de la faune sauvage en droit interne congolais.

Préfaçant l'ouvrage intitulé : Code de l'environnement de Delphine EMMANUEL ADOUKI, le Professeur Michel PRIEUR écrivait qu' « Une société responsable doit prendre en considération non seulement les risques présents de destruction de l'environnement mais aussi les risques futurs qui priveront nos descendants des richesses de la terre ». C'est donc le sens de la responsabilité qui a conduit l'Etat congolais, depuis plusieurs décennies, à mettre en oeuvre une politique de protection de ses ressources fauniques. Depuis 1962 jusqu'à nos jours, on a assisté à une prolifération des textes sectoriels comportant des dispositions portant sur des incriminations, des sanctions et des aspects procéduraux sur lesquels se fonde le juge répressif pour assurer une protection de la faune sauvage. Il en résulte donc que la protection pénale de la faune sauvage au Congo est un régime basé sur une diversité de textes en continuelle évolution (A). Mais cette protection est aussi caractérisée par des aspects procéduraux hétéroclites (B).

A)-Une protection pénale basée sur un foisonnement de texte en constante évolution.

L'analyse du régime répressif mis à la disposition de la justice pénale pour assurer la protection des ressources fauniques au Congo passe nécessairement par une rétrospection de l'ensemble des textes sectoriels sur la faune sauvage. Ils mettent en relief les aspects répressifs (1). De cet inventaire, il résultera que la profusion normative dans ce domaine a eu pour conséquence : une hétérogénéité des incriminations et des sanctions rendant parfois difficile la tâche du juge pénal (2).

1-L'évolution des normes répressives protégeant la faune sauvage en droit interne congolais.

C'est dès le lendemain de son indépendance, le 15 août 1960, que la République du Congo a adopté une loi relative à l'exploitation de la faune sauvage. Bien que celle-ci ne rentrait pas encore dans le cadre d'une politique globale de protection de l'environnement, elle comportait déjà une classification des infractions repartie en deux catégories. En effet, son article 70 sur le classement des infractions établit une nomenclature des atteintes qui sont, pour la plupart de nature administrative fondées sur l'existence d'une inobservation de la réglementation en matière de chasse.

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C'est ainsi qu'on peut constater dans les premiers alinéas de l'article 70 : « Sont classées en première catégorie : les infractions suivantes :

-Non présentation du permis ou de toute autre pièce nécessaire au contrôle de la chasse ainsi qu'à celui de la détention, de la cession, du commerce, du transport et de l'exploitation des divers produits de la chasse ,
·

-Non inscription sur le permis ou inscription non conforme aux règlements, des animaux protégés abattus ,
·

-Chasse sans autorisation dans les propriétés ou sur le territoire des communes rurales où la chasse est réservée... ».

Aussi pour le juge répressif congolais, encore sous l'influence du droit pénal de l'ancien colonisateur, la recherche de l'imputabilité de l'acte infractionnel au délinquant consistait essentiellement en la recherche d'un élément matériel. Celui-ci se résumait soit à des actes de chasse, à détenir, commercer ou transporter des produits de chasse en tout illégalité. L'élément intentionnel consistait, pour le juge, en la recherche d'une volonté manifeste chez le délinquant d'agir en ayant pleine connaissance d'une violation des prescriptions légales en matière de chasses.

Au début des années 1980, le changement de régime politique a influencé la volonté du gouvernement à réguler le secteur de la chasse. C'est dans cet ordre que s'inscrit la loi n°48/83 du 21 avril 1983 définissant les conditions de la conservation et de l'exploitation de la faune sauvage40. Celle-ci définissant d'entré de jeu, le domaine de protection à travers une classification tripartite des animaux sauvages objets de la protection légale. L'article 2 est ainsi stipulé : « Les animaux sauvages sont classés en trois catégories :

-Animaux intégralement protégés (Classe A) -Animaux partiellement protégés (Classe B) -Animaux non protégés (Classe C) »

Cette loi apparaît comme une version plus améliorée, puisqu'elle donne une définition légale d'un « acte de chasse », qui constitue pour le juge pénal un élément essentiel dans la caractérisation des différentes infractions. Ainsi, aux termes de l'article 5 de cette nouvelle loi : « Est qualifié acte de chasse tout acte/ de toute nature tendant à capturer ou tuer pour s'approprier ou non tout ou partie de son trophée ou de sa dépouille, un animal sauvage vivant en liberté appartenant à l'une des catégories désignées à l'article 2 ». Bien que pouvant être considérée comme novatrice à cette époque, cette définition donnait déjà lieu à diverses interprétations du juge pénal congolais.

40 EMMANUEL-ADOUKI (D.E), Code de l'Environnement, tome 1, édition Saint-Paul Congo-Brazzaville, page 49.

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Ce dernier, en s'inspirant de la jurisprudence française d'avant les indépendances, pouvait selon le cas désigner comme : « acte de chasse de toute nature » la recherche41, la poursuite42, la capture ou la mise à mort43 d'un animal catégorisé à l'article 2. La loi de 1983 va plus loin que celle de 1962, en ce qu'elle classe les atteintes à la faune sauvage en deux catégories, les délits et les contraventions (article 48). Mais l'analyse des différentes infractions qualifiées de délits prévus à l'article 49 montre aussi que jusque là, le but de cette règlementation n'était pas encore la protection des ressources naturelles dans un souci de préserver les écosystèmes. En effet, il ressort de cet article : « Sont considérées comme délits au sens de la présente loi, les infractions ci-après :

-Toute chasse illicite d'animaux intégralement ou partiellement protégés ,
· -L'utilisation d'un permis scientifique à des fins commerciales ,
·

-L'exercice du métier de guide de chasse sans licence ,
·

-La capture d'animaux sauvages et la détention de leurs produits sans permis scientifiques ou licence ,
·

-La chasse des crocodiles et varans sans licence de chasse aux crocodiles et varans ,
· -Le commerce des pointes d'ivoire et peaux de crocodiles et varans sans patente ,
·
».

Ainsi, comme on peut le constater, sur cette liste d'incriminations, qui n'est pas exhaustive, les infractions sont fondées non pas sur l'atteinte à l'intégrité d'un animal protégé. Elles sont au contraire fondées sur le défaut d'un titre administratif autorisant le délinquant à chasser, détenir ou commercer l'animal protégé. Cette remarque s'applique aussi sur l'ensemble des contraventions prévues à l'article 50 de la loi sus indiquée. Il paraît donc claire, que jusqu'à la fin des années 1980, la réglementation portant sur la faune sauvage était mise en oeuvre pour réguler le secteur de la chasse et non pas par nécessité de protéger l'environnement.

L'arrivée du multipartisme au Congo a coïncidé avec la prise de conscience, par les Etats africains, de la place de l'environnement et la nécessité de mettre en oeuvre des politiques visant à sa protection. En effet, si la Conférence de Rio marque un tournant important pour l'avenir du droit international de l'environnement, son Agenda 21 constituera une référence importante pour le droit de la faune et des aires protégées44.

41 En ce sens, les juridictions répressives congolaises s'inspiraient de la jurisprudence de l'ancienne métropole. Ainsi, pour le Tribunal correctionnel de Toulon dans une décision du 8 décembre 1952 « La recherche du gibier constitue incontestablement un acte de chasse. La réalité de cette acte découle de l'attitude du chasseur aux aguets, de l'existence d'une battue ou d'une traque de gibier, de l'action des chiens ».

42 Un arrêt de la Cour de Cassation a établit que : « Est coupable d'acte de chasse dans une réserve, celui qui après avoir lâché la meute de chiens sur un territoire de chasse, les laisse délibérément poursuivre un sanglier à travers le territoire de la réserve » (Cass. Crim., 25 janvier 2011)

43 Selon une jurisprudence rendue par le Tribunal correctionnel d'Avesnes-sur-Helpe : « Constitue un acte de chasse, le fait intentionnel de capturer ou de tuer un gibier, sans qu'il y ait lieu à prendre en considération le mobile réel de l'auteur » (Trb. Corr. Avesnes-sur-Helpe, 18 février 1959, Rec. Dalloz 1960, sommaires p.7)

44 Voir le chapitre 15 de l'Agenda 21 relatif à la préservation de la diversité biologique.

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La République du Congo qui ouvrait, au plan national, une nouvelle page de son histoire politique et institutionnelle ne devait pas manquer ce tournant. Ainsi, il a été mise en oeuvre une politique de préservation du cadre environnemental, laquelle était basée sur une production normative sectorielle intense. D'abord la loi n°003/91 du 23 avril 1991 sur la protection de l'Environnement dont le titre 3 sera consacré à la protection de la faune et de la flore. L'article 19 de cette loi vise l'interdiction de toutes formes d'atteintes contre l'intégrité physique des espèces protégées ou contre leur habitat. La protection de la faune était si

préoccupante que la Conférence Nationale Souveraine (CNS) avait par Acte
n°114/91/CNS/P/S du 24 juin 1991 instituée une interdiction d'abattage des éléphants en République du Congo.

Au plan constitutionnel, il faut souligner que la Constitution du 15 mars 1992 est la première à énoncer, dans son préambule, la promotion d'une exploitation rationnelle des richesses et des ressources naturelles45. De même que, son article 46 dispose que : « Chaque citoyen a droit à un environnement sain, satisfaisant et durable et a le devoir de le défendre. L'Etat veille à la protection et à la conservation de l'Environnement ». L'article 104 classe l'environnement et la conservation des ressources naturelles comme relevant du domaine de la loi. De son côté, le préambule de la Constitution du 20 janvier 2002 réaffirmait le principe de la souveraineté permanente sur les ressources naturelles. Tandis que le droit à un environnement sain et durable, ainsi que le devoir incombant à l'Etat de veiller à la protection et à la conservation de l'environnement est prévu à son article 35. Plus loin, son article 111 dispose que : « Sont du domaine de la loi (...) - l'environnement et la conservation des ressources naturelles ». Ces principes ont été repris par la Constitution du 25 octobre 2015 aussi bien dans son préambule que dans ses articles 41 et 125. Mais cette nouvelle Constitution se démarque des deux autres, en ce qu'elle institut un Conseil Economique, Sociale et Environnemental en ses articles 196 à 199. Cette institution constitutionnelle, bien qu'ayant un caractère consultatif, a été dotée d'un pouvoir d'auto-saisine sur tout problème environnemental. Dans ce sens elle peut, en cas de menace grave contre la faune sauvage, se saisir de l'affaire et y apportée des approches de solution pouvant être soumises au gouvernement. Ainsi, en matière de protection, elle constitue un organe qui peut appuyer le travail de la justice répressive.

Enfin, la loi n°16-2000 du 20 novembre 2000 portant Code forestier au Congo prévoit des incriminations protégeant l'habitat de la faune sauvage. Dans ses articles 43, 44, 137 et 138, elle prévoit le délit d'incendie volontaire ou involontaire et les peines encourues. La loi n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires protégées a améliorée l'aspect répressif des atteintes contre la faune sauvage. Elle renforce le quantum des peines d'amendes et d'emprisonnement à travers une classification tripartite des sanctions et des infractions. On relève pour la première fois dans la législation congolaise une atteinte à la faune ou à son habitat qui est érigée en crime punie des peines d'emprisonnement entre 10 ans et 20 ans et à celle d'une amende de 10.000.000 à 50.000.000 de francs CFA.

45 Préambule de la Constitution du 15 mars 1992

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En effet, l'article 114 est ainsi stipulé : « Est punie d'une amende de 10.000.000 fcfa à 50.000.000 fcfa et/ou d'une peine de 10 ans à 20 ans de réclusion, toute personne qui aura rejeté ou déversé des substances ou des déchets préjudiciables à la faune ou à son milieu ».

Après plus de cinquante années, on peut affirmer que l'évolution des législations portant sur la protection de la faune sauvage a été marquée par une amélioration considérable des incriminations et des sanctions. Au départ, l'objectif était simplement de réguler la chasse à travers des incriminations basées sur l'inobservation des prescriptions administratives. Aujourd'hui, ce cadre répressif a intégré les objectifs de préserver l'environnement avec des infractions fondées sur la protection de l'intégrité des espèces et leur milieu. On parlera ainsi de l'hétérogénéité de ces textes d'incriminations.

2-L'hétérogénéité des textes d'incriminations en matière faunique.

Après avoir examiné l'évolution et la diversité des textes portant sur la protection de la faune sauvage, il convient pour nous de mettre l'accent sur les incriminations prévues dans ces textes. C'est sur leur base que le juge répressif se fonde, à travers une interprétation stricte, pour établir la culpabilité du délinquant déféré devant lui. Or, lorsqu'on passe en revue l'ensemble de ces infractions telles que proposées par la classification des lois de 1962, 1983 et 2008, il saute aux yeux un sérieux problème de manque de lisibilité et de cohérence.

En effet, l'environnement et partant la faune sauvage étant par essence des domaines très techniques, il ne suffisait pas pour le législateur « de fulminer des incriminations et des peines ». Surtout, il devait les ordonner en suivant une certaine logique de sorte à permettre au juge de les appliquer aisément. Mais, tel n'est pas le cas. Les classifications des incriminations proposées au fil des années par le législateur congolais se présentent, dans chaque loi, comme une sorte de capharnaüm infractionnel ou une mosaïque d'incriminations. Pour s'en convaincre : l'article 112 de la loi n°37-2008 du 28 novembre 2008 dispose que : « Sans préjudice des confiscations, restitutions, retraits de permis et licence de chasse ou dommages-intérêts, sera puni d'une amende de 10.000frcfa à 500.000frcfa et d'un emprisonnement de 1à 18 mois ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque aura : - Chassé sans être détenteur du permis ou de licence de chasse requis ; -Chassé pendant une période interdite ou dans une zone non ouverte à la chasse ; -abattu ou capturé des animaux en excédant les limites autorisées ; -Chassé avec des moyens prohibés : la chasse en véhicule à moteur, à partir d'un aéronef ou d'une embarcation constitue une circonstance aggravante ; -Chassé entre le coucher et le lever du soleil ; -volontairement fait obstacle à l'accomplissement des devoirs des agents de l'administration des eaux et forêts ; -pénétré dans une aire protégée sans permis de visite ; -ramasser ou détruire des oeufs ou des nids sans être autorisé ; -commercialiser de la viande d'animaux sauvages sans être autorisé ; - faire circuler des trophées sans être détenteur du certificat d'origine correspondant ; -détenir illégalement un animal sauvage non intégralement protégé ».

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De même, l'article 113 de la même loi dispose que : « Sans préjudice des confiscations, restitutions, retraits de permis et licence de chasse ou dommages-intérêts, sera puni d'une amende de 100.000frcfa à 5.000.000frcfa et d'un emprisonnement de 2 ans à 5ans ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque aura : -fait des aménagements non autorisés ou chassé sans autorisation à l'intérieur d'une aire protégée ; -abattu une femelle suitée, un oiseau ou un reptile en nidation ; -abattu un animal intégralement protégé ; -rejeté ou déversé des substances ou des déchets préjudiciables à la faune ou à son milieu ;

-exploité, à l'intérieur des parcs nationaux, le sol, le sous-sol et les ressources naturelles, en violation des dispositions de la présente loi ; -importé, exporté, commercialisé ou fait transiter sur le territoire national des animaux sauvages ou leurs trophées en violation de la présente loi ou des conventions internationales en vigueur au Congo ; -chassé avec un véhicule à moteur appartenant à l'Etat ; -chassé avec les armes de guerre ; -chassé à l'aide d'engins éclairants ; -utilisé un permis scientifique à des fins commerciales ; -exercé le métier de guide de chasse sans y être autorisé (...) ».

Lorsqu'on examine de près ces infractions elles peuvent, en réalité, être reparties en deux grandes catégories avec des sous catégories :

V' D'une part : On peut regrouper certains types d'atteintes au titre des infractions à la police de la chasse.

Cette classification principale peut être subdivisée en cinq (5) sous-classifications à savoir : les infractions relatives au permis de chasser (tel est le cas des infractions visées à l'article 112 alinéas 1er, 8 et 11 ; 113 alinéa 1er, 10 et 11 de la loi congolaise de 2008). Les infractions relatives aux temps de chasse (tel est le cas des infractions visées aux articles 112 al. 2, 5 et 16 de la même loi). Les infractions relatives aux lieux de chasse (tel est le cas des infractions visées aux articles 112 al. 2 et 7 ; 113 al. 1er, 4 et 5). Les infractions relatives aux modes et moyens de chasse (articles 112 al. 4 ; 113 al. 7 et 9). Enfin, les infractions relatives à la régulation du gibier et au contrôle de chasse (articles 112 al. 2, 3 et 6 ; 113 al. 6, 12 et 13).

V' D'autre part : On peut regrouper certaines atteintes au titre des infractions à la police de la préservation de la faune sauvage.

Ce sont des infractions qui sont relatives à la préservation du patrimoine biologique. Il s'agit entre autre : Des atteintes à l'intégrité des espèces fauniques telle que visée à l'article 19 alinéa 1er de la loi n°003/91 du 23 avril 1991 qui dispose que : « Il est interdit en vertu de l'article 18 : -l'abattage, la chasse et la capture de la faune sauvage protégée ainsi que la destruction de son habitat ». A ces atteintes, on peut également associer les infractions de nature transnationale et celles portant sur l'utilisation de produits dangereux (importation, exportation, le transite sur le territoire national des animaux sauvages et même le rejet ou le déversement des substances ou des déchets préjudiciables à la faune ou à son milieu). La particularité de ces infractions relève du fait qu'elles sont conditionnées par la mise en place d'un domaine de protection des espèces fauniques. Il s'agit d'un texte réglementaire qui établit une classification ainsi que des listes d'espèces protégées selon les catégories ou le degré de protection.

C'est ainsi que l'Arrêté n°3863/MEF/SGEF/DCPP déterminant les animaux intégralement et partiellement protégés prévus par la loi n°48/83 du 21 avril 198346, détermine sous forme d'annexe les animaux intégralement et partiellement protégées. La caractérisation de ces infractions peut aussi dépendre de la détermination de la période de chasse. En ce sens, le Ministre en charge de la faune fixe par un arrêté les périodes d'ouverture et de fermeture de la chasse. Tel est le cas de l'Arrêté n°3772/MAEF/DEFRN/BC-1701 fixant les périodes de chasse et de fermeture de la chasse en République Populaire du Congo47.

En examinant l'ensemble des infractions prévues aux articles 112 à 114 de la loi sur la faune, certaines de ces atteintes peuvent être considérées comme des infractions relatives règles de préservation du patrimoine biologique. D'autres apparaissent comme des infractions comportant des circonstances aggravantes. Pour mieux comprendre le caractère hétérogène des textes d'incriminations en matière de la faune sauvage au Congo, nous nous sommes référés à un tableau de classification de ces incriminations qui prévoit deux (2) catégories principales et plusieurs sous-catégories.

TABLEAU DE CLASSIFICATION DES INCRIMINATIONS VISEES PAR LA LOI CONGOLAISE DU 28 NOVEMBRE 2008 SUR LA FAUNE ET LES AIRES PROTEGEES

Classification d'infractions

Sous classification

d'infractions

Différentes incriminations prévues par la loi du 28 novembre 2008 sur la faune

Les infractions à la police de la chasse

Les infractions relatives au permis de chasse et au droit de chasse

-Chasser sans être détenteur du permis ou de licence de chasse requis (art.112 al.1) ;

-Pénétrer dans une aire protégée sans permis de visite (art.112 al.7) ;

-Commercialiser de la viande d'animaux sauvage sans être autorisé (art.112 al.9) ;

-Faire circuler des trophées sans être détenteur du certificat d'origine (art.112 al.10) ;

-Utiliser un permis scientifique à des fins
commerciales (art.113al.11)

Les infractions relatives aux temps de chasse

-Chasser pendant une période interdite (art.112 al.2) ;

-Chasser entre le coucher et le lever du soleil (art.112 al.5) ;

Les infractions relatives aux lieux de chasse

-Chasser dans une zone non couverte à la chasse (art.112 al.2) ;

-Pénétrer dans une zone protégée sans permis de visite (art.112 al.7) ;

-Faire des aménagements non autorisés ou chasser sans autorisation à l'intérieur d'une aire protégée (art.113 al.1er) ;

-Exploiter à l'intérieur des parcs nationaux, le sol,

le sous-sol et les ressources naturelles, en

violation des dispositions de la présente loi
(art.113 al.4) ;

46 EMMANUEL-ADOUKI (D.E) op.cit. Page 97

47 EMMANUEL-ADOUKI (D.E) op.cit. Page101

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Les infractions relatives aux

modes et moyens de chasse

-Chasser avec des moyens prohibés : la chasse en véhicule à moteur, à partir d'un aéronef ou d'une embarcation (art.112 al.4) ;

-Chasser avec un véhicule à moteur appartenant à l'Etat (art.113 al.7) ;

-Chasser avec les armes de guerre (art.113 al.9) ;

-Chasser à l'aide d'engins éclairants (art.113
al.10) ;

Les infractions relatives à la

régulation du gibier et au contrôle de la chasse

-Abattre ou capturer des animaux en excédant les limites autorisées (art.112 al.3) ;

-Volontairement faire obstacle à
l'accomplissement des devoirs des agents de l'administration des Eaux et Forêts (art.112 al.6) ; -Faire circuler des trophées sans être détenteur du certificat d'origine (art.112 al.10) ;

-Exercer le métier de guide de chasse sans y être autorisé (art.113 al.12)

Les infractions à la police de la préservation de la faune sauvage

Les infractions aux règles de

préservation du patrimoine
biologique

-Ramasser ou détruire des oeufs ou des nids sans être autorisé (art.112 al.8) ;

-Détenir illégalement un animal sauvage non intégralement protégé (art.112 al.11) ;

Les atteintes à la faune sauvage ou à son milieu naturel

-Abattre une femelle suitée, un oiseau ou un reptile en nidation (art.113 al.2) ;

-Abattre un animal intégralement protégé (art.113 al.3) ;

-Détenir légalement un animal protégé (art.113 al.8) ;

Les infractions aggravées et à caractère transnationales

-Abattre un animal intégralement protégé (art. 113 al.14) ;

-Lorsque l'auteur de l'infraction est un agent de l'Etat ou d'une Collectivité territoriale (art.113 al.13) ;

-Lorsque l'infraction est commise pendant la période de fermeture de la chasse (art.113 al.14) ; -Lorsque le délinquant est récidiviste (art.113 al.15)

-Rejeter ou déverser des substances ou des
déchets préjudiciables à la faune ou à son milieu (art.114)

Source : Il s'agit d'un résultat des recherches dans le cadre de ce mémoire en se fondant sur la classification établit par Michel REDON.

En définitive, il convient de relever qu'après près de cinq décennies depuis l'adoption de la première loi sur la faune sauvage en 1962, le cadre juridique mis en place par la République de Congo pour assurer la protection des espèces fauniques a connu une évolution considérable.

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De cette évolution, on retiendra une diversité de textes sectoriels comportant plusieurs incriminations et sanctions. Leur caractère épars et lapidaire ne facilite pas l'action du juge pénal qui est appelé à une interprétation stricte de la loi, soit t'elle sectorielle. A ces textes, il faut ajouter les codes classiques qui régissent le procès pénal à savoir le Code pénal et celui de procédure pénale.

Mais, cette protection pénale de la faune sauvage est aussi fondée sur des règles procédurales parfois spécifiques contenues dans la loi faunique

B)-Une protection pénale basée sur des règles procédurales hétéroclites.

Philippe GROS qualifie d' « écheveau procédural »48, les règles de forme qui président à la répression des atteintes contre les espèces fauniques. Au Congo, déjà, la loi n°48/83 du 21 avril 1983 définissant les conditions de la conservation et l'exploitation de la faune sauvage prévoyait des aspects procéduraux spécifiquement adaptés à la recherche, la constatation et à la poursuite des infractions fauniques. La nouvelle loi de 2008 renvoie certains aspects procéduraux aux dispositions du Code de procédure pénale49. Elle accorde aussi à l'Etat congolais une exclusivité dans le déclenchement des poursuites et la constitution de partie civile (1). Mais il serait mal aisé, d'aborder le cadre procédural prévu par les textes relatifs à la protection de la faune sauvage sans examiner l'épineuse question de l'absence d'une responsabilité pénale des personnes morales (2). De nos jours, cet aspect est devenu l'une des pierres angulaires en matière de protection environnementale.

1-L'exclusivité accordée à l'Etat dans le déclenchement des poursuites et la constitution de partie civile au détriment des citoyens et des associations de protection de la faune sauvage.

L'exclusivité accordée à l'Etat congolais dans le déclenchement des poursuites et dans la constitution de partie civile en cas d'atteinte contre la faune sauvage par les lois en la matière pose, en toile de fond, la problématique du statut réel de l'animal sauvage. En effet, au Congo, les animaux sauvages sont-ils considérés comme une « res nulluis »50 ou une « res communis »51 ? A ce titre, l'évolution des textes de lois en matière faunique a conféré à l'Etat un statut mitigé sur la faune sauvage. Ces ambigüités sont même entretenues par les Constitutions congolaises. Cet état de chose ne facilite pas la tâche du juge pénal. Il peut s'agir de la recevabilité des actions intentées contre les délinquants fauniques par les Associations spécialisées dans la protection de la faune. Ou encore de la constitution de partie civile des personnes morales de droit public autres que l'Etat.

48 GROS (P), Protection pénale de la faune et la flore, in Sauvegarde de l'environnement et droit pénal, édition l'Harmattan Sciences Criminelles, page 270.

49 Voir article 105 de la loi sur la faune et les aires protégées

50 Expression latine utilisée en Droit Civil, qui désigne une « chose sans maître » c'est-à-dire qui n'a pas de propriétaire mais qui est néanmoins appropriable (Wikipédia, l'Encyclopédie libre. Site : www. Wikipédia.org)

51 Expression latine utilisée en Droit Public qui signifie « chose commune » c'est-à-dire une chose ou un bien qui ne peut pas être approprié, de par sa nature, elle appartient à tout le monde, à tous les citoyens et, elle est de ce fait accessible et utilisable par tous. (Wikipédia, l'Encyclopédie libre. Site : www. Wikipédia.org)

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D'abord l'article 1er de la loi de 1983 dispose que : « L'ensemble des animaux sauvages susceptibles de provoquer un intérêt touristique ou susceptibles d'être exploités pour leur viande, leur peau, leurs plumes ou leurs trophées, appartiennent à l'Etat et sont régis par les dispositions de la présente loi ». Cette disposition tirée d'une loi adoptée sous un régime communiste et populaire traduisait en réalité le mode de gestion de l'Etat sous l'emprise de la Constitution du 24 juin 1973 dont l'article 31 était ainsi libellé : « Sur toute l'étendue du territoire de la République Populaire du Congo, la terre est propriété du peuple ». Ainsi donc, sous le régime de la constitution de 1973 dont la loi de 1983 est adoptée, les espèces fauniques étaient la propriété de l'Etat. Celui-ci n'était, nul autre, qu'une représentation institutionnelle de tout le peuple. A ce titre, il était normal et justifié qu'en cas d'atteinte à la faune sauvage, seul l'Etat pouvait se constituer partie civile et enclencher une action en répression contre l'auteur des faits. En ce sens, les articles 1er al. 2 et 2 de la loi n°1-63 du 13 juillet 1963 portant Code de procédure pénale disposent respectivement : « Cette action (publique) peut aussi être mise en mouvement par la partie lésée dans les conditions déterminées par la présente loi » et « L'action civile en réparation du dommage causée par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par les faits objet de la prévention ». Ainsi donc, au regard de cette loi, seul l'Etat pouvait se prétendre victime d'une éventuelle atteinte à la faune sauvage et de ce fait, mettre en mouvement l'action publique tout en se constituant partie civile.

Or, depuis la Constitution du 15 mars 199252 en passant par celles du 20 janvier 2002 et même du 25 octobre 2015, la prise en compte du droit des citoyens à un environnement sain, satisfaisant et durable ainsi que leur devoir à défendre l'environnement soulève plusieurs questions : En effet, que faut-il entendre par : « devoirs constitutionnels de défendre l'environnement ou encore droit à un environnement durable » ? Un citoyen qui a l'obligation juridique de défendre l'environnement peut-il, en cas d'atteinte à la faune sauvage, saisir le juge pénal au nom de cette obligation constitutionnelle qui pèse sur lui ? L'atteinte à la faune sauvage et donc au patrimoine biologique d'un Etat constitue telle une violation au droit à un environnement durable reconnu à chaque citoyen, de sorte celui-ci à la possibilité de se constituer partie civile ? Autant d'interrogations qui appellent à une réflexion profonde avant de reconnaitre à l'Etat seul, l'exclusivité de se constituer partie civile en cas d'infraction contre la faune sauvage.

De plus, la loi du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires protégées a enfoncé le cloue puisque, contrairement à celle de 1983, elle élude la question du statut de la faune sauvage. Mais, la définition qu'elle donne de l'expression « faune » peut susciter des controverses. En effet, il apparaît aux termes de son article 5 alinéas 1er que l'expression faune se définit comme : « patrimoine biologique commun de la nation, dont l'Etat garantit la gestion durable. Elle est constituée par l'ensemble des animaux sauvages vivant en liberté dans leur milieu naturel ou maintenus en captivité ».

52 Voir l'article 46 de la Constitution du 15 mars 1992, reprise par l'article 35 de celle du 20 janvier 2002 et 41 de celle du 25 octobre 2015 dont la formule est ainsi libellée : « Tout citoyen a droit à un environnement sain, satisfaisant et durable et a le devoir de le défendre, l'Etat veille à la protection et à la conservation de l'environnement »

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Cette définition fait donc de la faune sauvage une « res commis » dont l'Etat n'est pas propriétaire, mais simple garant pour le compte de chaque citoyen.

Aujourd'hui, dans d'autres pays, l'accès au juge pénal en matière de protection de la faune sauvage n'est plus l'apanage de l'Etat. En effet, en tenant compte du Principe 10 de la Déclaration de Rio, au niveau national, les Etats ont l'obligation de faciliter un accès effectif (des citoyens) à des actions judiciaires et administratives. Plus précisément des réparations et des recours. C'est dans ce sens que la jurisprudence française, notamment, la Chambre criminelle de la Cour de Cassation s'est éloignée d'une interprétation restrictive de l'article 2 du Code de Procédure Pénale sur les conditions de recevabilité de la constitution de partie civile. Elle a décidée par exemple que : « devait être considérée comme une victime personnelle et directe au sens dudit article, le Parc national des Cévennes, personne morale de droit public, qui se prétend victime d'acte de chasse à l'aide d'engins prohibés »53.

Dans ce sens, la France va plus loin, puisqu'avec la loi Barnier du 2 février 1995 et une évolution jurisprudentielle, les Associations et autres personnes morales sont déclarées recevables à agir en leurs actions. Tel est le cas, chaque fois qu'une infraction serait susceptible de porter un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu'elles représentent de par leur mission légale et leur objet statutaire54. Cette évolution jurisprudentielle a été porté dans le Code de l'environnement français en son article L. 142-2 qui dispose que : « Les Associations agréées mentionnées à l'article L.141-2, peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu'elles ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature (...) ».

Il convient donc de retenir qu'en droit répressif congolais, en matière des atteintes contre la faune sauvage, les règles procédurales quant à la constitution de partie civile et l'accès au juge pénal sont restés ambigües. Ce privilège reste réservé à l'Etat par le truchement du Ministère en charge de la faune. Les Associations de défense de la faune, même lorsque leurs statuts sont clairement définis ne sont réduites qu'à une simple action passive. Celle-ci consiste entre autre : dans la collaboration55 à la recherche des auteurs d'infractions à la loi faunique et ce même quand il est établit que ces derniers sont des agents de l'Etat relevant du Ministère en charge de la faune.

Mais, il faut relever qu'il ne s'agit pas là, du seul retard ou manquement que présente la législation congolaise en matière des règles procédurales concourant à la répression de la faune sauvage. On note aussi, l'absence d'une responsabilité pénale des personnes morales qui constitue un véritable frein à l'action répressive du juge pénal congolais.

53 Cass. Crim., 08 février 1995, Dalloz 1996, page 96, note Dominique Guihal.

54 Voir Cass.crim., 15 juin 1999, 98-86.459 (in Legisfrance.gouv.fr)

55 Voir en ce sens, l'article 3 de la loi du 28 novembre 2008 portant sur la faune sauvage et les aires protégées.

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2-L'absence de responsabilité pénale des personnes morales.

Pour E. DAOUD et C. LE CORRE : « La mise en oeuvre de la responsabilité pénale des personnes morales en droit de l'environnement constitue une question fondamentale (...) qui prend tout son sens s'agissant des groupes de sociétés dont la nature transnationale fait écho à celle inhérente aux enjeux environnementaux »56. Au Congo, la nécessité de mettre en oeuvre une responsabilité des personnes morales s'impose. Le droit pénal de l'environnement doit être, à travers les lois sectorielles et les possibilités d'insérer des procédures sui généris qu'elles offrent, la porte par laquelle peut entrer cette responsabilité. En effet, depuis les années 1972, l'économie congolaise est essentiellement basée, outre l'exploitation pétrolière qui est la source principale du budget de l'Etat, sur l'exploitation forestière. Il s'agit donc d'une économie basée sur la destruction de l'habitat de la faune sauvage par des sociétés nationales et multinationales qui mettent ainsi à mal les écosystèmes forestiers du pays. D'autre part la construction des routes, des barrages hydroélectriques, la montée de l'économie liée au tourisme en milieu naturel sont autant d'activités exercées par l'Etat et ses actionnaires et qui portent ainsi atteintes à la faune sauvage et à son milieu.

Or, le droit pénal congolais en général consacre une totale impunité aux personnes morales de droit public et de droit privé. Ce principe de l'irresponsabilité des personnes morales en droit pénal de l'environnement congolais constitue une épine au pied de la justice répressive. Il trouve ses racines dans l'origine même du Code pénal de 1810 encore applicable en République du Congo. En effet, pendant longtemps, en France l'idée d'une responsabilité pénale des regroupements avait toujours été rejetée57. C'est cette idée qui découle de la maxime latine : « Societas delinquere non potest » autrement dit : « les sociétés n'ont pas le pouvoir de commettre un délit ». C'est dire que pour les auteurs du Code pénal à l'époque, plusieurs arguments militaient en faveur d'une irresponsabilité des personnes morales. D'abord, ils estimaient qu'un groupement, une société ou une entreprise n'était qu'une fiction car dénuée de toute volonté personnelle ni de conscience (susceptible donc de permettre à un juge d'établir l'élément intentionnel dans la caractérisation d'une infraction). Ensuite, en vertu du principe de spécialité, le groupement n'accède à la vie juridique qu'en vu d'un objet social qui ne saurait être la commission d'une infraction. Enfin, il existe une incompatibilité entre peine et entreprise, l'idée d'une responsabilité des personnes morales étant, par essence, une dérogation aux principes cardinaux de droit pénal classique à savoir : le principe de la culpabilité individuelle, de l'imputabilité de l'acte infractionnel et celui de l'égalité des personnes devant la loi58.

C'est ainsi que, quelque soit l'atteinte commis contre l'environnement, en général, ou contre les espèces fauniques en particulier, le juge pénal congolais est impuissant face aux personnes morales.

56 DAOUD (E) et LE CORRE (C), La responsabilité pénale des personnes morales en droit de l'environnement, in Perspectives Etudes, n°44, mars 2003 ; p 53.

57 PRADEL (J), Manuel de Droit Pénal Général, 16ème édition Dalloz, Paris 2006, p.492

58 TCHOCA FANIKOUA (F), Contribution du Droit pénal de l'environnement à la répression des atteintes à l'environnement au Benin, Thèse pour l'obtention du grade de Doctorat en Droit, Maastricht, Université de Maastricht, soutenue le 15 novembre 2012. Page 328.

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Les règles de procédure pénale générale ne reconnaissent pas la responsabilité de ces personnes. En effet, comment concevoir qu'une personne morale commette un acte de chasse ou porte matériellement atteinte aux espèces fauniques ? Mais il faut souligner que des infractions contre la faune sauvage peuvent être commises pour le compte d'une entreprise par une personne physique exerçant un pouvoir de direction en son sein qui agit en vertu d'un mandat de représentation de ladite entreprise. De même plusieurs agents relevant d'une société d'exploitation forestière ou touristique peuvent poser des actes constitutifs d'infractions à la faune sauvage, alors qu'ils agissaient sous les ordres de ladite société. Dans tous ces cas, la responsabilité pénale de la personne morale pourrait être envisagée, par le juge pénal, soit dans le cadre d'une coaction ou même d'une complicité au sens des articles 59 et 60 du Code pénal général.

Pourtant, il suffirait d'un simple déclique, d'une simple disposition dans la loi sur la faune, pour changer toute la donne. C'est ce qu'a connu le Cameroun depuis la loi de 1994. En effet, l'article 150 de la loi n°94/01 du 20 janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et de la pêche dispose en son alinéa 1er : « Est pénalement responsable et passible des peines prévues à cet effet toute personne physique ou morale qui contrevient aux dispositions de la présente loi et des textes réglementaires pris pour son application ». Bien qu'il soit évident qu'une simple mention dans un texte ne suffit pas, à elle seule, pour garantir une protection efficace et une application effective de cette responsabilité par le juge répressif. Puisque le droit de la responsabilité pénale des personnes morales en droit de l'environnement « renvoie à un régime répressif protéiforme, complexe et évolutif »59 .

C'est donc, dans une volonté d'aller encore plus loin dans la protection de l'environnement contre les sociétés multinationales, que la justice pénale française a dans l'affaire Erika60 condamnée la multinationale Total sur le fondement d'une responsabilité sociétale des entreprises. En effet, aujourd'hui, il est établit que la responsabilité pénale des entreprises en droit de l'environnement peut en outre être engagée sur le fondement de leurs engagements volontaires. Cette responsabilité dénommée « Responsabilité sociétale des entreprises » est une émanation du droit mou ou soft law fondée sur l'ensemble des engagements unilatéraux pris par une entreprise en matière de l'environnement et de développement durable. C'est un moyen pour les Etats de contraindre les multinationales à mieux se conformer aux différentes politiques de préservation des écosystèmes en adoptant un comportement écologiquement responsable. La justice répressive en France est encore allée plus loin en retenant la responsabilité pénale d'une personne morale du fait des atteintes à l'environnement de sa filiale.61

59 DAOUD (E) et LE CORRE (C) op.cit, page. 54

60 Voir Cass. Crim 25 septembre 2012 n°10.82-938) ; DAOUD (E) et LE CORRE (C), Arrêt Erika, marrée verte sur le droit de la responsabilité civile et pénale des compagnies pétrolières, Chroniques, in Lamy Droit Pénal des Affaires n°122 novembre 2012 ;

61 Idem.

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En somme, le régime de protection pénale de la faune sauvage est caractérisé par une multiplicité des textes qui pendant plusieurs décennies à connus de considérables évolutions. Au fil des années, le droit interne congolais en matière faunique a été renforcé, par des incriminations et des aspects procéduraux conçus pour permettre à la justice pénale de mieux assurer la protection des espèces fauniques. Mais, on relève encore de nombreuses insuffisances et des incomplétudes aussi dans la conception de ces normes que dans leur application. Notre analyse étant binaire et comparative entre le Congo et le Cameroun, il conviendra pour nous d'examiner, les normes de droit interne camerounais mis à la disposition du juge répressif pour assurer une protection des espèces fauniques.

Paragraphe2 : Le régime de protection pénale de la faune sauvage en droit interne camerounais.

Rogatien TEJIOZEM, magistrat camerounais, pense qu' « il serait hasardeux pour toute personne qui s'intéresse à la matière d'affirmer que le Cameroun y accuse un déficit de production normative. L'arsenal juridique relatif à la protection et la conservation des ressources fauniques est suffisamment fourni »62. En effet, depuis plusieurs décennies, on assiste à une prolifération normative, portant sur le domaine faunique, en droit interne camerounais. Dans cette profusion de texte, la loi n°94/01 du 20 janvier 1994 sur le régime des forêts, de la faune et la pêche constitue la pierre angulaire sur laquelle se fonde le juge répressif camerounais pour sanctionner les différentes atteintes aux ressources fauniques. Le régime pénal camerounais en matière faunique se caractérise par une complémentarité entre cette loi et d'autres textes qui concourent à cette répression. On note cependant une diversité des incriminations et des sanctions d'une part (A). D'autre part, la loi de 1994 présente certains aspects procéduraux dont l'examen minutieux s'avère nécessaire (B).

A)-Une protection pénale caractérisée une multiplicité des incriminations et des pénalités.

Dans cette rubrique, il conviendra pour nous, d'examiner en premier lieu la palette d'incriminations mis à la disposition du juge répressif camerounais (1). En second lieu, celle des pénalités attachées à ces infractions (2).

1-La complémentarité des textes et la diversité des incriminations en matière faunique.

a- La complémentarité des textes instituant le régime de protection pénale de la faune sauvage.

Pendant plus de vingt (20) ans le législateur camerounais, contrairement au model congolais, a opté pour une constance dans la législation faunique. En effet, depuis 1994 la loi portant régime des forêts, de la faune et de la pêche est le seul texte légal qui fixe un régime de protection en matière faunique bien qu'il s'agisse d'une loi multisectorielle. Mais à coté de cette loi, le législateur a prévu des principes de complémentarité et de subsidiarité.

62 ONONINO (A.B), Lois et procédures en matière faunique au Cameroun, Publié avec le concours de LAGA et de WWF Programme Eléphant d'Afrique, 1ère édition 2012, page.13

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C'est ainsi que la loi n°96/12 du 05 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l'environnement, dispose à l'article 9 au dernier alinéa : « le principe de subsidiarité selon lequel, en l'absence d'une règle de droit écrit, générale ou spéciale en matière de protection de l'environnement, la norme coutumière identifiée d'un terroir donné et avérée plus efficace pour la protection de l'environnement s'applique ». De même l'article 85 de la même loi dispose que : « Les sanctions prévues par la présente loi sont complétées par celles contenues dans le Code pénal ainsi que dans différentes législations particulières applicables à la protection de l'environnement ». Ce sont ces deux principes qui donnent lieu à une profusion normative en matière de protection de la faune sauvage.

Ainsi, à coté de cette loi, on peut citer la loi n°2005/007 du 27 juillet 2005 portant Code de Procédure Pénale, la loi n°2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code Pénal. Ce cadre légal a été renforcé par la réglementation en matière faunique. En ce sens, on peut compter : le Décret n°95/466/PM du 20 juillet 1995 fixant les modalités d'application du régime de la faune, le Décret n°2005/099 du 06 avril 2005 portant organisation du Ministère des Forêts et de la Faune, l'Arrêté n°0648/MINFOF du 18 décembre 2006 fixant la liste des animaux des classes de protection A, B et C, l'Arrêté n°0649/MINFOF du 18 décembre 2006 portant répartition des espèces animales de faune en groupe de protection et fixant les latitudes d'abattage par type de permis sportif de chasse, l'Arrêté n°0083/MINFOF du 6 février 2008 modifiant et complétant certaines dispositions de l'Arrêté n°0648/MINFOF du 18 décembre 2006 fixant la liste des animaux des classes de protection A, B et C et la Décision n°000857/D/MINFOF du 10 novembre 2009 portant organisation du commerce de la viande de brousse. Tous ces textes concourent à la répression des atteintes contre les espèces animales et le juge pénal, pour la caractérisation de l'incrimination et la détermination de la peine se livre à une interprétation combinée de ces textes de manière stricte. Mais, son fondement principal reste la loi de 1994 qui lui offre un éventail d'incriminations.

b- La diversité des incriminations en matière faunique.

La loi de 1994, pierre angulaire du régime de protection pénale en matière faunique a mis à la disposition du juge pénal, une diversité d'incriminations qui lui donne ainsi un large éventail dans la caractérisation des actes ou des faits portés à sa connaissance. C'est ainsi que malgré le caractère de fourre-tout de son chapitre III sur les infractions et les pénalités, on peut relever une sorte de catégorisation des infractions fauniques en cinq (5) rubriques à savoir : les infractions à la chasse proprement dite, la détention illégale d'espèces animales, l'exportation, l'importation ou le transit sur le territoire camerounais, la commercialisation et enfin la falsification de tout document émis par l'Administration faunique.

S'agissant de la chasse, on peut relever les infractions qui ont trait au lieu, au mode, au temps et moyens utilisés pour chasser. Dans ce sens, l'article 80 de cette lois dispose que : « Sauf autorisation spéciale délivrée par l'administration chargée de la faune, sont interdit : - la poursuite, l'approche et le tir de gibier en véhicule à moteur ; -la chasse nocturne, notamment la chasse au phare, à la lampe frontale et, en général, au moyen de tous les engins éclairants conçus ou non à des fins cynégétiques ; -la chasse à l'aide des drogues, d'appâts empoisonnés, de fusils anesthésiques et d'explosifs ;

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-la chasse à l'aide d'engin non traditionnel ; -la chasse à feu ; -l'importation, la vente et la circulation des lampes de chasse ; -la chasse au fusil fixe et au fusil de traite ; -la chasse au filet moderne ». De même l'article 104 dispose que : « Des zones tampons sont créées autour des aires de protection dans des conditions fixées par décret. La chasse est interdite dans ces zones au même titre qu'à l'intérieur des aires de protection ».

L'article 154 qui combine une multitude d'infractions sur plusieurs secteurs et les sanctions y relative, prévoit au titre des infractions sur la faune : « la détention d'un outil de chasse à l'intérieur d'une aire interdite de la chasse ; la provocation des animaux lors d'une visite dans une réserve de faune ou un jardin zoologique ». L'article 155 opère plusieurs renvois aux articles 87, 90, 91, 93, 98, 99, 100, 101 et 103. Ces articles portent essentiellement sur l'exercice du droit de chasse. Il en est de même de l'article 156 qui opère renvois aux articles 106, 107 et 108 portant sur les armes de chasse. L'article 158 prévois en ses derniers alinéas des infractions ayant trait à l'abattage ou la capture d'animaux protégés, soit pendant les périodes de fermeture de la chasse, soit dans les zones interdites ou fermées à la chasse.

Ainsi donc, à cette mosaïque d'incriminations, il faut ajouter la multiplicité des pénalités prévues par la loi de 1994.

2-La multiplicité des pénalités en matière faunique.

Certains auteurs63 ont estimé qu'une peine devait correspondre à la trilogie des trois principes qui la caractérise à savoir : D'abord le principe de la légalité des incriminations et des peines suivant la maxime latine : « Nullum crimen, nulla poena sine lege » autrement dit : « ni infraction, ni peine, sans texte légal ». Ce premier a pour conséquence, la soumission du juge pénal à une interprétation stricte ou rigoureuse de la loi. Celui-ci ne pouvant se livrer au prononcer d'une peine non prévue par la loi. Ensuite, celui de l'égalité des peines dans leur application. Ce principe oblige le juge à ne pas tenir compte du rang social d'un délinquant dans l'application de la peine. Il n'est que le prolongement du principe de l'égalité des citoyens devant la loi et le service public. Cependant, il ne conduit pas, non plus, à une identité des peines, la personnalisation de la peine conduisant le juge selon son pouvoir d'appréciation et son intime conviction à évaluer le taux de la peine et le quantum de l'amende. Enfin, le principe de l'individualisation de la peine, oblige le juge à ne sanctionner que l'auteur de l'infraction. Il empêche ainsi le juge à se livrer à la dérive autoritaire. Ces trois principes canalisent ainsi l'action du juge dans la détermination des peines.

Lorsqu'on examine les peines prévues par la loi de 1994, le constat est d'abord que toutes ces peines sont alternatives et offrent ainsi au juge pénal camerounais le choix. Il peut soit cumuler les peines d'amendes à celles d'emprisonnement, soit se focaliser que sur l'une ou l'autre.

63 LARGUIER (J), Droit pénal général (Mémentos), 19ème édition, Paris, Dalloz, page.15, 102

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Ensuite, il y a un manque de fixité, l'ensemble de ces peines comportant des intervalles. De plus, la loi de 1994 adopte le mode classification tiré du Code Pénal, celui qui consiste à

classer les infractions par rapport à la hiérarchie des peines64. En tenant compte, de cette
classification, on se rend à l'évidence qu'il n'existe pas au Cameroun de crime en matière faunique. Pour la simple raison qu'il n'existe pas d'infraction faunique punie d'une peine de mort ou d'une peine privative de liberté dont le maximum est supérieur à dix (10) ans. A ce titre, la loi sur la faune au Congo est beaucoup plus avancée et plus dissuasive puisqu'elle prévoit à son article 114 une de réclusion de 10 à 20 ans65.

Ainsi, des peines de simple police ou contraventionnelle aux peines délictuelles ou correctionnelles, le juge pénal dispose d'un large éventail des sanctions pénales. Celles-ci partent de l'article 154 qui prévoit une amende de 5.000 à 50.000 francs CFA et un emprisonnement de dix (10) jours, lesdites peines étant alternatives. Ensuite commence les peines correctionnelles avec les prévisions de l'article 155 qui dispose : « Est puni d'une amende de 50.000 à 200.000 francs CFA et d'un emprisonnement de vingt (20) jours à deux (2) mois ou de l'une seulement de ces peines », l'article 156 punie d'une amende de 200.000 à 1.000.000 de francs CFA et un emprisonnement d'un (1) mois à six (6) mois, ces peines étant alternatives. Enfin, l'article 158 prévoit une amende 3.000.000 à 10.000.000 francs CFA et une peine d'emprisonnement entre un (1) an et trois (3) ans. Dans les cas de circonstances aggravantes ou de récidive, l'article 162 prévoit le double des peines s'agissant des infractions prévues aux articles 154 à 160. Ainsi le maximum des peines en cas d'atteintes à la faune sauvage au Cameroun, la peine d'emprisonnement n'excède pas six (6) ans et celle d'amende 20.000.000 de francs CFA. Aussi, si le quantum de l'amende peut sembler dissuasif, le maximum de la peine, par contre l'est moins car en matière d'atteinte aux espèces fauniques, les actes posés par les délinquants varient et certains peuvent aller au-delà des extrémités de la cruauté et dans ce cas, si les peines ne sont pas exemplaires, les menaces qui pèsent sur les écosystèmes ne seront pas éradiquées.

Il convient de retenir que c'est dans le souci de faire respecter la réglementation protectrice de la faune sauvage que le législateur camerounais, comme celui du Congo a fait appel au droit répressif. Rappelons toutefois que si la force dissuasive de ses sanctions n'est pas aussi efficace, l'action du juge pénal deviendra comme des coups d'épée dans l'eau et le risque d'extinction encouru par les espèces fauniques ne cessera pas de prendre des proportions inquiétantes.

Mais, la force de la loi de 1994 réside aussi dans le fait qu'elle à mise en place certains aspects procéduraux spécifiques à la matière faunique. Au nombre de ceux-ci, il y a la particularité des procès-verbaux et des causes exonératoires dont-il conviendra d'examiner.

64 Voir en ce sens, l'article 21 du Code Pénal Camerounais

65 Voir en ce sens, l'article 114 de la loi congolaise du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires protégées

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B)-Les aspects procéduraux prévus par la loi du 20 janvier 1994.

Le chapitre 1 du titre 6 de cette loi porte sur la procédure répressive. Au nombre de ces aspects procéduraux, nous évoquerons les règles concourant à l'établissement du procès-verbal de constatation des infractions fauniques (1). Ainsi que, les causes exonératoires de la responsabilité (2).

1-Les règles concourant à l'établissement d'un procès-verbal de constatation des infractions en matière faunique.

Il s'agit d'examiner à la fois les règles de forme et de fond qui concourent à l'établissement d'un procès-verbal de constatation des infractions fauniques (a). Mais aussi et surtout la valeur ou la force probante de ce procès-verbal devant le juge pénal (b).

a- Les règles de forme et de fond concourant à l'établissement d'un procès-verbal en matière faunique.

Aux termes des dispositions combinées des articles 141 et 142 de la loi de 1994, les agents assermentés de l'administration chargée de la faune sont chargés de la recherche, de la constatation et des poursuites en répression des infractions commises en matière de la faune. Ils prêtent serment devant le tribunal compétent à la requête de l'administration intéressée. Ils procèdent à la constatation des faits, à la saisie des produits indûment récoltés et des objets ayant servi à la commission de l'infraction et dressent procès-verbal.

Le procès-verbal est la pièce fondamentale dans la mise en mouvement de l'action publique contre les infractions fauniques. En effet, dans la plupart des cas, les faits objet de l'infraction faunique se déroulent en pleine forêt en l'absence de témoins. Aussi, seul un procès-verbal rédigé suivant des règles de fond et de forme requises peut servir de base référentielle tant pour le Ministère Public que pour les juges au cours du procès. Au titre des règles de fond, la loi met l'accent sur deux (2) aspects essentiels à savoir : la qualité de l'agent habilité à rédiger le procès-verbal. Celui-ci doit être un agent assermenté relevant du Ministère en charge de la faune. Ensuite, le lieu où ledit procès-verbal est rédigé. Celui-ci devant être établit, en principe, dans les services de l'Administration compétente du lieu de la commission de l'infraction ou encore dans les services de la police ou de la gendarmerie.

S'agissant des règles de forme, la loi ne donne aucune précision sur la forme du procès-verbal. Elle fait simplement état d'un « procès-verbal rédigé et signé par l'agent assermenté ». Mais c'est le Décret du 20 juillet 1995 fixant les modalités d'application du régime de la faune en son article 70 alinéa 1er qui précise les mentions que doit contenir le procès-verbal de constatation d'infraction faunique. Au nombre de ces mentions, on cite entre autre : la date, l'heure et le lieu de la commission de l'infraction ; les identités complètes de l'agent verbalisateur, du contrevenant, des témoins, des complices ou des coauteurs, la nature de l'infraction et les dispositions qui la prévoie et réprime, les mentions des objets saisis et le lieu de garde. Mais le texte n'établit pas une distinction entre les mentions substantielles et non substantielles, ni ne précise quelles sont celles dont l'absence ou l'omission peuvent entrainer la nullité ou l'irrecevabilité du PV.

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Notons aussi que les règles relatives au processus d'interrogatoire ne sont pas spécifiées et dans ce cas, ce sont les dispositions générales du Code de procédure pénale qui s'appliquent66.

Mais outre ces règles de fond et de forme, quelle est la valeur probante du procès-verbal de constatation devant le juge répressif ?

b- La valeur probante du procès-verbal

En règle générale, les procès-verbaux dressés par les officiers de polices judiciaires à compétence générale ne servent qu'à titre de renseignements. Autrement dit, le juge répressif n'est pas lié par les faits tel que rapporté par l'agent verbalisateur (article 91 du CPP). Mais la loi faunique pose une exception à cette règle, en accordant une force probante aux procès-verbaux dressés par les agents assermentés relevant du Ministère en charge de la faune. En effet, l'article 142 alinéa 2 dispose que : « Le procès-verbal rédigé et signé par l'agent assermenté fait foi des constatations matérielles qu'il relate jusqu'à inscription de faux ». Il en résulte donc que le juge est lié aux faits matériels tel que décrit par l'agent verbalisateur sur la foi de son serment. Cependant, comment le délinquant visé dans le procès-verbal dressé par un agent assermenté peut-il engager une procédure en inscription de faux contre ledit procès-verbal et devant quelle juridiction peut-il le faire ?

2-Les causes exonératoires de responsabilité et d'extinction de l'action publique en matière faunique.

Il faut entendre par causes exonératoires de responsabilité, comme toutes situations invoquées par le délinquant de sorte que sa responsabilité ne soit pas engagée. En droit pénal général, ces raisons sont nombreuses. Il peut s'agir d'un cas de force majeur ou un état de nécessité. Mais la loi de 1994 prévoit, en matière faunique, deux causes essentielles d'exonération de responsabilité à savoir : la légitime défense (a) et les cas de battues administratives (b).

A coté de ces causes d'exonération de la responsabilité, la loi prévoit aussi de manière spéciale des causes d'extinction de l'action publique (c).

a- La légitime défense en matière des infractions fauniques.

L'article 83 de la loi de 1994 qui est l'assise légale de la légitime défense en matière faunique dispose que : « (1) Nul ne peut être sanctionné pour fait d'acte de chasse d'un animal protégé, commis dans la nécessité immédiate de sa défense, de celle de son cheptel domestique et/ou de celle de ses cultures. (2) La preuve de la légitime défense doit être fournie dans un délai de soixante douze (72) heures au responsable de l'administration chargé de la faune le plus proche. ». A la lecture de cette disposition, il apparaît que la légitime défense telle qu'envisagée par la loi faunique diffère sur quelques aspects de la légitime défense en matière des infractions de droit commun.

66 Voir en ce sens, l'article 90 du CPP

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En effet, en droit commun, pour que la légitime défense soit établit, il faut la réunion de deux conditions cumulatives à savoir : l'existence d'un acte d'agression qui soit actuel et injuste, d'une part. Celle d'un acte de défense qui soit nécessaire et mesuré. L'actualité consiste dans la menace d'un mal imminent qui ne peut être écarté que dans la commission de l'acte délictueux accompli en défense. Ainsi n'est pas en état de légitime défense l'individu qui tire sur son agresseur alors que celui-ci est entrain de s'enfuir67. Le caractère injuste de l'agression suppose que celle-ci n'est ni commandée par la loi, ni fondée en droit. D'autre part, un acte de défense est réputé nécessaire même si celui qui a commis l'acte délictueux avait d'autres moyens que la commission de ce délit pour résister à l'attaque. Il est réputé comme mesuré lorsqu'il est proportionné à l'attaque.

Or, transposée dans le domaine de la criminalité faunique, la notion de légitime défense a été étendue non pas seulement pour la défense personnelle de l'individu qui répond à l'acte d'agression, mais aussi lorsque le danger porte sur son cheptel domestique ou même sur ses culture. A ce titre, cette transposition large pose un problème. En effet, si l'acte d'agression peut être considéré comme imminent lorsqu'il s'agit des bêtes féroces ou nuisibles, la question peut se poser lorsqu'il s'agit d'un animal sauvage herbivore qui vient consommer à grande quantité les cultures et qu'il est abattu par un individu en invoquant la légitime défense du fait d'une nécessité immédiate de défendre ses cultures. De même, quelle proportionnalité existe-t-il entre un chasseur qui pour se défendre de la menace imminente d'un reptile nuisible utilise une arme de guerre prohibé par la loi ?

Enfin, l'exigence d'une preuve de la légitime défense est quelque peut irréaliste en matière faunique. Dans la mesure où généralement l'acte de défense à l'encontre d'un animal prétendument auteur d'une agression contre un individu, est toujours soldé par la mort de l'animal. De plus, les circonstances donnant lieu à légitime défense sont imprévisibles. De sorte qu'il peut ou ne pas y avoir de témoins alors comment établir, avec certitude, que l'individu a agit dans le cadre de la légitime défense ? Puisque dans ce cas, il n'y a pas le principe du contradictoire et seule la parole et les preuves produites par l'individu sont examinées.

Hors mis la légitime défense, la loi faunique prévoit aussi les cas de battues administratives qu'il convient d'examiner.

b- Les cas de battues administratives.

Les cas de battues administratives sont prévus par l'article 82 de la loi de 1994 qui dispose que : « Lorsque certains animaux constituent un danger pour les personnes et/ou les biens ou sont de nature à leur causer des dommages, l'administration chargée de la faune peut faire procéder à des battues suivant des modalités fixées par arrêté du Ministre chargé de la faune ». Ces battues peuvent être organisées en cas de menace ou à titre préventif ou même à la demande des populations concernées. La demande de battue est adressée aux autorités locales en charge de la faune, lesquelles procèdent d'abord à une enquête préalable.

67 BALOKI (H), Extrait sur la légitime défense en droit pénal, in Cours de Droit Pénal, Cotonou 2008. Page 23.

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Ensuite, lorsque l'enquête aboutie à des constats avérés, l'administration autorise alors, soit le refoulement ou l'abattage des animaux ayant été à l'origine des dommages causés à la population et à leurs biens ou ceux représentant une menace imminente à l'encontre des personnes et des biens.

c- Les causes d'extinction de l'action publique.

D'une manière générale, les causes d'extinction de l'action de publique sont prévues par l'article 62 du Code de procédure pénale camerounais et sont très diversifiées. En effet, il peut s'agir de la mort du suspect ou du délinquant, l'autorité de la chose jugée, la prescription des faits objet de l'infraction, le retrait de la plainte, l'abrogation de la loi ou l'amnistie. Mais, il faut préciser que d'une manière spéciale, la loi faunique de 1994 met l'accent sur la transaction comme mode par excellence d'extinction de l'action publique en la matière. En effet, l'article 146 alinéa 2 dispose que : « La transaction sollicitée par le contrevenant éteint l'action publique, sous réserve de son exécution effective dans les délais impartis »

Au terme de cet examen du corpus juridique au niveau interne, il apparaît que le Congo et le Cameroun ont fournis de grands efforts pour mettre en place des normes répressives sur lesquelles se base le juge pénal pour assurer une protection de la faune sauvage. Il existe ainsi, entre les deux pays, des aspects identiques tant au niveau des incriminations que sur la procédure. Mais, il résulte aussi de cette analyse, que ces régimes de protection pénale restent très tributaires de législation internationale en la matière. Le droit de l'environnement étant par essence « un droit cosmopolite et passeur de frontière ». D'où, il convient d'examiner en second lieu, le cadre normatif international en matière de protection de la faune sauvage qui constitue pour le juge pénal, une source de référence non négligeable.

Section2 : Des normes de droit international de l'environnement comme source de référence pour la protection de la faune sauvage.

Il est évident que la protection des espèces fauniques ne peut pas être assurée au même degré par les différents ordres juridiques68. De nombreux auteurs se conviennent à dire que l'une des caractéristiques du droit de l'environnement reste sa perméabilité marquée par une internormativité qui combine droits nationaux, droit international sous-régional ou régional et droit international général69. On assiste ainsi, en matière de protection de la faune sauvage, à une acculturation du régime répressif. Chaque pays dans sa politique de protection pénale des espèces fauniques se réfère, en plus de ses normes de droit interne, à des instruments de droit international de l'environnement (§1).

68 CORNU (M) et FROMAGEAU (J), Le droit de la forêt au XXIe siècle, Aspects internationaux, 1ère édition, Paris, l'Harmattan 2004, page.272

69 Voir en ce sens, DOUMBE-BILLE (S), Droit International de la faune et des aires protégées : importance et implications pour l'Afrique, Etude juridique de la FAO en ligne, septembre 2001. Dans le même sens, MALJEAN-DUBOIS (S), Juge(s) et développement du droit de l'environnement. Des juges passeurs de frontière pour un droit cosmopolite ? In : Le rôle du juge dans le développement du droit de l'environnement, page.24-25.

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A ce titre, la Convention sur le Commerce International des Espèces de Faune et de Flore sauvages menacées d'extinction (CITES) reste, depuis plusieurs décennies, un exemple de protection juridique internationale. Elle s'invite souvent dans l'office du juge pénal en matière des infractions fauniques (§2).

Paragraphe1 : La référence aux instruments de droit international de l'environnement pour la protection pénale de la faune sauvage.

Contrairement au domaine de la flore, le droit international applicable à la faune sauvage est, assurément, l'un des aspects les plus anciens, diversifiés et aboutis du droit international de l'environnement. Sa richesse et sa diversification tient de la quantité des instruments internationaux portant sur sa protection. Aussi bien sur le plan mondial que régional et sous-régional (B). Mais, pour le juge pénal national, ces instruments internationaux ne sont pertinents que lorsqu'ils sont nationalisés ou lorsqu'ils sont ajoutés au corpus juridique national au moyen des différents modes d'internalisation (A).

A)-Les processus d'internalisation des instruments de droit international sur la faune sauvage dans le droit positif congolais et camerounais.

Il existe plusieurs modes d'internalisation des normes de droit internationale de l'environnement. On peut citer, la ratification, l'incorporation, la transposition. De tout temps, les pays d'Afrique ont toujours été considérés comme le berceau des conventions internationales portant sur la protection de la nature. La Convention de Londres de 1933 faisant figure de « grand ancêtre »70 des traités en la matière. Mais l'application de ces instruments au plan interne dans les pays africains, ne pouvait passer que par la mise en oeuvre des mécanismes de leur insertion dans leur ordonnancement juridique respectif. Abordant dans ce sens, Delphine E. EMMANUEL ADOUKI affirme qu'au cours des années 1980, le Congo a élaboré une politique nationale de protection de l'environnement, ce qui a permis d'observer l'insertion dans l'ordonnancement juridique interne des normes du droit international de l'environnement71. En réalité pour les Etats africains, les efforts d'uniformisation du droit de l'environnement, en général, et des normes internationales portant sur la protection des espèces fauniques, en particulier, sont marqués de nos jours par un double phénomène d'internationalisation et de constitutionnalisation. Ces phénomènes traduisent l'évolution de la mise en oeuvre des normes du droit international de l'environnement par les Etats.

70 DOUMBE-BILLE (S), op.cit

71 EMMANUEL ADOUKI (D.E), Le Congo et les traités multilatéraux, Paris, l'Harmattan (Logiques Juridiques) 2007.page.205

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Cette évolution a été soulignée par le Professeur Michel PRIEUR, pour qui, aujourd'hui : « Il ne s'agit plus tant d'une construction du droit -de l'environnement- par mimétisme, mais d'une construction d'un droit dans lequel tous les pays (...) adoptent en même temps des règles quasi identiques qui leur sont dictées par les conventions internationales»72.

Parlant des mécanismes d'internalisation des normes internationales sur la protection de la faune sauvage, disons que l'incorporation permet aux conventions internationales sur le droit de l'environnement, lorsqu'elles sont dûment ratifiées, de trouver une traduction juridique en droit interne. Cette traduction peut se faire directement. Dans ce cas, la norme internationale se mute en règle de droit interne. Soit particulièrement par son insertion dans les lois et règlements. L'incorporation entraine ainsi des innovations et des modifications des règles de droit interne. La ratification est l'acte qui par une déclaration authentique et solennelle permet de confirmer ce qui a préalablement été accepté ou promis. C'est le document par lequel, le Chef de l'Etat ou une autre autorité compétente confirme la validité de la signature que son plénipotentiaire a apposé au bas d'un traité international. Une fois ratifiée, les normes de droit international de l'environnement intègre le corpus juridique interne, elle aura ainsi une valeur infra-constitutionnelle et supra-législative.

B)-Les différents instruments internationaux sur la protection de la faune sauvage en vigueur au Congo et au Cameroun.

Parlant de l'importance des instruments de Droit international de l'environnement consacrés à la protection du milieu naturel, le Professeur S. DOUMBE-BILLE explique qu'en Afrique : « c'est dans ce domaine que les évolutions les plus significatives ont eu lieu »73. En effet, du fait de leurs importances et de leurs implications, ces instruments ont véritablement doté le continent africain d'un régime international de protection de son milieu naturel et partant des espèces fauniques. En effet, depuis la Convention de Londres en 1900, l'évolution de ces instruments résulte d'une combinaison entre les normes internationales de portée universelle (1) et celles dont la portée ne se limite qu'au plan régional ou même sous-régional (2). Cette évolution résulte également de leur interaction dans l'objectif d'assurer la conservation des écosystèmes pour le bien des générations présentes et futures.

1-Les instruments internationaux de portée universelle

Ce sont des instruments de portée mondiale qui définissent un cadre général de protection des espèces fauniques. Ils peuvent porter soit sur la protection des habitats ou sur les espèces proprement dites et peuvent avoir soit un caractère contraignant ou non contraignant.

Ainsi de façon non exhaustive, on citera entre autre :

72 PRIEUR (M), L'influence des conventions internationales sur le droit interne de l'environnement, in Actes de la réunion constitutive du Comité sur l'Environnement de l'AHJUCAF. Porto-Novo, juin 2008

73 DOUMBE-BILLE (S), Droit international de la faune et des aires protégées : importance et implications pour l'Afrique, Etude Juridique de la FAO en ligne, septembre 2001, page.5

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? La Convention sur la diversité biologique (CDB)

C'est un traité international adopté à Nairobi (Kenya) en mai 1992, il soumit à la signature lors du sommet de la terre à Rio de Janeiro le 05 juin 1992 et entre en vigueur le 29 décembre 1993. Son objectif étant de développer des stratégies nationales pour la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique. Cette convention est considérée comme « l'instrument global qui manquait encore au droit de l'environnement naturel pour parachever (...) la construction juridique permettant de régir, à la fois, les gènes, les espèces et les écosystèmes. C'est pourquoi on a pas hésité parfois à parler de « convention-chapeau » pour caractériser la place qu'elle doit occuper et le rôle qu'elle doit jouer dans l'encadrement juridique et l'utilisation durable des ressources de la diversité biologique »74.

? La convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage.

Elle est adoptée à Bonn en 1979, elle est entrée en vigueur le 1er novembre 1983. Cette convention porte sur la protection d'un groupe d'espèces terrestres, marines ou de l'avifaune dont la caractéristique principale est qu'elles se déplacent de manière cyclique à plus ou moins longue distance, d'un point géographique à un autre. Cette convention met en place un système de protection fondé sur une répartition des espèces protégées en annexe.

? Le Protocole sur la biodiversité

Il a été adopté à Montréal en janvier 2000 et constitue un accord additionnel à la convention sur la biodiversité. Ce protocole a pour but d'assurer la gestion de la faune et des aires protégées en raison des effets préjudiciables que risqueraient d'avoir la manipulation et l'utilisation des organismes vivants modifiés sur la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité.

D'autres instruments internationaux de portée mondiale, visent la protection des milieux et des sites et à ce titre, on peut retenir deux grandes conventions d'importance majeure pour la conservation des habitats de la faune en Afrique.

? La convention relative aux zones humides d'importance internationale

Entrée en vigueur le 21 décembre 1973, cette convention, encore appelée convention Ramsar, a été adoptée le 02 février 1971 à Ramsar en Iran. Elle a pour but d'assurer la conservation et la gestion naturelle des zones humides dans leur fonction d'habitat des oiseaux d'eau. La convention a mise en place un système de liste sur laquelle est inscrit les différents sites. Ainsi en 2009, le Congo a inscrit deux (2) nouveaux sites sur la liste Ramsar à savoir : les rapides du Congo-Djoué (2500 hectares 04°19'S 01°511'E) qui comportent les grands affluents du fleuve Congo, le Djoué, la Loua et tout un ensemble de zones humides. Le très vaste site de la Sangha-Nouabalé-Ndoki (1.525.000 hectares 0141'N 01626'E) qui comprend un parc national, le fleuve sangha et ses environs. A ces deux sites, il faut ajouter celui de la reserve communautaire du Lac Télé (438960 hectares).

74 DOUMBE-BILLE (S), op.cit.

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Le Cameroun quant à lui comporte sept (7) sites inscrit sur la liste Ramsar à savoir : Le lac de cratère Mbarombi Mbo (415 hectares 04°40'N 09°23'E).

2-Les instruments internationaux de portée régionale et sous-régionale. Sans être exhaustive, on pourra citer parmi plusieurs de ces instruments :

? La convention d'Alger de 1968 sur la conservation de la nature et des ressources naturelles.

Elaborée à l'initiative et conclue sous l'égide de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), elle est considérée comme l'une des premières grandes conventions portant sur la conservation de la nature et des ressources naturelles. Elle a proclamée comme « capital vital et irremplaçable pour l'homme », les ressources naturelles dans leur ensemble et celles de la faune en particulier. Ainsi, elles doivent être utilisées rationnellement « pour le bien-être présent et futur de l'humanité ». La convention institut un système de protection des espèces fauniques suivant un classement en deux (2) annexes A et B. Aux termes de son article VIII, lorsqu'une espèce protégée n'est présente que sur le seul territoire d'un Etat partie, la responsabilité de celui-ci est « particulière » et son article XI propose une régulation du trafic des spécimens et de trophées.

? La convention de Maputo de 2003 sur la conservation de la nature et des ressources naturelles.

C'est la version révisée de la convention d'Alger de 1968

? Le traité relatif à la conservation et à la gestion durable des écosystèmes forestiers d'Afrique Centrale et instituant la Commission des Forêts d'Afrique Centrale (COMIFAC).

Il est signé à Brazzaville en février 2005 entre les pays de l'Afrique Centrale.

? L'accord de coopération et de concertation entre les Etats de l'Afrique Centrale sur la conservation de la faune sauvage.

Au -delà de tous ces instruments, celui qui suscite une adhésion unanime des Etats, reste celle de Washington dite convention CITES dont une mise en relief paraît nécessaire.

Paragraphe2 : L'exemple d'intégration d'une norme de droit international de l'environnement dans l'office du juge pénal en

matière faunique : La convention CITES

.

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Il est aujourd'hui établit que le commerce des espèces fauniques est devenu l'une des causes majeurs de disparition ou d'extinction des ressources fauniques, après celles liées à la perte de leurs habitats naturels. C'est donc en ce sens que la Convention sur le Commerce International des Espèces de Faune et Flore menacées d'extinction, plus connue sous le sigle de CITES, a été mise en place pour réguler et assurer une conciliation entre les nécessités du commerce international et la protection des espèces fauniques. Adoptée depuis 1973, la CITES est considérée comme le premier instrument juridique de portée international qui offre un cadre fixant les règles en matière d'importation, d'exportation, de réexportation et de transit des espèces fauniques. De ce fait, elle joue un rôle essentiel dans la répression des infractions fauniques par le juge pénal. Bien que sa mise en oeuvre au niveau des ordres juridiques internes soulève plusieurs problèmes. En ce sens, il nous ait paru intéressant de mettre en relief cette convention, en examinant successivement, sa place dans le régime de protection de la faune sauvage tel que conçu par les deux Etats (A). Ensuite, les différentes atteintes à cette réglementation et les sanctions y relatives (B).

A)-La place de la convention CITES dans le régime de protection de la faune sauvage au Congo et au Cameroun.

La réglementation CITES occupe une place considérable dans le dispositif répressif de chaque pays. En effet, l'inscription des espèces fauniques sur les différentes annexes de la Convention définit le niveau de protection de chaque espèce. Ce qui n'est pas sans conséquence (1). De même que la fixation des quotas d'exportation pour chaque espèce menacée d'extinction est une procédure essentielle dans la conservation du patrimoine faunique des Etats membres (2).

1-L'inscription des espèces fauniques sur les annexes CITES et ses effets.

Aux termes des dispositions de la convention CITES, des milliers d'espèces d'animaux qui bénéficient d'une protection spécifique sont inscrites sur les trois annexes (I, II et III). Chaque annexe détermine un niveau de protection nécessaire à leur conservation. Ainsi, l'article II qui fixe les principes fondamentaux, consacre son alinéa 1er à l'annexe I et dispose que : « L'Annexe I comprend toutes les espèces menacées d'extinction qui sont ou pourraient être affectées par le commerce. Le commerce des spécimens de ces espèces doit être soumis à une règlementation particulièrement stricte afin de ne pas mettre d'avantage leur survis en danger, et ne doit être autorisé que dans des conditions exceptionnelles ». De même que l'Annexe II est déterminée par l'alinéa 2. Il comprend les espèces qui bien que n'étant pas nécessairement menacées actuellement d'extinction pourraient le devenir si le commerce des spécimens de ces espèces n'était pas soumis à une règlementation stricte. Son but est d'éviter une exploitation incompatible avec leur survie.

Enfin l'Annexe III comprend toutes les espèces qu'une partie déclare soumises, dans les limites de sa compétence, à une règlementation ayant pour but d'empêcher ou de restreindre leur exploitation, et nécessitant la coopération des autres parties. Le dernier alinéa précise que les Etats membres ne permettent le commerce des spécimens des espèces inscrites aux Annexes I, II et III qu'en conformité avec les dispositions de la CITES. Il résulte donc de ce qui précède, que cette convention en instituant une protection des espèces par annexes, définit un régime global visant la survis des espèces fauniques qui s'impose à tous les Etats membres.

L'inscription des espèces aux différentes annexes donne lieu à une règlementation spécifique. Celle-ci consiste à soumettre les exportations et importations des spécimens d'espèces reparties dans les différentes annexes à la délivrance d'un permis d'exportation ou d'importation. Dans ce sens, l'article 3 dispose en ses alinéas 2 et 3 : « L'exportation d'un spécimen d'une espèce inscrite à l'Annexe I nécessite la délivrance et la présentation préalable d'un permis d'exportation (...) l'importation d'un spécimen d'une espèce inscrite à l'Annexe I nécessite la délivrance et la présentation préalable d'un permis d'importation (...) ». Cette délivrance est soumise à diverses conditions déterminées par la convention. Il en est de même pour les espèces inscrites aux Annexes II et III dont les règlementations sont prévues aux articles 4 et 5 de la convention.

Tableau du nombre d'espèces animales du Congo et du Cameroun inscrites aux Annexes CITES.

Annexes CITES (I, II et III)

Pays et Nombres d'espèces animales

Type d'espèces

(animalia)

Congo

Cameroun

Mammifères (mammalia)

52

66

Oiseaux (Aves)

66

115

Reptiles (Reptilia)

22

35

Autres types

d'espèces(Others)

10

12

Total

150

228

Source : Rapport TRAFFIC, Mise en oeuvre de la CITES par les Pays de l'espace COMIFAC : Evaluation préliminaire, CITES Secrétariat 2013.p.19 (extrait des donnés sur le Cameroun et le Congo).

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2-La fixation des quotas sur l'exportation des espèces menacées d'extinction et la délivrance des permis CITES.

Dans le cadre de la CITES, un quota peut être entendu comme la quantité ou le nombre maximal des spécimens pouvant faire l'objet d'une exportation annuelle par chaque Etat partie. Il sert donc à limiter le nombre de spécimens d'espèces entrant dans le commerce international ou à déterminer le maximum des spécimens pouvant être exporté en une année sans que cela ait des effets négatifs sur la survie des espèces. Il est vrai que le texte de la convention ne comporte aucune disposition requerront spécifiquement les parties qu'elles établissent des quotas pour limiter le commerce des espèces inscrites aux annexes CITES. Cependant, avec la Résolution Conf.14.7 (Rev.Cop.15)75, la conférence des parties a mis en place des lignes directrices pour la gestion des quotas d'exportation établis au plan national et recommande aux parties de suivre ces lignes. Ainsi, on peut lire sur le premier point (1.) de l'annexe portant sur les lignes directrices pour la gestion des quotas d'exportation établis au plan national : « Le présent document spécifie un certain nombre de principes généraux à suivre dans l'établissement et la gestion des quotas d'exportation annuel au niveau national dans le contexte de la CITES (...) ». Il s'agit donc d'instituer un système uniforme d'établissement des quotas dans le but de renforcer les mécanismes de protection des espèces fauniques.

De même, il a été institué dans le cadre de la CITES, un système d'information sur le commerce des éléphants dénommé ETIS, avec la Résolution Conf 10.10 (Rev.Cop.16). Il ressort donc, de ce qui précède, qu'après plus de quatre (4) décennies d'existence, la CITES est devenue un instrument majeur de droit international de l'environnement. Elle s'intègre avec succès dans les politiques de protection des espèces fauniques de chaque pays. Aussi, la violation à la règlementation CITES constitue à plusieurs égards des infractions dont le juge répressif national (congolais ou camerounais) peut sanctionner.

B)-Les atteintes et sanctions à la réglementation CITES

En adhérant à la convention CITES, le Congo76 et le Cameroun77 ont de ce fait intégré cet instrument dans leur règlementation interne en matière de protection de la faune sauvage. C'est ainsi que le Cameroun a mis en place le Décret 2005/2869/PM du 29 juillet 2005 fixant les modalités d'application de certaines dispositions de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvage menacées d'extinction. Il faut retenir que les modalités d'applications de la CITES dont ce Décret portent, entre autre, sur la détention, le transport, le commerce domestique et international de toutes les espèces de faune inscrites aux Annexes de ladite convention. A ce titre, son article 22 dispose clairement que : « Les infractions dûment constatées sont punies conformément à la législation en vigueur ».

75 Voir en ce sens le site internet : http:// cites.org

76 Le Congo a adhéré à la CITES, le 31 janvier 1983, il est le 79 ème pays au rang mondial et la convention est entrée en vigueur le 1 mai 1983. (conf. Liste des parties in www.cites.org)

77 Le Cameroun a adhéré à la CITES, le 05 juin 1981, il est le 68 ème pays au rang mondial et la convention est entrée en vigueur le 03 septembre 1981. (conf. Liste des parties in www.cites.org)

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Il en résulte que le juge répressif camerounais peut recourir à la réglementation CITES, lorsque les prescriptions mises en place pour la gestion durable des ressources fauniques ont été violées par un délinquant. Il s'agira par exemple des importations, exportations, transit et commerce des spécimens d'espèces inscrites dans les annexes de la convention sans être en possession des autorisations nécessaires tels que les permis CITES. Il en sera de même en cas de falsification des documents prévus par la convention. C'est ce que prévoient les termes de l'article 158 de la loi de 1994.

Au Congo, l'Arrêté n°0103/MEF/SGEF/DCPP du 30 janvier 1984 fixant les dispositions relatives à l'exportation des produits de la faune et de la flore sauvage, fixe les conditions d'exportation des produits de la faune. Mais plus mieux, l'article 113 puni d'une amende de 100.000 francs CFA à 5.000.000 de francs CFA et à celle d'un emprisonnement de deux (2) à cinq (5) ans, le fait d'importer, d'exporter, de commercialiser ou de faire transiter sur le territoire national, des animaux sauvages ou leurs trophées en violation des conventions internationales. Par « conventions internationales », le législateur congolais fait référence en premier lieu à la CITES étant donné que c'est l'une des rares conventions qui fixe les règles en matière d'importation, d'exportation et commercialisation des espèces fauniques. Il ressort donc que les infractions et les sanctions prévues par les textes de droit interne en application de la convention CITES portent soit sur les différentes atteintes portées contre la survie des espèces faisant l'objet d'une protection au titre des annexes de la CITES. Mais aussi sur la violation des obligations mis en place par ladite convention.

Mais, ce buissonnement normatif qui démontre à l'évidence combien l'alerte de la conscience de ces Etats a été vive78, met aussi en exergue un constat majeur : Celui d'une augmentation à des proportions inquiétantes du phénomène de la délinquance faunique. Il est donc claire, que la réponse pénale apportée jusque là par les institutions étatiques, au premier rang desquelles figure la justice répressive, a été insuffisante. De plus, cette réponse ne cadre pas certainement avec les enjeux d'une criminalité qui, depuis lors, a dépassée les sphères nationales pour revêtir des formes transnationales échappant ainsi aux compétences du juge pénal. C'est donc à juste titre qu'une deuxième sous-partie doit être consacrée aux différentes interrogations sur l'effectivité des normes répressives contenues dans le corpus juridique consacré à la préservation de la faune sauvage. Ces questions ne peuvent, cependant, trouver des réponses qu'à travers un examen des obstacles à l'application du cadre juridique sus-évoqué.

78 MALJEAN-DUBOIS (S), La mise en oeuvre du droit international de l'environnement, Paris, Iddri 2003, page.10

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