Sous-section 2 : Les droits de l'assuré
La désignation du bénéficiaire et sa
révocation sont des droits exclusifs du souscripteur du contrat
d'assurance vie, ainsi que des droits sur la réserve
mathématique.
Paragraphe1 : Les droits du souscripteur au titre de
l'attribution bénéficiaire
Le plus souvent, dans les assurances en cas de vie, le
bénéficiaire est l'assuré-souscripteur lui-même,
mais dans les assurances en cas de décès, la désignation
d'un bénéficiaire est l'hypothèse normale.
Le bénéficiaire, quoique non partie au contrat
d'assurance, dispose d'un droit personnel contre l'assureur.
En effet, le tiers est considéré comme
créancier direct de l'assureur depuis le jour même où la
police est souscrite et, sous réserve de révocation
antérieure par le stipulant, son droit propre est consolidé par
son acceptation57.
c) La cause de désignation
La stipulation au profit du bénéficiaire peut
être effectuée à titre onéreux, par exemple dans le
cas où la désignation a pour objet de garantir un
créancier. Néanmoins, le plus souvent, le souscripteur sera
animé d'une intention libérale, et l'attribution sera faite
à titre gratuit.
57 M.PICARD et A.BESSON, Les assurances terrestres
en droit français, tome. I, le contrat d'assurance, LGDJ 1964, p.513.
34
La désignation à titre gratuit
Le souscripteur entend avantager le bénéficiaire
qui ne fournit aucune compensation. L'assurance-vie constitue ainsi un mode de
libéralité indirecte, affranchie, en la forme, des
solennités des donations58.
La désignation à titre onéreux
Il arrive fréquemment que le souscripteur retire un profit
direct ou indirect de la désignation d'un bénéficiaire
celle-ci est alors faite à titre onéreux59. Le
souscripteur-assuré peut alors désigner le prêteur
bénéficiaire à titre onéreux d'un contrat
d'assurance-vie en vue de régler le prêt en cas de
décès. Ainsi, à la réalisation de
l'évènement assuré, le capital sera versé au
prêteur et servira à éteindre sa dette.
d) La désignation
La désignation du bénéficiaire peut
être faite à tout moment, depuis la conclusion du contrat
jusqu'à la date d'exigibilité des sommes assurées et
l'assureur n'a pas à donner son consentement à cette
opération. La désignation est valable alors même que
l'assureur n'en a pas été informé60.
Concernant les modes de désignation, l'article 75 du CAM
indique que la désignation du bénéficiaire peut être
contenue dans la police ou s'effectuer par avenant, par testament, ou par voie
d'endossement pour les polices à ordre.
e) La révocation Avant acceptation
Tant que le bénéficiaire n'a pas accepté la
stipulation souscrite à son profit, le souscripteur a la faculté
de révoquer l'attribution et de disposer du bénéfice du
contrat en faveur d'une autre personne. Ce droit, est formellement
consacré par les articles L.132-8 du CAF et 75 du CAM , qui disposent
qu' « en l'absence de désignation d'un
bénéficiaire dans la police ou à défaut
d'acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le
58 H. EL HABBOULI, « le contrat d'assurance vie en droit
comparé franco-marocain», 2015, p.148.
59 M.PICARD et A.BESSON, op.cit. p .502.
60 H. EL HABBOULI, op.cit. p.149.
35
droit de désigner un bénéficiaire ou de
substituer un bénéficiaire à un autre ».
Après acceptation
La seule hypothèse où l'article 92 du CAM permet
une révocation d'office de la désignation du
bénéficiaire après acceptation est le cas où ce
dernier est condamné comme auteur ou complice du meurtre de
l'assuré.
En cas de tentative de meurtre de l'assuré par le
bénéficiaire, la révocation est laissée à
l'appréciation du contractant. Toutefois, le législateur marocain
ajoute que la révocation de l'attribution du bénéfice
devient obligatoire si l'assuré en fait la demande à l'assureur
par écrit61.
Paragraphe 2 : Les droits du souscripteur relatifs
à la provision mathématique
Pour garantir à tout moment le règlement
intégral de ses engagements, l'assureur doit constituer une certaine
réserve, appelée provision mathématique. Le souscripteur
de l'assurance vie dispose d'un droit de créance sur cette provision
mathématique.
L'article premier du CAM a définit la provision
mathématique comme la différence entre les valeurs actuelles des
engagements respectivement pris par l'assureur et l'assuré.
f) Le rachat
? Le rachat ne concerne pas tout les types du contrat d'assurance
vie.
? Les conditions de rachat doivent être indiquées
par le contrat.
? La valeur du rachat doit être déterminée
par un règlement général de l'assureur approuvé par
l'administration.
Le rachat est un « versement anticipé à
l'assuré d'un pourcentage de l'épargne constituée au titre
d'un contrat d'assurance sur la vie. Le rachat de la totalité de
l'épargne met fin au contrat »62.
61 Art 92 al.3 du CAM.
62 Art Premier du CAM.
36
Les assurances qui ne comportent pas de rachat sont les suivantes
: les assurances temporaires en cas de décès, les assurances de
capitaux de survie et de rente de survie, les assurances en cas de vie sans
contre-assurance et les rentes viagères différées sans
contre-assurance.
Les conditions de la mise en oeuvre du droit de rachat sont
établies par l'assureur dans un document dénommé «
règlement général » et soumis ensuite au
régulateur pour approbation63. Dès son approbation,
les parties ne peuvent le modifier par une convention particulière. En
effet, le législateur précise, dans le même article, que
sur la demande du contractant, le rachat du capital ou de la rente garanti
devient obligatoire et l'assureur ne peut s'opposer.
Le rachat met fin définitivement au contrat et
libère les parties de leurs engagements réciproques dès la
demande de rachat.
g) L'avance sur la police
L'avance est définie par l'article premier du CAM comme
étant « un prêt, accordé par l'assureur au
souscripteur, garanti par le montant de la provision mathématique du
contrat d'assurances sur la vie ».
Autrement dit, l'avance sur la police est une opération
par laquelle l'assureur, en cours d'exécution du contrat, remet au
souscripteur, à sa demande une partie de la provision
mathématique qu'il a déjà constitué.
À l'instar du rachat, les conditions de l'avance sont
fixées par le règlement général établi par
l'assureur et approuvé par les autorités.
Soulignons enfin que, l'avance n'entraîne aucune
modification des obligations contractuelles des parties. Si le remboursement de
l'avance intervient avant l'échéance du contrat, l'assureur doit
verser les capitaux convenus au contrat64. Dans le cas où
l'avance majorée des intérêts remboursable avant
l'échéance du contrat, n'a pas été
remboursée à son échéance, l'assureur sera en droit
de faire jouer la clause de rachat d'office du
contrat65.
63 Art 89 du CAM.
64 H. EL HABBOULI, op.cit. p.162.
65 Ibid.
37
h) La mise en gage
? La mise en gage du contrat est l'opération
par laquelle l'assuré débiteur donne son assurance vie en
garantie à son créancier.
? Elle suppose la volonté des parties de
constitué un gage.
L'article 77 du CAM précise que la police peut
être donnée en
gage :
'7 soit par avenant : ce moyen est suffisant à
démontrer que l'assureur est informé de la mise en
nantissement66 ;
'7 soit par endossement : ce moyen est
réservé aux polices à ordre pratiquement inexistantes;
'7 soit par l'accomplissement, selon le droit commun, des
formalités prévues par l'article 1195 du D.O.C à
savoir la rédaction d'un acte authentique ou signification à
l'assureur de l'acte sous seing privé.
Et en absence d'un avenant, l'accomplissement des
formalités de l'article du 1195 du D.O.C est nécessaire.
Toutefois, certains consentements peuvent être
également requis,
soit :
'7 le consentement du bénéficiaire
acceptant : le gage ne peut être valablement formé que si le
bénéficiaire acceptant manifeste son accord,
'7 le consentement de l'assuré s'il est
différent du souscripteur : le consentement doit être donné
par écrit, lors de la constitution de gage, et ce, à peine de
nullité67.
Le créancier gagiste a un droit de rétention sur la
police et un droit de préférence sur la somme assurée.
Pour perpétuer son droit, il peut, comme toute personne
intéressée, payer les primes à la place du
souscripteur68.
66 L'article 1170 du D.O.C
défini le nantissement en ces termes « un contrat par lequel le
débiteur, ou un tiers agissant dans son intérêt, affecte
une chose mobilière ou immobilière ou un droit incorporel
à la garantie d'une obligation, et confère au créancier le
droit de se payer sur cette chose, par préférence à tous
autres créanciers, au cas où le débiteur manquerait
à le satisfaire ».
67 Art 68 du CAM.
68 Art 84 du CAM.
38
Toutefois, le créancier gagiste ne peut se substituer en
lieu et place du souscripteur et exercer des droits qui sont attachés
à la personne du souscripteur tels que le rachat et l'avance. De plus,
les règles du droit commun interdisent au créancier, sauf
autorisation expresse du débiteur, de disposer du gage69.
Lorsque le contrat dispose d'une provision mathématique,
il a une valeur patrimoniale. Le souscripteur peut donc céder le droit
de créance qu'il possède à l'égard de
l'assureur70. Mais si le contrat est souscrit sur la tête d'un
tiers, le consentement de l'assuré doit, à peine de
nullité, être donné par écrit71.
|