La gestion de la dette publique dans les états membres de UEMOA et de la CEMAC( Télécharger le fichier original )par Aïcha Ndiaye Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master II recherche droit et gouvernance des systèmes financiers publics 2017 |
Paragraphe 2 : Une convergence ralentie par l'effet pro-cyclique de la surveillance multilatérale :Certains auteurs estiment que les règles de l'UEMOA et de la CEMAC encouragent la pro cyclicité des politiques budgétaires et donc une mauvaise maîtrise des chocs économiques (A). Mais avec la révision des critères de S.M, il est accordé plus de marge de manoeuvre aux Etats dans leurs politiques budgétaires (B). A- L'absence de marge de manoeuvre budgétaire dans un contexte pro cyclique :Une politique budgétaire est dite pro cyclique lorsque, durant une période de haute conjoncture, elle favorise une politique expansionniste (hausse des dépenses et baisse des impôts) et, durant une période de basse conjoncture, provoque une politique restrictive (baisse des dépenses et hausse des impôts). La majeure partie des pays en développement se trouve dans cette situation. A côté, il existe ce qu'on appelle une politique contra cyclique qui produit des effets inverses. Par exemple, en période de basse conjoncture, la contra cyclicité voudrait que les taux d'imposition soient diminués dans le but de soulager les ménages et de ne pas affecter leur pouvoir d'achat. Les dépenses publiques seront augmentées afin de relancer l'économie privée, de faire face au chômage et à toute autre problématique sociale. Entre les deux, se trouve la politique acyclique c'est-à-dire que les dépenses restent inchangées en période de récession. Pour certains les politiques budgétaires de la C.E.M.A.C sont acycliques.111(*) Jusque-là, la convergence n'a pas été atteinte car le critère du solde budgétaire tel que posé ne permettait pas aux Etats membres de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C de faire face aux chocs économiques. En effet, le solde devait toujours être nul ou positif. Ce qui poussait les Etats de la C.E.M.A.C à combler le gap financier par un emprunt et à accentuer ainsi leurs arriérés. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles le critère de la non-accumulation des arriérés a été revalorisé au sein de la C.E.M.A.C. La diminution des dépenses en période de récession est d'autant plus difficile du fait de l'action des lobbies. Certaines dépenses, étant considérées comme des acquis par les bénéficiaires, deviennent intouchables. Il s'agit pour la plupart des exonérations et des dépenses fiscales. Le critère du solde budgétaire n'était respecté que pendant les périodes de haute conjoncture et ce n'était pas dû à une politique budgétaire discrétionnaire mais aux stabilisateurs automatiques. La pro cyclicité est encouragée par la forte instabilité des recettes qui est plus perceptible dans la C.E.M.A.C que dans l'U.E.M.O.A. Le défi majeur des pays de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C est d'allier deux objectifs à priori opposés : atteindre une croissance économique en réduisant la pauvreté et assurer une stabilité macroéconomique. La réduction de la pauvreté passe par des projets d'investissement. Or, l'investissement n'est possible que lorsqu'une épargne a été préalablement effectuée. Cependant, il s'est avéré que dans les pays en développement la faiblesse de l'épargne privée est une règle générale. Il incombe donc aux Etats de relever le niveau de l'épargne publique. Cette situation ne peut être obtenue que si la S.M est souple. Accorder une marge de manoeuvre budgétaire aux pays de la CEMAC et de l'UEMOA, c'est leur permettre de faire face à l'insuffisance des infrastructures nécessaires pour une bonne croissance. La politique budgétaire est le seul instrument qui permet à l'Etat de faire face à certains chocs.Certains auteurs112(*) ont pu constater qu'entre 2000 et 2006, le critère du solde budgétaire n'était pas respecté par les Etats membres de l'UEMOA à l'exception du Bénin (de 2000 à 2002) et du Togo (de 2000 à 2006). Mais, lorsque les soldes budgétaires sont corrigés des appuis financiers provenant de l'IPPTE, ils deviennent tous positifs à quelques exceptions près. Cela signifie que les aides des bailleurs de fonds poussent à dépenser plus. Et sans ces aides, les Etats n'ont pas tendance à effectuer des dépenses en capital. Les Etats sont en fait incapables de s'octroyer eux-mêmes les recettes leur permettant de financer la croissance économique. Les critères tels qu'ils étaient formulés, enfermaient les Etats dans un carcan institutionnel. Ce qui retardait encore plus la convergence car les Etats ne pouvaient corriger les effets de la basse conjoncture sur les économies nationales. * 111BIKAI J. Landry, « Règles de surveillance multilatérale et pro cyclicité de la politique budgétaire dans la zone CEMAC », juin 2015, p.1-26, disponible sur https://www.beac.int/download/BEAC_Working_Paper_07_15.pdf * 112DUFRENOT Gilles et alii., op.cit., p.69 |
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