L'accès à la justice en milieu ruralpar Bio Marc KORA CHABI Université de Parakou - Bénin - Maîtrise en droit privé 0000 |
1.4 Section II : La justice informelleEn milieu rural, l'appareil judiciaire est décrié et accusé de tous les maux. Lui dont la mission première est de trancher les conflits et de protéger les citoyens contre lesviolations de leurs droits et libertés et contre tout arbitraire de la part des pouvoirspublics, se trouve quotidiennement et violemment pris à partie et soupçonné departialité, de corruption, de négligence et même très souvent d'incompétence.L'isolement de la justice formelle devient dès lors inévitable. Le recours à la justice indigène (paragraphe 1) et au chef de village(paragraphe 2)s'imposent. 1.5 Paragraphe 1 : le système de justice indigènePar système de justice indigène on entend « la justice traditionnelle ou justice coutumière (...) liéeà la conception selon laquelle les chefs traditionnels sont les dépositaires de la justice des ancêtres »45(*). Cette justice est considérée comme sacrée. Elle n'est pas une justice vulgaire ouprofane.46(*) Elle est détenue et exercée selon le cas par les gardiens des traditions, les responsables religieux(A)et les notables(B) qui se sont distingués par un sens élevé de sagesse. Ces dimensions confèrent à cette justice « (...) une audience et une crédibilité exceptionnelles auprès des populations, car elle s'intègre dans leur système de croyance »47(*). L'outrage à ces autorités investies correspond à l'outrage aux ancêtres, aux divinités, et à Dieu et est censé entraîner de ce fait des malheurs et des drames pour les présumés auteurs. A- L'exercice de la justice indigène par les gardiens des traditions et les responsables religieuxLes gardiens des traditions, par des consultations occultes trouvent solutions aux problèmes à leur poser. Ainsi, le recours aux fétiches qui d'emblée censé éclairer le féticheur permet de faire une analyse et interprétation afin de trouver des solutions. C'est l'exemple des "Vodounsi"48(*) dans la partie méridionale du pays et du "Gogué-Karou"49(*)répandu dans la partie septentrionale du Bénin. Dans ces confréries, toutes les mésententes sont résolues par le chef du couvant. Les adeptes ont l'obligation d'obéir au risque d'être excommuniés. Quant aux sources religieuseselles sont souvent utilisées par les responsables religieux, dontla finalité est de trouver une solution aux problèmes posés par les parties. La technique utilisée par ces autorités consiste à recevoir la prétention des parties après serment fait sur le Coran quand il s'agit des musulmans. Au nom du principe «...si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-luiaussi l'autre »50(*)proclamé dans les églises, les fidèles chrétiens se confient purement et simplement aux décisions des responsables d'églises. Ces moyens extrajudiciaires, dont l'efficacité est prouvée, permettent une résolution pacifique des litiges. * 45 A. KOSSI et al, Op.cit. p.187. * 46 A. KOSSI et al, Op.cit. p.187. * 47 Ibidem * 48CfK.EL WERT-KRETSCHMER, Vodoun et contrôle social au village, Dossier pdf en ligne sur Google, consulté le 22 /02/ 2014 à 17h 04min. * 49 Nom d'une divinité indigène au nord EST du Bénin, l'adepte est appelé karou bi en langue locale bariba * 50 Mathieu chapitre 5 versets 39, Sainte Bible, traduit d'après les textes originaux hébreux et grec, Louis Segond, 1910. |
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