L'accès à la justice en milieu ruralpar Bio Marc KORA CHABI Université de Parakou - Bénin - Maîtrise en droit privé 0000 |
CONCLUSION
L'Homme ne naît pas villageois ; c'est la société dans laquelle il vit, qui lui donne cettedénomination. Ainsi, au terme de cette étude, il ressort que depuisl'historique conférence des forces vives de la nation de Février 1990, période de l'avènement de la démocratie au Bénin, l'accès à la justice en milieu ruralconnaît des grincements. Pour cause,les obstacles traditionnels et modernes font que les justiciables ruraux se heurtent aux sérieuses difficultés pour exercer leurs droits devantles juridictions. Ces obstacles se manifestent de diverses façons. L'enracinement dans la culture et dans la tradition font entretenir un climat de peur à l'égard de la justice étatique. De même, dans le souci d'entretenir un bon lien avec le voisinage et par crainte de représailles, la justice formelle est vidée de son sens de protectrice des droits. Conséquence immédiate, la justice institutionnelle est ignorée, voire ouvertement défiée. On assiste sur le terrainà une montée exponentielle de la justice informelle. D'autant que,cette dernière àpour avantage une longévité dans la mentalité collective des justiciables ruraux. Aussi, le problème lié à la distance est-il une autre cause justifiée. Le justiciable rural est obligé de parcourir de très longue distance avec tous les aléasque cela comporte pour obtenir justice. S'ajoute sur les lieux le rouage de la machine judiciaire qui se traduit par la complexité des procédures et du coût onéreux de la saisine. Il faut noter que, mêmeles praticiens de la justice reconnaissent eux-mêmes qu'il existe de sérieuses entraves au libre accès des citoyens à la justice. Le principe de la gratuité de la justice est vidé de son sens. Le système d'assistance judiciaire pour les personnes indigentes devant agir en justice n'est pas mis en oeuvre.100(*) A propos de la connaissance du droit positif, l'analphabétisme des villageois fait qu'ils ne connaissent même pas les normes nationales ainsi qu'internationales ratifiées par le Bénin en rapport avec la protection de leurs droitssur l'accès à la justice.De surcroît, les acteurs judiciaires restent méconnus. Le paradoxe est que les incriminations sont faites à leurs endroits car soupçonnés d'avoir volontairement faussé le résultat d'un procès ou leurs collaborateurs accusés de pratiques favorisantes pour l'une des parties au détriment d'une autre. Ils sont arrivés à croire que, celui qui gagne un procès a forcément fait peser dans la balance des atouts autres que ceux issus de la loi. Ces insuffisances sont sans nuls doutesliées au bas niveau de développement du pays, mais aussi à la gestion très peu transparente des affaires publiques. Néanmoins, à côté des inquiétudes, peut apparaître une lueur d'espoir. Des réformes sontnécessaires afin de rendre perfectible cet accèspuisqu'il est un droit de l'Homme. Oui, un droit pour tous citoyens de même qu'un gage de sécurité judiciaire. L'Etat doit faire des efforts pourassurer l'accès surtout des personnes démunies à la justice. Il faut donc aider le justiciable en le rapprochant de la justice,légitimer les justices de proximité, améliorer les procédures pour les rendre moins complexes etcompréhensibles pour l'usager,puis, instituerdes bureaux d'écoute et de conseil dans les juridictions. A l'endroit du personnel judiciaire, la formation et les cours de recyclages doivent être d'actualité car, la qualité des décisions est tributaire de la connaissance des règles de droit. Les juges doivent disposer d'une indépendance large, garantie par la législation. C'est pourquoi Philippe JESTAZ affirme « Le métier de juriste consiste à trouver des solutions pour pallier le silence, l'obscurité, ou l'inadaptation de la loi.»101(*) * 100 Extrait de texte sur l'état de la justice au Bénin, in Ministère de la justice de la législation et des droits de l'homme, Manuel d'information et de formation, Op. cit. p 24. * 101 P. JESTAZ, Le droit, in SEBASTIEN Bissardon, Droit et justice en 1400 citations et adages,éd juris-classeur, 2003, p 90. |
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