La dépénalisation des délits de presse et la protection des droits de la personnalité au Burkina Faso( Télécharger le fichier original )par Yacouba GORO Institut des Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication - Bac+5 en Science et technique de l'information et de la communication 2016 |
2. La difficulté à délimiter la vie privée de la vie publiqueComme dit l'arrêt Gunther Sachs : «Chacun a deux vies : une vie publique et une vie privée». La vie publique est celle que l'on met au regard de tout le monde. C'est celle que l'on a même dans les lieux publics. Toute personne doit garder la maîtrise des informations qui la concernent. Ce qu'elle fait, ce qu'elle pense, ce qu'elle dit, n'est pas nécessairement destiné à être connu des tiers. Vivant en société, l'individu ne peut prétendre faire échapper sa vie publique aux réflexions et aux regards d'autrui. Mais le droit lui donne des armes ou garanties législatives pour se mettre à l'abri des excès, des malveillances et des nuisances des comportements des autres, notamment de la presse écrite, audiovisuelle et en ligne. Ce qui se remarque sur le terrain, d'une part, en matière pénale avec la répression du délit de diffamation et de l'injure, et d'autre part, en matière civile par l'octroi de dommages-intérêts39(*), la saisie et la suppression d'écrits comportant des atteintes à la personne ou encore, l'insertion, dans ces écrits, d'encarts rétablissant la vérité. Le respect de la vie privée concerne également les personnalités publiques, ainsi que le simple «quidam» et s'applique sans conteste, aux éléments visibles sur la voie publique, y compris dans le cadre d'une manifestation. En principe, seuls les événements relevant de la sphère publique peuvent être révélés par la presse. La délimitation entre les sphères publiques et privées n'est évidemment pas la même, selon qu'on est en présence d'un notable ou d'une personne inconnue du public. Un lieu public est un lieu accessible à tout le monde, sans restriction. Par exemple, le marché de Rood-Woko40(*) est un lieu public par nature. En effet, nous avons aussi des lieux publics par destination, c'est-à-dire un lieu privé dont l'accès est conditionné par exemple, par présentation de ticket d'entrée. Il s'agit par exemple, de salle de spectacle, etc. Il y a aussi les lieux publics par accident, notamment un lieu privé qui, à l'occasion d'un évènement, est temporairement devenu un lieu public. C'est l'exemple d'une étude d'un notaire, à l'occasion d'une vente aux enchères ou d'un domicile, à l'occasion d'une fête de mariage, etc. Dès lors quand les lieux sont publics, le journaliste n'a pas besoin de demander le consentement de l'intéressé. Pour mieux cerner l'étendue de la protection apportée à la vie privée, la jurisprudence a distingué trois sphères, à savoir : - la sphère intime, qui comprend les faits et gestes qui doivent être soustraits à la connaissance d'autrui, à l'exception des personnes auxquelles ces faits ont été confiés. - la sphère privée, qui comprend les événements que chacun veut partager avec un nombre restreint d'autres personnes auxquelles il est attaché par des liens relativement étroits comme ses proches, ses amis ou connaissances. - la sphère publique, qui comprend les événements accessibles à chacun. En principe, seuls les événements relevant de la sphère publique peuvent être révélés par la presse. Cependant, il y a toujours des journalistes qui pensent que certaines personnes, en raison des hautes fonctions qu'elles occupent, n'ont plus le droit à la protection d'une quelconque vie privée et qu'elles n'ont plus droit au droit à l'intimité. D'autres s'abritent derrière la complaisance partielle des artistes et des politiciens pour croire que ceux-ci ont délibérément abandonné leur vie privée dans le domaine public et que leur vie privée n'est que le prolongement de leur vie publique. En tous les cas, et par prudence, seule l'autorisation ou le consentement peut protéger les journalistes contre les poursuites judiciaires relatives aux atteintes à la vie privée. * 39Civ, 2e, 6 janv, 1971, Gunther Sachs, D. 1971, 263, note B. Edelman, JCP 1971, II, 16723, note R.L; Paris 16 mars 1955, Marlène Dietrich, D. 1955, 295, Gaz. Pal. 1955, 1, 396 ; TGI Seine, 23 juin 1966, Bernard Blier, JCP 1966, II, 14875, note R. Lindon, 13 avril 1970, Catherine Deneuve, Gaz. Pal. 1970, 2, 150 * 40 Le marché central de Ouagadougou au Burkina Faso |
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